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L'imagination n'est-elle qu'un refuge pour échapper à la réalité ?

Publié le 27/02/2008

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L'imagination n'est-elle qu'un refuge pour échapper à la réalité ?

ANALYSE DU SUJET

Il convient de se demander de quoi on parlera lorsqu'on parlera d'« imagination » : il faut donc s'efforcer de distinguer les sens possibles de ce terme.

Remarquer que le sujet n'est pas : « L'imagination peut-elle nous éloigner du réel ? » mais «L'imagination nous éloigne-t-elle forcément du réel ». Il sera sans doute opportun de s'interroger sur la notion d'« éloignement » et surtout sur celle de « réel » : une mise à distance d'un certain « réel » (conçu ou appréhendé comme tel) ne pourrait-elle être une condition d'une approche « du réel » ?

THÈMES DE RÉFLEXION

Sartre (« L’Imaginaire », p. 233) : « Poser une image c'est constituer un objet en marge de la totalité du réel, c'est donc tenir le réel à distance, s'en affranchir, en un mot le nier ». 

maginer c’est viser un objet absent, le poser comme absent et donc poser le monde comme n’étant pas cet objet : le monde est alors tenu à distance par ma conscience.

Mais ne pourrait-on dire que pouvoir tenir le « monde » « à distance » est la condition (ou une condition) pour l’appréhender selon le « possible », et qu’appréhender le « monde » ou un certain « réel » selon le possible est la (ou une) condition pour aller au « réel profond » par-delà les « apparences » ?

Bachelard dit que l’imagination créatrice est le pouvoir non de former mais de « déformer les images », c’est-à-dire de rompre — en un certain sens — avec l’asservissement à « un réel » antérieurement perçu.

Libérer l’expression de l’imagination ne serait-ce pas libérer l’expression de notre réalité subjective, pouvoir l’appréhender ?

L’imagination a-t-on dit est « maîtresse d'erreur et de fausseté». S’il s’agit d’appréhender le réel en s’efforçant à l’objectivité, s’il s’agit d’appréhender le réel scientifiquement, la science comme l’a longuement montré Bachelard (entre autres) doit se défier du flux des images où s’exprime la fusion « du réel » et de notre « subjectivité ».

L’« imagination » scientifique (que l’on devrait sans doute plutôt appeler invention) travaille par combinaisons abstraites et très conceptualisées.

INDICATIONS DE LECTURE

L’Imagination de Sartre (Alcan)

L’Eau et les rêves de Bachelard (Corti).

La Fonction pratique de l’imagination de Lacroze (Boivin).

L’Imagination symbolique de G. Durand (P. U.F.).

Manifeste du surréalisme de Breton (Idées, N.R.F.).

Donner à voir d’Eluard (N.R.F.).

« littéralement, « prend ses rêves pour la réalité », échappe au réel en restant cloîtré dans le nid douillé del'imagination.

Transition :§ En fin de compte, l'imagination n'est plus un refuge, un endroit clos et fictif où il fait bon vivre, mais elle est ce qui, dans l'achèvement de son mouvement, nous restitue nécessairement à l'épreuve duréel . § Reste alors à déterminer comment, c'est-à-dire qu'il faut interroger le pouvoir de l'imagination. § En fin de compte, si l'imagination permet d'échapper au réel, c'est peut-être moins par un mouvement de fuite, qu'en nous poussant à agir sur lui. 3- L'IMAGINATION PERMET D 'ÉCHAPPER AU RÉEL EN LE MODIFIANT Au 20 ème siècle, émerge un type particulier d'images : les images de publicité et de propagande.

Celles-ci reposent sur le lien étroit entre le désir et l'imagination mais elles ajoutent la prise en compte du passage à l'acte . En effet, l'image publicitaire comme l'image de propagande part du principe où l'image engage sa propre réalisation.Cette idée a été théorisée fin 19 ème par Gustave Lebon dans sa Psychologie des foules (1895). Lebon remarque que l'image = la plus puissante source de mobilisation des masses .

L'image impressionne et nous ne sommes pas loin de la formule pascalienne selon laquelle l'imagination peut seule « mettre le prix aux choses ».L'image est un accélérateur de passions [2].

Sans entrer dans les conséquences politiques d'une telle théorie, retenons seulement que Lebon est fortement inspiré par l'émergence des sciences psychophysiques dont il estcontemporain.

Selon ces sciences, l'image est un mobile d'action : la réception d'une image entraîne des mouvements inchoatifs à la ressemblance de l'image. On a donc ici un renversement : au lieu de prolonger le désir, l'imagination le déclenche et ce faisant, nous pousse à agir.

Le but de l'action provoquée par l'imagination consiste à faire que l'image, dont l'existence n'est quefictive, prenne la place de la réalité présente en exigeant l'adéquation de la réalité future à l'image présente. Cette idée se trouve formulée par les saint-simoniens dans leurs conception de l'art social : l'image doit montrer la voie à l'instauration future du paradis sur terre.

Cette thèse met très clairement en avant l'idée que l'imagination est créatrice de mythes , c'est-à-dire de récits qui ne font pas état d'un passé intemporel mais qui s'affirment comme des mythes fondateurs pour un futur indéterminé, un avenir d'un ordre nouveau. Finalement, on a avec l'imagination un mouvement de va-et-vient entre réel et les images, via le désir qui rend possible l'action et donc le changement. [1] Voir : Freud, L'interprétation des rêves , chapitre VII. [2] Remarque : Lebon tire argument de cette sensibilité populaire aux images pour justifier, sur le plan politique, unconservatisme autoritaire, un régime opposé à la démocratie.. »

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