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Epicure: la pensée de la mort

Publié le 23/03/2005

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epicure
Maintenant habitue-toi à la pensée que la mort n'est rien pour nous, puisqu'il n'y a de bien et de mal que dans la sensation et la mort est absence de sensation. Par conséquent, si l'on considère avec justesse que la mort n'est rien pour nous, l'on pourra jouir de sa vie mortelle. On cessera de l'augmenter d'un temps infini et l'on supprimera le regret de n'être pas éternel. Car il ne reste plus rien d'affreux dans la vie quand on a parfaitement compris qu'il n'y a pas d'affres après cette vie. Il faut donc être sot pour dire avoir peur de la mort, non pas parce qu'elle serait un événement pénible, mais parce qu'on tremble en l'attendant. De fait, cette douleur, qui n'existe pas quand on meurt, est crainte lors de cette inutile attente ! Ainsi le mal qui effraie le plus, la mort, n'est rien pour nous, puisque lorsque nous existons la mort n'est pas là et lorsque la mort est là nous n'existons pas. Donc la mort n'est rien pour ceux qui sont en vie, puisqu'elle n'a pas d'existence pour eux, et elle n'est rien pour les morts, puisqu'ils n'existent plus. Mais la plupart des gens tantôt fuient la mort comme le pire des maux et tantôt l'appellent comme la fin des maux. Le philosophe ne craint pas l'inexistence, car l'existence n'a rien à voir avec l'inexistence, et puis l'inexistence n'est pas un méfait. Epicure
Dans ce texte, Épicure va donner une "solution" au problème de la mort, problème fondamental pour les hommes, car la mort est souvent apparue comme l'obstacle absolu, la fin de tous les plaisirs, de tous les projets, la fin de la liberté. Avec la mort (ou plutôt à l'idée de la mort, puisque nous n'avons pas, directement, l'expérience de la mort), viennent la crainte de la solitude (on meurt seul), et la peur devant l'inconnu, le mystère. Mais Épicure, suivant la conception classique de la mort, voire la conception stoïcienne, dans un premier temps, affirme et démontre logiquement que la mort n'est pas un problème. Elle n'est rien. Il déduit ensuite les conséquences positives de sa position : la vie prend toute sa valeur, et n'est plus troublée par la crainte ou l'angoisse. Dans un second temps, l'auteur critiquera et réfutera le passionné et ses objections. Enfin, Épicure conclura en résumant sa position, que la mort, comme le disait Montaigne, « ne nous concerne ni morts, ni vifs «. Mais peut-on, face au « problème « de la mort, faire usage de sa raison, soit : maîtriser ses passions, et admettre qu'il est vain de s'effrayer de ce qui ne serait rien? Plusieurs problèmes sont ici posés : la mort n'est-elle rien? et le serait-elle, est-ce une raison suffisante pour ne pas la craindre? L'homme n'a-t-il pas de l'imagination? Enfin, la mort de l'autre pourrait nous atteindre. Comment la dépasser? Par une espérance d'éternité?


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« qui n'est rien.Expliquons nous.

La mort a toujours suscité deux réactions : la révolte (l'enfant qui ne veut pas que sonpetit chien ait été écrasé), puis la tristesse.

La révolte se manifeste chez l'homme qui essaie, par la technique, denier la mort, en se protégeant de la maladie (ainsi un célèbre écrivain a-t-il sans cesse à sa disposition, dans samaison, une armée de médecins, prêts à l'opérer ou le soigner!).

Cette peur devant la mort est devenue unemaladie, une obsession pour beaucoup.

Et les hommes de s'accrocher, alors qu'ils sont emportés par un torrent,comme le critiquait Senèque dans ses lettres à Lucilius.

Ainsi, l'héroïne du Lys dans la Vallée abandonne-t-elle toutemaîtrise d'elle-même, toute morale, lorsque la Mort s'approche pour l'emporter, vaincue par une peur violente etpeut-être absurde.

Nous précisons « peut-être », car, si nous passons outre l'orgueil ou « l'avidité de la vie » quinous feraient craindre la mort, cependant, on peut la craindre.

Car supposons un instant que la mort ne soit rien,cependant, après la mort, il y a quelque chose : soit rien, soit une nouvelle vie, dans un animal, dans un autrehomme, ou dans un autre univers.

Et si l'immortalité pouvait rendre vaine et vide notre existence terrestre, la mort,si l'on pose qu'elle est suivie du néant, le pourrait aussi.

« A quoi bon agir si rien ne nous survit? ».

Et si, commepour Épicure, les Dieux n'existent pas, ou du moins ne régissent pas la nature, et ne sont qu'à côté de l'homme etde sa vie, ne s'intéressant pas spécialement à eux, si donc seules les lois de la nature nous gouvernent, la mort estsuivie du néant.

Pour vaincre cet obstacle, comme celui de la mort d'autrui, que nous verrons plus loin, il nousfaudrait accepter, soit l'immortalité de l'âme, ou des idées, ou l'immortalité par la création d'enfants, ou par unecréation quelle qu'elle soit (artistique, par exemple).

Enfin donc, si la mort ne nous concerne pas, elle est cependantune nécessité, qui révolte et effraye toujours les hommes.

Elle empêcherait notre liberté.

mais ii nous semble que,premièrement, l'être humain n'est pas, comme pour Heidegger, « un être pour la mort », c'est-à-dire que si l'hommedoit mourir.

il nevit pas pour mourir.

Et donc que, du temps de sa naissance à sa mort, il peut agir et vivre libre et heureux, la mortétant, comme le dit Epicure, la condition de sa liberté et de son bonheur.

Deuxièmement, la mort ne nous apporterien, en tant que telle : ce qui compte, c'est la vie.

Mais l'idée de la mort peut torturer la vie, car comme nous ledisions précédemment, et en opposition avec Épicure, les hommes ont peur, même de ce qui n'est rien.Épicure, en effet, pose une conception de la nature humaine dans ce texte.

Il conçoit l'homme comme un êtreraisonnable, qui ne craindrait pas à l'avance ce dont il n'a pas peur au présent.

L'expérience aurait tendance à lecontredire.

L'homme peut être insensé, et son irrationalité fait sans doute' partie de lui-même.

Car qui n'a pas craintde devenir différent? L'adolescent, souvent, a peur de devenir adulte, mais il ne craint cependant pas l'âge adulteen lui-même.

Le malade a peur de l'opération, qu'il sait nécessaire et bonne.

L'homme a peur d'être privé desensations.

Il a peur de changer.

Il imagine, et « la folle du logis », « la raison en vacances », d'Oscar Wilde, sedonne à coeur joie de tourmenter l'esprit.

L'homme a besoin, hélas, de certitudes.

Il veut savoir, et c'est pourquoi lamort, toujours, l'effrayera; car il ne peut savoir quel avenir elle cache.

Lorsqu'elle arrive, l'homme ne s'afflige plus ,car il est désormais trop tard pour que l'imagination puisse penser.

Ainsi, dans la mort, deux aspects négatifssurgissent : la contrainte du Temps, de la nécessité (qui est peut-être positive), et l'appréhension de l'inconnu,l'homme n'étant pas toujours soumis à sa raison.Donc, si nous reconnaissons, comme Épicure, que la crainte devant la mort est illogique, nous ne pouvonscependant que constater que les « insensés » forment la multitude, et que la mort est toujours effrayante, et ceci,par la nature même de l'homme.Enfin, nous soulèverons une dernière question.

Épicure, en affirmant que la mort n'est rien pour nous,n'envisage pas le problème d'autrui.

Car lors de la mort d'un être cher, si nous posons que la communication estpossible par sympathie, comme chez Scheler, alors nous sommes là, et la mort aussi.

Cet obstacle sembleinsurmontable, si l'on exclut l'immortalité ou la possibilité de l'éternité « dans le Grand Tout », ou dans l'Ile desBienheureux de Platon, ou au Paradis.

Là serait le lieu des retrouvailles, qui ferait que la mort d'Autrui ne serait quemomentanée, ne serait qu'un passage.Quelle que soit notre méditation sur la mort, nous ne pourrons empêcher l'inéluctable venue de cette dernière.Elle ne paraît pas mériter, pourtant, la peur qu'on éprouve devant elle.

Mais on peut noter que, selon notreconception de la mort, nous pouvons vivre différemment.

Soit la mort n'est rien, et il n'y a rien après elle; en cecas, il nous faut apprécier, et boire chaque goutte de bonheur que la vie nous apporte avec satisfaction, soit lamort n'est rien, et après elle, vient une autre vie, ce qui nous aiderait à supporter la peur et le problème de la mortd'autrui (les religions ont d'ailleurs parfois abusé de cette crainte).

Enfin, l'homme a toujours peur de la mort, depuisÉpicure : serait-il irrationnel, et guidé par l'imagination? Pour finir, nous dirons que si une méditation sur la mort estnécessaire pour découvrir, apprécier la vie, et lui donner un sens, il ne convient pas qu'elle soit permanente, aurisque de devenir une obsession.

Et l'homme ne connaîtrait-il pas la mort, si nous affirmons comme Sartre, ouNietzsche, que sans cesse il se dépasse, « qu'il est quelque chose qui doit être « surmonté »? Il meurt à lui-même,pour renaître dans un univers plus élevé, avec un esprit neuf et ouvert. ÉPICURE. Né à Samos, ou peut-être à Athènes, vers 341 av.

J.-C., mort en 270 av.

J.-C.. »

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