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MONTAIGNE ET LES MORALISTES

Publié le 20/05/2011

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montaigne

I. — Montaigne (1533-1592).

Sa vie. — Michel Eyquem de Montaigne naquit le 28 février 1533, au château de Montaigne, situé sur un tertre au pied duquel coule la Lidoire, affluent de la Dordogne. Son père, Pierre Eyquem, fit la guerre en Italie, et devint conseiller à la Cour des aides et maire de Bordeaux en 1544. — Michel de Montaigne fut, dès qu'il put parler, confié à un précepteur allemand qui ne savait mot de français, et qui dut se servir exclusivement avec son petit élève de la langue latine; et les serviteurs eux-mêmes ne devaient jamais lui parler en français. Mais il y eut sans doute quelque mollesse dans l'éducation première de Michel ; on l'éveillait le matin au son des instruments de musique, et il vagabondait une partie du jour avec les petits paysans des environs. Aussi l'enfant éprouva-t-il une fâcheuse impression quand on le mit au collège de Guyenne, à Bordeaux. Dans cette « geôle de jeunesse captive «, Michel de Montaigne resta six ans, et continua à faire du latin. A treize ans, il commença à suivre les cours de la Faculté des arts de Bordeaux. Il fit son droit à Toulouse, fut nommé conseiller à la Cour des aides de Périgueux, et y rencontra La Boétie, de deux ans plus âgé que lui, pour qui il ressentit dès le premier jour une amitié restée légendaire (voir Essais, I, 27).

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« Montaigne y parle de son style, de sa méthode, de ses habitudes, de sa personne physique et morale; c'est un deschapitres les plus importants de son autobiographie ; à la fin, il nous dit quelques mots de sa « fille d'alliance »,Marie de Gournay.Livre troisième.

— Chap.

II (Du Repentir).

Montaigne y parle beaucoup de sa sincérité, et de la façon dont il prétendse peindre.

— Chap.

nt (De Trois Commerces).

Encore un des chapitres essentiels pour l'analyse du caractère deMontaigne.

Il y décrit avec complaisance sa librairie (bibliothèque).

— Chap.

viii (De l'Art de conférer).

Laconférence, ici, est la conversation.

Il faut comparer ce chapitre avec celui de La Bruyère sur la Société et laConversation.Comment Montaigne a composé les Essais.

— Ce n'est pas d'une manière suivie que Montaigne a écrit ses Essais.

Letitre même du livre le prouve : essais, qu'est-ce à dire ? sinon tâtonnements, va-et-vient, retouches, absence dedessein et de but, impossibilité de classer et d'intituler.Montaigne, une première fois, de 1571 à 1580, s'enferme dans son château.

II a le goût des livres.

Il lit.

Et comme ilva de préférence aux moralistes et aux historiens, et qu'il ne lit point passivement, l'esprit critique s'éveille en lui; ilpense, et il juge.

Pour juger, il compare.

Le terme de comparaison qui lui est nécessaire, il le prend en lui-même, enl'homme naturel qui est en lui.

Montaigne s'engage donc insensiblement dans la rédaction de ses mémoirespsychologiques, mais en « honnête homme qui ne se pique de rien », en causeur qui se défend de faire un livre.C'est ainsi que se formèrent, au jour le jour, les deux premiers livres des Essais (158o).Puis Montaigne, mûri par les voyages et par l'expérience, revient à ce qu'il a déjà écrit; il le complète, il le fortifie, ille confirme, et il entrevoit d'autres sujets, d'autres chapitres.

C'est l'édition en trois livres qui sort de cette secondepériode de retraite (1588).Il reprend une troisième fois son ouvrage; et, comme à l'approche de la vieillesse bien des choses apparaissent,auxquelles on n'avait pas songé, Montaigne ajoute encore, et prépare la nouvelle édition qu'il ne verra point (1595).Plus sceptique peut-être, mais surtout plus sage, il estime que l'on ne saurait trop prouver aux hommes la nécessitéd'être modérés et tolérants.

Aussi accumule-t-il les citations et les anecdotes, car il ne veut pas être cru sur parole, et il appuie ses réflexionsdu plus grand nombre possible de témoignages.Le but de Montaigne.

— D'abord, dans la courte introduction qu'il adresse Au lecteur, Montaigne nous dit : « C'estici un livre de bonne foi, lecteur.

Il t'avertit dès l'entrée que je ne m'y suis proposé aucune fin, que domestique etprivée...

Je veux qu'on m'y voie en ma façon simple, naturelle et ordinaire, sans étude et artifice : car c'est moi queje peins...

je suis moi-même la matière de mon livre...

» — Au chapitre xvii du livre II, c'est encore plus net : « Lemonde regarde toujours vis-à-vis; moi, je renverse ma vue au dedans : Je la plante, je l'amuse là.

Chacun regardedevant soi ; moi je regarde dedans moi.

Je n'ai affaire qu'à moi.

Je me considère sans cesse, je me contrôle, je megoûte...

Moi, je me roule en moi-même.

»Mais ce projet de se peindre serait un sot projet, pour employer l'expression sévère de Pascal, si Montaigne avaitprétendu nous intéresser uniquement à sa petite personnalité.

S'il est vrai qu'il nous ait donné complaisamment tropde détails sur sa vie privée, sur sa nourriture, ses vêtements, sa santé, il ne faut pas s'y arrêter.

De lui, il ne parle,nous l'avons dit, que pour contrôler par son bon sens et par son expérience ce que les écrivains anciens etmodernes lui apprennent d'autrui.

« Le charmant projet qu'il a eu de se peindre, dit Voltaire, car en se peignant, il a peint la nature humaine! » Qu'il ait donc commencé par étudier l'homme en général, etqu'il soit arrivé à chercher des témoignages en lui-même, — ou qu'il ait voulu d'abord sepeindre et qu'il ait été conduit à généraliser ses découvertes, l'unité du livre deMontaigne est dans cet aimable moi qui n'a rien, certes de haïssable, auquel noussommes toujours ramenés, et qui semble être le centre de tant de lignes venues de tousles points de l'horizon humain.La Philosophie de Montaigne.

— Au moyen de cette enquête entreprise parallèlement surlui-même et sur le genre humain tout entier, à quel résultat Montaigne a-t-il abouti ?Son scepticisme est essentiellement basé sur cette constatation que l'homme est unêtre mobile, « ondoyant et divers », incapable d'atteindre la vérité : ni la science, ni laraison, ni la philosophie ne peuvent le guider.

L'homme obéit à la coutume, aux préjugés,à l'intérêt, au fanatisme ; il est le jouet des circonstances extérieures et de ses propresimpressions.

Ce procès de l'homme, dont les éléments sont disséminés partout dans lesEssais, devient un réquisitoire ardent et presque suivi dans le fameux chapitre xi' du livreII, l'Apologie de Raymond de Sébonde, qui aboutit d'ailleurs à une profession de foi toutechrétienne. L'impression générale que donne Montaigne à qui l'a lu et relu, c'est d'ailleurs moins celle d'un véritable sceptique,qui prend plaisir à ruiner la certitude et qui s'amuse malignement de la sottise ou de l'impuissance humaine, commeVoltaire, que celle d'un modéré très intelligent qui, à l'époque où chacun s'écrie : « Je sais! » et anathématise outue son prochain pour imposer sa vérité à lui, murmure doucement : « Que sais-je ? » Toute opinion extrême ettranchante le blesse.

La plupart de ces vérités ne sont pour lui que conjectures.

Il nous invite surtout à suspendrenotre jugement.

Et la balance qu'il a fait graver au frontispice des Essais est moins encore l'emblème du doute quele symbole de l'équité.. »

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