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Illusion comique: commentaire de la scène d'exposition

Publié le 20/09/2010

Extrait du document

illusion

 

Introduction

 

C'est un texte tiré de l'Illusion Comique de Corneille,‭ ‬à l'Acte‭ ‬1‭ ‬Alcandre a promis à Pridamant de lui montrer son fils en‭ ‬faisant apparaître des spectres dans la grotte.‭ ‬On‭ ‬sait que Clindor,‭ ‬après avoir exercé de multiples métiers plus ou moins honnêtes,‭ ‬est devenu l'agent d'un soldat.‭ ‬Alcandre nous dit qu'il se joue de son maître.‭ ‬C'est donc ici qu'apparaît pour la première fois de la pièce,‭ ‬le procédé du‭ ‬théâtre dans le‭ ‬théâtre:‭ ‬c'est le début de l'Illusion.‭ ‬L'extrait est un dialogue comique entre Clindor,‭ "‬l‭’‬agent‭" ‬et Matamore,‭ ‬le‭ "‬soldat fanfaron‭"‬,‭ ‬son maître.‭ ‬Nous verrons en quoi Corneille renouvelle ici des personnages traditionnels de la comédie.‭ ‬Nous allons montrer d'abord que cette‭ ‬scène s'inscrit dans une tradition et que le personnage de Matamore acquiert une dimension poétique baroque.

 

Plan

 

1°‭ ‬Cette‭ ‬scène s'inscrit dans une tradition

-‭ ‬Le personnage du capitaine et de son‭ ‬valet

-‭ ‬Conformément à‭ ‬cette tradition,‭ ‬Matamore nous apparait comme un personnage égocentrique et‭ ‬mégalomane.

-‭ ‬Conformément à la tradition,‭ ‬Clindor est un‭ ‬valet qui se joue de son maître.

 

2°‭ ‬Le renouvellement du personnage de Matamore par Corneille

-Un personnage qui vit dans un rêve et dans‭ ‬une illusion.

-Il fait aussi de Matamore un personnage‭ ‬constitué de‭ ‬2‭ ‬facettes contradictoires.

-Matamore joue une‭ ‬double comédie en se livrant par sa bouche à la parodie du style précieux et héroïque.

 

1°‭ ‬Cette‭ ‬scène s'inscrit dans une tradition

‭    ‬-‭ ‬Le personnage du capitaine et de son‭ ‬valet‭ 

Matamore est un descendant‭ ‬du mile gloriosus de Plaute dramaturge latin‭ ‬2‭ ‬e‭ ‬siècle avant J-C.‭ ‬C'est un soldat qui se vante de ses exploits,‭ ‬accompagné d'un‭ ‬valet qui le flatte pour l'exploiter.‭ ‬Le personnage est ensuite repris dans la‭ ‬Commedia‭ ‬Del Arte,‭ ‬qui connaît un succès du‭ ‬16e‭ ‬au‭ ‬18‭ ‬e siècle.‭ ‬Ce personnage se retrouve également dans le Rolan furieux d‭'‬Aristote,‭ ‬œuvre italienne qui date de‭ ‬1585.‭ ‬Le soldat fanfaron s'appelle Rodamont,‭ ‬d'où le mot‭ ‬rodomontade‭ ‬qui signifie vantardise et se trouve plus loin dans la pièce pour désigner Matamore.‭ ‬Enfin Matamore se retrouve aussi dans la tradition espagnole et qui signifie tueur de morts.‭ ‬Le‭ ‬valet lui aussi appartient à la tradition,‭ ‬ce personnage entre dans le jeu de son maître dans toutes ses‭ ‬œuvres afin de vivre en parasite près de lui.

‭  ‬-‭ ‬Conformément à‭ ‬cette tradition,‭ ‬Matamore nous apparait comme un personnage égocentrique et‭ ‬mégalomane.

Egocentrique d'abord on voit que Matamore insiste sur la‭ ‬1er personne‭ "‬je‭" ‬qui peut prendre d'autres formes‭ "‬ce bras‭"‬,‭ "‬mon nom‭"‬.‭ ‬Cette insistance montre que ses succès sont dus à lui et non à ses sujets.‭ ‬Ce‭ "‬jee est toujours sujet de verbe d'actions violentes fréquemment.‭ ‬A ceci s'ajoute des métaphores qui accentuent sa puissance.‭ ‬Il est également‭ ‬mégalomane,‭ ‬caractérisé par l'excès,‭ ‬l'exagération et s'exprime par l'hyperbole.‭ ‬Il parle au début de s'en prendre au‭ "‬Grand Sofi de Perse‭" ‬et‭ "‬Grand Bogord‭"‬.‭ ‬Ces mots sont unis en valeur par l'hémistiche et l'accent.‭ "‬Grand‭" ‬signifie‭ ‬la‭ ‬puissance,‭ ‬ce mot est ainsi‭ ‬répété pour souligné ce caractère qui contraste avec la‭ ‬1er partie‭ "‬souverains de pays exotiques‭"‬.‭ ‬Il y a aussi une exagération du nom des ennemis:‭ "‬mes ennemis‭" ‬ce qui contraste avec le singulier de la‭ ‬première‭ ‬personne.‭ ‬Il y a aussi une hyperbole lorsque les combats sont évoqués par des‭ ‬victoires:‭ «‬mettre en poudre‭"‬,‭ "‬réduit en fumée‭"‬,‭ " ‬Je couche d'un revers‭" (‬vers‭ ‬243‭)‬.‭ ‬Une destruction radicale.‭ ‬Pour évoquer ses destructions il emploie le présent de vérité générale ou de répétition.‭ ‬Exploits présentés comme permanant.‭ ‬L'importance de ces victoires est‭ ‬amplifiée par le rythme ternaire.‭ ‬L'exagération s'exprime également par l'énumération‭ "‬massacre,‭ ‬détruit,‭ ‬brise,‭ ‬brûle‭" ‬avec des allitérations en‭ "‬r‭" ‬et le sens de ces vers est employés de façon absolue sans complément ce qui accentue leur sens.‭ ‬Enfin la mégalomanie de Matamore l'assimile aussi à une divinité.‭ ‬Le lexique lui attribue une puissance‭ ‬surréelle.‭ ‬Il l'assimile à‭ ‬Zeus,‭ ‬Jupiter ainsi qu'à un‭ "‬nouveau Mars‭" ‬un dieu de la guerre.‭ ‬L'hyperbole,‭ ‬l'exagération de l'exploit montre que Corneille suit la‭ ‬tradition et joue sur le comique de caractère.

-‭ ‬Conformément à la tradition,‭ ‬Clindor est un‭ ‬valet qui se joue de son maître.

En‭ ‬apparence,‭ ‬c'est le maître qui domine par la parole‭ ‬(longues tirades‭)‬.De plus Matamore tutoie son‭ ‬valet alors que celui ci le vouvoie et l'appelle‭ ‬Monsieur.‭ ‬Enfin Matamore n'hésite pas à insulter son‭ ‬valet‭ "‬poltron‭"‬,‭ ‬le menace de l'assassiner,‭ ‬le rabroue quand Clindor ose lui parler.‭ "‬Et tu m'ose parler‭"‬.‭ ‬Il domine son valet cependant ce n'est qu'en‭ ‬apparence.‭ ‬Clindor débute le dialogue et c'est lui qui a le dernier mot mais surtout il flatte son maître et entre dans son jeu,‭ ‬ses phrases sont interrogatives ou exclamatives et Matamore ne fait que répéter ce que Clindor dit pour développer son rôle‭ "‬votre armée‭"‬,‭ "‬Mon armée‭"‬.‭ ‬C'est donc bien Clindor qui mène le soldat.‭ ‬Clindor parle de‭ "‬son arme autaine‭"‬,‭ "‬tout de beaux faits‭"‬.‭ ‬Il fait semblant de sétinner de ses nouveaux projets.‭ ‬Clindor flatte son maître fait semblant de le modérer:‭ "‬Et de grâce‭" ‬pour amener son maître à renchérir‭; ‬Le rôle de Clindor est de‭ ‬nourrir la folie de son maître.‭ ‬Enfin,‭ ‬on voit aussi qu'il s'y exprime toujours.‭ ‬Et les exagérations de Clindor‭ ‬montrent clairement au lecteur qu'il se moque de son maître et n'est pas dupe.‭ 

   -‭ ‬Conclusion de la‭ ‬1e partie:

‭     ‬Clindor apparait donc comme un valet habile,‭ ‬usé et manipulateur de son maître,‭ ‬ce qui assure le comique de situation de la scène.‭ ‬Le spectateur comprend que toute ses‭ ‬phrases sont des antiphrases ce qui joue avec la complicité du spectateur.‭ ‬Corneille fait de Clindor un personnage baroque.

 

2°‭ ‬Le renouvellement du personnage de Matamore par Corneille

‭   ‬ -Un personnage qui vit dans un rêve et dans une illusion crée par des mots.

‭"‬Vous‭ ‬rêvez‭" ‬Le mot est polysémique.‭ ‬Ce verbe‭ "‬rêver‭" ‬est l'une des‭ ‬clés du personnage.‭ ‬Corneille joue sur les sens de ce mot:‭ ‬méditer,‭ ‬rêver.‭ ‬Cela se vérifie‭ ‬puisqu’à partir d'un mot de Clindor,‭ ‬Matamore se laisse emporter et il crée lui même son personnage et son univers d'illusion par des mots.‭ ‬On le voit par les sonorités‭ "‬r‭" ‬qu'il développe dans tout une tirade‭ "‬mon armée ah poltron...‭«‬ Matamore est saisi d'une sorte de délire verbal,‭ ‬à partir d'un mot,‭ ‬il se laisse emporter dans on rêve.‭ ‬Il‭ ‬se laisse emporter aussi par le rythme:‭ ‬rythme ternaire.‭ ‬Il y a des‭ ‬parallélismes de construction.‭ ‬Par le rythme de l'alexandrin:‭ ‬tétramètre‭ (‬3-3‭)‬,‭ ‬très cadencé.‭ ‬C'est un personnage qui se laisse emporté par les mots,‭ ‬les sons,‭ ‬le rythme et acquiert une dimension poétique.‭ ‬Il crée un rêve,‭ ‬une illusion avec des mots.

-Il fait aussi de Matamore un personnage‭ ‬constitué de‭ ‬2‭ ‬facettes contradictoires.

Parvenu à une sorte de paroxysme,‭ ‬Matamore va se succédé au guerrier belliqueux,‭ ‬l'amant précieux.‭ ‬Il parodie le‭ ‬langage précieux en le mettant dans la bouche de Matamore.‭ ‬Le contraste est brutal et est marqué par les points de suspension et souligné par‭ "‬toutefois‭"‬.‭ ‬On passe du soldat‭ ‬destructeur au personnage de l'amant.‭ ‬Il y a‭ ‬un souvenir du‭ ‬1er‭ ‬rôle en jouant notamment‭ ‬sur les sons qui relient ces actions violentes par le son‭ "‬r‭"‬,‭ "‬i‭"‬,‭ "‬u‭" ‬et cela contraste avec des sonorités‭ ‬douces.‭ «‬Adouci‭" ‬X verbe d'action violente‭ "‬Je ne suis plus qu'un amour‭"‬,‭ ‬champs lexical de la violence X champs lexical des sentiments amoureux.‭ ‬Matamore est dompté par l'amour.‭ ‬Ce changement qui représente la transformation souligne le caractère baroque.‭ ‬La contradiction entre ces‭ ‬2‭ ‬aspects‭ ‬du‭ ‬personnage est soulignés par clindor‭ "‬En un moment‭" ‬souligne l'instant bref du changement.‭ "‬Aussi‭ ‬beau que vous étiez terrible‭ "‬beau est à l'hémistiche et terrible à la fin ce qui souligne l'opposition.‭ "‬J‭'‬épouvante‭" ‬X‭ "‬je charme‭" ‬puis les procédés de‭ "‬Quand je veux‭"‬,‭ "‬Les hommes de terreurs,‭ ‬les femmes d'amour‭" ‬soulignent eux l'aspect baroque qui est‭ ‬la source du comique lui même renforcé par l'exclamation de Clindor qui souligne une feinte de son admiration‭ (‬M fuit le danger puisqu'il est peureux‭)‬.‭ ‬Cette aptitude à se transformer est un autre trait baroque du personnage.

‭   ‬-Matamore joue une‭ ‬double comédie en se livrant par sa bouche à la parodie du style précieux et héroïque.

D'abord la parodie du style héroïque.‭ ‬Corneille place dans la bouche de Matamore des vers qui annoncent le style comme s'il se parodiait lui même avec le Cid.‭ ‬On retrouve le même rythme,‭ ‬le même champ lexical,‭ ‬les même sonorités‭ "‬mon bras‭"‬,‭ ‬les même formules‭ ‬rhétoriques,‭ ‬le même grandissement épique.‭ ‬On retrouve aussi la‭ ‬métonymie du bras,‭ ‬le rythme des‭ ‬vers...‭ ‬"Oui,‭ ‬tout autre que‭ ‬moins au seul bruit de ton nom pouvait trembler d‭'‬effroi‭"‬,‭ "‬les palmes...‭"‬,‭ "‬J'attaque en téméraire un bras toujours vainqueur,‭ ‬mais j'aurai‭ ‬trop de force ayant assez de‭ ‬cœur‭" (‬antithèse trop/‭ ‬assez‭) ‬suivi de‭ "‬A qui venge son père rien n'est impossible,‭ ‬ton bras est invaincu mais non pas invariable‭"‬.‭ ‬Dans la tirade de Matamore,‭ ‬il s'agit de parodie parce que le contexte n'est pas celui de la tragédie.‭ ‬L'effet produit est comique car ce‭ ‬langage de Matamore se trouve dans le style héroïque qui renforce le style précieux.‭ ‬En effet Matamore s'exprime à travers des périphrases et des métaphores précieuses‭ "‬ce‭ ‬p‭’‬tit archet qui dompte tous les‭ ‬cœurs‭ "‬,‭ "‬Ce bel‭ ‬œil qui tient ma liberté‭" ‬pour exprimer l'amant emprisonné pour son sentiment.‭ ‬Ces métaphores sont des clichés ce qui confirme:‭ ‬parodie précieuse,‭ ‬ce qui ridiculise les sentiments de Matamore et souligne le fait qu'il joue un‭ ‬rôle appartenant a la comédie.‭ 

    -‭ ‬Conclusion‭ ‬2e partie:

‭   ‬Corneille fait de Matamore un personnage baroque à cause de ses excès,‭ ‬de l'univers illusoires dans lequel il vit,‭ ‬à cause de ses transformations et de son aspect‭ ‬théâtral.‭ ‬Il accroît par là le comique‭ ‬puisqu‭’‬au comique traditionnel s'ajoute celui de la parodie.

 

Conclusion générale

 

‭   ‬Corneille prend donc appui sur la tradition,‭ ‬il prolonge les soldats fanfarons du passé flanqué de‭ ‬leurs valets,‭ ‬mais i renouvelle également le personnage de Matamore qui acquiert ici une dimension poétique par ses facultés verbales et de vivre dans le rêve.‭ ‬En s'éloignant de ses ancêtres Matamore rattache la pièce‭ ‬à l‭'‬esthétique baroque.

 

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