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Liaisons Dangereuses : Cécile, Personnage Comique

Publié le 16/10/2010

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liaisons dangereuses

 

Cécile est un personnage majeur des liaisons dangereuses. Elle ouvre le roman par une lettre naïve adressée à Sophie Carnay, amie qu’elle avait au couvent dont elle vient de sortir. Cette lettre donne le ton. Cécile est une jeune personne qui a encore beaucoup de l’enfant, dont la très grande innocence et la naïveté. De plus, elle se ravit de tout, du secrétaire par exemple, mais elle ignore les usages : il s’agit d’une enfant peu préparée et projetée dans un monde ‘apparences et de réputations. Dans le film, Cécile ne prend pas toute cette importance et ne s’attribue pas cette même sympathie de la part du lecteur – provoquée par le partage à Sophie, qui fait d’elle une jeune fille normale et qui ressent le besoin de se confier – mais apparaît directement comme une idiot, présentée ainsi par sa mère qui confie lui apprendre à ne pas trop parler. Par ailleurs le genre épistolaire de l’œuvre romanesque apporte une certaine omniscience au lecteur, qui ainsi en saura toujours plus que le personnage, ce qui provoque de l’ironie dramatique, d’autant plus qu’on peut trouver un lien entre Tourvel et Cécile. Luttant d’abord contre le libertinage, guidée par l’éducation défaillante qu’elle à reçu au couvent, Cécile cédera pourtant bien plus vite, ce qui fait d’elle un personnage entre le tragique et la culpabilité. Ainsi Cécile présente-t-elle ces deux aspects d’une jeune fille comique de par sa naïveté excessive, et vouée à la fatalité.

 

Cécile est avant tout un personnage comique de par sa naïveté, sa tendance à la gaucherie. Dès la première lettre, puisque c’est elle qui ouvre le roman, le ton est donné : son écriture est légère et enfantine, sans trop de style ni de formalité. De plus, sa lettre est suivie de celle de Merteuil, qui elle, au contraire, maîtrise tout à fait son style, élégant et recherché. Ce contraste permet de rabaisser Cécile, de la conforter dans cette position d’éternelle faiblesse et de dominée. Dans les confessions qu’elle fait à Sophie Carnay, on apprend qu’elle vient de sortir du couvent et qu’elle n’est pas tout à fait préparée à la vie en société. Elle s’émerveille d’un rien et se lamente d’une erreur qu’elle a fait. En effet, déjà, elle raconte s’être trompée dans ses jugements avec l’épisode du cordonnier qu’elle a prit pour son futur mari. Cette anecdote atteste non seulement du manque de réflexion de Cécile, qui aurait probablement pu différencier un simple cordonnier d’un homme de bonne famille, mais aussi de ses manières : elle pousse un petit cri, s’effondre dans une chaise. Elle se révèle être très théâtrale et exagérée dans ses réactions. Celles-ci amènent forcément une moquerie de la part du lecteur, qui voit ici un personnage exagéré et un peu simple. Obnubilée par sa position de « fille à marier «, elle se ridiculise donc. L’œuvre de Frears cependant n’a pas exactement suivi celle de Laclos, et l’épisode du cordonnier est passé sous silence. Si le spectateur n’est pas directement sensibilisé à ce trait majeur de Cécile, il y est cependant confronté rapidement avec une apparition qui donne elle aussi le ton. Elle s’y présente comme une fille inutile (mais non pas comme un personnage inutile) et sans saveur. Quand elle parle, sa voix se révèle perçante, voire agaçante et ne dit que des choses sans intérêt. De plus Merteuil la lance déjà sur le sujet : elle ne sait pas s’adapter à la vie en société. Sa mère elle-même surenchérit : elle lui apprend à se taire, sous-entendu qu’elle ne dit de toute façon rien de bien pertinent étant donné qu’elle n’est pas très maligne. Sa voix et ses paroles cependant ne sont pas les seuls en cause, son corps lui aussi la trahit. Dans sa démarche, les positions qu’elle adopte, elle est ridicule. Elle sautille, ne sait comment se tenir et, sous le regard appuyé de Valmont, intéressé par sa gorge, elle reste simplement pétrifiée. Cette naïveté restera présente tout au long du film, comme du livre, avec entre autre une remarque que Cécile fera et qui illustre très bien son niveau de réflexion et sa naïveté excessive : quand Valmont lui parle de dores et déjà coucher pour satisfaire son futur mari, elle réplique simplement « Faire tout ça avec trois hommes différents ? «, et ce d’une voix nasillarde. Sa seule réticence ne durera que le temps d’une phrase idiote et à valeur très comique. Et ce serait sans compter sur la scène de la clef, qui prend une grande importance chez Frears, celle-ci étant tombée dans un vase, Cécile ne trouve rien d’autre à faire que de secouer ledit vase ou de regarder dedans. Il s’agit alors de comique porteur de suspens.

 

 Cependant elle n’est pas la seule actrice de sa naïveté, qui est elle-même encore renforcée par l’insistance que Laclos comme Frears sur l’infantilisation de Cécile. En effet, cette infantilisation est elle aussi perceptible dès le début de l’œuvre de Laclos, plus encore que chez Frears, puisque le roman débute avec une lettre de Cécile à une amie du couvent. Elle a donc beau être sortie physiquement de l’établissement, elle y est encore, ses pensées y sont encore. Elle est encore enfermée dans ce système comme dans une éternelle enfance. Son amie, elle, y est encore. Par conséquent, elle n’a pas encore de contact réellement adulte, c’est pourquoi elle n’est pas introduite dans la société. En outre, elle surenchérit « il m’en restera [du temps] toujours pour toi «, ce qui implique qu’elle gardera toujours une part d’enfance en elle. Elle ne grandira jamais vraiment, et ne sera jamais vraiment mûre : elle n’apprendra donc jamais. D’autre part son caractère manque de saveur, elle ne semble qu’être le pâle reflet de sa mère, elle-même relativement intéressante en tant que personne. Cécile cherchera toujours une amie, cependant elle est la seule jeune femme du roman et du film, hormis Sophie qui est donc une attache à l’enfance et au couvent, et qui n’est présentée que comme confidente de Cécile. En effet, le lecteur n’aura jamais la possibilité de lire une de ses lettres. L’omniprésence de sa mère ne fait qu’en rajouter : on peut par ailleurs l’accuser d’avoir participer aux ébats de Cécile et de Valmont lors de la lettre 110 ou de la séquence 17. Son aveuglement exagéré est à l’image de celui de sa fille, qui ne remarque rien, croit tout ce qu’on lui dit, pire encore qu’une enfant. Elle est comme prise par la main et menée en bateau par qui le veut.

 

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