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Jean-Jacques Rousseau: Y a-t-il un droit du plus fort ? ?

Publié le 09/03/2005

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rousseau
Le plus fort n'est jamais assez fort pour être toujours le maître, s'il ne transforme sa force en droit et l'obéissance en devoir. De là le droit du plus fort ; droit pris ironiquement en apparence et réellement établi en principe : mais ne nous expliquera-t-on jamais ce mot ? La force est une puissance physique ; je ne vois point quelle moralité peut résulter de ses effets. Céder à la force est un acte de nécessité, non de volonté ; c'est tout au plus un acte de prudence. En quel sens pourra-ce être un devoir ? Supposons un moment ce prétendu droit. Je dis qu'il n'en résulte qu'un galimatias inexplicable. Car sitôt que c'est la force qui fait le droit, l'effet change avec la cause ; toute force qui surmonte la première succède à son droit. Sitôt qu'on peut désobéir impunément on le peut légitimement et puisque le plus fort a toujours raison, il ne s'agit que de faire en sorte qu'on soit le plus fort. Or qu'est-ce qu'un droit qui périt quand la force cesse ?

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« Or le droit suppose la permanence d'un ordre qui s'oppose à l'irrégularité du fait.

Cette permanence est fondée sur laloi et non sur la force.

Qu'est-ce qu'un droit qui périt quand la force cesse sinon un état de fait qu'on nomme ainsiabusivement ? Qu'est-ce qu'un droit mesuré par la force sinon ce qu'on appelle la « loi de la jungle », expression quidésigne en fait l'absence de toute loi ?La conclusion de ce texte a une portée révolutionnaire évidente : sitôt qu'on peut désobéir impunément on le peutdonc légitimement, car c'est seulement la contrainte et non le devoir qui jusqu'alors nous faisait obéir.

Ce message,les acteurs de la Révolution française ne l'oublieront pas.

Ils trouveront, dans ces lignes, les principes de légitimitéde leur propre action.

Ce à quoi s'oppose cet extrait: Rousseau a posé au début du Contrat social que l'homme est né libre.

Cela signifie que la liberté constitue unepropriété fondamentale de la nature humaine, qu'elle caractérise en propre.Il s'est ensuite interrogé sur la disparition de cette liberté dans l'état de société qui a suivi l'état de nature.Comment se fait-il que l'homme soit né libre et que maintenant il soit « partout dans les fers », soumis auxpuissances des rois et des tyrans ?L'auteur en vient alors à examiner la nature de ce prétendu « droit du plus fort » qui pourrait répondre à cettequestion.

Ce droit du plus fort, dont le philosophe anglais Thomas Hobbes affirmait qu'il était au fondement du droitpositif, n'est qu'un mot inventé par les puissants pour justifier, après coup, leurs injustices, à savoir leur priseabusive du pouvoir.Or, pour Rousseau, la force est une puissance physique qui ne peut fonder aucune légitimité et le pouvoir qui endécoule ne peut réclamer aucun devoir d'obéissance de la part du peuple.

Le devoir est un commandement moral quis'impose comme une obligation que ma volonté a la possibilité de suivre ou de ne pas suivre, et c'est ce choix quifonde ma responsabilité.La force n'oblige donc pas une liberté, elle soumet et contraint.

Aussi « je ne vois point quelle moralité, écritRousseau, peut résulter de ses effets ».

La force est pure contrainte car, lorsqu'on s'y soumet, ce n'est pas par unlibre choix de la volonté mais par « un acte de nécessité », comme lorsque j'obéis à celui qui me menace pour éviterqu'il ne me détruise.

C'est donc tout au plus « un acte de prudence », c'est-à-dire de survie, et non le respect d'undevoir moral librement consenti.

Elaborer la problématique Le texte part d'une situation de fait, dont il retrace l'origine, afin d'en examiner la légitimité du point de vue du droit.Cette situation est celle du pouvoir et de l'obéissance, supposée inconditionnelle, qu'on lui doij^ Qu'est-ce quidonne une valeur à cet état de fait ? D'où vient cette supériorité et, surtout, quel est son fondement ? Au nom dequoi doit-on s'y soumettre ? La thèse consiste à montrer qu'il y a eu manipulation et contradiction à faire reposer le droit sur la force.

Il invoquepour cela le langage, en rappelant le sens des mots, puis utilise la logique, en raisonnant par l'absurde.

Raison etlangage sont en effet deux facultés propres à l'homme et présentes chez chacun d'entre eux.

Cela donne donc aussiune légitimité au propos de Rousseau, qui conclut par une application à son actualité.

Ce texte sonne le premiercoup de la Révolution. Thèse : La force peut sans doute servir à établir un pouvoir, mais pas à le fonder en droit.

L'obéissance à un pouvoir illégitime n'a rien d'obligatoire. I.

Origine et fonction du droit 1.

Situation naturelle Il n'existe pas de hiérarchie naturelle entre les hommes. 2.

Situation artificielle La société peut créer des inégalités définitives.

En se présentant comme un droit, la force change sa nature car elleapparaît conforme à un avis général du fait de son institutionnalisation. II.

Examen théorique. »

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