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ILES DES EXCLAVES

Publié le 12/05/2011

Extrait du document

Iphicrate et son valet Arlequin ont fait naufrage dans une île fondée il y a cent ans par des esclaves révoltés. Comme Iphicrate lui explique que la coutume dans cette île est de tuer les maîtres ou de les rendre esclaves, Arlequin refuse désormais de lui obéir. Trivelin désarme Iphicrate, qui menaçait son esclave de son épée, et ordonne l’échange, pour trois ans au moins, des noms et des rôles; car on ne tue plus les maîtres, on veut les guérir. Trivelin demande à la servante Cléanthis de tracer le portrait de sa maîtresse Euphrosine — elles aussi naufragées du même vaisseau — et il promet d’abréger l’épreuve thérapeutique si Euphrosine reconnaît la vérité de ce portrait; il soumet Iphicrate au même traitement. Nouveaux maîtres, Cléanthis et Arlequin singent une scène de séduction mondaine. Arlequin entreprend la conquête d’Euphrosine, qui le désarme par sa souffrance, et il rend ses habits à un Iphicrate en larmes, avant de pousser Cléanthis au même pardon. Sans cette pitié attendrie, déclare Trivelin, «nous aurions puni vos vengeances, comme nous avons puni leurs duretés».

 

 

3) Historique de la pièce

 

Comédie en un acte et en prose de Pierre Carlet de Chamblain de Marivaux (1688-1763), créée à Paris par les comédiens-italiens le 5 mars 1725, et publiée à Paris chez Pissot la même année.

 

L’Île des esclaves n’est pas la première incursion de Marivaux dans le genre utopique, en croissance régulière depuis Thomas More, et en passe d’exploser au XVIIIe siècle. Les Effets surprenants de la sympathie (1712-1713), son roman de jeunesse, conte l’histoire d’Emander, naufragé dans une île qu’il civilise. Il n’est pas non plus le premier à porter sur la scène italienne la revendication philosophique et sociale: Arlequin sauvage (1721) et Timon le Misanthrope (1722), de Delisle de La Drevetière, comptent parmi les grands succès du Théâtre-Italien, en compagnie de l’Île des esclaves. Elle n’entra pourtant au répertoire de la Comédie-Française qu’en 1939.

 

 

4) Étude psychologique des personnages principaux

 

-          Iphicrate est le personnage principal de la pièce à laquelle il a donné son nom. La pièce raconte ses avatars au milieu d’une société fondée sur des principes que sa philosophie lui interdit de respecter. Dom Juan est un épicurien, sûr de soi, au milieu d’un monde d’ignorants dont il veut profiter pour assouvir sa soif de vie, de jouissances et de plaisir. Ce jeu sera facilité à ses débuts par ses bonnes manières, son charme et son appartenance à la haute société du pays. Au fil de la pièce, on lui découvre de nombreux adversaires dont il ne se débarrassera que par des promesses hypocrites. Son refus de toute religion, de toute loi lui confère une dimension satanique confirmée lors de sa mort « Le tonnerre tombe avec un grand bruit et de grands éclairs sur Dom Juan ;la terre s’ouvre et l’abîme ;et il sort de grands feux de l’endroit où il est tombé. » (Acte V ;scène 6)

 

-          Arlequin est le valet de Iphicrate, son compagnon, complice et confident. Cette place lui confère une importance prédominante dans la pièce. D’ailleurs il apparaît sur scène une fois de plus que son maître (26 scènes contre 25 pour Iphicrate) et a le privilège d’ouvrir et de fermer la pièce. Mais ce rôle d’une importance capitale demeure étrange par la complexité des sentiments de Sganarelle. C’est un opposant moraliste lorsque son maître lui accorde de s’exprimer ou lorsqu’il est scandalisé par une de ses prestations (Acte III scène 1). Mais c’est aussi son plus fidèle disciple lorsqu’il s’agit d’argent ou de la défense de ses propres intérêts (scène du pauvre Acte III scène 2 ,ou scène de Mr Dimanche Acte IV scène 3). Sganarelle à aussi le rôle de ramener à la raison son maître, de lui ouvrir les yeux. D’ailleurs, en étudiant l’étymologie de son nom, on s’aperçoit qu’il vient de sgannare, « ouvrir les yeux, dessiller ». C’est d’ailleurs lui qui voit le premier les signes de la Statue où le changement de figure du Spectre annonçant sa perte. Mais son maître préfère des explications rigoureusement scientifiques et contrecarre les superstitions et la naïveté de Sganarelle par des explications rationnelles, ignorant ainsi les avertissements du monde qui l’entoure.

 

-          Euphrosine est le personnage principal de la pièce à laquelle il a donné son nom. La pièce raconte ses avatars au milieu d’une société fondée sur des principes que sa philosophie lui interdit de respecter. Dom Juan est un épicurien, sûr de soi, au milieu d’un monde d’ignorants dont il veut profiter pour assouvir sa soif de vie, de jouissances et de plaisir. Ce jeu sera facilité à ses débuts par ses bonnes manières, son charme et son appartenance à la haute société du pays. Au fil de la pièce, on lui découvre de nombreux adversaires dont il ne se débarrassera que par des promesses hypocrites. Son refus de toute religion, de toute loi lui confère une dimension satanique confirmée lors de sa mort « Le tonnerre tombe avec un grand bruit et de grands éclairs sur Dom Juan ;la terre s’ouvre et l’abîme ;et il sort de grands feux de l’endroit où il est tombé. » (Acte V ;scène 6)

 

-          Cléanthis est le valet de Iphicrate, son compagnon, complice et confident. Cette place lui confère une importance prédominante dans la pièce. D’ailleurs il apparaît sur scène une fois de plus que son maître (26 scènes contre 25 pour Iphicrate) et a le privilège d’ouvrir et de fermer la pièce. Mais ce rôle d’une importance capitale demeure étrange par la complexité des sentiments de Sganarelle. C’est un opposant moraliste lorsque son maître lui accorde de s’exprimer ou lorsqu’il est scandalisé par une de ses prestations (Acte III scène 1). Mais c’est aussi son plus fidèle disciple lorsqu’il s’agit d’argent ou de la défense de ses propres intérêts (scène du pauvre Acte III scène 2 ,ou scène de Mr Dimanche Acte IV scène 3). Sganarelle à aussi le rôle de ramener à la raison son maître, de lui ouvrir les yeux. D’ailleurs, en étudiant l’étymologie de son nom, on s’aperçoit qu’il vient de sgannare, « ouvrir les yeux, dessiller ». C’est d’ailleurs lui qui voit le premier les signes de la Statue où le changement de figure du Spectre annonçant sa perte. Mais son maître préfère des explications rigoureusement scientifiques et contrecarre les superstitions et la naïveté de Sganarelle par des explications rationnelles, ignorant ainsi les avertissements du monde qui l’entoure.

 

 

5) Choix d’un thème : Les rapports maitres/esclaves

 

            Pour Marivaux, l’amour est un élan, qui vient du plus profond de soi, de l’instinct, et que l’on ne peut maîtriser. Il s’impose et prive ceux qui l’éprouvent de tout pouvoir de décision. Il échappe également à la raison et au bon sens, à l’éducation et à la croyance religieuse. Si, sous cet aspect, il semble priver l’être humain de liberté, par contre il lui restitue sa dignité en ce que l’amour ne peut être imposé ni par force, ni par intérêt.

            IL est bel et bien la victime de ses pulsions, un malheureux que la société condamne pour ses faiblesses. Mais il est aussi un être libre parce qu’il ne lutte pas contre lui, contre ce qu’il ressent. Il repousse toutes les injonctions d’une religion, proche du jansénisme, qui veut le contraindre à faire amende honorable, à demander pardon, à se repentir.

Il ne peut échapper à sa condition humaine ; mais il peut se révolter, se montrer avec le visage romantique de l’anarchiste qui défie les gens de pouvoir, les puissants, ceux qui écrasent les petites gens. Il n’aura aucune pitié envers ceux qu’il trouvera sur son chemin et qui ne pourront pas prouver leur prétendu pouvoir.

En amoureux de la liberté, Molière prend plaisir à lutter contre la conception autoritaire du mariage, courante au 17ème siècle. Le mariage forcé rend malheureux. Les jeunes filles contraintes sont poussées au bord du suicide. Pour cet auteur, le mariage réussi est celui qui apporte le bonheur, c’est à dire la liberté à deux.

 

 

6) Choix d’un passage : scène 6 ; le théâtre dans le théâtre

 

Je trouve que cette pièce décrit les avatars d’un Dom Juan qui prétend vivre comme un nouvel « Alexandre le Grand » dans sa frénésie de conquêtes à travers le monde.

Dom Juan à l’apogée de son « art », à l’accomplissement de sa philosophie devient au fil du texte le chasseur réduit au rôle de gibier. Il sera l’objet des perpétuelles remontrances de son valet; d’Elvire puis des frères d’Elvire, de M. Dimanche, de son père et de la statue.

Ici, les règles du classicisme ne sont pas respectées. On peut ainsi poursuivre le parallèle avec Alexandre et ses conquêtes, qu’elles soient amoureuses ou politiques. En effet, l’unité de la pièce est garanti par Dom Juan (et son valet) lui même, dans 6 décors différents (et une unité temporelle indéfinie) trahissant son perpétuel besoin de conquête qu’aucune fidélité ne vient unifier en empire «Eh mon Dieu! s’exclame Sganarelle, je sais mon Dom Juan sur le bout du doigt, et connais votre cœur pour le plus grand coureur du monde: il se plaît à se promener de liens en liens, et n’aime guère à demeurer en place» (Acte I, scène 2).

J’identifie Dom Juan, face à une société moralisatrice, à un rebelle qui sera à maintes reprises ébranlé, ridiculisé (après le naufrage) et finalement anéanti à la fin de l’œuvre.

Les grands principes de la société ont aujourd’hui évolué, me rendant plus difficile de juger les actes de Dom Juan. Je suis partagé entre l’écœurement d’un style de vie aussi peu soucieux des sentiments d’autrui et la compréhension de sa recherche de la liberté. Mais je pense que, du fait même qu’il appartient à l’humanité, sa quête de liberté est utopique puisqu’il demeurera enchaîné à sa condition humaine imparfaite et impuissante jusqu’à sa mort.

 

 

7) Opinion personnelle

 

Tempête, naufrage, île, constitution politique régie par la raison en vue de remédier aux tares des sociétés réelles, intercesseur entre indigènes et visiteurs: on reconnaît sans peine les signes du genre utopique de l’ère classique, qui appelle ici, au Théâtre-Italien, un agréable dosage d’éléments antiques (esclaves et noms propres), de traits satiriques contemporains (la coquette, le petit-maître, le traitement des domestiques), et du code comique italien (Arlequin plutôt que Trivelin). Mais il est très clair que la pièce ne se propose pas, à l’instar du récit utopique, la description émerveillée, et généralement bavarde, d’un monde idéal: Marivaux n’est pas homme à se laisser fasciner par la toute-puissance de la raison législatrice. Sa pente philosophique, en accord avec les nécessités dramaturgiques, transforme les voyageurs, de voyeurs d’un monde régénéré, en acteurs de leur propre transformation. En passant du récit au théâtre, le site utopique devient nécessairement le siège d’une expérience qui vise le visiteur (et donc le spectateur, naufragé volontaire): le travail du voyageur n’est pas de regarder, mais de voir, non pas de se porter en rêvant vers un ailleurs idéal, mais de descendre en soi-même pour réconcilier «Athènes», notre cité divisée. C’est pourquoi peut-être l’action se déroule entre la mer et quelques maisons, au bord de la cité utopique, au bord de l’eau purificatrice. Sur cette plage entre deux mondes, qu’on appelle une scène, seule cité où nos rêves s’incarnent.

Le salut ne vient pas d’une réorganisation rationnelle de l’espace et du temps social, mais de la libre expression des cœurs, brusquement sensibles, grâce à l’inversion des positions, à la pitié et au pardon chez les serviteurs, à un remords un peu plus embarrassé chez les maîtres. L’expérience inattendue de la servitude et de la maîtrise, en réveillant la sensibilité engourdie par l’habitude et les préjugés d’état (la fameuse «morale de condition» du Neveu de Rameau) permet à l’homme de parler à l’homme en dépit de l’inévitable inégalité. Il est donc vain de chercher ici un programme de réformes, ou de s’étonner de sa timidité, quand on ne suppute pas d’insondables audaces. L’expérience de l’humiliation, aussi douloureuse soit-elle, ouvre le cœur des maîtres et leur permet un retour sur soi devant le miroir qu’on leur tend, tandis que les esclaves doivent apprendre à ne pas s’endurcir dans leur vengeance.

Que cette guérison passe par l’échange des rôles n’est pas un hasard: l’Île des esclaves parle moins des devoirs de l’utopie que des pouvoirs du théâtre. Qu’est-ce qui s’agence dans l’île thérapeutique? Pour les maîtres, une épreuve; pour les serviteurs, une surprise (celle de la pitié). Pour tous (spectateurs compris), l’occasion de jouer avec les masques qui nous cachent le visage et figent les élans surprenants de la sympathie. Aussi furtifs et fictifs soient-ils

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