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JACQUES BASSAN

Publié le 25/06/2012

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Pendant que le Titien semble vouloir incendier ses toiles tardives des illuminations les plus volcaniques; que Véronèse éloigne ses visions aussi loin qu'il peut du réel, comme si eJles devaient vivre à jamais dans la fraîcheur cristalline d'une clarté matinale; que le Tintoret s'applique de tout ramener aux confidences d'extatiques voix spirituelles, lui se promène calmement parmi les troupeaux des campagnes, dans les cuisines des hameaux, au milieu de la foule des marchés. Mais il n'en fait pas, comme les Flamands, l'élément spécifique de son oeuvre, leur voix principale, mais seulement l'accompagnement de la composition.

« Tout lui est prétexte à d'intenses effusions chromatiques, à des rythmes architecturaux limpides et imposants, et, par-dessus tout, à l'exaltation d'une humanité humble, héroïquement mélancolique.

Pendant que le Titien semble vouloir incendier ses toiles tardives des illuminations les plus volcaniques; que Véronèse éloigne ses visions aussi loin qu'il peut du réel, comme si eJles devaient vivre à jamais dans la fraîcheur cristalline d'une clarté matinale; que le Tintoret s'applique de tout ramener aux confidences d'extatiques voix spirituelles, lui se promène calmement parmi les trùupeaux des campagnes, dans les cuisines des hameaux, au milieu de la foule des marchés.

Mais il n'en fait pas, comme les Flamands, l'élément spécifique de son œuvre, leur voix principale, mais seulement l'accompagnement de la composition.

C'est pourquoi, après l'essai plein de compréhension de G.

Lorenzetti sur la jeunesse de Bassan, après le docte volume d' Arslan et l'étude sensible de Bettini, après les jugements péné­ trants de Berenson et d'A.

Venturi, et tout autant peut-être, après ce que nous avons appris sur lui par la récente publication de ses notes intimes, il nous apparaît toujours plus comme un artiste qui travaillait jour après jour, privé de l'amitié d' Arétins flagorneurs, dépourvu d'envie, monta­ gnard parmi les montagnards, mais aussi comme de plus en plus riche, plus nouveau, plus proche de nous par sa simplicité et son humanité.

Peu nous importe la vieille distinction entre ses quatre manières correspondant aux quatre moments capitaux de sa carrière, telle que l'a établie, très justement, Verci, marchant sur les traces de l'arrière-petit-fils de Bassan lui-même, le peintre-caméléon du xvne siècle Giovanni Volpato.

Si l'hypothèse de la part décisive qui reviendrait à son maître dans la mystérieuse genèse de l'art de Domenico Théotokopouli (imaginée non sans tout fondement par le peintre danois "\>Villumsen) ne se vérifie pas historiquement, il n'en est pas moins certain que des œuvres telles que la Chute de la manne (autrefois au château de Collato, où je l'ai vue pour la première fois, ensuite passée, sous ce nom, dans la collection Mappeli à Florenc_e et reproduite par R.

Longhi dans l' Arte Veneta) ramènent à lui par la nouveauté saisissante de leur milieu paysan et par certains accents qui préludent à l'art des peintres de la réalité et qui nous acheminent, davantage encore, vers le Caravage.

Sans avoir été, à proprement parler, gagné par les ferments de la Réforme, du moins cons­ cient de son existence, le montagnard Da Ponte n'est-il pas, également, l'inspirateur direct, le seul inspirateur direct, peut-être, de ce Pietro de Marescalchi, dit Spada, redécouvert depuis peu, son continuateur authentique, apparenté à lui au point que l'on dirait sienne sa palette dans ses travaux pour l'église d'Enego (Bassano); en outre homme de la montagne, lui aussi, originaire de la Feltre voisine, âme anxieuse, ct qui n'ignora pas les tourments de l'Inquisition.

Inutile donc de se perdre dans des considérations historiques sur l'école des Bassan, eût-elle même été parfois heureuse et féconde pour l'avenir, puisque tout nous ramène à Jacques, cet infatigable travailleur, enfant des Alpes, qui, semblable au Titien, avait le labeur tenace, mais possédait, de plus, l'innocent abandon à la muse consolatrice, sans nul souci d'honneurs et de prestige.

Comme Cézanne, Jacques Bassan, anachorète de l'art, sut se contenter de sa cité natale et, plus il pouvait vivre en paix, plus il s'estimait heureux.

C'est pourquoi personne n'a porté de meilleur droit le nom de sa patrie comme le sien propre.

JACQUES BASSAN « L' A·doration des bergers.' » ( Gemiildegaleru, Vienne.) JACQUES BASSAN « Descmte de croix » (Musée du Louvre, Paris.) GIUSEPPE FIOCCO.

I77. »

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