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Electre de Giraudoux: ACTE I, SCÈNES 9, 10, 11

Publié le 22/02/2012

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À la fin de la scène 11, les petites Euménides usent de deux formules qui consomment l'adieu : « Adieu, vérité de mon fils » et « Adieu, mirage de ma mère ». Au-delà de la distance tragique entre mère et fils, les trois scènes proposent une thématique fondée sur les rapports entre mirage et vérité. L'opposition traditionnelle entre apparence et réalité, entre mensonge et vérité, trouve ici une expression plus nuancée et plus complète.
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« Clytemnestre demande à voir le visage de l'inconnu, Électre refuse.

« Si tu ne le vois point à distance, tu le verrasencore moins de près », lui dira-t-elle (scène 9).

Au moment où le dialogue entre mère et fils risquerait d'évoluerfavorablement, Électre intervient.

Si elle avait accordé à Oreste une heure de répit (scène 8), elle n'accorde à samère qu'une minute d'amour filial.

« Tout me dit que toi tu n'as pas droit, dans ta vie, à plus d'une minute d'amourfilial.

'ru l'as eue.

Et comble...

», lui assène-t-elle cruellement avant de la chasser (scène 11). Effet de distanciation enfin dans les propos qu'échangent la mère et le fils.

À une Clytemnestre qui cherche à serapprocher de son fils, Oreste répond par une attitude raide, méfiante.

La mère propose une scène dereconnaissance (« C'est doux, à vingt ans, de voir une mère ? », scène 11), et le fils renvoie à une distanceoriginelle (« Une mère qui vous a chassé, triste et doux », idem).

Le seul point commun des deux répliques, l'adjectif « doux », traduit davantage l'éloignement que le rapprochement.

« Tu la regardes de bien loin », constateClytemnestre, ce que corroborent les propos d'Oreste : « À distance, c'est une splendide mère » — « C'est bienpour cela que je reste immobile », scène 11.

Si Clytemnestre parle de « splendeur », Oreste, lui, parle de maternité». L'effet de distanciation est constant.

Il est d'essence tragique.

La reconnaissance ne peut être celle du coeur.Cruauté et distance suprême : les petites Euménides, illustration même du destin, viennent faire écho à l'adieu de lamère et du fils, s'interposant entre leurs répliques, achevant de les éloigner. Mirage et vérité À la fin de la scène 11, les petites Euménides usent de deux formules qui consomment l'adieu : « Adieu, vérité demon fils » et « Adieu, mirage de ma mère ».

Au-delà de la distance tragique entre mère et fils, les trois scènes proposent une thématique fondée sur les rapports entre mirage et vérité.

L'opposition traditionnelle entre apparenceet réalité, entre mensonge et vérité, trouve ici une expression plus nuancée et plus complète. Certes le mirage de la mère est la traduction d'un tragique cruel où Clytemnestre est victime de son personnage de reine hautaine, soucieuse de sa beauté.

Aux yeux d'Oreste, elle est une « splendide mère ».

Mais elle ne l'est qu'a distance, comme un mirage.

Or, cruauté du sort, aussi bien pour la mère que pour le fils, c'est à ce mirage qu'Oreste confie qu'il l'aime, qu'il la respecte, qu'il l'admire (scène 11).

À l'inverse, Clytemnestre ne s'adresse pas àun mirage.

Elle traduit une réalité affective, particulièrement forte.

La reine orgueilleuse semble exprimer safaiblesse.

« Mais que mon fils soit lui-même devant moi, qu'il parle, qu'il respire, je perds mes forces ». Étrange et complexe rapport que celui d'une vérité du fils et du mirage d'une mère.

Un instant vérité et miragesemblent sur le point de se rejoindre, de donner une unité affective au couple Clytemnestre-Oreste.

« Oui.

Jeressemble point par point au fils que j'aurais pu être.

Toi aussi d'ailleurs ! À quelle mère admirable tu ressembles ence moment ! », confesse Oreste.

Mais, on l'a vu, Électre veille.

C'est elle qui empêche toute faiblesse, qui parle de «coquetterie maternelle », de « guichet qui permet à la mère et au fils de s'entrevoir tels qu'ils ne sont pas ».

C'estelle qui oblige vérité et mirage à rester disjoints. En fait, ces deux éléments sont inséparables, comme s'ils formaient un ensemble nécessaire dans la tragédie.

Lachasteté revendiquée par Électre comme une différence fondamentale est-elle avérée ? Électre est peut-être unmirage de vérité, aveuglée qu'elle est par sa soif de vengeance.

Clytemnestre parle d'une « fille que rongent lesdésirs ».

Quant à Électre, elle avouera elle-même : «Je ne connais pas mon secret encore.

Je n'ai que le début du fil» (scène 10).

Sa mère lui posera une question tout à fait pertinente : « Qui te dit qu'une minute d'amour maternelsuffise à Oreste ? », scène 11. Dernier exemple de l'union du mirage et de la vérité : la nouvelle apportée par Égisthe.

Si elle éclaire Clytemnestre,elle. »

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