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Une héroïne racinienne: Étudiez le caractère de Monime dans Mithridate. ?

Publié le 27/03/2009

Extrait du document

  • Début. — En Monime s'unit la grâce pudique de la jeune fille et l'expérience plus mûre de la femme, ce qui s'explique par sa situation délicate et même périlleuse à la cour de Mithridate.
  •  1. Situation. Monime, fiancée à Mithridate, roi de Pont, et en guerre avec les Romains, est aimée de ses deux fils, Pharnace et Xipharès.
  •  2. Caractère :

  a) Vis-à-vis de Pharnace qu'elle n'aime pas : Monime repousse ses avances avec fierté, au risque de s'en faire un ennemi irréconciliable. N'est-il pas d'ailleurs allié des Romains et, elle, fille de Philopoemen ?  b) Vis-à-vis de Xipharès qu'elle aime : conduite pleine de loyauté, de tact, de fidélité à son devoir et pourtant de tendresse.  c) Vis-à-vis de Mithridate : en face du vieux roi amoureux, mais rusé et despotique, elle est digne, d'abord résignée, puis fière, indignée, douloureuse; elle signe son arrêt de mort en refusant de l'épouser.

  • Conclusion. — Monime, comme Bérénice, est d'une fermeté toute cornélienne, enveloppée dans la douceur racinienne; fille de Racine et de la Grèce, elle est une des plus pures héroïnes du grand poète.

« m'afflige et m'intéresse. Mais sans faiblesse, cette Monime éplorée sait s'arracher à la mortelle douceur de la plainte près de ce qu'on aime : Il faut, pourtant, il faut se faire violence, Et, sans perdre en adieux un reste de constance.

Je fuis.

Souvenez-vous,prince, de m'éviter, Et méritez les pleurs Que vous m'allez coûter.(Acte II, Sc.

VI.) Que l'on se représente alors Mithridate, ce vieux roi belliqueux, Implacable ennemi de Rome et du repos qui revient, auprès de cette toute jeune fiancée, réclamer ses droits.

Il ne se fait pas d'illusion sur lui-même : C'est faire à vos beautés un triste sacrifice Que de vous présenter, Madame, avec ma foi, Tout l'âge et le malheurque je traîne après moi... Quel contraste! Que Racine est habile d'avoir su ménager une telle opposition pour nous rendre Monime plustouchante et pour éclairer de sa grâce ce tableau, de défaite et de déclin, ce sombre couchant de la gloire d'unhéros (on pense à un Condé vieillissant qui eût connu la défaite, ou aux revers de Louis XIV en ses dernièresguerres).Mais le héros, ici, disparaît, c'est le vieillard amoureux et rusé, le despote oriental, conforme à l'histoire rapportéepar Dion Cassius, qui va se jouer de la loyauté d'une femme avec une savante cruauté.

Il lui tend le piège : qu'elleépouse Xipharès, cette union mieux proportionnée le vengera en même temps de Pharnace.

Admirable scène où lajeune Grecque use de toute sa finesse pour ne pas se trahir, mais enfin, traquée par ces questions insidieuses, ellefinit par laisser échapper son secret : Si le sort ne m'eût donnée à vous, Mon bonheur dépendait de l'avoir pour époux.

Avant que votre amour m'eûtenvoyé ce gage Nous nous aimions...

Seigneur, vous changez de visage !(Acte III, Sc.

VI.) Monime, trop loyale, s'est perdue, mais ce n'est pas pour elle qu'elle craint la vengeance terrible qui l'attend : c'estd'avoir perdu Xipharès qu'elle est bourrelée de regrets.

Pour elle, l'outrage qu'elle a subi a fouetté son énergie :comme toute âme bien née, elle se redresse sous l'affront; maintenant elle sait qu'elle ne pourra pas épouserMithridate et elle aura le courage de le braver, déliée qu'elle est désormais de toute fidélité envers l'homme qui l'aindignement trompée, et qui a mis entre eux un tel souvenir : Et le tombeau, Seigneur, est moins triste pour moi Que le lit d'un époux qui m'a fait cet outrage, Qui s'est acquis surmoi ce cruel avantage, Et qui, me préparant un éternel ennui, M'a fait rougir d'un feu qui n'était pas pour lui.(Acte IV, Sc.

V.) C'est signer son arrêt de mort, qu'importe! Je vous connais; je sais tout ce que je ni apprête, Mais le dessein est pris, rien ne peut ni ébranler, Cornélienne! Mais quelle douceur dans cette fermeté, douceur pareille à celle de Junie résistant à Néron, à celled'Iphigénie entre les colères d'Achille, l'omnipotence d'Agamemnon et l'inflexible volonté des dieux.

« Douce envers lamort comme elle l'avait été envers tous » (Bossuet, Oraison funèbre d'Henriette d'Angleterre), Monime s'apprêtedonc à boire le poison, quand on annonce que Mithridate est mourant, et que Xipharès revient victorieux.

Cerevirement brusque de la fortune ne l'éblouit pas, ne 1' « étonne pas ».

C'est avec le tact, la pieuse compassiond'une sœur de charité, d'une fille respectueuse et tendre qu'elle accourt auprès du grand blessé, qu'elle se penchesur le vieillard et trouve pour bercer l'agonie du vieux chef indomptable les paroles qu'il faut : elle parle de gloire, derevanche militaire : Vivez, Seigneur, vivez pour le bonheur du monde Et pour sa liberté qui sur vous seul se fonde Vivez pour triompherd'un ennemi vaincu... Elle ne saisit pas son bonheur d'une avide main, avec un empressement vulgaire, elle saura, avec son Xipharès,conduire dignement le deuil du grand roi...

toujours égale à sa fortune et à elle-même.Monime, fille de la Grèce et de Racine, Monime, fière et soumise, aimante et pudique, douce et ferme, se rangeparmi les plus parfaites créations du poète.

Plus qu'aucune autre, peut-être, elle nous fait comprendre que la vertu,beauté de l'âme, est comme toute beauté une harmonie.. »

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