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Montrer comment l'apparence immédiate des choses est à la fois un moyen et un obstacle à leur connaissance objective.

Publié le 25/03/2011

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CONSEILS PRÉLIMINAIRES    1. Il est nécessaire d'analyser les expressions clefs du sujet : en particulier celles d'« apparence immédiate « et de « connaissance objective «.    Il n'y a pas de connaissance objective qui ne soit élaborée par un sujet en rapport immédiat avec un objet qui se donne comme un fait. Le vrai problème apparaît alors : comment opérer un remaniement épistémologique qui permette de faire d'un obstacle à l'objectivité le moyen de sa constitution.    2. Ne pas oublier que toute connaissance, même scientifique, a une histoire, qu'elle tend à l'objectivité. Une science ne se réduit jamais à un accueil naïf d'une objectivité déjà constituée : c'est par son élaboration théorique systématique qu'elle produit l'objectivité.    PLAN    I. — Le dualisme de l'apparence et du vrai : l'intellectualisme platonicien.    — L'apparence immédiate et sa variabilité essentielle.    — L'objectivité de la connaissance intellectuelle.    Mais    — Les contradictions du sensible sont origine de la connaissance.    — La dialectique platonicienne est aussi descendante.    II. — La notion de rupture épistémologique.    — Théorie et système.    — Connaissance préscientifique et théorie scientifique.    III. — La dialectique de la théorie et de l'apparence.    — Théorie et expérience.    — L'expérimentation est intuition immédiate d'un fait.    — Mais cette apparence doit être pensée et exprimée objectivement.    Conclusion. — Une connaissance scientifique constitue une objectivité.

« partie du Théétète.

Ce qui, aux yeux de Platon, fait de l'apparence sensible un obstacle à la connaissanceobjective, c'est essentiellement sa variabilité.

Variation en fonction des sujets, variation dans le temps pour unmême sujet, sont autant de preuves que l'apparence sensible ne constitue pas une connaissance de la réalité del'objet. Aussi Platon donne-t-il pour principe fondamental de la constitution d'une connaissance objective la conversion denotre regard vers les Idées, seules réalités dont l'être puisse garantir l'objectivité de la connaissance qui l'énonce.Ainsi se dessine, pour la connaissance, un dualisme opposant la connaissance objective et l'apparence immédiate etsensible des choses. Mais même dans le platonisme, l'apparence immédiate des choses ne constitue pas uniquement un obstacle pour laconnaissance objective. D'une part, il est évident que le projet de connaissance objective ne peut naître qu'au sein de notre rapportimmédiat à l'objet : le sensible fait penser.

Telle est, pour Platon, la fonction des contradictions, de la sensation.

Laconversion vers le monde intelligible ne peut s'opérer que lorsque la dialectique du sensible est mise en évidence : ilfaut que la tendance à l'unification systématique de l'âme constate son impuissance à se réaliser dans le mondesensible pour qu'apparaisse l'orientation nouvelle de la conscience vers les Idées.

L'apparence sensible et lescontradictions qui l'animent est la seule voie qui mène à la conversion. D'autre part si l'Idée constitue une prise intelligible sur le réel, la connaissance objective doit pouvoir rendre compte,au moins d'une façon générale, de la réalité sensible elle-même.

A l'intérieur même du dualisme platonicien,l'apparence immédiate des choses demeure, en dernière analyse, la pierre de touche de la vérité d'une connaissanceobjective.

Tel semble être en effet le sens de la dialectique descendante réalisée dans le processus de la division :le terme dernier de ce processus méthodologique demeure en effet l'articulation du concept défini sur la classed'objet qu'il désigne en exprimant l'Idée. On voit que même dans une philosophie d'inspiration idéaliste et intellectualiste, telle la philosophie de Platon,l'apparence immédiate des choses ne peut être comprise uniquement comme un obstacle à leur connaissanceobjective.

Cette relation première que nous entretenons avec les objets demeure la condition d'existence d'uneconnaissance objective qui, pourtant, n'a pas d'autre but que de s'en détacher. * * * Nous retrouvons le même problème, posé en des termes peut-être plus rigoureux, dans l'épistémologie moderne.

Laconstitution d'une science se produit elle aussi à partir du terrain de l'apparence immédiate et préscientifique dumonde.

Cette appréhension subjective se fait à travers un langage quotidien dont l'équivocité constitue un obstacleradical à la réalisation d'une compréhension systématique de l'objet. C'est par une rupture épistémologique avec cette connaissance simplement empirique du monde qu'une activitéthéorique s'introduit dans le champ de la scientificité. L'objectivité d'une connaissance scientifique se fonde sur la structure systématique de la théorie qui l'organise.

Maiscette unité systématique de la théorie n'est à son tour possible que par la constitution d'un langage spécifique dontles signes tendent à une univocité radicale : seule la transparence d'un langage « artificiel » peut amener à uneconnaissance de l'objectivité de ses énoncés. Ainsi, la physique est devenue science par la réalisation d'une rupture avec l'appréhension simplement empirique dela nature.

Mais cette rupture s'est opérée grâce à l'utilisation systématique du langage mathématique.

Ainsi laphysique galiléenne, dont Descartes fut le continuateur et l'épistémologue, ouvre-t-elle à la fois l'ère de la sciencephysique et celle de la scientificité moderne. Mais une science ne saurait non plus se constituer par la mise hors circuit de toute appréhension immédiate del'objet.

Les premiers pas d'une science ne sauraient négliger d'utiliser les renseignements et les résultats de notreapproche préscientifique du monde. Ici encore, les contradictions, les insuffisances de l'apparence immédiate de l'objet sont une invite à une conversionradicale vers un nouveau type d'intelligibilité.

Le champ de la science s'articule sur celui de la connaissancepréscientifique qui le précède, même si le développement de cette science l'amène à démentir cette connaissanceempirique.

La révolution copernicienne dénonça notre appréhension du mouvement apparent du soleil et l'ensemblede « l'astronomie des apparences », mais les objets dont parle Copernic, le soleil, la terre, etc., n'auraient pudevenir objets d'une science s'ils n'avaient été auparavant révélés par une appréhension immédiate etpréscientifique.

Ainsi Kant, dont on ne peut contester l'hostilité à une compréhension empiriste de la science, devaitcependant avouer que « toute notre connaissance commence avec l'expérience » (Critique de la Raison pure,Introduction 2e édition). * * *. »

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