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Kant: jugement de goût et raison

Publié le 17/04/2009

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« Le jugement de goût n'est pas déterminable par des raisons démonstratives comme s'il était seulement subjectif. Premièrement, quand quelqu'un ne trouve pas beau un édifice, un paysage, un poème, il ne se laisse pas imposer intérieurement l'assentiment par cent voix qui toutes louent ces choses. Certes, il peut faire comme si cela lui plaisait à lui aussi pour ne pas paraître dépourvu de goût et il peut même commencer à douter d'avoir assez formé son goût... Mais ce qu'il voit bien clairement c'est que l'assentiment d'autrui ne constitue pas une preuve valable pour le jugement sur la beauté... Le jugement d'autrui défavorable à notre égard peut sans doute à bon droit nous rendre incertain sur le nôtre mais il ne saurait jamais nous convaincre qu'il n'est pas légitime. Ainsi, il n'existe aucune raison démonstrative empirique pour imposer le jugement de goût à quelqu'un. Deuxièmement, une preuve a priori d'après des règles déterminées peut encore moins imposer le jugement sur la beauté. Si quelqu'un me lit un poème ou me conduit à un spectacle qui finalement ne convient pas à mon goût, il pourra bien invoquer Batteux ou Lessing ou des critiques encore plus anciens et plus célèbres ainsi que toutes les règles de la beauté... je me bouche les oreilles, je ne veux entendre aucune raison, aucun argument et j'admettrai plutôt que les règles des critiques sont fausses ou du moins que ce n'est pas ici qu'il faut les appliquer, que d'accepter de laisser déterminer mon jugement par des raisons démonstratives a priori, puisqu'il doit s'agir d'un jugement du goût et non d'un jugement de l'entendement ou de la raison. Il semble que ce soit une des principales raisons pour lesquelles on a désigné cette faculté d'appréciation esthétique précisément par le nom de goût. Il se peut en effet que quelqu'un m'énumère tous les ingrédients d'un certain mets, qu'il remarque que chacun m'est en lui-même agréable et par-dessus vante à bon droit le caractère sain de ce plat ; je reste sourd à toutes ces raisons, j'essaie ce plat avec ma langue et mon palais et ensuite (mais non selon des principes universels), je juge. En fait le jugement de goût est toujours absolument énoncé comme un jugement singulier à propos d'un objet. » KANT
  • SUJET :
 Nature du jugement de goût, son caractère paradoxal parce qu'il ne peut être démontré ni empiriquement ni a priori. Le jugement de goût c'est le jugement que tout homme, quelles que soient sa culture et sa condition porte sur le beau ; ce jugement s'impose à chacun mais il est en deçà ou au-delà de la preuve, à l'inverse de l'énoncé mathématique ou de la thèse scientifique. 
  • ENJEU :
 Par le jugement esthétique tout homme est l'égal d'un autre, il n'y a dans ce domaine ni autorité, ni lois. Chacun fait l'expérience de sa liberté de jugement. C'est pourquoi il y a une parenté indiscutable entre le jugement esthétique et le jugement moral. Dans l'expérience du beau, comme dans l'expérience morale, l'homme est seul juge. Il ne peut prendre appui sur un savoir préalable, et tout à la fois ce jugement peut être prononcé avec certitude, et n'être admis par personne d'autre. Le jugement esthétique s'éprouve, il ne se prouve pas. 

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« ENJEU :Par le jugement esthétique tout homme est l'égal d'un autre, il n'y a dans ce domaine ni autorité, ni lois.Chacun fait l'expérience de sa liberté de jugement.

C'est pourquoi il y a une parenté indiscutable entre lejugement esthétique et le jugement moral.

Dans l'expérience du beau, comme dans l'expérience morale,l'homme est seul juge.

Il ne peut prendre appui sur un savoir préalable, et tout à la fois ce jugement peut êtreprononcé avec certitude, et n'être admis par personne d'autre.

Le jugement esthétique s'éprouve, il ne seprouve pas. COMPOSITION :Le texte est une réfutation successive de deux théories — dont la seconde est rejetée encore plusradicalement que la première.La première théorie affirme que le jugement esthétique est déterminé par un accord général qui fait juger beaucertains objets.

Elle affirme donc indirectement que la beauté est une propriété objective des choses :comment expliquer sinon que des générations entières s'accordent pour trouver beaux les poèmes d'Homère,tels temples grecs ou cathédrales? Sans doute est-il impossible de démontrer, au sens strict, que de telsobjets sont beaux ; mais ceux qui en douteraient seraient aussi ridicules que s'ils s'avisaient de comparer unemare à l'océan.

Par conséquent, il semble qu'aucune force convaincante ne puisse nous empêcher dereconnaître la beauté de tel ou tel objet consacré par la tradition.

Que ce soit là une théorie sérieuse, l'auteurl'admet puisqu'il concède que, face à un jugement unanime contraire au nôtre, nous sommes pratiquementcontraints de feindre de trouver beaux certains objets.

Mais cela signifie simplement que nous craignons d'êtrejugés sur notre goût : nos jugements nous exposent à être jugés.

Or il faut accepter ce risque quand au fondde nous-mêmes, nous estimons avoir raison contre tous. La seconde théorie est celle de tous les auteurs qui ont tenté de définir a priori les règles du beau.

On peut icipenser à l'Art poétique de Boileau.

Le beau rival de la nature a, comme la nature, ses lois qui échappent aucaprice du plaire et du déplaire ; en somme il suffirait' de connaître les règles du beau pour produire à coup sûrun bel objet.

Selon Batteux et Lessing par exemple, est beau ce qui imite la nature, il n'y a pas là matière àdiscussion.

Je vous signale aussi que la scène du sonnet, dans le Misanthrope de Molière a le même sens quenotre passage de Kant, les deux mêmes théories sont successivement représentées plaisamment et rejetées.Là encore le critère décisif du beau n'est pas dans l'objet mais dans le sujet : le jugement de goût est, diraKant, réfléchissant et non déterminant; il exprime la liberté du sujet, non une propriété de l'objet.

Le texte setermine par une justification de cette dénomination même de jugement de goût.

Accorder que l'objetcorrespond aux critères du beau est une chose, le juger beau, c'est-à-dire éprouver en sa présence un plaisirdésintéressé, est tout autre chose. RÉFÉRENCES :Jugement de goût, jugement esthétique : le terme esthétique est introduit en philosophie par Baumgarten, ildésigne ce qui a trait à la sensibilité.

Il ne s'agit pourtant pas d'un simple sentiment mais d'un jugement : c'estbeau.

Convenablement analysé, ce jugement signifie en fait : l'objet me plaît, et d'une façon toutedésintéressée.

De là l'idée centrale « qu'il n'y a pas de belles choses mais seulement une belle représentationdes choses ».Le jugement logique consiste à penser le particulier comme contenu dans l'universel ; il s'agit alors d'unjugement de connaissance.

Au contraire, l'objet du jugement esthétique est le particulier, il ne porte jamais surles choses en général mais sur un objet unique, de là l'impossibilité de le communiquer. LE TEXTE AUJOURD'HUI :La validité de l'analyse kantienne s'impose dans ce domaine : nul ne peut vous démontrer que vous devezaimer cet objet, ce paysage, cette oeuvre.

Pourtant, je crains de m'exposer à la dérision et je m'efforceparfois de dissimuler mon jugement derrière celui de critiques « autorisés ».

C'est bien là la preuve que lejugement esthétique, à l'inverse du jugement de connaissance met en jeu toute la personnalité.

Lacommunication avec autrui dans le jugement de goût est une des formes les plus achevées de communicationmais nul savoir et nulle règle ne permettent de l'obtenir à coup sûr.

De là les feintes devant ce qu'il estconvenu d'admirer et un assentiment réticent qui sera d'ordre social et non pas du tout dérivé d'une adhésionpleine et entière.. »

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