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Que gagne-t-on a échanger ?

Publié le 03/01/2011

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Introduction
L'idée d'échange implique celle d'une transaction de biens entre deux individus ou entre deux parties. Pour que l'échange puisse être considéré comme positif, chacun des deux individus ou chacune des deux parties doit y trouver un avantage ou un bénéfice. En contrepartie d'un bien que nous cédons, nous obtenons un autre bien. Par conséquent, nous ne gagnons rien a priori, si nous nous considérons que nous perdons quelquechose en échange : en effet, en échangeant un bien contre un autre, nous prenons possession d'une chose, mais nous nous dépossédons d'une autre.
 L'échange résulte en outre d'un accord préalable : si nous consentons à un échange, c'est que nous considérons que de cet échange résulte pour nous un "gain". L'échange s'établirait donc sur un contrat,implicite ou explicite, avantageux à la fois pour moi et pour l'autre. Cependant, on peut envisager, précisément, que l'échange ne correspond pas à un gain, mais à une perte, qu'il ne soit pas positif, mais négatif. Mais la question n'est pas, précisément, de savoir si nous sommes gagnants en procédant à un échange, mais de savoir ce que l'on gagne. De plus, la question sous-entend que lorsque nous échangeons des biens, nous ne gagnons pas d'argent, mais que nous procédons à une sorte de "troc" - ce qui ne signifie pas que nous ne le faisons pas par intérêt. Si l'on ne gagne pas d'argent, mais si, néanmoins, nous gagnons quelque chose, alors que gagne-t-on ?
 Même si l'argent, apparemment, n'est pas en jeu, de nombreuses discordes , de nombreux désaccords peuvent survenir dès que l'une des parties s'estiment lésée. Nous devons donc admettre que l'idée de justice ou d'équité préside à tout échange, même si l'argent ne rentre pas en ligne de compte. Nous pouvons finalement établir, de façon préalable, que l'échange impliquerait tout aussi bien l'idée d'un gain que celle d'une perte.
 Il s'agira d'examiner dans un premier temps en quoi les sociétés humaines ont toujours fonctionné sur la base d'échanges de biens : l'échange a donc une fonction essentiellement économique, et, de manière plus englobante, sociale. Ces fonctions sont liées aux besoins propres des hommes, lesquels doivent se nourrir, se vêtir, se protéger de l'environnement extérieur. Les hommes s'organisent en outre en fonction de capacités et de compétences complémentaires. Dans un second temps, il s'agira de voir en quoi l'égalité dans l'échange est nécessaire au bon fonctionnement d'un système basé sur les échanges, tout en nous posant la question de savoir en quoi l'échange n'est pas obligatoirement le seul mode de fonctionnement de ce système. Cela va nous permettre, dans un dernier temps, de voir en quoi les termes d'"échanges" et de "gain" ne concernent pas uniquement la division du travail ou l'économie, et peuvent être considérés dans leur généralité: lorqu'on parle d'"échanges", en effet,il peut également s'agir de communication, c'est-à-dire de dialogue ou d'échange d'informations ou d'idées entre les hommes.
 PLAN DE LA DISSERTATION
 1. Les échanges de biens entre les hommes ont une fonction essentiellement économique et sociale. Les hommes ont intérêt à échanger leurs biens.
 a. Nous devons travailler pour gagner notre vie. Nous échangeons notre travail contre de l'argent.
 b. Ne gagne-t-on rien - en terme d'argent, en terme monétaire - lorsque nous échangeons des biens ?
 c. Que peut-on échanger ? Conditions de l'échange : la division du travai.
 2. Les échanges s'établissent sur la base d'un contrat, explicite ou implicite, formulé ou non formulé. Ce contrat s'établit sur la base du principe d'équité.
 a. L'échange est basé sur un contrat
 b. Quelle est la valeur de ce contrat ? Que gagne-t-on à l'établir, mis à part le fait qu'il préside à tout échange ?
 c. L'équité corrige les inégalités.
 3. Les échanges du point de vue de la communication entre les hommes.
 a. Le rapport avec l'autre s'inscrit dans une dimension morale.
 b. L'échange avec l'autre suppose la reconnaissance mutuelle
 c. L'impasse de la "Dialectique du maître et de l'esclave".
 Partie 1
 Si nous travaillons, c'est principalement pour gagner de l'argent. Même si le travail n'est plus, dans nos sociétés contemporaines, uniquement lié au gain, considéré à la rémunération ou aux émoluments, les hommes travaillent pour "gagner de l'argent". Certes, le travail est censé contribuer à l'épanouissement de l'individu, ou à sa réalisation personnelle. Il n'en demeure pas moins que le but essentiel et avoué de tout individu qui recherche un travail est de "gagner sa vie". La vie, qui semblait nous être donnée, et qui ne dépend pas d'un acte de notre volonté, doit en fait être "gagnée". Cela signifie que nous avons des besoins à satisfaire si nous voulons rester en vie. Parce que l'homme doit subvenir à des besoins essentiels, naturels, parce qu'il doit manger, boire, se protéger de l'environnement dans lequel il se trouve, il doit gagner sa vie, et il ne peut le faire que par l'intermédiaire du travail - à moins qu'il ne dispose de ressources qui le dispensent de travailler. En travaillant, par conséquent, nous échangeons une activité, répartie sur un nombre d'heures données,(en France, le travail salarié représente 35 heures consacrées à ce travail), contre un salaire. Ce salaire est donc assimilable à un "gain".
 b) Ne gagne-t-on rien – en terme d’argent, en terme monétaire- lorsque nous échangeons des biens ? Existe-t-il des échanges désintéressés ?
 Même si la question posée se présente sous la forme : "Que gagne-t-on à échanger?", cela présuppose que nous ne gagnons pas d'argent au cours de cet échange, mais que nous prenons possession d'un objet en échange de la cession d'un autre objet. Nous pouvons très bien penser cependant que l'échange de "biens" n'exclut pas la dimension de l'argent : nous "échangeons" ainsi nos compétences ou notre force de travail contre de l'argent. Il s'agit donc toujours d'un échange, même si les biens considérés ne sont pas à proprement parler des objets, ou des choses - puisqu'il s'agit de travail ou d'argent. Les biens échangés, sous cette forme, semblent l'être en fonction d'un intérêt, de nature purement économique. En ce sens, l'échange n'est pas un don, en vertu duquel nous n'attendons rien en retour. Nous nous dépossédons d'un bien sans prendre possession d'un autre. Marcel Mauss, ethnologue et sociologue français, mort en 1950, a montré toutefois en quoi, dans son ouvrage intitulé "Essai sur le don", les échanges, au sein de certaines sociétés dites "archaïques", ou primitives (on parle aujourd'hui de sociétés "premières") avaient une signification à la fois économique et sociale. Le "potlach" (le don) des Indiens de la côte du Pacifique nord correspondent en fait à des échanges, ou à des prestations réciproques, même si s'expriment à travers cette manière de procéder des relations entre les individus qui paraissent plus affectives et plus amicales, donc plus désintéressées que ne le sont nos échanges basés sur l'argent. Dans la mesure en effet où les échanges revêtent une dimension affective, symbolique, nous imaginons que le "don", présidant aux échanges dans ces sociétés, est totalement désintéressé, un peu comme lorsque nous offrons un cadeau à un parent ou à un ami le jour de son anniversaire. Marcel Mauss montre qu'il n'existe pas d'échanges désintéressés : tout cadeau appelle un autre cadeau. Il s'agit bien, à plus ou moins long terme, d'échanger des biens. Si le "don" apparaît, dans un premier temps, comme tel, il révèle, dans un second temps, qu'il n'en est pas un, et que le "receveur" est en fait redevable envers le donneur. Le don n'en serait pas un. Et nous serions probablement très décontenancés si le jour de notre anniversaire, l'ami auquel nous avons offert un cadeau le jour du sien n'en faisait pas autant le jour du nôtre.

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