Devoir de Philosophie

L'expérimentation en psychologie.

Publié le 20/06/2009

Extrait du document

Introduction. — La psychologie est une science expérimentale : elle se fonde sur l'expérience. Mais l'expérience prend des formes assez diverses et on peut distinguer en particulier deux façons d'expérimenter : constamment, au cours de ma vie consciente, j'éprouve ou j'expérimente quelque chose, ne serait-ce que l'ennui d'une vie inoccupée ou la pesanteur de la solitude; c'est d'une tout autre façon que le physicien, au laboratoire, expérimente pour découvrir les causes d'un phénomène inexpliqué. Le verbe « expérimenter «, qui, grammaticalement, est un verbe actif, est appliqué dans les deux cas, mais de l'un à l'autre sa signification change. Dans le premier, je me comporte passivement par rapport à la connaissance que je tire de l'action présente : celle-ci augmente mon savoir ou mon savoir-faire, mais ce savoir je ne le cherche pas. Au contraire, c'est pour savoir que les physiciens expérimentent dans leurs laboratoires : le verbe « expérimenter « a, dans ce cas, une signification active. C'est cette façon active d'expérimenter que désigne le mot « expérimentation «, et par là nous entrevoyons ce qu'il faut entendre par l'expérimentation en psychologie : il ne suffit pas d'avoir fréquemment « éprouvé « de vives colères ou « expérimenté « tous les jours le chaud ou le froid pour faire œuvre d'expérimentation; aurait-on soigneusement réfléchi sur ces expériences, on en serait resté au stade de l'observation; l'expérimentateur provoque les phénomènes pour les mieux observer et pour déterminer avec plus de sûreté et d'exactitude leurs causes et leurs lois. Inutile de le dire, l'expérimentation ainsi comprise joue un rôle capital dans les sciences physiques, qui restent le type idéal des sciences expérimentales. Mais la question peut se poser de savoir si et comment elle intervient en psychologie.

« laboratoire de psychologie, expérimenter sur des passions, pas même sur les sentiments, ni, d'une façon générale,sur les états d'âme affectant la personnalité profonde de l'individu.

Il reste néanmoins un important domaine de lavie psychique où la conscience ne trouble pas l'expérience d'une façon notable : telles sont, par exemple, lesrecherches relatives à la pensée sans images et celles qui concernent l'acquisition des habitudes physiques.De plus, il est bien des expériences psychologiques dans lesquelles le sujet peut ignorer, non seulement le but desexpériences auxquelles il est soumis, mais encore que ces expériences ont un but scientifique, que ce sont devéritables expériences.

Ainsi, un professeur qui veut déterminer la valeur d'un procédé didactique n'a pas besoin defaire entrer les élèves sur lesquels il l'essaie dans le secret de ses recherches; après les avoir répartis en deux ouplusieurs groupes d'égale force, il distribue le même enseignement aux uns suivant la méthode à contrôler, auxautres suivant la méthode classique; d'après le résultat des récitations ultérieures, il aura vite découvert quelle estla meilleure méthode. II.

Quelques-unes de ses modalités.

— A strictement parler, l'expérimentateur ne vise que le savoir.

Mais entre ce chercheur désintéressé préoccupé seulement de connaître et le praticien qui, tel que le médecin ordinaire, songeseulement au résultat utile de ses interventions, il y a tout un important entre-deux : le monde des spécialistes, qui,tout en utilisant leur savoir pour améliorer l'homme, profitent aussi des interventions qui leur sont demandées pouraugmenter leur savoir.

Ces interventions, celles, par exemple, d'un chirurgien du cerveau, sans rentrer dans le cadrede l'expérimentation strictement comprise, peuvent cependant être considérées comme une sorte d'expérimentationau sens large. A.

L'expérimentation au sens strict. — D'après ce que nous avons dit, le psychologue expérimentateur devra surtout se prémunir contre le danger qui le menace de ne faire, par suite du caractère conscient de son sujet, quedes expériences faussées.a) Un premier moyen d'éviter ce danger est d'expérimenter sur l'animal, qui, sans doute, est doué de consciencespontanée — sans laquelle il n'aurait aucune vie psychique et ne serait d'aucune utilité pour le psychologue — maisà qui manque cette conscience réfléchie qui vient fausser nos expériences psychologiques.

C'est pourquoi leslaboratoires de psychologie font plus volontiers appel aux animaux qu'aux hommes.Avec l'animal, les considérations morales ne peuvent guère intervenir : des rats, des cobayes, des chiens ou des.singes peuvent être exclusivement consacrés à la recherche psychologique, et on peut, si besoin est, procéder sureux aux interventions chirurgicales les plus graves.C'est à des interventions de ce genre que nous devons dans une grande mesure les progrès de la psychophysiologie,qui cherche à établir les rapports du physique et du moral.

Ainsi, on détermine, par des ablations successives, dequel centre cérébral dépendent les diverses opérations psychiques, ou encore quel est le rôle des glandesendocrines.

Sans doute, on ne peut pas conclure directement de l'animal à l'homme; mais le comportement del'animal permet de formuler des hypothèses précises qu'on pourra vérifier sur l'homme lui-même quand un accidentprovoquera une de ces « expériences toutes faites » dont doivent se contenter, dans une large mesure, lesspécialistes des sciences de l'homme.Les animaux servent encore à rechercher les lois de l'hérédité psychologique : ainsi, un laboratoire peutexpérimenter sur des dizaines de générations de rats auxquels on fait acquérir le même savoir-faire; ensuite, onobserve si ce savoir-faire est plus parfait ou d'une acquisition plus facile dans les générations récentes,Enfin, c'est à l'aide d'animaux qu'on procède à ces recherches — par exemple, celles qui concernent l'habitude — quinécessitent d'innombrables exercices dont la répétition monotone lasserait l'homme. b) Un second moyen d'assurer l'objectivité de l'expérimentation psychologique est de la limiter aux formesélémentaires de la connaissance.

Les fonctions cognitives, en effet, ne tiennent pas, comme l'affectivité et levouloir, au centre même de notre être.

A la condition de s'en tenir aux opérations les plus simples, on peut aboutir àdes résultats qui présentent une véritable valeur scientifique.

C'est ainsi que, depuis longtemps, on étudie lasensation. B.

L'expérimentation au sens large. — Tout homme réfléchi est amené à expérimenter sur lui-même ou sur les autres, mais il est des spécialistes dont toute l'activité professionnelle se double d'une activité expérimentaleanalogue à celle des laboratoires. a) C'est surtout parmi les médecins que, jusqu'ici, on trouvait le plus grand nombre de ces praticiens, qui étaient enmême temps des expérimentateurs.

Sans doute, ce n'est guère en soignant une pleurésie ou une lièvre typhoïdequ'on peut faire avancer la psychologie, mais il n'en est pas de même quand il s'agit de tumeurs ou de lésionscérébrales ou de troubles mentaux.

Nombre de cas devant (lesquels se trouve le chirurgien du cerveau ou lemédecin des asiles sont des expériences toutes faites dont on n'a qu'à tirer la leçon.

Parfois, d'ailleurs, il fautprocéder à de véritables expériences : étant donnée l'incertitude qui règne dans certaines régions de la médecine, lemédecin est amené à expérimenter divers traitements; ces expériences sont destinées à guérir le malade et non àaugmenter le savoir; mais elles n'en sont pas moins utiles à la science que celles des chercheurs de laboratoires. b) Plus récemment sont apparus les techniciens psychologiques, qui, dans bien des cas, viennent doubler le médecin: songeons aux spécialistes de l'orientation et de l'organisation professionnelle, aux éducateurs spécialisés dans ledépistage des anomalies mentales chez les écoliers ou dans l'essai de méthodes pédagogiques nouvelles.

Voilà unimmense domaine d'expériences, qui, utilisées méthodiquement, fournissent la matière d'une riche expérimentation. Conclusion. — Le psychologue n'en est donc pas réduit à l'observation : il expérimente comme le physicien et le chimiste.

Sans doute, il ne peut pas, comme ces derniers, mesurer exactement les faits observés : pour éliminer les. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles