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Malherbe vous semble-t-il avoir détruit ou avoir continué l'oeuvre de Ronsard ?

Publié le 15/02/2012

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malherbe

Cette question a été maintes fois posée et débattue. Les classiques des xviie et xviiie siècles refusèrent de reconnaître en Malherbe un continuateur de Ronsard; les Romantiques du XIXe n'ont rien voulu voir de commun entre le chef de la Pléiade, grand poète, et son contempteur, « étrangleur « de la poésie. Mieux informée, moins passionnée, la critique contemporaine semble avoir définitivement tranché le débat par la plume d'Emile Faguet : « Malherbe, a-t-il écrit, c'est Ronsard continué, Ronsard rectifié, Ronsard combattu. « Nous ne saurions mieux dire, et nous bornerons à justifier cette triple affirmation....

malherbe

« Tithon n'a plus les ans qui le firent cigale Et Pluton aujourd'hui, Sans egard du passé, les merites egale D'Archemore et de lui. Ronsard n'offre rien de plus pedant.

Qui sait que Tithon, fils de Lasmedon, un des fondateurs de Troie, &tall Pepoux de la deesse Aurore; qu'il devint si vieux qu'il ne resta presque plus rien de lui; et que, finalement, it fut change en cigale? Quant a Archemore, ou elle n'a laisse de trace dans aucun dictionnaire.

Il n'est pas jusqu'a l'italianisme que Malherbe ne.

continue.

Non seule- ment dans les Larmes de saint Pierre, qu'il a desavouees, mais dans ses sonnets, ses epigrammes - en particulier celles qu'il dedie a la Puce lle d'Orleans - it cultive la pointe.

Circonstance agravante, it n'en use pas comme d'une forme de langage appartenant a l'epoque, mais pour le seul amour de to pointe.

Ecoutons-le, parlant a Jeanne d'Arc : L'ennemi, tons droits violant, Belle Amazone, en vous bralant, Temoigne son dme perfide; Mais le Destin n'eut point de tort : Celle qui vivait comme Alcide Devait mourir comme it est mort. Si Ronsard et Malherbe ont exprime dans leur oeuvre quelques senti- ments chretiens, on peut soutenir que leur poesie est penetree d'esprit paien.

Passe encore pour Ronsard! Son admiration naive de Pantiquite explique cette anomalie chez un homme qui, par ailleurs, s'affirme chretien et catholique.

Pour Malherbe, en un temps oil chacun a compris le vide et le faux de ce paganisme postiche, ce n'est plus qu'un procede de rhetorique; et nous avons peine a le lui pardonner. Trop liberalement, sur la foi de Boileau, on attribue au seul Malherbe toutes les a reformes » enumerees dans l'Art Poetique.

La verite est que Ronsard se montre aussi exigeant que Malherbe en matiere de prosodie. Rarement ses vers enjambent l'un sur l'autre.

Epris d'harmonie, it &He la cacophonie, et, sans l'interdire absolument, condamne l'hiatus.

Il impose comme une loi l'alternance reguliere des rimes masculines et femimnes, invente une grande variete de rythmes, et tourne des stances savamment agencees.

En tout cela, Malherbe n'est que son continuateur.

En composant des vers corrects, pleins, nombreux, sonores, males et robustes, ii ne fit guere qu'imiter celui qu'il condamnait sans restriction. Neanmoins on peut soutenir, on doit meme ajouter qu'en le continuant it le rectifie.

Poesie grave, majestueuse, avons-nous dit.

Oui, mais chez Ronsard l'ima- gination l'emporte souvent sur la raison, et frequemment nous sentons fremir en ses vers une ame passionnee.

Malherbe marque l'avenement de la ?aison eloquente, se suffisant a elle-meme, ce qui est specifiquement classique.

Qu'il console ou s'indigne, it recourt aux arguments de raison; it est, par la, tout proche de Descartes et de Corneille.

Sans doute, it dis- tingue les genres, if declaigne les petits; mais chez Ronsard la delimitation n'a rien de rigoureux, tandis que chez Malherbe sevit déjà le regime des cloisons etanches, tel que le comprendront les deux siecles classiques.

II imite l'antiquite; mais avec desinvolture, jetant les Grecs -- si chers a la Pleiade - par dessus bord, et n'accueillant les Latins, plus proches de nous, qu'avec circonspection.

Les Ronsardisants avaient « pine » les anciens; Malherbe les « filtre », use d'une sage discretion, n'admet que les elements susceptibles d'etre assimiles par notre genie national.

II use et abuse de la mythologie; mais tandis que Ronsard la prend pour fond de ses poemes, déjà Malherbe ne s'en sert plus guere qu'a titre d'ornement. Il « italianise mais en vieillissant it se &gage de plus en plus de- ces modeles dangereux, du « manierisme » si peu francais.

II &nonce cette mode, s'irrite de cette affeterie dont raffole la cour et devient le mortel ennemi du « cavalier Marin », champion du mauvais goat italien.

Enfin si un relent de paganisme s'exhale des deux oeuvres, ii est beaucoup plus Tithon n'a plus les ans qui le firent cigale Et Pluton aujourd'hui, Sans égard du passé, les mérites égale D' Archémore et de lui.

Ronsard n'offre rien de plus pédant.

Qui sait que Tithon, fils de Lasmédon, un des fondateurs de Troie, était l'époux de la déesse Aurore; qu'il devint si vieux qu'il ne resta presque plus rien de lui; et que, finalement, il fut changé en cigale? Quant à Archémore, il ...

ou elle n'a laissé de trace dans aucun dictionnaire.

Il n'est pas jusqu'à l'italianisme que Malherbe ne continue.

Non seule­ ment dans les Larmes de saint Pierre, qu'il a désavouées, mais dans ses sonnets, ses épigrammes - en particulier celles qu'il dédie à la Pucelle d'Orléans - il cultive la pointe.

Circonstance a~gravante, il n'en use pas comme d'une forme de langage appartenant à l'epoque, mais pour le seul amour de la pointe.

Ecoutons-le, parlant à Jeanne d'Arc: L'ennemi, tous droits violant, Belle Amazone, en vous brûlant, Témoigne son âme perfide; Mais le Destin n'eut point de tort: Celle qui vivait comme Alcide Devait mourir comme il est mort.

Si Ronsard et Malherbe ont exprimé dans leur œuvre quelques senti­ ments chrétiens, on peut soutenir que leur poésie est pénétrée d'esprit païen.

Passe encore pour Ronsard_! Son admiration naïve de l'antiguité explique cette anomalie chez un homme qui, par ailleurs, s'affirme chretien et catholique.

Pour Malherbe, en un temps où chacun a compris le vide et le faux de ce paganisme postiche, ce n'est plus qu'un procédé de rhétorique; et nous avons peine à le lui pardonner.

· Trop libéralement, sur la foi de Boileau, on attribue au seul Malherbe toutes les « ré,formes » énumérées dans l'Art Poétique.

La vérité est que Ronsard se montre aussi exigeant que Malherbe en matière de prosodie.

Rarement ses vers enjambent l'un sur l'autre.

Epris d'harmonie, il évite la cacophonie, et, sans l'interdire absolument, condamne l'hiatus.

Il impose comme une loi l'alternance régulière des rimes masculines et féminines, invente une grande variété de rythmes, et tourne des stances savamment agencées.

En tout cela, Malherbe n'est que son continuateur.

En composant des vers corrects, pleins, nombreux, sonores, mâles et robustes, il ne fit guère qu'imiter celui qu'il condamnait sans restriction.

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Néanmoins on peut soutenir, on doit même ajouter qu'en le continuant il le rectifie.

Poésie grave, majestueuse, avons-nous dit.

Oui, mais chez Ronsard l'ima­ gination l'emporte souvent sur la raison, et fréquemment nous sentons frémir en ses vers une âme passionnée.

Malherbe marque l'avènement de la raison éloquente, se suffisant à elle-même, ce qui est spécifiquement classique.

Qu'il console ou s'indigne, il recourt aux arguments de raison; il est, par là, tout proche de Descartes et de Corneille.

Sans doute, il dis­ tingue les genres, il dédaigne les petits; mais chez Ronsard la délimitation n'a rien de rigoureux, tandis que chez Malherbe sévit déjà le régime des cloisons étanches, tel que le comprendront les deux siècles classiques.

Il imite l'antiquité; mais avec désinvolture, jetant les Grecs -- si chers à la Pléiade - par dessus bord, et n'accueillant les Latins, plus proches de nous, qu'avec circonspection.

Les Ronsardisants avaient « pillé » les anc:îens; Mal~erbe les «filtre», use d'une sage discrétion, n'admet que les éléments susceptibles d'être assimilés par notre génie national.

1l use et abuse de la mythologie; mais tandis que Ronsard la prend pour fond de ses poèmes, déjà Malherbe ne s'en sert plus guère qu'a titre d'ornement.

Il « italianise » ; mais en vieillissant il se dégage de plus en plus de ces modèles dangereux, du « maniérisme » si peu français.

Il dénonce cette mode, s'irrite de cette afféterie dont raffole la cour et devient le mortel ennemi du « cavalier Marin », champion du mauvais goût italien.

Enfin si un relent de paganisme s'exhale des deux œuvres, il est beaucoup plus. »

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