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Eltsine, Boris Nikolaïevitch

Publié le 06/04/2013

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1   PRÉSENTATION

Eltsine, Boris Nikolaïevitch (1931-2007), homme d’État russe, président de la Russie de 1991 à 2000.

Succédant à Mikhaïl Gorbatchev, il a incarné le passage de la Russie à la démocratie, dans un contexte marqué par une crise économique, sociale et morale révélatrice des difficultés de la transition vers l’économie de marché.

2   LE PETIT-FILS D’UN KOULAK

Né à Boutka, petite ville l’Oural, Boris Eltsine est issu d’une riche famille paysanne, appartenant à la classe des koulaks (« gros fermiers «). Dans les premières années du stalinisme, avec le processus de collectivisation des terres, sa famille perd ses biens, son grand-père est exécuté et son père passe plusieurs années en camp de travail avant de devenir ouvrier. En 1935, la famille s’installe à Berezniki, ville industrielle située à proximité de Perm. Élève indiscipliné, Boris Eltsine parvient à entrer à l’Institut polytechnique de Sverdlovsk (aujourd’hui Iekaterinbourg), où il obtient en 1955 un diplôme d’ingénieur en bâtiment. Il commence à travailler comme contremaître puis, en une dizaine d’années, gravit tous les échelons jusqu’à prendre la direction, en 1966, d’un complexe de construction d’immeubles.

3   UN APPARATCHIK EXCENTRIQUE

Boris Eltsine, qui a adhéré au Parti communiste de l'Union soviétique (PCUS) en 1961, devient chef du département de la construction du comité régional du Parti. Il mène dès lors une carrière mouvementée d’apparatchik, favorisée par une forte intuition politique. Nommé secrétaire régional du Parti en 1975, il devient premier secrétaire pour la région de Sverdlovsk dès l’année suivante, ce qui le conduit à siéger en 1981 au sein du Comité central et à faire la connaissance du réformateur Mikhaïl Gorbatchev. Lorsque celui-ci devient secrétaire général du PCUS, en 1985, il nomme Boris Eltsine à la tête de la section du Parti de Moscou et le fait entrer au Bureau politique en tant que membre suppléant (février 1986). Le nouveau « maire « de Moscou part en guerre contre la gabegie, la bureaucratie et le marché noir, se montrant volontiers iconoclaste et populiste.

4   LE DÉMOCRATE RÉFORMISTE

En octobre 1987, devant le Comité central, Boris Eltsine attaque violemment les fractions conservatrices du Parti et s’en prend à la lenteur des réformes menées par Mikhaïl Gorbatchev. Ces critiques lui coûtent ses deux postes ; contraint de reconnaître son « erreur « et humilié publiquement, il tombe en dépression plusieurs mois. Cet épisode lui permet cependant de gagner en popularité et d’incarner la colère et les revendications du peuple russe en faveur d’une accélération des réformes. Fort de cette renommée, il est élu député de Moscou au Parlement soviétique avec 90 p. 100 des suffrages lors des premières élections semi-pluralistes organisées en 1989. Au Congrès des députés du peuple, il se rapproche des intellectuels démocrates et libéraux, en particulier l’historien Youri Afanassiev et le physicien Andreï Sakharov, auxquels il apporte son expérience du terrain et des rouages de l’appareil d’État.

En mars 1990, Boris Eltsine est élu député de la région de Sverdlovsk au Parlement de la République socialiste fédérative soviétique de Russie (RSFSR) et prend la tête du principal mouvement d’opposition à la politique de Mikhaïl Gorbatchev. Le 29 mai 1990, les députés l’élisent à la présidence du Parlement de la fédération de Russie. Il quitte le Parti communiste quelques jours plus tard et fait une déclaration sur la souveraineté de la Russie, cruciale pour l’avenir de l’Union soviétique et de son leader Mikhaïl Gorbatchev.

5   LE « FOSSOYEUR « DE L’UNION SOVIÉTIQUE ET DU PARTI COMMUNISTE

Le 12 juin 1991, Boris Eltsine devient le premier chef de l’État russe élu au suffrage universel (avec 57 p. 100 des suffrages). Le 19 août 1991, lors de la tentative de putsch menée contre Mikhaïl Gorbatchev par les durs du régime, il s’oppose avec succès aux putschistes, en haranguant la foule avec panache, jugé sur un char en plein Moscou, devant le Parlement russe. Mikhaïl Gorbatchev, affaibli et impuissant, perd définitivement son autorité et Boris Eltsine impose son image démocrate réformiste. Nouvel homme fort de la Russie, il joue un rôle clé dans la dissolution de l’Union soviétique, qui devient effective avec le congrès fondateur de la Communauté des États indépendants (CEI) — tenu le 8 décembre 1991 à Minsk (avec le président ukrainien Leonid Kravtcouk et son homologue biélorusse, Stanilas Chouchkievitch) — et la démission de Mikhaïl Gorbatchev le 25 décembre 1991. Il organise le transfert des pouvoirs de l’ex-URSS à la fédération de Russie, issue de la transformation de la RSFSR, et dissout le Parti communiste.

Le président Boris Eltsine engage dès lors la Russie sur la voie de vastes réformes institutionnelles, sociales, politiques et économiques, libéralisant à un rythme effréné l’économie et la société russes. Malgré l’aide économique apportée par les pays occidentaux et le soutien d’une classe d’anciens apparatchiks reconvertis dans l’économie de marché naissante, il doit faire face à de graves problèmes économiques (inflation galopante, perte de pouvoir d’achat des classes moyennes, etc.), provoquant un mécontentement croissant de la population. Le conflit qui l’oppose à ses adversaires politiques, ex-communistes et nationalistes nostalgiques de l’empire soviétique, s’intensifie à partir de 1992. Boris Eltsine est notamment contraint d’avaliser la nomination de Viktor Tchernomyrdine, partisan de réformes moins radicales, au poste de Premier ministre, et d’autoriser la constitution d’un nouveau parti communiste russe. La crise atteint son paroxysme lors du « coup d’État parlementaire « d’octobre 1993, lorsque Boris Eltsine ordonne à l’armée de bombarder le siège du Parlement russe (la « Maison Blanche «), dans lequel sont retranchés de nombreux députés autour de Rouslan Khasboulatov et Alexandre Routskoï. Il décrète l’état d’urgence, prononce la dissolution de la Chambre et impose sa nouvelle Constitution de type présidentialiste. Cette victoire conforte temporairement son pouvoir. Mais, affaibli physiquement, Boris Eltsine se révèle être un président instable et peu assidu à la tâche. Disparaissant fréquemment de la scène publique pendant plusieurs semaines, il ne peut redresser une situation économique catastrophique et altère profondément son image de président démocrate en intervenant militairement en Tchétchénie, n’hésitant pas à mener une guerre totale et sanguinaire contre les rebelles indépendantistes regroupés autour du président Doudaïev.

En dépit de l’instabilité chronique de la Russie et des luttes politiques divisant le pays, Boris Eltsine se montre cependant assez présent et actif sur la scène internationale, s’imposant comme un homme de la détente et de la coopération entre les anciens pays du bloc de l’Est et le monde occidental. Régulièrement invité aux sommets du G7, il obtient d’importants prêts financiers de la part des pays industrialisés (États-Unis, Allemagne, etc.) et poursuit une politique de dialogue et de coopération constructive avec les pays de l’OTAN et les États-Unis.

6   UNE FIN DE RÈGNE CHAOTIQUE

Malgré une opposition croissante des communistes, Boris Eltsine est réélu en juillet 1996 avec 52 p. 100 des voix, devant le communiste Guennadi Ziouganov, à l’issue d’une campagne présidentielle menée avec le soutien des oligarques, ces « nouveaux Russes « enrichis par les privatisations. Mais cette réélection marque aussi le début de la bataille pour sa succession : dès la fin de l’année 1996, il subit deux opérations cardiaques et doit s’absenter de la scène politique pendant de longues périodes. Des luttes d’influence féroces opposent, au Parlement et au Kremlin, les partisans d’une voie démocrate et libérale et ceux, de plus en plus nombreux, qui penchent pour une solution proche de la dictature, sorte de despotisme éclairé à la russe seul capable, à leurs yeux, de sortir le pays du marasme et du désordre, illustrant encore une fois les divisions de la classe politique russe. Malgré de nombreuses manœuvres politiques pour consolider son pouvoir, les problèmes de santé du président relancent jeux et spéculations politiques sur son remplacement tout au long de l’année 1998, alors que le pays est confronté à une grave crise financière. Mis en cause avec sa famille dans des scandales financiers, Boris Eltsine doit faire face en 1999 à des tentatives pour limiter ses pouvoirs au profit d’un rôle accru du Premier ministre, tandis que la Douma tente d’obtenir, en vain, sa destitution.

Accaparé par les problèmes de politique intérieure et par la guerre en Tchétchénie, Boris Eltsine cherche toutefois à redonner à la Russie une influence au Moyen-Orient (crise ONU-Irak, 1998) ou à réactiver de vieilles solidarités orthodoxes dans les Balkans. La deuxième puissance nucléaire et militaire mondiale reste un interlocuteur obligé du monde occidental et, malgré les multiples incertitudes liées à la personnalité de son président (maladie, instabilité caractérielle chronique, décisions imprévisibles), son régime populiste et autoritaire apparaît à beaucoup comme la meilleure garantie contre un retour au pouvoir des forces du passé (communistes, nationalistes) et comme le plus déterminé à poursuivre le processus de réformes et d’ouverture du pays au monde extérieur.

En août 1999, Boris Eltsine prépare lui-même sa succession en nommant le jeune Vladimir Poutine au poste de Premier ministre. À la surprise générale, il démissionne (officiellement pour raisons de santé) le 31 décembre 1999, lors des vœux du Nouvel An adressés au peuple russe. Un décret promulgué par Vladimir Poutine lui garantit l’immunité parlementaire.

Il a retracé son parcours dans Jusqu’au bout (1990), Sur le fil du rasoir (1994) et Mémoires (2000).

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