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L'expérience démontre-t-elle quelque chose ?

Publié le 27/02/2008

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L'expérience démontre-t-elle quelque chose ?

  • Les termes du sujet

L'expérience :

 -> au sens commun, le vécu, le savoir et le savoir-faire acquis par la pratique.  -> au sens philosophique, l'ensemble des perceptions sensibles.  -> au sens scientifique, l'expérimentation, dans des conditions définies par un protocole et une méthode.   Peut-elle démontrer :  -> idée de possibilité, de capacité.  -> idée de vérité totalement certaine et objective.   Quelque chose :  -> tout fait concret et réel, qu'il soit naturel, psychologique ou social.  -> tout élément identifiable, même abstrait: une hypothèse, un résultat de calcul...

  •   On pense généralement qu'une théorie est démontrée lorsqu'elle a été vérifiée par l'expérience. Mais établir un rapport entre un fait et une idée est une opération de l'esprit. C'est donc l'esprit et non l'expérience, qui vérifie la théorie. L'expérience peut-elle donc démontrer quelque chose ? Il s'agit de juger de sa valeur scientifique en la situant dans le champ du savoir. Si tout ce qui nous est donné dans l'expérience l'est en effet par l'entremise des sens, de façon particulière et contingente, une démonstration est à l'inverse une preuve administrée par la raison, validant de façon universelle et nécessaire l'une de ses propositions. Les notions d'expérience et de démonstration paraissent donc opposées, sans que cela soit vrai dans tous les domaines. Si les sciences mathématiques décrivent des objets auxquels rien ne peut parfaitement correspondre dans l'expérience, les sciences expérimentales ne peuvent à l'inverse progresser sans recourir à cette dernière. Que vaut donc l'expérience : peut-elle démontrer une théorie en prouvant sa vérité, ou seulement nous montrer ce qu'il nous faudra ensuite comprendre rationnellement ? Précède-t-elle ou suit-elle la démonstration ? Démontre-t-elle qu'une hypothèse est vraie, ou que l'on ne peut la dire fausse ? Il s'agit de savoir comment accorder la théorie à l'expérience, la raison et le réel, pour connaître la vérité et faire progresser les sciences. Quel rôle lui attribuer dans la recherche du vrai ?

 

I. Bacon : l'expérience peut être démonstrative

 II. David Hume : l'expérience ne fait que légitimer la croyance

III. Claude Bernard : la raison s'instruit par l'expérience

« II.

David Hume : l'expérience ne fait que légitimer la croyance Hume distingue radicalement les notions d'expérience et de démonstrationdans ses Enquêtes sur l'entendement humain de 1748.

« Les seuls objets dela démonstration sont la qualité et le nombre, nous dit-il.

Toutes les autresrecherches concernent les questions de fait et d'existence que l'on ne peutpas démontrer » (XII, 3).

Le rapport de cause à effet sur lequel se fonde laphysique ne se réduit pas selon lui à un rapport de principe à conséquence.Ce dernier est nécessaire, parce que l'idée de la conséquence est déjàcontenue dans celle du principe, si bien que la nier après l'avoir poséeimplique contradiction.

Mais le premier est contingent, car l'idée de l'effetn'est pas déjà contenue dans celle de la cause, si bien que l'on peut nier sonexistence après avoir reconnu celle de cette dernière sans que cela impliquecontradiction.

Un triangle a par exemple nécessairement trois angles, carcette propriété est enveloppée par principe dans son concept.

Sa négationimplique contradiction.

La raison suffit à nous la faire connaître par l'analysede la notion, sans que l'on ait à recourir à l'expérience.

Mais le fait que lemouvement d'une boule de billard puisse en causer un autre n'est pas enrevanche nécessaire, car on peut imaginer qu'il produise un autre effet.

Laraison ne peut découvrir seule quel en est l'effet, car celui-ci n'est pas déjà contenu dans l'idée de la cause.C'est ce qui conduit Hume à distinguer radicalement les mathématiques de la physique et à affirmer que le rapportde cause à effet ne peut être connu que par expérience.

Ce rapport n'est pas rationnel et logique comme celui deprincipe à conséquence.

Il faut sortir du concept de la cause pour connaître l'effet.

L'existence de l'une n'entraînepas nécessairement celle de l'autre.

Il ne se déduit pas rationnellement et il faut se référer à l'expérience pour laconstater.

C'est sur elle, conclut Hume, non sur la raison, que reposent donc toutes nos conclusions sur les faits etl'existence.

Or ces conclusions ne peuvent être plus certaines que l'expérience, poursuit-il.

Elles ne peuvent doncêtre nécessaires, mais seulement probables, car le rapport de la cause à l'effet est contingent.

Si l'expérience noushabitue à les voir s'enchaîner, il ne faut pas selon Hume prendre cette habitude pour une nécessité objective.

Cen'est qu'une disposition subjective, créée au fil du temps par la répétition d'une série d'événements par ailleurscontingents.

L'expérience fait la coutume, mais ne dévoile aucun ordre immuable et caché.

Elle légitime lescroyances.

Si démontrer consiste à établir un rapport nécessaire entre des faits, il faut convenir, conclut Hume, quel'expérience ne démontre rien, car les conclusions qui reposent sur elle sont seulement probables, jamais certaines.On ne démontre qu'en mathématiques, pas en physique, où tout est contingent.

Cette conclusion ne discrédite pascette dernière, mais consacre au contraire son autonomie en ouvrant un nouveau domaine d'investigation à laraison.

La physique n'est pas une mathématique appliquée à la nature, mais une discipline ayant un objet et des loispropres.

Ces dernières ne sont pas certaines, mais probables, car elles ne sont pas démontrées par la raison, maisaccréditées par l'expérience.Cette opposition est-elle donc aussi tranchée qu'il y paraît ? La raison et l'expérience correspondent-elles à desdomaines distincts de la science ? Ne peut-on les réunir en faisant d'elles les moments d'un même processusdémonstratif ? Qu'est-ce qu'observer ? Qu'est-ce qu'expérimenter ? Quelle méthode suivre dans les sciencesexpérimentales, pour trouver la vérité dans l'expérience et faire apparaître la nécessité dans la contingence ? III.

Claude Bernard : la raison s'instruit par l'expérience C.

Bernard fait de l'expérience un moment de la démonstration.

Dans son Introduction à l'étude de la médecineexpérimentale publiée en 1865 il nous dit que « l'esprit n'a en lui-même que le sentiment d'une relation nécessairedans les choses, mais ne peut connaître la forme de cette relation que par expérience » (I, 1, 2).

Le point de départde son analyse consiste à distinguer les notions d'observation et d'expérience.

Il s'agit dans les deux cas du rapportd'un sujet à un objet, ou d'un homme à des faits.

Mais ce rapport n'est pas le même dans les deux cas, remarque-t-il : il change de sens.

Dans l'observation, le fait est donné et le sujet constate passivement son existence parl'entremise de ses sens.

Il l'observe, mais reste intellectuellement passif.

Dans l'expérience, le fait est au contraireproduit par le sujet qui l'utilise pour mettre à l'épreuve ses idées.

Il est donc actif et le fait est conçu en penséeavant d'être découvert ou produit.

Observer n'est donc pas expérimenter, conclut C.

Bernard : si la premièreopération ne fait appel qu'aux sens, la seconde fait intervenir la raison, dont elle est le privilège, ajoute-t-il.Cette première distinction lui permet ensuite de décrire le cheminement de la pensée dans les sciencesexpérimentales.

Elle procède selon lui en trois temps.

L'expérimentateur est d'abord confronté à un fait que lesthéories existantes ne lui permettent pas d'expliquer.

C'est le stade de l'observation.

Il forge ensuite une hypothèsequi doit lui permettre d'en comprendre la cause en le rendant maîtrisable ou prévisible.

C'est le moment de l'idée.Puis il se retourne à nouveau vers les faits pour confronter son hypothèse au réel, qui la vérifiera ou la réfutera :cette dernière étape est celle de l'expérience.

L'expérimentateur qui suit cette méthode va donc des faits aux idées,puis à rebours des idées aux faits.

Mais le détour par l'idée fait changer les faits de nature, nous dit C.

Bernard.

Uneexpérience est une observation provoquée par la raison, c'est-à-dire un fait qu'elle a fait et que le sujet ne se. »

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