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Extrait de Réponses à la violence - Rapport du comité présidé par Alain Peyrefitte

Publié le 24/02/2011

Extrait du document

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Qui ne se souvient de ce mot de Victor Hugo, porteur de toute la générosité du XIXe siècle : «Ouvrez des écoles, vous fermerez des prisons.« La déconvenue a été sévère. Pourtant, il ne viendrait à personne l'idée de regretter, ni de mettre en cause l'option fondamentale prise alors. La généralisation et la prolongation de la scolarité sont facteurs de progrès pour la collectivité, et garantie de justice entre les hommes.    Mais il nous faut aller au fon&des choses. Les études effectuées à la demande du Comité ont montré que si, pour beaucoup d'enfants, la prolongation de la scolarité à 16 ans a été un élément bénéfique, pour d'autres, elle s'est accompagnée, au contraire, d'une sorte de désocialisation.    Celle-ci est sensible dans les zones à forte densité et, principalement, dans les grandes agglomérations. Ses formes sont la passivité, l'absentéisme, le vandalisme, parfois les conduites d'auto-destruction.    Comment expliquer ce phénomène qui n'est, heureusement, pas général? Il semble tout d'abord que, pour certains élèves qui déjà avaient peine à suivre les cours, ce maintien dans le système scolaire soit ressenti plus comme une punition que comme l'occasion d'une promotion. Il s'agit d'une sorte de garderie imposée à des adolescents au moment où ils pourraient commencer à exercer leur indépendance, par des choix personnels. Cette garderie leur interdit toute indépendance pécuniaire, alors même qu'ils disposent de nombreux loisirs (209 jours par an).    L'adolescent qui accuse un retard scolaire est l'objet d'une ségrégation, connue par les enseignants, sous le nom tristement évocateur de «classes dépotoirs« et, par l'administration, sous d'autres vocables euphémiques* «classes pratiques«, «aménagées«, «à programme allégé«. Les enseignants sont affectés aux classes «nobles« selon leurs diplômes et leur notation. Il s'institue ainsi comme une contre-hiérarchie, où le travail le plus délicat, et qui devrait requérir les qualités pédagogiques les plus affirmées, est confié aux maîtres qui ne s'en voient pas offrir d'autres.    Comment s'étonner qu'un tel adolescent, maintenu contre son gré dans un système dont il ne voit pas le sens, mal encadré, privé des moyens matériels de sa liberté, en un mot, rejeté, cherche à s'affirmer par l'indiscipline, bientôt la violence solitaire, ou, plus souvent, collective ?    Extrait de Réponses à la violence - Rapport du comité présidé par Alain Peyrefitte, pp. 124-125.    * Expressions destinées à atténuer la dureté de l'idée.    QUESTIONS    1) Résumez ce texte, en une dizaine de lignes.    2) Expliquez :    — "déconvenue";    — "conduites d'auto-destruction" ;    — "ségrégation".    3) L'analyse présentée dans ce texte vous paraît-elle exacte? Quels remèdes proposeriez-vous à la situation évoquée?   

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« s'ennuyant, perd ses plus riches ressources.

D'une certaine manière il se détruit lui-même.

L'expression faitcertainement allusion à des problèmes plus concrets, quoique liés au premier.

Par la drogue, par exemple,l'adolescent se détruit.

On parle également assez souvent du suicide des jeunes, en nombre accru. Ségrégation.

On parle de ségrégation lorsque des personnes de races, de religions différentes sont séparées dureste de la population. Les élèves qui suivent mal, sont placés dans des classes à part.

Ils ne s'intègrent pas dans le système scolaire«normal», d'où le nom de « classes dépotoirs » signalé dans le texte.

Elles subissent un enseignement de moindrequalité, dit l'auteur.

La séparation est accrue par la difficulté de se réinsérer dans les filières plus traditionnelles. REMARQUES Le devoir devra comporter trois mouvements : d'une part, relever les arguments essentiels du passage; d'autrepart, donner son avis sur cette analyse, en montrer la justesse ou au contraire les limites.

Enfin proposer dessolutions. Pour la première partie, il est évident que le texte établit la responsabilité de l'école dans la délinquance. Quelques points à ce sujet peuvent être dégagés : — L'école est contraignante pour ces élèves. — Les classes où se trouvent ces adolescents n'apportent pas un enseignement de qualité : « garderie». — L'éducation semble inutile : «un système dont il ne voit pas le sens ». A cette idée essentielle s'ajoutent d'autres raisons.

Elles sont plus discrètement évoquées : — Le rôle de l'habitat puisque les délits sont plus fréquents dans les grandes concentrations urbaines. — Le manque de moyens financiers incite à des actes violents. — Les loisirs, nombreux et coûteux, ne peuvent être pleinement vécus.

Ils entraînent au désœuvrement. Jugement sur l'analyse. Les raisonnements sont complets et pertinents.

Toutefois certaines remarques, certains points sont à préciser. Tout d'abord le rapport a soin de préciser que la scolarité n'est pas, bien entendu, remise en cause. Pour l'école l'analyse est assez complète.

Ajoutons cependant que si ces adolescents pensent que l'école manquede sens, ils généralisent souvent cette absurdité à l'ensemble de la société.

L'absence de valeurs, l'accroissementdes préoccupations matérielles, la monotonie dans laquelle ils voient s'engluer les adultes, expliquent aussi cedésintérêt pour leur vie présente et leur avenir. De même le rapport signale les maigres ressources financières.

L'analyse pourrait être plus complète en ajoutantque la société de consommation, par la pression des différents moyens commerciaux, excite les convoitises.

Lesadolescents cherchent alors à se procurer par n'importe quel moyen l'objet de leur vœu.

Le thème de l'habitat estégalement évoqué, mais il pourrait être plus développé, ainsi que celui de la préparation aux loisirs.

Pour ce dernierpoint, le texte de Frédéric Gaussen (épreuve 3) fournit de précieuses indications.

Il signale, en effet, l'inégalité quis'instaure lors des vacances, ou des loisirs.

Le désœuvrement, l'ennui, la solitude s'emparent de ces jeunesdéfavorisés.

Une véritable ségrégation, pour reprendre le terme du rapport, s'opère entre ces deux sortes devacanciers. Ces remarques ne constituent pas une critique contre le rapport : il parle bien des moyens financiers, des loisirs, del'habitat.

Mais ces thèmes sont secondaires par rapport au rôle de l'école.

Les arguments précédents leur accordentsimplement une place plus importante. Une omission pourtant : la responsabilité de la famille.

Elle est suggérée, peut-être, lorsque le texte parle de cesadolescents «mal encadrés» et «rejetés».

Il est certain que la «sollicitude familiale», pour reprendre le mot deFrédéric Gaussen, ou son absence, détermine fortement la délinquance.

Rejetés hors du sein familial, d'autant plusque les logements sont souvent exigus, les jeunes constituent alors des bandes. Enfin, dans une dernière partie, l'élève doit proposer des remèdes à cette situation.

Question difficile quand on pense que les spécialistes de l'éducation, les autorités, ontbien du mal à envisager des solutions et à appliquer des mesures.. »

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