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La Méditerranée : interface Nord/Sud

Publié le 12/06/2011

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L’espace méditerranéen : une interface nord/sud.

 

 

L’espace méditerranéen est-il vraiment une interface nord-sud ? Si oui, quelles relations entretiennent les Etats de l’espace méditerranéen ? Les flux sont-ils générés par les disparités de l’espace méditerranéen ? Au final, l’opposition nord-sud est-elle toujours pertinente ?

 

L’espace méditerranéen est un espace organisé autour d’une mer continentale divisée elle-même en plusieurs ensembles ( Méditerranée Occidentale, orientale, adriatique, mer Egée, mer Noire ( Hors programme)). Si l’ensemble de cet espace a les caractéristiques du domaine bio-climatique méditerranéen caractérisé, entre autres, par des étés chauds et secs et des hivers ou des automnes plus arrosés, une végétation essentiellement xérophile, on observe tout de même des variantes. (la rive nord par exemple est plus arrosée que la rive sud). De part et d’autre de la méditerranée, les 25 Etats ( soit 250 millions d’habitants) sont d’une grande diversité, ils ont entretenus et entretiennent aujourd’hui encore de nombreuses relations. L’espace méditerranéen est donc une zone de clivage et de contact. A ce titre, il peut apparaître comme une interface, c'est-à-dire un espace qui met en relation deux ensembles géographiques distincts. Cet espace peut d’ailleurs marquer certaines discontinuités.

 

Alors l’espace méditerranéen est-il vraiment une interface nord-sud ? Si oui, quelles relations entretiennent les Etats de l’espace méditerranéen ? Les flux sont-ils générés par les disparités de l’espace méditerranéen ? Au final, l’opposition nord-sud est-elle toujours pertinente ?

 

I Un espace de clivages et de fractures.

 

a) Une interface culturelle complexe et un carrefour de civilisations.

 

- Cette région du monde a connu des périodes d’échange culturels. Il serait possible de citer les emprunts réciproques dans le domaine des sciences, de la philosophie, dans la méditerranée au 12ème siècle. On peut évoquer aussi le processus d’acculturation en marche dans les pays de la rive sud pendant la période coloniale. Ceci explique que certains pays de la rive sud appartiennent aujourd’hui à la francophonie. Aujourd’hui encore les exemples d’échanges sont nombreux. On peut citer le festival « Méditerranéennes » d’ Argelès sur mer. (66)

 

- On peut cependant distinguer d’un point de vue culturel, un Nord et un Sud de la Méditerranée. Le christianisme est dominant au Nord. L’islam au Sud. Au Nord, les langues sont essentiellement indo-européennes, au Sud , elles sont majoritairement chamito-sémitiques. Concernant les structures familiales, les structures traditionnelles sont également différentes. Au nord, le modèle est plutôt exogame ( les époux sont issus de cercles familiaux différents) , au sud le modèle familial peut être endogame d’autant plus que la famille est dans ce cas plutôt communautaire de dimension élargie).

 

- Cependant, il serait réducteur d’opposer simplement le nord au sud. Marque du schisme de 1054, on peut distinguer une Europe méditerranéenne catholique d’une Europe méditerranéenne orthodoxe. Au sud, l’Islam n’est pas uniforme. Certes, il y a 90 % de sunnites, mais il faut compter également avec des minorités chiites notamment au Liban. Enfin en Turquie , la langue est ouralo-altaïque.

 

- On peut tout de même réaliser une typologie en distinguant 5 ensembles : Deux au Nord : L’ Arc occidental ; catholique et latin.

 

Monde grécobalkanique : orthodoxe mais marqué par la longue présence des turcs ottomans. ( Présence d’un Islam autochtone en Europe).

 

Au Sud, il y a trois variantes d’une même civilisation cimentée par l’Islam : le Maghreb, le Proche-Orient-le monde Egyptien.

 

b) De grands écarts de développement.

 

Une opposition N-S : Les pays européens du nord de la méditerranée sont en moyenne plus développés que les pays du Sud . En termes démographiques, au Nord la transition démographique est terminée ( Natalité, mortalité et accroissement naturels faibles), au Sud , elle est souvent en cours ( fort accroissement naturel lié à un décalage dans le temps entre la baisse de la mortalité et celle de la natalité)

 

Mais dans cette répartition nord-sud, il y a des exceptions :

 

Israël est un pays développé sur la rive orientale de la méditerranée : IDH 0.905. Au Nord : suite aux conflits des années, la Yougoslavie a accumulé d’importants retards. Une distinction NO/SE plus pertinente.

 

En effet, au NO , l’IDH est en moyenne supérieur à 0.8. Sur le versant sud et oriental , il est compris entre 0.5 et 0.8.

 

Notez que le sous-développement du Sud de l’espace méditerranéen est relatif. Aucun IDH n’est inférieur à 0.6. C'est-à-dire un IDH moyen.

 

Dans le détail, on peut distinguer.

 

Au Nord : La France et l’Italie appartiennent au G8. La Grèce , le Portugal et l’Espagne connaissent une croissance rapide depuis 1980.

 

Au Sud, l’ouest maghrébin et l’Egypte connaissent une ébauche de développement en exploitant les hydrocarbures les ressources touristiques. Mais ces Etats connaissent encore certaines difficultés : croissance démographique encore rapide, structures rurales mal adaptées à une économie ouverte, inégalités sociales qui génèrent l’instabilité politique.

 

A l’Est avec la Syrie et le Liban, on a un ensemble fragile. La Turquie souffre encore d’un mal développement.

 

c) Un espace de tensions géopolitiques.

 

Il y autour de la méditerranée de nombreux points chauds :

 

Il y a des tensions et des conflits internes liées à des revendications nationalistes : Corse. Il est parfois difficile de distinguer les considérations internes et les enjeux interétatiques de conflits. Maroc-Algérie-Mauritanie au sujet du Sahara occidental. Cette ancienne colonie espagnole partagée entre le Maroc et la Mauritanie fait l’objet d’un conflit entre le Front Polisario ( mouvement pour l’indépendance soutenu par l’Algérie), le Maroc et la Mauritanie.

 

Ex-Yougoslavie. Depuis 1991, dans la violence de plusieurs conflits, la Yougoslavie a éclaté en 5 Etats ( accords de Dayton (1995) : RFY (Serbie et Monténégro), Croatie, Slovénie, Bosnie-Herzégovine, Macédoine).

 

Chypre : Peuplée à 80% de grecs et à 17 % de turcs, Chypre est déchirée en particulier à partir de 1974 à cause de l’affrontement des communautés et de l’intervention des Etats Turc et Grec. Depuis l’île est partagée. Le règlement de la question chypriote est un préalable de l’adhésion de la Turquie dans l’Union européenne.

 

Le Proche Orient : voir leçon.

 

Il faut noter également l’existence de conflits frontaliers entre la Libye, la Tunisie, et l’Egypte. Remarque : l’eau peut également être aujourd’hui un enjeu de ces conflits. C’est le cas entre Israël, le Liban, et la Syrie au sujet du contrôle des eaux , du Yarmouk, du Jourdain et du plateau du Golan. Des tensions existent également entre la Turquie et la Syrie au sujet de l’utilisation des eaux du Tigre et surtout de l’Euphrate.

 

II Une zone d’échange

 

a) L’importance des flux migratoires.

 

- Les niveaux de vie des pays européens de la rive nord sont attractifs et génèrent une immigration de travailleurs étrangers. Il y a par exemple, 3 millions de turcs dans l’UE, 1 million de Marocains et 400 000 Tunisiens.( attention ces chiffres concernent l’ensemble de l’UE qui n’est pas exclusivement méditerranéenne).

 

- Il faut noter dans les pays d’accueil un durcissement des politiques migratoires depuis 1970. Par exemple en 1974, la France a mis un terme à l’immigration de travailleurs. Les flux de travailleurs étrangers sont aujourd’hui essentiellement clandestins. En France, le nombre de clandestins est estimé entre 200 000 et 400 000 (toute provenance confondues). Il faut mettre ce chiffre en rapport avec la population totale en France 62 000 000 millions d’habitants. Les pays de la Rive nord inclus dans la zone Schengen cherchent à renforcer le contrôle sur leurs frontières lorsqu’elles constituent des limites de l’Union européenne. (ïle de Lampedusa au sud de l’Italie Gibraltar, Ceuta , Melilla pour l’Espagne)

 

- Les flux migratoires se transforment. Avant les pays du Maghreb constituaient en partie, le champs migratoire privilégie de la France. Aujourd’hui , la France n’est plus la destination exclusive des migrants du Maghreb.

 

De plus des pays qui traditionnellement étaient des foyers de départ deviennent des pays d’accueil. C’est le cas autour de la Méditerranée, de l’Italie et de l’Espagne. L’Espagne est entrée dans un processus de 700 000 régularisation de clandestins.

 

Champs migratoires : provenances privilégiées des migrants arrivants dans un pays donné.

 

b) Les flux touristiques.

 

- espace méditerranée est un important espace touristique : La méditerranée reçoit 30%des touristes internationaux. La France reste la première destination touristique au monde.

 

- Dans l’espace méditerranéen, les principaux pôles sont les suivant : L’Espagne méditerranéenne ( 46 millions de touristes/an) , la France méditerranéenne (17 millions), la Tunisie ( 4 millions) , le Maroc ( 2.2 millions).

 

- Le Nord reste donc dominant. Les flux sont essentiellement nord-nord. Les flux Nord-Sud de la méditerranée se développent.

 

- La pression touristique pose des problèmes pour l’environnement : surexploitation des littoraux et concurrence pour l’eau.

 

c) Les flux commerciaux et financiers.

 

- La méditerranéen est un lieu d’échanges importants : par exemple, 60 % du pétrole importé en Europe transite par la méditerranée.

 

- Il existe d’importants échanges entre le nord et le sud. Ceux-ci sont d’ailleurs en hausse. Par exemple chacun des Etats du sud e la méditerranée réalise 60 % de ses échanges avec l’Union européenne. L’UE absorbe 80 % des exportations des PPM, et 50 à 60% des pays du moyen-orient.

 

- Mais ces échanges sont dissymétriques:

 

D’abord, dans l’espace méditerranéen, les flux dominant sont des flux N-N. Les flux N-S sont secondaires ( les exportations des pays du nord méditerranéen vers le sud représentent 4 % de leur activité commerciale) et les flux S-S ne représentent que 3 à 4 % des échanges dans l’espace méditerranéen. Ensuite, les flux produits primaires ( des hydrocarbures en particulier) vont vers le nord, mais les pays de la rive sud importent aussi beaucoup de produits agricoles et de produits manufacturés.

 

Les investissements de l’UE vers les PSEM, sont relativement faibles. Ils ne représentent que 5 % des IDE de l’UE vers les PPM. Mais , ils augmentent. Les avoirs de l’UE dans les PPM ( sauf Chypre et Malte) ont augmenté en moyenne de 19% par an entre 1994 et 1999.

 

PSEM : pays du sud de l’espace méditerranéen.

 

III L’organisation de l’espace méditerranéen.

 

a) Une faible intégration économique et politique.

 

Il n’existe pas d’ organisation rassemblant l’ensemble de pays de l’espace méditerranéen. Cependant, les relations entre l’UE et les PP M s’organisent . En 1995, la conférence de Barcelone, établit les bases d’une zone de libre échange ( horizon 2010) dans le zone méditerranéen. Des accords d’association sont signés avec le Maroc, la Tunisie, Israël, etc… Remarque : les PPM craignent que leur statut de pays atelier soit remis en cause dans le cadre d’une UE élargie.

 

PPM (pays Partenaires méditerranéens) : Pays méditerranéens qui sont liés à l’Union européenne par des accords de partenariat et de coopération.

 

b) Les dynamiques de l’organisation de l’espace méditerranéen.

 

On observe, le long du littoral méditerranéen une concentration de la population .

 

Dans l’espace méditerranéen , plus de 60% de la population vit à moins de 10 kms de la mer. On observe également une tendance à la métropolisation . La métropolisation, c’est le processus de concentration des hommes, des activités et des fonctions dans les grandes agglomérations. On distingue, le long du littoral méditerranéen des mégalopoles de dimension continentale. Barcelone ( 5 millions d’habitants), Le Caire seule mégapole d’Afrique ( entre 12 et 15millions d’habitants).

 

Il faut noter également que les espaces littoraux sont attractifs. Au nord, on assiste à une manifestation de l’héliotropisme (attraction exercée par les régions ensoleillées) . Au Sud se poursuit un exode rural important dans un contexte d’inégal développement des régions.

 

On assiste donc à double processus de polarisation et d’anisotropie.

 

Polarisation : domination et attraction exercée par une agglomération.

 

Anisotropie littorale :développement qui s’opère de manière axiale le long du littoral.

 

c) Une typologie de l’espace méditerranéen.

 

L’Europe méditerranéenne et occidentale : le centre.

 

L’Arc Latin ( France –Italie-Espagne ) et la Grèce représentent 85 % du PIB méditerranéen. Ce centre a les attributs de la puissance : des métropoles dynamiques (Madrid-Barcelone-Toulouse-Marseille-Lyon-Turin-Gênes-Rome), le tourisme et l’industrie y sont développés. L’intégration de ces régions dans le mondialisation est effective.

 

Les périphéries en voie d’ intégration :

 

Il s’agit d’une part des pays de l’Est européen bordant la méditerranée. Pour certains ils intègrent actuellement l’UE ( Slovénie-Malte-Chypre). Ils connaissent cependant un retard de développement par rapport au reste de l’UE.

 

On peut associer à ces Etats européens, Israël dont le poids économique, politique et militaire est réel.

 

Les pays du sud de l’espace méditérranéen.

 

Ils souffrent en général d’un retard de développement, même si certains sont dynamisés par des activités comme la production manufacturière de faible VA mais à fort besoin de main-d’œuvre. Si les relations avec les pays du nord sont réelles elles restent secondaires.

 

Conclusion : L’espace méditerranéen est-il vraiment une interface nord-sud ?

 

Il convient de répondre point par point à cette question :

 

L’espace méditerranéen est un lieu d’échanges. Ces échanges sont intenses, mais ils peuvent être dissymétriques comme dans le cas du commerce, des flux migratoires et du tourisme. Cette dissymétrie est d’ailleurs le reflet de fractures existant en particulier dans le domaine du développement entre le nord et le sud de la mer méditerranée.

 

Cependant, on observe à plusieurs reprises que l’opposition nord-sud est parfois réductrice. Une grande diversité caractérise cette région. La rive nord comme la rive sud sont loin d’être uniformes. Enfin, l’espace méditerranéen est un lieu de partenariat mais aussi de conflits. C’est même l’une des régions les plus conflictuelles au monde.

 

Donc oui l’espace méditerranéen est une interface nord-sud mais pas seulement.

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