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Montrez les mérites du peintre du cœur féminin chez Racine, en analysant un des personnages de son théâtre à votre choix.

Publié le 06/03/2011

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racine

   (Comme il n'y a jamais d'examen sans refusés, lesquels ne manquent pas de maudire leurs juges ou tout au moins les sujets, il n'y a guère de sujets de dissertation française donnés au baccalauréat qui n'aient suscité quelques reproches ; mais quelques-uns semblent les provoquer. Quel père de famille, au nom de la morale, n'aura excusé — sinon félicité — son fils refusé au baccalauréat pour n'avoir su parler de Racine, peintre du cœur féminin ? Toutefois de pareils sujets sont donnés, corrigés et, en dépit des réclamations, les refusés restent refusés. Il faut donc se préparer à les traiter, vaille que vaille.

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« Chateaubriand voyait le triomphe de la femme chrétienne.

Chateaubriand admirait également les conseilsqu'Andromaque, décidée à mourir, donne à Céphise chargée d'élever son fils.

Quand celle-ci apprendra l'histoire deses ancêtres au jeune Astyanax, qu'elle lui apprenne « plutôt ce qu'ils ont fait que ce qu'ils ont été ».

Ce qu'ils ontfait, c'est-à-dire leur action, est plus objectif et peut se détacher de leur personne ; ce qu'ils ont été, leurcaractère, est plus subjectif et flatte davantage la vanité de leurs descendants.

Quelle délicatesse féminine dansune telle distinction ! Cette esclave qui sait rester une reine est très femme, car la femme mieux que l'homme maintient l'harmonie entreles contraires.

Ainsi il semblerait qu'Andromaque est étrangère à tout ce qui n'est pas Hector.

Elle l'interroge, il luirépond.

« Voilà ce qu'un époux m'a commandé lui-même ! » (v.

1098).

Sa vie est une hallucination continuelle : « Unépoux qui croit revivre en elle »(v.

1078).

Tout cela ne l'empêche pas d'avoir fort bien observé Pyrrhus : Je sais quel est Pyrrhus.

Violent mais sincère, Céphise, il fera plus qu'il n'a promis de faire, (vers 1085). Elle a pour implorer Hermione, pour détourner les déclarations de Pyrrhus, une habileté féminine qui indique qu'ellen'est pas tout à fait morte au monde.

Quand il »le faudra, ses paroles seront d'une inconsciente, peut-être, maisréelle coquetterie : J'ai fait plus : je me suis quelquefois consolée Qu'ici plutôt qu'ailleurs le sort m'eut exilée, (vers 933). Enfin elle ne serait pas femme si elle n'était pas plus impulsive que l'homme, obéissant à l'instinct, plutôt qu'à laraison.

Ce n'est pas une série de syllogismes, c'est la vision de la dernière nuit de Troie qui la décide à refuser lamain de Pyrrhus.

Aussi, comme toutes les femmes, elle entend moins ce qu'on dit que ce qu'on ne dit pas.

Lesparoles sont pour elle sans importance.

Elle s'écriera : « Malgré lui-même enfin — c'est-à-dire, malgré ses paroles —je l'ai cru magnanime » (vers 942) : et elle ne s'est pas trompée. Nous terminerons sur ce dernier trait, si féminin, et que nous retrouverons, plus accentué encore, chez Hermione. Hermione n'a pas la sensibilité d'Andromaque.

Dure, hors Pyrrhus, elle n'a qu'indifférence pour les autres ; mais c'estune indifférence féminine qui méprise en Andromaque une rivale et utilise en Oreste un instrument.

Notez ce point.Une femme ne peut guère agir directement ; aussi, avant de faire la moindre chose, à plus forte raison un crime, parelle-même, elle songe d'abord à pousser le bras d'un homme. Hermione pleure, elle aussi, mais moins ; très vite elle songe à se venger et à tuer. Hermione est fière, d'une fierté de femme et même de femme du XVIIe siècle.

Habituée par la courtoisie et lapréciosité à être encensée comme une divinité, elle considère comme un acte contre-nature d'aimer sans êtreaimée, et elle ne saurait en soutenir l'affront devant Oreste. Amante, comme toute les jeunes filles, elle avait eu son idéal, et son malheur fut de le découvrir en Pyrrhus : Les exploits de son père effacés par les siens, Les feux que je croyais plus ardents que les miens... T'es-tu fait raconter Le nombre des exploits...

Mais qui les peut compter..

Ce prince dont mon cœur se faisaitautrefois Avec tant de plaisir redire les exploits, A qui même en secret je m'étais destinée Avant qu'on eut conclu cefatal hyménée (vers 1426). Sincère, elle reconnait qu'elle a eu tort d'avouer trop aisément son amour à Pyrrhus et de ne pas imiter les dédainsdes héroïnes de roman.

Elle aurait dû « armer ses yeux d'un moment de rigueur ».

(v.

459).

Trop sincère pour êtrecoquette longtemps, elle saura néanmoins dire quelques paroles aimables à Oreste : Mais qui sait si depuis Je n'ai point en secret partagé vos ennuis....

Enfin qui vous a dit que, malgré mon devoir, Jen'ai point quelquefois souhaité de vous voir ? Et toujours Racine met en lumière le côté féminin du sentiment.

Ainsi, c'est l'homme qui fait les avances, les visites ;la femme est forcée d'attendre, elle souhaite de voir...

« Viendra-t-il ? », dira Bérénice.

L'homme! tout au plus peutdire : « Serai-je bien reçu ? » car il va. Moins femme par la dureté, la franchise, Hermione est très femme par les inconséquences.

Elle se voit abandonnéeet espère contre toute espérance : « Mais si l'ingrat rentrait dans son devoir ? » (v.

436).

Aussi elle accepte sansdoute ni crainte le retour de Pyrrhus : « Qui l'eût cru que Pyrrhus ne fut pas infidèle ! » (v.

810).

Elle veut bien direà Oreste qu'elle est trahie, mais s'irrite, dès qu'il 'le lui redit : « Qui vous! l'a dit, Seigneur, qu'il me méprise ! » (v.550).

Oreste pourrait répondre : « Vous-même », comme, lorsqu'après le meurtre de Pyrrhus, elle prononce le. »

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