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Le don peut-il être gratuit ou n'est-il qu'une forme de l'échange ?

Publié le 19/03/2004

Extrait du document

don

L'échange est cet acte humain où la liberté se révèle en se démarquant des objets échangés et donc relativisés. En ce sens, il y a quelque chose dans l'échange qui le rapproche du don.Le donSi le don n'est pas une notion du programme, c'est pourtant à son propos que la question posée nous invite à réfléchir : c'est la notion centrale du sujet. Le don est par essence libre, il n'appelle pas un acte en retour, ou du moins il n'est pas conditionné par l'attente d'un retour, il n'est pas calculé. Il a sa cause en lui-même et non dans la mise en rapport de deux objets, préalable et constitutive de tout échange. Ce qu'on donne, ce n'est pas quelque chose qui s'échange, ce n'est pas un objet, c'est soi-même, c'est quelque chose qui manifeste la liberté de celui qui donne, sa « grandeur d'âme «. On ne donne pas une chose parce qu'elle est chose mais parce qu'elle est signe. La chose que l'on donne est le signe d'un acte qui est sa propre fin. En ce sens, le don est essentiellement gratuit.

Le plan doit certes comparer le don et l'échange de manière à affiner l'analyse de la notion d'échange. Mais il ne faut pas perdre de vue le sens précis de la question et ordonner progressivement les éléments de l'analyse.

_ PLAN _

Introduction

 

  • I. La gratuité du don par opposition à la réciprocité de l'échange

1. La réciprocité de l'échange 2. La gratuité du don a. le don gratuit, effet de la libéralité b. le don magnifique

  • II. La gratuité du don n'est pas désintéressée

1. La dette du donateur 2. Le don appelle le don a. don et prestige b. le potlatch 3. Amitié et réciprocité

Conclusion

don

« II.

La gratuité du don n'est pas désintéressée Mais celui qui donne sans calculer l'intérêt qu'il trouve dans son acte n'est pas pour autant désintéressé.

À défaut d'attendre de l'autreun objet en retour - sa richesse l'en dispense, ou sa générosité le rend capable de s'en priver - ne cherche-t-il pas à susciter lareconnaissance de l'autre ? Le don est-il alors complètement désintéressé? N'est-il pas toujours de façon plus ou moins subtile uneforme de l'échange ? 1.

La dette du donateur.En plaidant non pour l'annulation de la dette, mais pour le report toujours différé de l'échéance, Panurge suggère l'idée qu'on ne peutjamais en finir avec sa dette, qu'on ne sait pas très bien qui est en dette.

Obligé de son débiteur, l'emprunteur lui devient une forcedisponible sur laquelle il peut compter.

Et parce qu'il peut compter sur cette force, voilà le créditeur débiteur à son tour.

Rabelais nousfait comprendre à travers ce paradoxe la subtile dépendance que crée la générosité.

Le don aussi, d'une autre manière, crée unedépendance, exige une réciprocité.

C'est en donnant qu'on devient donateur et ce que le donateur, pour le moins, demande à celui quibénéficie de sa générosité, c'est la reconnaissance.

On n'en finit pas avec ses dettes parce qu'on a jamais fini d'être en dette. 2.

Le don appelle le don.Être le premier, le plus beau, le plus chanceux, le plus riche, maintenir son rang, accroître son prestige, voilà ce qui est recherché àtravers le don : le bien et le plaisir sur lesquels insistent les morales de l'Antiquité.

Le don appelle toujours l'obligation de rendre.

C'estce que montre Marcel Mauss dans son Essai sur le don, en analysant l'exemple du « potlatch », ensemble de fêtes, de cérémonies, derituels, où les clans rivalisent de dons prodigués ou détruits pour manifester leur prestige, leur honneur.

Le potlatch comporte une tripleobligation donner, recevoir, rendre dans une dynamique de suron chère.

C'est une règle de toujours donner plus qu'on a jamais reçu.Tout - nourriture, femmes, enfants, biens, talismans, sols, travail, services, valeurs, offices sacerdotaux et rangs - est matière àtransmission et à reddition (M.

Mauss, op.

cit., p.

163).La générosité a alors une signification économique et sociale. 3.

Si le don pouvait être gratuit, c'est dans la relation d'amitié que s'épanouirait cette gratuité.L'amitié se distingue de la justice qui veille à une répartition des échanges proportionnelle à ce qui convient ou revient à chacun et quidoit être préalablement fixé (Aristote, Éthique à Nicomaque, VIII, 9).

L'amitié tend à effacer l'inégalité, chacun étant pour son amicomme un autre soi-même (ibid, IX, 7).

L'amitié, entre deux hommes égaux et vertueux, modèle de l'amitié, s'accomplit dans une viecommune qui permet à chacun de bénéficier des biens de l'autre (Éthique, VIII, 7).

Celui qui reçoit est tenu d'exercer envers son amisa tâche d'amitié : il donne à l'autre son amitié.

Car nul ne peut être ami si ce n'est de son ami.

L'amitié est une sorte d'allianceinformelle mais elle exige un engagement réciproque et appelle la réciprocité du don ; elle constitue une sorte d'échange.

L'idée de lagratuité du don divin lui-même est difficile à tenir.

L'amour divin, tout oblatif qu'il soit, demande à être accepté et rendu.

Le paradoxede la création et de la grâce est le même que celui du don.

De même que le don fait exister le donateur, de même c'est la créature quifait de Dieu un Dieu créateur.

La création ne peut fournir le modèle de la gratuité du don. « L'amitié est une certaine vertu ou ne va pas sans vertu; de plus, elle est ce qu'il ya de plus nécessaire pour vivre.

Car sans amis, personne ne choisirait de vivre,même s'il avait tous les autres biens.

Et de fait les gens riches, et ceux quipossèdent autorité et pouvoir semblent bien avoir, plus que quiconque, besoind'amis : à quoi servirait une pareille prospérité, une fois ôtée la possibilité derépandre des bienfaits, laquelle se manifeste principalement et de la façon la plusdigne d'éloge à l'égard des amis.

Ou encore, comment cette prospérité serait-ellegardée et préservée sans amis? Car, plus elle grande, plus elle est exposée aurisque.

Et, dans la pauvreté comme dans toute autre infortune, les hommes pensentque les amis sont l'unique refuge.

L'amitié est d'ailleurs un secours aux jeunes gens,pour les préserver de l'erreur; aux vieillards pour leur assurer des soins et suppléerà leur manque d'activité dû à la faiblesse; à ceux qui sont dans la fleur de l'âge pourles inciter aux nobles actions.

» ARISTOTE. L'amitié n'est pas en apparence un thème philosophique classique.

Pourtant, ce texte permet decomprendre toute son importance pour développer la réflexion sur autrui.

D'une part, l'extraitmontre le caractère indispensable d'autrui sous la figure particulière de l'ami : il m'est précieuxparce qu'il peut m'être utile.

D'autre part, il m'est cher, parce que sa compagnie est unagrément irremplaçable.

Enfin, il remplit une fonction éthique, dans la mesure où il peut m'inciterà la vertu.

Ce sont les trois types fondamentaux d'amitié chez Aristote : ils mettent en évidence l'omniprésence d'autrui dans mon existence.D'autre part, il convient de remarquer que l'amitié et donc la relation avec autrui sont inhérentes à la nature humaine.

Premièrement,elles sont fondées sur une sociabilité naturelle qui fait plus généralement de l'homme « un animal par nature politique » (Politique).Elles sont également le moyen indispensable à l'accomplissement de l'homme : sans autrui pas de bonheur possible et donc pas de vievéritablement humaine.

Le regard de l'autre est comme une exigence de réalisation de soi. Conclusion La générosité ne peut pas être retenue comme critère de l'action désintéressée dont Kant établit qu'il est fourni par le seul devoir.L'homme n'est pas un être de pure raison et il ne peut parvenir au désintéressement sans une libre soumission à l'impératif de la loimorale.

Le don ne constitue pas une obligation morale, mais une obligation sociale.

Le don n'est pas désintéressé, il ne peut êtrequ'une forme de l'échange, ce qui ne diminue en rien la valeur de la générosité.. »

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