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LA MORT DE MAROT

Publié le 29/06/2011

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marot

En septembre 1542 il passait en Savoie et demandait au président du conseil provincial, Pellisson, de vouloir bien l'accueillir. Sans résultat, semble-t-il, car en décembre il se réfugiait à Genève, geste significatif, — chez Calvin. Il était temps : en décembre la Sorbonne condamna son œuvre. Mais le poète était loin. Il avait été accueilli ait bord du lac Léman par une épître austère d'Antoine Malingre, un peu plus tard par des vers aimables d'Eustorg de Beaulieu qui résidait depuis 1537 non loin de la ville de Calvin. Il conta ses malheurs en un Coq à l'Ane et line épître au médecin Le Coq qui l'avait jadis soigné i il y disait sa joie d'être à Genève. Joie de peu de durée...

marot

« bon cœur et criblait de flèches cruelles.En mai 1531, il fut victime d'un vol important, puis très gravement malade.

Son valet disparut une belle nuit,dérobant l'argent, les habits et le cheval de son maître, et ce juste en un temps où par hasard la bourse de Marotavait « grosse apostume ».

Au lendemain de cette affaire désagréable le poète eut une « longue et lourde maladie »qui dura trois bons mois et lui laissa « toute eslourdie la pauvre teste » ; il ne se releva — L'estomac sec, le ventre plat et vague, — que grâce aux bons soins de trois médecins, Messieurs Braillon, Le Coq, Akakia.

qui surent le garder « d'aller jusqu'àquia...

» Il se retrouva convalescent, mais fort désargenté.

Tout naturellement il se retourna vers le Roi.

Non pourlui demander, mais pour lui emprunter quelqu'argent, sous la caution des « princes lorrains », le cardinal de Lorraineet le duc de Guise, argent destiné à couvrir les dépenses engagées par lui pour les bâtiments qu'il avait récemmentconstruits en ses châteaux imaginaires de « Clément » et de « Marot », argent qu'il pensait rendreQuand on verra tout le monde content,ou lorsque cessera la gloire du Roi.

Voici probablement la meilleure pièce qu'ait écrite Marot.

Elle affirmait sa maîtrise; elle atteignit son but ; elle fut remise au Roi pour ses étrennes, — geste habile, le IER janvier 1532.

François Ier,amusé, envoya le 13 février 1532 deux cents écus, somme importante, à son poète.

Par ailleurs, Marot remerciaitses médecins et ses amis (que sa maladie avait inquiétés) par d'amusantes épigrammes, d'un tour très varié, parune épître émue et charmante à Vignals, Toulousain, et par une épître assez ironique au lieutenant Gontier qui luiavait écrit en vers.

Il répliquait enfin, vertement, à un quidam qui lui reprochait la manière dont il avait parlé desGascons dans son épître au Roi : courte pièce, mordante, où éclate son aptitude à la riposte rapide et cruelle.Sa maladie avait ému toute la cour, et surtout les poètes, ses amis ou ses rivaux.

Les poètes néo-latins notammentlui avaient dédié force pièces louangeuses, et Marot, flatté, s'amusait, en leur répondant à jouer avec esprit sur laressemblance de son nom au surnom, Maro, de Virgile.

Il était, à la cour, une sorte de personnage, protégé par cesgrands seigneurs qu'étaient les princes lorrains ou Montmorency qui recevra bientôt de lui un recueil manuscritd'œuvres inédites, par de moins grands personnages aussi mais qui savaient l'aider, tel le « lecteur » du Roi, JacquesColin.

C'est qu'il ne ménageait à personne les compliments habiles et les flatteries.

C'est surtout qu'avec Mellin deSaint-Gelais (et plus que lui peut-être) il faisait figure de chef de la poésie française : les grands Rhétoriqueurs sontmorts, Crétin en 1525, Jean Marot en 1526, Jean d'Auton en 1528 ; seul subsiste, perdu en son Poitou, JeanBouchet.

Marot l'emporte — et de loin — sur ses confrères, qu'il s'agisse des médiocres poètes néo-latins ou despoètes français, ses « disciples gentilz», Claude Chappuys, Victor Brodeau, Charles de Sainte-Marthe, Borderie,Charles Fontaine, voire Bonaventure des Périers.On ne s'étonne pas, dès lors, que ce soit le moment choisi par le poète pour grouper, en 1532, sous un titremodeste : l'Adolescence clémentine, les vers qu'il avait composés depuis 1515.

Recueil incomplet : L'Enfer n'y figurepas, ni l'épître à Lyon Jamet, et pour cause ; mais qui présente, en deux parties, l'essentiel de son œuvre à cettedate.

Pourquoi cette publication à ce moment précis ? C'est sans doute parce que, la notoriété venue, Marotdésirait parer aux contrefaçons et donner de ses vers une édition qu'il pût avouer.

Le mince volume, imprimé parl'éditeur Roffet, parut le 12 août ; il comprenait deux parties : L'Adolescence, groupant les poèmes antérieurs à1526, puis d'Autres Œuvres faides depuis Veage de son adolescence.

L'Adolescence contient surtout les œuvres dudisciple des Rhétoriqueurs : on y trouve, avec les traductions rédigées avant 1525, 13 épîtres seulement (celles deMaguelonne, du dépourvu et du camp d'Attigny par exemple, mais aussi les épîtres au Roi), 18 complaintes etépitaphes, 14 ballades, 4 chants royaux, 8 dizains, 5 blasons, 7 envois, 58 rondeaux, des chansons.

De quoi flatterles mânes du bon Crétin, mais non révéler le vrai Clément Marot.

Le livre était recommandé par trois courtes pièceslatines signées de trois humanistes : Nicolas Béraud, Pierre Brisset et l'illustre Geoffroy Tory.

Il eut un succèsimmédiat.

Une seconde édition augmentée de dix pièces sortait des presses à la fin de 1532 ; elle était suivie dedeux éditions à Paris en 1533, de cinq éditions publiées à Paris et à Lyon de 1534 à 1535.

Et ce fut un concert delouanges, à Paris et en province : le vieux Roger de Collerye, Mellin de Saint- Gelais, Charles de Sainte-Marthe, lesToulousains Vignals, Jean de Boyssonné, Guillaume de La Perrière, et Antoine Macault, et Salmon Macrin saluaient enmaître Clément un émule de Virgile.

Simplement...Marot n'abdiquait pas pour autant son humeur indépendante.

Peu de semaines avant de publier son livre, en mars1532, il avait de nouveau mangé du lard en carême et ne dut son salut qu'à la reine de Navarre : elle fit intervenirun de ses familiers, Etienne Clavier, grâce à qui le poète déjà emprisonné fut relâché, et suspendre, avant qu'ellen'allât trop loin, la procédure.Marot fut alors du grand voyage qui, au printemps de 1533, conduisit le Roi et la cour vers le Languedoc et laProvence, puis les ramena en Champagne et en Lorraine.

Il ne devait revenir à Paris qu'en février 1534.

Il séjourna àToulouse où il fut accueilli avec honneur par le juriste Jean de Boyssonné, par le poète Vignal, lauréat des jeuxfloraux, et par le polygraphe La Perrière, heureux de faire honneur à leur compatriote — et Marot les invita à dîner.Par Narbonne la cour gagna Avignon, et Marot s'en fut en pèlerinage au tombeau de Laure de Noves, nouvellementdécouvert : occasion pour lui d'évoquer le souvenir de Pétrarque dont il adapta en français les Visions et traduisitsix sonnets sur la mort de Laure.

C'est peut-être durant ce voyage qu'il échangea quelques vers avec la reine deNavarre au sujet d'une de ses suivantes, Hélène de Tournon, et ce sont quelques-unes de ses épigrammes les plusdélicates.

En septembre 1533, il donnait une édition des poésies de Villon, affirmant ainsi la persistance de ses goûtspour la tradition médiévale.

Peu de temps après il publiait, coup sur coup, la Suite de L'Adolescence et sa traductiondu premier livre des Métamorphoses.Son talent s'affirme avec vigueur ; il fait figure de chef d'école ; il a la faveur du Roi.

Son étoile, brusquement, vapâlir.

L'année 1534 va le voir partir pour l'exil.. »

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