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lettres persanes: le sérail, métaphore du despotisme?

Publié le 26/09/2012

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Sujet: Un critique a dit à propos des Lettres Persanes : « le sérail est la condensation métaphorique du despotisme. « Vous expliquerez et commenterez cette citation. Montesquieu, philosophe du XVIIIème siècle, publie en 1721 les Lettres persanes sous le couvert de l'anonymat. Il s'agit d'un roman épistolaire qui raconte le voyage de deux persans en Europe, Rica et Usbek. A travers leur correspondance se tisse une critique des moeurs européennes ; le regard faussement naïf de l'étranger remet en cause tout ce que les européens pensaient aller de soi, et fait apparaître comme logique des traditions inconnues et exotiques, comme le système du sérail. Mais quels sont les rapports entre la vie d'Usbek dominée par le sérail d'Ispahan et sa réflexion abondante sur toutes les formes d'absolutisme ? Les Lettres persanes mettent en scène un sérail qui est à lui seul un microcosme complet et complexe où les relations entre pouvoir et servitude sont toujours floues ; mais le roman traite aussi abondamment des deux formes d'absolutisme que sont le despotisme Perse et la monarchie absolue Française, notamment à travers Usbek qui se fait la voix de Montesquieu. Enfin, le lecteur attentif réussit à percer, sous l'ambivalence du personnage d'Usbek et le drame du sérail, les enseignements que souhaite lui transmettre l'auteur. Le sérail, dans la tradition orientale, est un palais où sont jalousement gardées les &eac...

« doivent à la fois servir les femmes, veiller à ce qu'elles soient toujours présentables pour Usbek mais aussi à ce qu'elles respectent les lois du sér ail.

Tout en l'eunuque symbolise le renversement et la contradiction.

Tout d'abord, il sort du « néant », du statut d'esclave, par l'acte même qui le « sépare de lui-même ».

Ce sont des hommes émasculé s, qui tirent leur pouvoir de l'ablation de ce qui fait leur virilité.

Ils sont de plus esclaves d es femmes, comme le prouve le discours du premier eunuque dans la lettre IX : « Elles font toujours t omber sur moi les emplois les plus humiliants ; elles affectent un mépris qui n'a point d'exemple ; et, sans égard pour ma vieillesse, elles me font lever la nuit dix fois pour la moindre bagatelle.

» Mais ils sont également les instruments de la tyrannie d'Usbek et détiennent par là un pouvoir re doutable sur les femmes.

Cette contradiction apparaît clairement dans les écrits d'Usbek dans la lettre II : « Tu leur commandes, et leur obéis ; tu exécutes aveuglément toutes leurs volontés et leur fais exécuter de même les lois du sérail.

Tu trouves de la gloire à leur rendre les services les plus vils ; tu te soumets avec respect et avec cra inte à leurs ordre légitimes ; tu les sers comme l'escla ve de leurs esclaves.

Mais, par un retour d'empire, tu commandes en maître comme moi-même, quand tu cra ins le relâchement des lois de la pudeur et de la modestie.

» Devenir eunuque implique aussi ce rtains avantages.

En échange de son émasculation, il lui est proposée une considération qui l'élève du point de vue du rang social et lui accorde de nombreux avantages ; auparavant dans la servitude totale, il devient partiellement maître.

Mais la lettre IX, du premier eunuque, mont re que ces avantages ne réussissent pas à contrebalancer la torture psychologique de garder d es femmes magnifiques en étant dans un désir perpétuel et impossible à satisfaire, tant physique ment que par sa situation; il écrit : « Malheureux que j'étais ! […] j'espérais que je serais délivré des atteintes de l'amour par l'impuissance de le satisfaire.

Hélas ! On éteignit en moi l'effet des passion, sans en éteindre la cause et, bien loin d' en être soulagé, je me trouvais environné d'objets qui les irritaient sans cesse.

[…] Je me sentais animé à chaque instant ; mille grâces naturelles semblaie nt ne se découvrir à ma vue que pour me désoler.

» L'eunuque est donc attiré par ces femmes qu'il ne peut envisager « de regarder avec des yeux si tendres » ; le seul moyen de rester auprès d'elles est au contraire d'entretenir un rapport de force, de contrainte : il doit les commander, les i ntimider, leur faire respecter les ordres d'Usbek e t punir au besoin.

Il ne peut ainsi les envisager « q u'avec des regards sévères ».

Mutilés, frustrés et soumis, la seule satisfaction des eunuques est alor s de faire régner la terreur sur les femmes et de les soumettre à leur tour.

Ainsi naît une sorte de haine profonde entre les e unuques et les femmes, personnages tous aussi frustrés les uns que les autres ; les eunuque s par la suppression de leur virilité, les femmes p ar leur enfermement.

L'objet de frustration est précis ément réciproque : l'eunuque dirige et obéit à des femmes qu'il ne peut atteindre et les femmes sont g ouvernées par l'eunuque qui entrave leur liberté. On se retrouve dans une lutte permanente du pouvoir entre les femmes et les eunuques, où les ordres se font toujours plus contraignants et se su ccèdent avec un air de vengeance.

Le premier eunuque écrit à ce sujet dans la lettre IX : « Je l es désespère en leur parlant sans cesse de la faiblesse de leur sexe et de l'autorité du maître.

[…] Ce n'est pas qu'à mon tour je n'aie un nombre infini de désagréments, et que tous les jours ces f emmes vindicatives ne cherchent à renchérir sur ceux que je leur donne : elles ont des revers terri bles.

Il y a entre nous comme un flux et un reflux d'empire et de soumission ».

La domination s'exerce alors à travers la psychologie : les femmes s'amusent à épuiser les eunuques sous leurs ordres « humiliants » et incessants, tandis que ces derniers sont entraînés à reconnaître et accepter l e comportement des femmes, à ne pas céder à leurs larmes, à décrypter leurs expressions ; ils se serv ent même des tensions entre les femmes pour apprendre par certaines ce que d'autres ont fait, e t récompensent ensuite les secrets avoués.

Les femmes autant que les eunuques sont dans un rapport de force permanent, étant tour-à-tour maître et esclave.

Entre elles-même naissent des tensions : e lles se jalousent en effet les unes les autres pour avoir la préférence d'Usbek et savoir qui est la pl us belle : « Je me vis insensiblement devenir la maîtresse de ton cœur ; tu me pris ; tu me quittas ; tu revins à moi, et je sus te retenir : le triomphe fut tout pour moi, et le désespoir pour mes rivales .

» (Zachi à Usbek, lettre III).

Le sérail reste donc un système fragile, qui n'est maintenu que par la p eur du châtiment : les femmes craignent les eunuques qui craignent Usbek.

C'est pourquoi la fra gilité augmente encore quand ce dernier, qui. »

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