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La nouvelle economie et la mesure de la croissance

Publié le 07/10/2012

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045-071 - Comparaisons 04/05/2001 13:44 Page 45 COMPARAISONS INTERNATIONALES La nouvelle économie et la mesure de la croissance François Lequiller* Dans le contexte de l'essor d'une nouvelle économie statistiquement difficile à mesurer, un doute a été jeté à la fois sur la croissance en Europe et sur sa comparabilité avec celle des États-Unis. On explore ici les problèmes de mesure en France. Les données à prix courants apparaissent fiables, même si l'information par type de produit devient de plus en plus délicate à élaborer. Contrairement à une idée bien établie, les différences dans la mise en application des fameuses méthodes hédoniques ont un impact faible sur données françaises. Il y a, en revanche, une différence de traitement entre la France et les États-Unis - et entre plusieurs pays européens et les États-Unis -, sur le partage entre dépenses finales et dépenses intermédiaires en produits informatiques. Les États-Unis comptabilisent plus de formation brute de capital fixe en logiciels, toutes choses égales par ailleurs, ce qui entraîne une croissance mesurée du PIB mécaniquement plus forte sur les dernières années. Cet écart pourrait résulter de processus industriels différents, mais on ne peut exclure qu'il pourrait ne provenir que de l'application d'une convention statistique différente. Dans ce cas, on pourrait parler d'un biais de comparabilité. La méthode utilisée majoritairement en Europe - qui préserve la comparabilité intraeuropéenne -, maintient une cohérence avec les résultats de la comptabilité privée, tandis que la méthode américaine s'en éloigne. L'utilisation du produit intérieur net au lieu de l'habituel produit intérieur brut améliore la comparabilité avec les États-Unis. À l'aune du produit intérieur net, le différentiel de croissance entre la France et les États-Unis est réduit d'un demi point en 1999. *François Lequiller est chef du département des Comptes nationaux à l'Insee. Les noms et dates entre parenthèses renvoient à la bibliographie en fin d'article. ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 339-340, 2000 - 9/10 45 045-071 - Comparaisons 04/05/2001 13:44 Page 46 D e nombreux économistes sont convaincus que la nouvelle économie (1) a expliqué en partie la croissance exceptionnellement soutenue, durable et non inflationniste de l'économie américaine des années 90. Le débat s'est ensuite porté sur l'Europe. Allaitelle aussi profiter d'un boom nouvelle économie ? Le présent article ne vise pas à répondre à cette question (2). Il vise à éclaircir un débat dans le débat, portant sur les insuffisances éventuelles de la mesure de la nouvelle économie et sur l'impact de ces insuffisances sur la mesure de la croissance globale. Ce débat sur la mesure n'est ni récent ni uniquement français. Il a été sous-jacent à toutes les études sur la croissance et la productivité. Aux États-Unis, il date au moins des années 80. Il a été relancé implicitement dans les années 90 par les conclusions de la commission Boskin qui critiquait la surestimation de l'inflation (Boskin et al., 1996). En effet, qui dit surestimation de la hausse des prix dit sousestimation de la croissance. Il est enfin revenu à la surface dans les dernières années aux États-Unis, avec les travaux sur la fin du paradoxe de Solow (3). Ce débat a atteint l'Europe. Des économistes, en France (Touati, 2000) et au Royaume-Uni (Wadhwani, 2000a et 2000b), ont exprimé l'idée, largement reprise par la presse, d'un biais important sur la mesure de la croissance. On a cité une sous-estimation de 0,4 ou 0,5 % par an, et jusqu'à 0,9 % par an. Comme la Banque Centrale Européenne (BCE) et la Banque d'Angleterre ont des politiques monétaires déterminées par des seuils absolus (inflation inférieure à 2 %) et que les analystes financiers comparent les croissances américaines et européennes pour arbitrer sur les monnaies, le débat n'est pas purement intellectuel. Ce débat a une forte composante de comparaison internationale. Si biais il y a, est-il plus ou moins important en Europe qu'aux ÉtatsUnis ? Est-il plus ou moins important suivant les pays européens ? Particulièrement intéressant (4), ce développement implique des comparaisons internationales très rigoureuses qui, pour certaines, vont au-delà de cet article. L'Insee prépare pour la mi-2001 une comparaison fouillée entre les données françaises et américaines qui ira plus avant dans cette direction. Cependant, le présent article apporte des premiers éléments de réponse. 46 L'instabilité des produits TIC Le récent rapport du Conseil National de l'Information Statistique (Cnis) sur l'observation statistique des Technologies de l'Information et de la Communication (TIC) met en évidence le dilemme de la construction de séries statistiques qui supposent « un environnement stable « (Roussel et al., 2001). Or, l'économie progresse en créant de l'instabilité : disparitions/apparitions de produits, de marchés, d'entreprises, fusions, absorptions, modifications réglementaires, etc. Les produits des TIC et la nouvelle économie en sont les exemples récents les plus criants : startups, boom extraordinaire de la téléphonie mobile, explosion des jeux vidéos, de l'Internet, de la télévision par satellite, etc. Tout cela est instable et particulièrement difficile à mesurer, car constitué de nouveaux produits et surtout de nouveaux services, dont la quantité est traditionnellement toujours plus difficile à mesurer. Doit-on pour autant renoncer à construire des séries statistiques ? Non, et l'Insee les construit, y compris pour les TIC. Mais il serait vain de nier que la statistique est mal à l'aise dans ce contexte car ses procédures reposent sur la stabilité des unités (nomenclatures, pondérations, échantillons constants, etc.), ses réactions sont (parfois judicieusement) lentes et ses moyens limités. L'exemple de l'indice des prix à la consommation, largement utilisé en comptabilité nationale, illustre parfaitement la contradiction. Pour calculer un bon indice de prix, il faut comparer le prix de produits identiques dans le temps alors que, en pratique, il y a une multitude de produits qui changent. Ainsi, pour prendre l'exemple de l'informatique, les statistiques de relevés de prix montrent que, de décembre d'une année à décembre de l'année suivante, il n'y a aucun micro-ordinateur identique dans le panier des relevés de prix. Au contraire, la plupart des relevés de prix sur les micro-ordinateurs ont été changés deux fois et certains plus de trois fois : le taux de « changement « des relevés de prix dépasse 300 % (Basher et Lacroix, 1999). 1. Voir la définition retenue dans la partie « L'instabilité des produits TIC «. 2. Cette question est traitée, par exemple, dans Cette et al. (2001), Cohen et al. (2000), MINEFI (2000) et Schreyer (2000a). 3. Cf. pour ces travaux Corrado et Slifman (1999), Fraumeni et al. (1999), Griliches (1994), Gullickson et Harper (1999). Le paradoxe de Solow tenait dans la formule suivante : « On voit des ordinateurs partout sauf dans les statistiques «. En effet, les statistiques, jusque dans les années récentes aux États-Unis, ne montraient pas d'augmentation de la productivité liée à la généralisation des ordinateurs. 4. Cf. Deutsche Bundesbank (2000) et Grant (2000). ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 339-340, 2000 - 9/10 045-071 - Comparaisons 04/05/2001 13:44 Page 47 Le défi de la statistique est justement de trouver une méthode pour continuer de comparer ces données et d'en tirer des séries temporelles en glissement annuel, même, et peut-être surtout, dans ces situations instables. La question d'un biais de mesure de la croissance liée à l'explosion de la nouvelle économie est donc tout à fait pertinente. Définissons d'abord ces TIC. Tous les auteurs essaient de faire référence à une définition internationale commune, issue de l'OCDE. Mais le sujet est chausse-trappe, parce que l'information n'existe pas toujours dans chaque pays sur chacun des postes de nomenclature retenue, et on peut être amené en pratique à retenir une définition différente de celle voulue au départ. Ainsi, les rapports ou dossiers TIC de la direction générale de l'industrie (BIPE, 2000), de l'Insee (Berthier, 2000) et du Conseil d'Analyse Économique (Cohen et al., 2000) donnent une part des TIC dans le PIB américain variant de 4,4 % à pratiquement le double, 8,2 %, en passant par 6,7 %. Le premier chiffre est relatif à 1995 et les deux autres à 1998. Les différences proviennent surtout du champ couvert. Pour le chiffre du bas de la fourchette, les services informatiques ont été exclus de la comparaison. Le chiffre du haut de la fourchette correspond à une définition élargie, comprenant les activités audiovisuelles. L'estimation pour la France est plus convergente : de 4,4 % à 5,0 %, suivant les mêmes sources. Le poids de ce secteur reste cependant délicat à évaluer, même pour la France, notamment du fait d'une difficulté croissante à classer les activités des entreprises dans les postes d'une nomenclature qui peine à suivre les innovations techniques. La définition des TIC la plus souvent utilisée est donnée sous la forme d'une liste d'activités en nomenclature européenne (cf. tableau 1). Elle recouvre trois filières : l'informatique, avec la fabrication des ordinateurs et les logiciels, les télécommunications, qui comprennent les réseaux, donc l'Internet, et enfin l'électronique. Une définition alternative, élargie aux activités dites de « contenu «, a été proposée par Rouquette (1999). Tableau 1 Une définition extensive des TIC Code NAF (1) Code TES (2) Filière Activité 30 GE31 Informatique Machines de bureau et matériel informatique 31.3 HF61B Télécommunications Fils et câbles isolés 32.1 GF62 Électronique Composants électroniques 32.2 GE33 Télécommunications Appareils d'émission et de transmission 32.3 GC45 Électronique Appareils de réception, d'enregistrement ou reproduction du son et de l'image 33.2 GE35 Électronique Instruments de mesure et de contrôle 33.3 GE35 Électronique Équipements de contrôle des processus industriels 51.6G Partie de GJ20 Informatique Commerce de gros de machine de bureau et de matériel informatique 71.3E HN31D Informatique Location de machines de bureau et matériel informatique 64.2 GN12 Télécommunications Télécommunications 72 GN21 Informatique Activités informatiques (i.e. logiciels) 1. Adaptation française de la nomenclature européenne. 2. Nomenclature de la comptabilité nationale française. Source : NAF et TES, Insee. ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 339-340, 2000 - 9/10 47 045-071 - Comparaisons 04/05/2001 13:44 Page 48 Cette définition extensive des TIC est appropriée à l'objet de cet article. Mais la question posée dépasse les insuffisances de la mesure de la production des produits des TIC euxmêmes et s'étend à tous les phénomènes qui leur sont liés. Les problèmes de mesure affectent ainsi l'ensemble des activités, parfois banales, utilisant des TIC. L'étude devra donc être beaucoup plus générale et concerner des branches non TIC, comme par exemple le système bancaire. À l'inverse, cet article ne cherchera pas à discuter de la précision avec laquelle on peut mesurer le poids des TIC dans l'économie : on laisse de côté les problèmes de classement sectoriel. On se reportera pour cela au rapport du Cnis déjà cité, qui explique la difficulté pour les statisticiens et les entreprises de la nouvelle économie de classer leur activité au sein de la nomenclature actuelle. On ne s'étendra pas non plus sur des phénomènes annexes à la nouvelle économie, comme les stock options, qui n'ont d'ailleurs pas d'impact sur la mesure du PIB. Enfin, on restera dans les limites des définitions communément acceptées du système international de comptabilité nationale. La mesure du PIB est inévitablement conventionnelle. D'où l'importance de conventions stables, pour comparer dans le temps, et internationales, pour comparer entre pays (cf. encadré 1). Encadré 1 LES DÉFINITIONS DU SYSTÈME INTERNATIONAL DE LA COMPTABILITÉ NATIONALE Si biais il y a sur la croissance, on ne peut le mesurer que par rapport à un concept de référence du PIB, défini par le système international de comptabilité nationale. Dans ce système, le PIB est égal à la dépense finale intérieure totale plus les exportations moins les importations. Il ne comprend pas les dépenses intermédiaires. D'où l'une des difficultés de mesure : il faut partager les dépenses finales et intermédiaires des agents économiques. Lorsqu'il s'agit des ménages, il n'y a pas de problème conceptuel : toutes les dépenses des ménages qui sont faites en dehors de leurs éventuelles activités d'entrepreneurs individuels et de possesseurs de logements sont en effet entièrement finales et donc incluses dans le PIB. Il reste cependant un problème statistique lorsque les données de chiffre d'affaires ne distinguent pas les clients entreprises des clients ménages. On en verra un exemple concret dans cet article quant à la téléphonie mobile. De leur côté, les dépenses des entreprises doivent être soigneusement partagées entre consommations intermédiaires (qui ne rentrent pas dans le PIB) et investissement, appelé formation brute de capital fixe (FBCF), (qui y rentre). Le cas des administrations est spécifique : l'ensemble de leurs dépenses est inclus dans le PIB car leur production (estimée comme la somme des coûts, y compris des consommations intermédiaires) est entièrement constituée d'emplois finals. Les erreurs de partage entre leurs dépenses finales et intermédiaires n'ont qu'un impact limité sur le PIB, via la consommation de capital fixe. De nombreux débats ont eu lieu parmi les comptables nationaux et les économistes sur le partage des dépenses des entreprises et, a fortiori, sur la notion de capital fixe. À l'origine, n'étaient comptées comme capital fixe que les dépenses portant sur les biens dont la durée de vie est supérieure à un an. Aucun service ne pouvait être capitalisé. Cette définition n'étant pas assez précise pour distinguer la partie du petit matériel qui constitue des consommations courantes, le système 48 SEC 95 de l'Union européenne y avait ajouté un seuil : il faut que la dépense soit supérieure à 500 euros pour être du capital fixe ; en-dessous, c'est de la consommation intermédiaire. Mais tout ceci laissait de côté l'investissement immatériel. Devant l'importance croissante des investissements immatériels dans le processus productif, le SCN 93, système mondial, et sa version européenne, le SEC 95 (la « base 95 « pour les comptes nationaux français), ont étendu le champ du capital fixe à certains d'entre eux. Ainsi, les achats ou la création de logiciels, les dépenses de prospection pétrolière, les oeuvres artistiques ou littéraires originales sont maintenant inclus dans la FBCF, dont la définition est aujourd'hui très proche des conventions retenues par la comptabilité privée pour mesurer les immobilisations. En revanche, malgré une vive pression des comptables nationaux français au sein du groupe de travail international (Muller, 1990), les dépenses de recherche-développement restent hors champ (1). La définition du capital fixe retenue dans cet article est celle qui vient d'être décrite. Contrairement à ce qui a été dit (Touati, 2000), les dépenses de recherchedéveloppement sont exclues par le système international de comptabilité nationale, dans tous les pays, y compris les États-Unis. Si le PIB contenait les dépenses de recherche-développement et qu'elles croissaient plus vite que le reste de l'économie, le PIB progresserait plus vite. Cette évolution serait vraie aussi bien aux États-Unis qu'en France, et même, d'après les chiffres cités par Didier et Martinez (2000), probablement beaucoup plus aux États-Unis qu'en France dans la période récente. 1. En fait, l'intégration des logiciels dans la FBCF fait qu'implicitement les dépenses internes de recherche-développement des entreprises de logiciels sont incluses dans le PIB. ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 339-340, 2000 - 9/10 045-071 - Comparaisons 04/05/2001 13:44 Page 49 La fiabilité des données à prix courants L e dispositif de suivi statistique de l'activité des entreprises à l'Insee est à trois étages (cf. tableau 2). Au premier étage on trouve les données infra-annuelles : elles sortent le plus rapidement et sont utilisées pour les comptes nationaux trimestriels. Elles comportent principalement les indices de chiffres d'affaires mensuels calculés à partir des déclarations adressées à la direction générale des impôts pour la collecte de la TVA (indices dits CA3). Le deuxième étage est constitué par les enquêtes annuelles d'entreprises (EAE) et les premières exploitations d'un échantillon de données fiscales. Le troisième étage provient de l'exploitation des déclarations fiscales exhaustives des entreprises . La source la plus complète pour évaluer le PIB à prix courants est constituée par ce troisième étage. Les déclarations fiscales des entreprises sont exploitées au cours de l'année A+2, puis confrontées aux enquêtes annuelles d'entreprises (voir infra) et intégrées dans la base Suse de l'Insee. Cette base comporte 2,5 millions d'entreprises. Elle est utilisée pour le calcul du compte définitif des comptes nationaux publié en avril A+3, avec l'aide du Système Intermédiaire d'Entreprise (SIE). La qualité de cette source repose sur une déclaration fiscale obligatoire, utilisant un cadre comptable com- mun (le Plan Comptable Général), qui en fait la source la plus exhaustive sur l'activité globale des entreprises, couvrant tous les secteurs, industrie et services confondus. Seuls les secteurs financiers n'y figurent pas, mais ils sont couverts par les statistiques de la Commission Bancaire et de l'autorité de tutelle des assurances, que l'Insee exploite en coordination avec la Banque de France. Un traitement particulier pour les petites entreprises Les comptables nationaux opèrent un redressement sur ces données pour tenir compte d'absences éventuelles, en l'occurrence celles de petites entreprises n'étant pas encore, pour des raisons administratives diverses, enregistrées par la DGI (5). Pour effectuer ce redressement, on confronte le nombre d'entreprises de moins de 20 salariés enregistrées dans le répertoire administratif Sirene avec celui du SIE, par secteur d'activité. Ce répertoire recense exhaustivement (car c'est une obligation légale) les entreprises, même individuelles. Lorsque le nombre d'entreprises du répertoire Sirene, préalablement corrigé des « fausses actives «, 5. Il ne s'agit pas ici d'une correction pour sous-déclaration ou « fraude «, mais d'absence due à des retards ou à des cas spéciaux. Les comptes nationaux corrigent aussi de la fraude mais à une étape ultérieure. Tableau 2 Suivi statistique des entreprises : un dispositif à trois étages Comptes nationaux Étage Date de publication Source Troisième Année A, Troisième évaluation, (compte définitif) A + 28 mois Données exhaustives et redressées sur les entreprises (SIE : 2 500 000 entreprises) Deuxième Année A, Deuxième évaluation (compte semidéfinitif) A + 16 mois Enquêtes annuelles d'entreprises Échantillon de comptes d'entreprises (400 000 entreprises) Trimestre T et première évaluation de l'année A T + 60 jours, révisé en T + 100 jours Indices de chiffres d'affaires Premier Source : Insee. ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 339-340, 2000 - 9/10 49 045-071 - Comparaisons 04/05/2001 13:44 Page 50 est sensiblement plus élevé, on redresse globalement le chiffre d'affaires du secteur en supposant que les entreprises manquantes ont le chiffre d'affaires moyen des petites entreprises présentes. Cette base et cette procédure de redressement, devraient mettre les comptes nationaux dits définitifs, publiés en A+3, à l'abri de toute sous-estimation des chiffres d'affaires globaux et activité des petites entreprises, comme les startups (cf. encadré 2). Au travers de ces statistiques exhaustives, on mesure d'ailleurs bien l'explosion des TIC enregistrée par les comptes nationaux annuels (cf. graphique I). Le volume de la valeur ajoutée des TIC croît même beaucoup plus vite que la même série à prix courants, du fait de la baisse de leurs prix. Les statistiques infra-annuelles, disponibles plus tôt, suivent moins bien l'activité des petites entreprises. Cependant, les indices mensuels de chiffre d'affaires construits par l'Insee et largement utilisés dans les comptes nationaux en attendant les statistiques exhaustives, sont basés sur des déclarations administratives très complètes. Presque toutes les entreprises imposées au régime dit réel normal, soit plus de 550 000 entreprises représentant 96 % du total du chiffre d'affaires, remplissent mensuellement une déclaration de TVA (CA3) dans laquelle figure leur chiffre d'affaires. Seules les très petites entreprises, au régime fiscal dit simplifié ou dont le chiffre d'affaires n'excède pas 5 MF, ne font qu'une déclaration annuelle (CA12). Sur cette population, l'Insee tire un échantillon de 50 000 entreprises pour l'industrie et de 72 000 pour le commerce et les services, à partir desquelles il construit cet indicateur. Celui-ci peut être affecté par une sous-estimation des créations car l'Insee ne prend en compte que les entreprises de l'échantillon pour lesquelles on dispose de données exploitables le mois courant et le même mois de l'année précédente. Cependant, le biais n'est pas dans un seul sens, des surestimations peuvent aussi intervenir si les entreprises pérennes reprennent les affaires d'entreprises disparues ne figurant pas dans l'échantillon. Une nouvelle procédure prenant mieux en compte la démographie des entreprises est en cours de mise en place. Ces indices retracent des chiffres d'affaires globaux d'entreprises et ne distinguent donc pas les produits si l'entreprise a une multi-acti- Encadré 2 STARTUPS, PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE ET COMPTABILITÉ NATIONALE On parle beaucoup des startups informatiques, même si le marché est beaucoup moins florissant depuis le retournement du Nasdaq au deuxième trimestre 2000. Ancienne startup, Microsoft, dont les effectifs ont été multipliés par 9 en 10 ans, est la « success story « la plus éblouissante. On pourrait même dire que Bill Gates est le véritable créateur de la nouvelle économie, car sans PC et Windows, pas de Net économie. Il ne faut pas oublier pour autant que les entreprises plus anciennes (IBM, HP, DEC, Bull) restent les poids lourds du secteur en termes d'effectifs et donc d'activité (BIPE, 2000). Il y a surtout des anecdotes (souvent boursières) plutôt que des statistiques sur le phénomène des startups. Une rare statistique est israélienne (OCDE, 2000). Israël a, en effet, connu un boom de ces activités, qu'on pourrait assimiler à de la R&D exportée : les startups israéliennes créent un service ou un logiciel informatique ; puis l'entreprise et son logiciel sont vendus à un gros investisseur, généralement américain. L'institut statistique israélien estime à 2 % du PIB, l'activité de ces unités, mais en soulignant la difficulté de sa mesure. Comme expliqué ci-dessous, il faut d'abord estimer leur production pour compte propre sur la base de son coût car elles ne vendent rien pendant deux ans au moins, le temps de réaliser la recherche et le développement du logiciel. Dans la plupart des cas, la vente du logiciel intervient ensuite, en même temps que celle de l'entreprise elle-même. La propriété intellectuelle joue un rôle croissant dans cette économie digitale du fait de son immatérialité. Une des conséquences (et une des difficultés, pour les producteurs) de ce...

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