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L'INFLUENCE GÉNÉRALE DE ROUSSEAU AVANT LA RÉVOLUTION

Publié le 25/06/2011

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rousseau

Après la polémique violente que suscite la Profession de foi du Vicaire savoyard, il ne publie plus rien. Mais il n'est pas oublié pour autant ; avant sa mort on publie ou commence à publier une douzaine d'éditions plus ou moins complètes de ses oeuvres. Quand il meurt, on voit éclater et grandir, avant la Révolution, une sorte de culte fervent. Jean-Jacques devient plus qu'un écrivain, plus même qu'un directeur de conscience. Il devient comme un compagnon fidèle dont la présence spirituelle est sans cesse un réconfort et une exaltation. Cette mort le hausse, en un certain sens, au-dessus de Voltaire. Voltaire est mort dans son lit, dans une maison de Paris, comme tout le monde, assiégé, un peu ridiculement, par de braves ecclésiastiques brûlant du saint zèle de le convertir et qui se vantent d'y avoir réussi. Rousseau meurt brusquement, dans une sorte de solitude, dont la simplicité semble -une grandeur. Il est enterré, comme un poète, comme un prophète, dans ce parc d'Ermenonville qui semble aux contemporains l'asile du rêve et de la félicité ; dans l'île des peupliers il dort, bercé par le bruit du vent dans les feuilles ; autour de l'île et de l'étang encadré de bosquets profonds ce sont la ruine « presque méconnaissable « du temple de l'amour, l'autel de la rêverie, le temple a inachevé « de la philosophie, la maison rustique du « Petit Clarens «, les solitudes du « Désert « et la cabane où s'arrêtait Jean-Jacques ; tout ce dont on peut sourire aujourd'hui, mais qui semblait aux contemporains les « délices du sentiment «, le « trésor des âmes sensibles « et même « la voix de l'âme et de la vérité «. 

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« démonstration il la vivait, après son Héloïse et son Emile, dans ses Confessions et ses Rêveries.

On le crut, dans unextraordinaire élan de ferveur et d'abandon.

Il me suffit de renvoyer au troisième volume de la remarquable étude dePierre-Maurice Masson sur la Religion de Rousseau : Rousseau et la restauration religieuse.Un an après l'Emile on prêchait dans les églises de Paris contre Jean-Jacques plus encore qu'on n'avait prêchécontre Voltaire.

On « l'anathématisait » dans les formes.

Mais presque aussitôt on assiste à l'alliance officieuse desdisciples, avoués ou non avoués de Rousseau et des dévots a jusqu'à ce que cette alliance devienne une fusion ».On groupe, dès 1763, des Pensées de J.-J.

Rousseau qui ont eu quelques trente éditions ou contrefaçons avant laRévolution et qui sont comme un bréviaire non seulement de sagesse mais de piété ; tout dans la vie part de Dieu etn'a de fin qu'en lui.

Dans la correspondance que Jean-Jacques échange avec de jeunes admirateurs, dans l'histoirede ceux ou celles qui l'ont pris pour guide, on trouve bien des exemples d'âmes qui nous disent avoir été régénérées:Je viens, écrit Roustan, de recevoir une lettre d'Usteri, baigné de joie d'avoir passé un jour avec vous [en 1762] ; etmoi, malheureux ! il me faudra attendre l'autre vie ! Mon cher maître, tout mon coeur s'émeut à votre seul nom, ilvoudrait s'élancer hors de moi...A Diderot, à Voltaire il arrivera de « parler Rousseau » en faisant l'éloge du curé de campagne et Mably parleracomme eux et Marmontel (dans son Bélisaire) comme Mably, sans oublier Delisle de Sales, Linguet et d'autres.

Peu àpeu, même à Genève, on renonçait à faire l'apologie de la religion par la raison raisonnante de la théologie pourexalter « sa beauté, son excellence, son utilité ».

C'est son « coeur » qu'on demande à l'homme de consulter non saraison.

Bientôt les directeurs de conscience permettent la lecture de Rousseau.

Dans les volumineux ouvrages queles écrivains pieux multiplient pour défendre la religion contre la philosophie, Rousseau est presque toujours un alliéet non un adversaire.

Quand les Jeux floraux de Toulouse proposeront comme prix un éloge de J.-J.

Rousseau, denombreux prêtres sont parmi les concurrents.

Par centaines paraissent les ouvrages qu'inspire le christianisme et oùil ne s'agit plus que de rendre la religion rassurante, consolante, profitable, délectable, pleine d'attraits, deséductions et déjà de beautés.

Avant la Révolution déjà toute l'atmosphère est créée que Chateaubriand n'aura qu'àrespirer pour écrire le' Génie du christianisme et achever une révolution dans l'apologétique traditionnelle. NOTE SUR L'INFLUENCE DE J.-J.

ROUSSEAU A L'ÉTRANGER (AVANT LA RÉVOLUTION FRANÇAISE) Le cadre de la collection où paraît cet ouvrage ne me permet pas d'étudier en détail cette influence.

Mais je donneles renseignements essentiels qui me sont fournis par la remarquable bibliographie de M.

Sénelier (voir ma Notebibliographique).

La meilleure preuve d'une influence est donnée par le nombre des lecteurs et ce nombre est fourni,approximativement, par le nombre des éditions.

Assurément ce nombre ne suffit pas.

En Italie pas de traductions deRousseau, à part cinq éditions d'un extrait de la Nouvelle Héloïse qui s'en tient aux lettres exposant la sagessedomestique du château de Clarens.

En Espagne rien.

En Hollande rien.

Pourtant des études très précises ont montréque la culture française était très répandue dans plusieurs Etats italiens.

Rousseau était loin d'être un inconnu.

Maisla surveillance de l'autorité rendait impossible toute publication d'une traduction des oeuvres de Rousseau.Surveillance plus sévère encore en Espagne et au Portugal.

Là encore des esprits cultivés connaissent Rousseau etle lisent.

C'est en Hollande que s'impriment d'abord le deuxième Discours, la Lettre à d'Alembert, la Nouvelles Héloïse,le Contrat social, une première édition de l'Emile, la Lettre à Christophe de Beaumont, les Lettres écrites de laMontagne, etc.

Tous les Hollandais cultivés lisent le français ; il n'est pas besoin de traduction.Par contre le nombre des éditions de traductions témoigne éloquemment de la diffusion des oeuvres de Rousseau enAllemagne et en Grande-Bretagne.

Rousseau prend une place importante dans ce grand mouvement qui, surtout àpartir de 1750, réagit contre l'esthétique littéraire du classicisme français et contre la raison des philosophesencyclopédistes.

Mouvement complexe dans lequel se mêlent l'influence des romans de Richardson ou de Goldsmith,de la poésie d'Ossian, de celle des bardes, etc.

La libre grandeur des « littératures du Nord » tend à se substituer àla clarté et à la sagesse superficielles de celles du Midi.

Rousseau, apôtre du sentiment et prophète des lumières ducoeur y joue un rôle essentiel.En Allemagne, un petit nombre de traductions des deux Discours et de la Lettre à d'Alembert, quatre de la NouvelleHéloïse, trois du Contrat, trois de l'Emile, dont le grand succès ne commence qu'après la Révolution (huit traductionsjusqu'en 1826) ; à quoi il faut d'ailleurs ajouter deux traductions de la Profession de foi ; et une de la Lettre àChristophe de Beaumont.En Grande-Bretagne, une demi-douzaine de traductions du premier Discours, deux du second et une de la Lettre àd'Alembert ; une douzaine de traductions de la Nouvelle Héloïse ; trois du Contrat ; une douzaine de l'Emile (plusdeux de la Lettre à Christophe de Beaumont).

En Allemagne Rousseau juge de Jean-Jacques n'est pas traduit.

Maisen Grande-Bretagne le séjour de Rousseau et la querelle Rousseau-Hume ont vivement intéressé la curiosité publiqueet il y a une demi-douzaine de traductions de ces Dialogues.

Il en est de même pour la première partie desConfessions : deux éditions en Allemagne et cinq en Angleterre.et il doit accompagner certaines de ses descriptions d'un?.

Mais cette rigueur numérique n'est pas nécessaire.

Il estentendu que lorsque je donne un chiffre de traductions cela signifie le nombre d'éditions de traductions (et non pasautant de traductions différentes).. »

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