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L'historien peut-il faire l'économie d'une philosophie de l'histoire ?

Publié le 22/02/2012

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• Il est fréquent d'entendre opposer l'«enquête positive» de l'historien, qui «s'en tiendrait aux faits», et ('«interprétation philosophique», qui serait tributaire d'une subjectivité ou d a priori politiques. Longtemps, les historiens eux-mêmes, lorsqu'ils se référaient aux exigences de leur propre discipline, ont cru bon d'écarter résolument toute philosophie de l'histoire, celle-ci étant pensée soit comme un élément perturbateur dans la démarche, soit comme un domaine totalement étranger à l'explication objective des faits. • La réflexion épistémologique sur la pratique même des historiens (et non pas sur ce qu'ils en disent) conduit cependant à formuler quelques questions qui problématisent un tel point de vue :
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« « Jusqu'ici, toute conception historique a ou bien laissé complètement de côté cette base réelle de l'histoire ou l'aconsidérée comme une chose accessoire, n'ayant aucun lien avec la marche de l'histoire.

De ce fait, l'histoire sembledevoir toujours être écrite d'après une norme située en dehors d'elle» (L'idéologie allemande, Éditions Sociales,pages 70-71). La formulation de la démarche matérialiste en histoire. « On se décida à concevoir le monde réel — la nature et l'histoire — tel qu'il se présente lui-même à quiconquel'aborde sans lubies idéalistes préconçues; on se décida à sacrifier impitoyablement toute lubie idéaliste impossible àconcilier avec les faits considérés dans leurs propres rapports et non dans des rapports fantastiques.» (Engels, L.Feuerbach et la fin de la philosophie classique allemande, in Études philosophiques, Éditions Sociales, page 43.) Le caractère explicite d'une telle démarche. « Cette façon de considérer les choses n'est pas dépourvue de présuppositions.

Elle part des prémisses réelles et neles abandonne pas un seul instant.

Ces prémisses ce sont les hommes, non pas isolés et figés de quelque manièreimaginaire, mais appréhendés dans leur processus de développement réel dans des conditions déterminées,développement concrètement saisissable.

Dès que l'on représente ce processus d'activité vitale, l'histoire cessed'être une collection de faits sans vie comme chez les empiristes, qui sont eux-mêmes encore abstraits, ou l'actionimaginaire de sujets imaginaires, comme chez les idéalistes.» (Marx et Engels, L'idéologie allemande, mêmeréférence.) Point de départ matérialiste et méthodologie critique. (Partir du concret ne signifie pas ipso facto tomber dans l'empirisme.) « Il semble que ce soit la bonne méthode de commencer par le réel et le concret, qui constituent la conditionpréalable effective, donc en économie politique, par exemple, la population qui est la base et le sujet de l'acte socialde production tout entier.

Cependant, à y regarder de plus près, on s'aperçoit que c'est là une erreur.

La populationest une abstraction si l'on néglige par exemple les classes dont elle se compose (...).

Le concret est concret parcequ'il est la synthèse de multiples déterminations, donc unité de la diversité.

C'est pourquoi il apparaît dans la penséecomme procès de synthèse, comme résultat, non comme point de départ, bien qu'il soit le véritable point de départet par suite également le point de départ de la vue immédiate et de la représentation.» (Marx, Introduction à laCritique de l'économie politique, Éditions Sociales, pages 164-165.) Synthèse.

Les quatre citations qui précèdent montrent l'association possible entre le point de départ matérialiste(formulé explicitement) et une méthodologie critique conduisant à une réélaboration de l'apparence.

Ellespermettent, dans une certaine mesure, de dissiper le malentendu que recouvre le rejet de toute philosophie del'histoire. • Philosophie de l'histoire et théorie de la causalité: éléments de réflexion. L'exigence qui paraît donc s'imposer à l'historien semble être celle du caractère totalement explicite des conditionsde sa propre démarche et des principes de sa méthode.

Raconter l'histoire n'est pas l'expliquer, et une simplejuxtaposition narrative des aspects ou des facteurs propres à un processus historique est de peu d'intérêt.

Il fautbien qu'à un moment ou à un autre une théorie critique de la causalité permette de hiérarchiser ces facteurs, de lessituer dans un ensemble signifiant.

Dans la reconstitution de la causalité complexe d'un phénomène, les diversestentations de l'empirisme événementiel, du psychologisme, du finalisme, de l'économisme, peuvent investir à son insul'historien et donner un caractère fictif ou unilatéral à l'explication qu'il s'efforce de définir. - L'historien peut donc très difficilement faire l'économie d'une réflexion dont l'enjeu est de lui assurer la maîtrise de sa propre démarche.

La façon dont il produit desconcepts à valeur explicative n'est pas indépendante des catégories générales qu'il utilise pour aborder le devenirréel.

L'historien, notamment, doit toujours maintenir l'exigence critique de démarcation entre l'idéologie et lescientifique (cf.

la rubrique philosophie et les références à Althusser).

Ne pas juger les hommes sur la consciencequ'ils ont d'eux-mêmes, sur les illusions historiquement déterminées qu'ils nourrissent dans un contexte donné ; telpeut être, par exemple, un des principes d'analyse critique dans l'étude des documents historiques.

Ce principe,découlant du primat de la pratique matérielle, permet de démystifier les causalités imaginaires (par exemple, dans lesmultiples propos qu'elle tient, la bourgeoisie française de 1789 croit faire la révolution pour toute la société, ou parhaine de l'absolutisme). — Quelques lectures utiles pour approfondir et développer ces analyses : Braudel, Écrits sur l'histoire, Éditions du Seuil. Hegel, La raison dans l'histoire, édition 10-18. Marx et Engels, L'idéologie allemande (première partie), Éditions Sociales.. »

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