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« Il faut voir Rousseau vivre avant de l'écouter parler ». Montrez combien est exacte la relation ainsi introduite entre la vie d'une part, et, d'autre part, les idées et le style de Rousseau.

Publié le 15/02/2011

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I. « VOIR ROUSSEAU VIVRE «. — Regarder vivre Rousseau nous est particulièrement facile. Il est à peine besoin, par désir de contrôle, de recourir aux témoignages de ses contemporains, souvent informés, d'ailleurs, par les écrits de Rousseau lui-même.

— Consultons les œuvres directement autobiographiques : — Les Confessions : Douze livres ; dans les six premiers, la vie de l'auteur, de la naissance (1712) à 1742. C'est la période « provinciale «. Dans les six derniers, la vie à Paris et l'exil jurassien (jusqu'en 1765). Rousseau a rédigé ces douze livras de 1765 à 1767 et de 1769 à 1770, c'est-à-dire à l'époque de sa vie où il est devenu le plus vertueux et le plus religieux, sous le double effet de la maladie et de la persécution. Malgré le désir d'apologie, on peut suspecter parfois la véracité mais non la sincérité ; une sorte de confession religieuse.

 

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« Il procède d'une révélation, un jour qu'il allait visiter Diderot à la prison de Vincennes ; le sujet proposé parl'Académie de Dijon lui est une délivrance et de l'emprise des philosophes qu'il fréquente et subit, et d'une viemondaine où il n'est pas à l'aise. Preuve : Dès après le « Discours », Rousseau s'habille de bure, se coiffe d'un bonnet, veut gagner sa vie par letravail ; il copie de la musique.

Il renonce à travailler de nouveau pour le théâtre (il avait fait un opéra et unecomédie). Rousseau vient de poser le principe de toute son œuvre : Opposition entre la bonté de l'individu et les méfaits de lasociété ; cette dualité c'est la sienne : il se croit et se sent bon ; quand il est misérable ou vil, c'est non en tantqu'individu mais en tant qu'être social ; c'est donc bien la société qui l'a corrompu I Le second discours ne fera qu'accuser la rupture de Rousseau avec le milieu philosophique dont il veut se détacher. b) L'Emile: Un paradoxe mille fois signalé : l'homme qui a abandonné cinq enfants, se mêle de composer le roman de l'éducation. Tout Rousseau est là : il fut précepteur ; — il s'éleva lui-même et prit conscience de ses propres difficultés ; — unesorte de refoulement enfin : l'éducation qu'à n'a pas reçue, celle qu'il n'a pas donnée, il s'en allège par le livre.

— Anoter que toute l'éducation consiste à laisser l'enfant libre de toute contrainte.

— La profession de foi du Vicaire esttout à la fois catholique et protestante : toujours la dualité de Rousseau. c) La Nouvelle Héloïse : — Rousseau écrit le début du livre dans la solitude de Montmorency.

Julie est comme une synthèse des femmes qu'ila connues. — Surgit Mme d'Houdetot : elle devient l'objet de son amour et du roman.

Les lettres sont celles qu'il aurait voulu luiécrire et celles qu'il aurait voulu recevoir... — La situation paradoxale — Julie, de Wolmar, Saint-Preux — à Clarens est celle qu'il eût souhaitée : Mmed'Houdetot, Saint-Lambert (son amant) et lui, Rousseau. — Mme d'Houdetot reste fidèle à Saint-Lambert, comme Julie, et c'est encore la transposition, sur le plan de ladéclamation vertueuse et du romanesque, des événements de sa vie. — Il soutient la thèse de la régénération de la famille parce qu'elle lui a manqué et lui manque encore. — Mais son amour pour Mme d'Houdetot lui « inspire des tableaux voluptueux » parce que dans le fond de son âme,cet amour n'est pas foncièrement platonique.

Saint-Preux et Julie ne pensent qu'à la satisfaction de leur passion etne parlent que de vertu... — Enfin et toujours la thèse du bonheur par le retour à la vie naturelle. c) Le Contrat Social : — Paradoxe encore : l'œuvre d'un Genevois qui n'eut jamais de vie publique, fugitif de sa petite patrie. — Mais le « Contrat » ne pourrait être conçu que pour un État de petite étendue : et nous retrouvons le Genevois. — Dualité : d'un côté, la liberté individuelle ; de l'autre des contraintes curieuses ; la religion d'État imposée souspeine de mort ou d'exil.

Rousseau a besoin de Dieu (cf.

ses multiples professions de foi) ; il n'admet donc pas que lesautres puissent s'en passer. Le « Contrat » est une ultime tentative pour concilier la dualité inconciliable : l'individu et la société, telle qu'elle estdevenue. Conclusion partielle : Parce que cet homme se sentait bon, parce que de multiples raisons lui rendaient insupportablela vie sociale de son temps, parce que ce plébéien voulait pourtant être du monde, Rousseau a construit toute unephilosophie qui n'est pas seulement la sienne pour l'avoir pensée mais qui est la substance même de son âme et lacontinuelle transposition, sur le plan théorique, des événements de sa vie.

S'il aime Alceste et le défend, c'est qu'ilse prend pour Alceste. III.

L'ÉCRIVAIN. — Enfin, c'est ici le lieu, plus que pour nul autre, d'écrire : « le style, c'est l'homme ! ». »

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