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Irréguliers, Satiriques et Satyriques

Publié le 27/06/2012

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Ses conseils, son oeuvre même, se heurtèrent à des résistances tenaces. A sa conception de la « perfection « s'opposait celle de l' « invention «, qui s'autorisait de Ronsard, dont la gloire était toujours grande. La fille d'adoption de Montaigne, Mlle de Gournay, se révolte contre une conception qui lui paraît brider tout ce qu'il y a de noble chez le poète. Régnier, parce qu'il est neveu de ce Desportes que Malherbe a vilipendé, et parce qu'il est lui-même de vie libre, parce que son imagination est plaisante et riche, parce qu'il aime les aspects divers de la réalité concrète, l'attaque avec violence et ironie dans sa Satire à Rapin. D'autres le tiendront pour inexistant; ils laisseront leur imagination tumultueuse ou monotone courir en des vers bavards...

« 120 HISTOIRE DE LA LITTÉRATURE et mous; mais ils feront figure de gens de l'ancien temps; quand Boileau les ridiculisera dans ses pre­ mières Satires, il y avait longtemps que les Scudéry, les Chapelain, les Desmarets de Saint-Sorlin étaient condamnés par la Cour et les salons.

L'œuvre de Mathurin Régnier (1573-1613), au con­ traire, sut garder l'estime de Boileau comme elle devait conquérir la sympathie de Musset.

Régnier mena, comme tant d'autres poètes de son temps, une vie de bohême; il ignora les salons et leur préféra les cabarets, les libres propos, les gaillardises et les impiétés.

Son œuvre se compose, outre diverses poésies, de dix-sept Satires, publiées de 1608 à 1613.

Dans la bataille litté­ raire une de ces satires est particulièrement importante, la JXe, dédiée au chantre aimable de la vie rustique, qui fut aussi un des ironistes de la Satire Ménippée, Rapin, héritier poétique de la Pléïade.

C'est là que s'exprime avec le plus de verve et de netteté la protes­ tation contre la tyrannie des règles et des mots à laquelle Malherbe voulait soumettre le poète.

Mais le génie de Régnier est ailleurs.

Certes, il compose mal - mais dans la satire, le désordre n'est-il pas une loi du genre? - il est bavard, il accumule les traits sans se soucier de choisir, et les lance à foison plutôt que de les aiguiser et de viser juste; d'ailleurs ce satirique n'est pas méchant; il ne s'indigne pas au nom d'une vertu qu'il ne lui siérait guère d'invoquer.

Ce qui lui plaît, et ce qui nous plaît en lui, c'est la caricature; il a l'œil juste: il voit le ridicule extérieur et pénètre le ridicule des âmes; il s'amuse au détail pittoresque, mais s'intéresse à la réalité intérieure.

Il a le don du vers franc, dru, sorti d'un coup, bien frappé.

Il a le mouvement et le naturel.

Il ne lui manque, pour être tout classique, que d'avoir un style plus châtié; car, quoi qu'il en dise, quoi qu'il en pense, il va dans le même sens que Malherbe par son bon sens foncier, sa haine des cuistres préten­ tieux qui se croient l'âme poétique, et des ignorants arrogants qui jugent la poésie; Boileau ne s'y est pas trompé.

Il est, avec le Du Bellay de la Satire Contre les Pétrarquistes, le vrai créateur en France de la satire morale et pittoresque, l'héritier direct d'Horace, mais d'un Horace un peu étoffé par la truculence française.

L'époque est d'ailleurs féconde en tempéraments gaillards, qui mettent la poésie au service d'une ima-. »

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