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Une libération du passé est-elle possible ?

Publié le 11/08/2009

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Il arrive qu'un événement nous ait affectés au point que son souvenir nous hante. Comme on voudrait se défaire de cette rumination douloureuse ! Mais serait-ce une bonne chose que d'évacuer ce souvenir ? Est-ce simplement en oubliant le passé que l'on s'en libère ? Le méconnaître n'est peut-être pas le plus sûr moyen de s'en affranchir. Car l'ignorance favorise rarement la liberté. Or, le présent n'est pas indépendant du passé. C'est donc seulement par la connaissance des causes antécédentes qu'un espoir de changer le présent est permis. Par conséquent, la question de savoir si l'oubli est libérateur est subordonnée à celle de savoir dans quelle mesure le passé détermine notre présent.  

« emprunter à une tradition. 2.

Si la liberté était indépendante du passé, il serait alors possible à chacun, à tout moment, de renoncer à sonexistence présente pour changer tout, et recommencer sa vie à zéro.

Cela supposerait le pouvoir de devenir unautre, de modifier son propre caractère.

Il est sans doute possible de changer, mais de façon progressive et avec letemps.

En revanche, la possibilité d'une métamorphose radicale est douteuse.

Il est même difficile de ne pas répéterles erreurs passées.

C'est ce qu'illustre Sartre, dans les Jeux sont faits.

Un patriote, Pierre, est tué par un traître.En même temps, Eve est empoisonnée par son mari.

Quand ils reviennent à eux, ils découvrent que les autres ne lesvoient pas, ne les entendent pas.

Ils ont été tués.

La mort est une sorte d'autre vie, menée en parallèle avec lesvivants avec qui il est impossible de communiquer.

Mais ils obtiennent une seconde chance: celle de ressusciter s'ilsparviennent à se refaire, à recommencer leur vie à zéro, en s'aimant en toute confiance.

Ils ont une journée pourréussir.

Mais le poids des habitudes déjà prises est trop fort.

Leurs milieux sociaux les séparent.

Pierre ne peuts'empêcher de profiter de l'occasion qui lui est donnée pour aider ses camarades.

Alors que le délai expire, il tientabsolument à les prévenir qu'ils vont tomber dans une embuscade.

Ainsi, la tentative pour se refaire échoue: "Lesjeux sont faits, voyez-vous.

On ne reprend pas son coup".

Notre vie ne se construit pas seulement contre notrepassé, mais à partir de lui.

Nous ne devenons pas adultes seulement en niant l'enfant que nous étions: nousconservons, dans une certaine mesure, ce que nous avons été. 3.

On ne peut rien créer ex nihilo, mais seulement à partir de ce qui existe déjà.

C'est ce principe que lesrévolutionnaires semblent avoir méconnu en 1789.

Tout peuple a une tradition, des habitudes, des coutumesauxquelles il ne peut pas renoncer du jour au lendemain.

Il y a un poids des habitudes qui rend impossible unbouleversement radical.

Même une révolution ne peut s'accomplir à partir de rien.

Elle ne pourra rien édifier sur lesruines du passé.

Elle ne peut donc pas être seulement la négation violente de ce qui l'a précédée.

BenjaminConstant (De l'esprit de conquête et de l'usurpation, , II, 4) explique l'échec de la révolution française, qui s'achèvedans la Terreur, par la volonté des révolutionnaires d'imposer aux Français une conception de la liberté qui neconvenait pas à leur esprit.

Robespierre et St-Just privilégient la liberté politique aux dépens des libertésindividuelles.

Mais les Français n'étaient pas disposés à perdre de leur indépendance pour participer aux affairespubliques.

Une révolution ne peut pas être sans lien avec le passé.

Elle ne peut pas en être seulement la négation.Toute négation est déterminée, c'est-à-dire qu'elle est négation de quelque chose, négation de ceci.

Elle a ainsi unlien avec ce qu'elle nie, même si elle le refuse.

Elle conserve forcément quelque chose du passé.

L'Internationale,chanson révolutionnaire ("du passé faisons table rase") semble bien utopique.

III.

Un devoir de mémoire Il est impossible de se libérer du passé si l'on entend par libération une rupture telle qu'elle ne conserve rien dupassé.

Cependant, cela nous conduit-il à rester prisonniers du passé? L'impossibilité d'une action ex nihilo ne doit pas conduire à renoncer à toute action.

Qu'une action à partir de riensoit impossible ne nous oblige à renoncer qu'à une conception naïve de la liberté, définie comme le pouvoir de fairetout ce que l'on veut.

Toute liberté est en situation.

La liberté ne peut pas s'exercer en dehors d'une situationconcrète.

Séparée de toute situation, elle n'est qu'une liberté abstraite et de ce fait impuissante à inscrire unequelconque action dans le cours du monde.

Ainsi, la liberté du sage stoïcien, qui est libre par la pensée, n'a aucunefécondité, puisqu'elle reste retirée du monde, à l'abri de la réalité et des coups du sort.

C'est ce qui la rend possiblequi l'empêche en même temps d'être effective et efficace: pour être absolue, il faut qu'elle se retire, dansl'intériorité de la conscience, et ainsi échapper à "ce qui ne dépend pas de nous".

Mais pour être réelle, la libertédoit donc s'inscrire dans un monde qui lui résistera.

La liberté ne peut s'exercer que comme lutte avec un certaindonné, une certaine situation, dont le passé fait partie.

La liberté ne peut s'exercer à partir de rien, mais seulement,par exemple, à partir de ce fondement qu'est le passé.

Comment agir, sinon à partir d'un certain passé? Maiscomment une telle liberté est-elle possible? Ce passé dont elle ne peut pas se détacher ne la détermine-t-il pas? Enréalité, elle est possible parce que ce n'est pas le passé lui-même qui détermine mon action, mais plutôtl'interprétation que je choisis de donner de ce passé.

En effet, ma situation ne prend sens que dans la mesure où jel'interprète.

Sartre fournit cet exemple, dans l'Existentialisme est un humanisme, d'un jeune homme qui, à la suited'une série d'échecs (mort du père, insuccès à un examen, déception amoureuse), décide de se convertir.

Il estclair que sa décision ne surgit pas de nulle part, les événements traversés n'y sont pas étrangers.

Mais elle ne selaisse pas entièrement expliquer par eux.

La cause de la conversion, ce n'est pas le passé lui-même, mais le passétel qu'il a été compris par l'individu, tel qu'il a été interprété par lui.

En effet, ces déceptions pouvaient être vuesautrement que comme des échecs.

De plus, le jeune homme y a vu le signe qu'il n'était pas fait pour les réussitesterrestre, que sa vocation était ailleurs, mais d'autres interprétations étaient possibles. Le passé ne me détermine qu'au travers du sens que je veux bien lui donner.

Or, il faut connaître le passé pourpouvoir l'interpréter.

Mon action dépendra de la conscience que j'aurai du passé.

Pour se libérer du passé, il ne s'agitdonc pas de l'oublier, mais au contraire d'en prendre conscience.C'est plutôt quand on méconnaît son passé qu'il nous aliène.

Par exemple, les maladies mentales comme les névrosess'expliquent, selon Freud, par l'action de souvenirs inconscients liés à des désirs eux-mêmes cachés.

Ces souvenirstraumatisants ont été refoulés.

Mais ils n'ont pas été abolis pour autant.

Le refoulement ne les efface pas.

Loin delà: l'oubli interdit au désir de trouver satisfaction.

Au lieu de s'affaiblir, il va s'exacerber, s'irriter.

Il se renforce d'êtrefrustré.

C'est un principe élémentaire de la psychanalyse, que Freud nomme le principe de plaisir: tout désir tend àse satisfaire, il doit être pensé comme une pulsion qui s'efforce de trouver le contentement; toute pulsion. »

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