Devoir de Philosophie

L'OEUVRE DE PROUST

Publié le 05/04/2011

Extrait du document

proust

     L'Œuvre de Marcel Proust se compose essentiellement d'un livre immense, dont le titre général est : A la Recherche du Temps Perdu. Le premier volume parut en 1913, le dernier en 1926, après la mort de l'écrivain. Il avait publié, en 1896, un recueil de contes et d'essais, Les Plaisirs et les Jours; on retrouva, après 1919, les divers articles, préfaces et portraits épars dans les journaux et les revues, et on en fit deux volumes : Pastiches et Mélanges et Chroniques. Enfin, depuis sa mort, une vingtaine de recueils è de lettres, présentées et commentées, ont été publiés par divers éditeurs. è La Recherche du Temps Perdu, Pastiches et Mélanges, Chroniques et Les è Plaisirs et les Jours sont édités par Gallimard (la raison sociale N. R. F. } Nouvelle Revue Française n'existant plus depuis 1944).

   L'ouvrage comprend sept divisions : Du côté de chez Swann; A l'Ombre des Jeunes Filles en fleurs ; Le côté de Guermantes ; Sodome et Gomorrhe ; La Prisonnière ; Albertine disparue ; Le Temps Retrouvé. Chacune de ces divisions comporte plusieurs volumes de 250 pages environ.

proust

« Au-dessus de ce qu'on appelle généralement intelligence3 les philosophes cherchent à saisir une raison supérieure,une et infinie comme le sentiment, à la fois objet et instrument de leurs méditations. Cet objet et instrument : la connaissance de l'être en vérité, c'est la Mémoire seule qui peut le lui apporter.

Mais laMémoire involontaire, la Mémoire inconsciente, celle qui affecte la sensibilité externe et interne, qui n'est pasmécanisée ni solidifiée par la raison, par l'exercice conscient de l'intelligence.

Seule, cette mémoire restituel'authenticité.

Elle doit s'exercer après que l'oubli a mis le souvenir dans un refuge inviolé où se conserve « sanetteté et sa fraîcheur » : C'est grâce à cet oubli seul que nous pouvons de temps à autre retrouver l'être que nous fûmes, nous placer vis-à-vis des choses comme cet être Vêtait, souffrir à nouveau parce que nous ne sommes plus nous, mais lui, et qu'ilaimait ce qui nous est maintenant indifférent.

(J.

F., 2.) Pour exprimer ce que lui suggère la résurrection de pensées, de sentiments, de sensations, de faits, due à lamémoire, Proust procède par analogie: C'est le moyen le plus sûr, pour lui, de serrer l'idée du plus près possible et dela dépouiller peu à peu des voiles obscurcissants.

En cela il se rapproche de la magie évocatrice et incantatoire, sapersonne servant de « sujet », de support vivant, prêtant sa substance ultrasensible à l'expérience. Il a décrit — et c'est une page devenue célèbre — le phénomène qui bouleversa un jour sa vie et transforma pour luil'univers : le choc émotif, matériel, concret, qui déchaîna soudain les associations d'idées, qui fit surgir le Passédisparu, et qui mit en branle l'intelligence, afin qu'elle pût assister à ce réveil victorieux, qu'elle eût le moyen decanaliser, d'endiguer, d'épaissir le flot abondant et dévergondé des souvenirs, et qu'elle ne leur permît plus dedisparaître. Voici cette page.

On le verra, le « traumatisme » catalyseur se présente comme une émotion prémonitoire (1),suivie d'une incontestable révélation; c'est une figuration métaphysique de la Mémoire : La madeleine et la tasse de thé ...

Un jour d'hiver, comme je rentrais à la maison, ma mère voyant que j'avais froid, me proposa de me faire prendre,contre mon habitude, un peu de thé.

Je refusai d'abord et, je ne sais pourquoi, je me ravisai.

Elle envoya chercherun de.

ces gâteaux courts et dodus appelés petites madeleines, qui semblent moulés dans la valve rainurée d'unecoquille de Saint-Jacques.

Et bientôt, machinalement, accablé par la morne journée et la perspective d'un tristelendemain, je portai à mes lèvres une cuillerée du thé où j'avais laissé s'amollir un morceau de madeleine.

Mais àl'instant même où la gorgée mêlée des miettes du gâteau toucha mon palais, je tressaillis, attentif à ce qui sepassait d'extraordinaire en moi.

Un plaisir délicieux m'avait envahi, isolé, sans la notion de sa cause.

Il m'avaitaussitôt rendu les vicissitudes de la vie indifférentes, ses désastres inoffensifs, sa brièveté illusoire, de la mêmefaçon qu'opère l'amour, en me remplissant d'une essence précieuse : ou plutôt cette essence n'était pas en moi, elleétait moi.

J'avais cessé de me sentir médiocre, contingent, mortel.

D'où avait pu me venir cette puissante joie ? ...

Je pose la tasse et me tourne vers mon esprit.

C'est à lui de trouver la vérité.

Mais comment ? Grave incertitude,toutes les fois que l'esprit se sent dépassé par lui-même ; quand lui, le chercheur, est tout ensemble le pays obscuroù il doit chercher et où tout son bagage ne lui sera de rien.

Chercher ? pas seulement : créer.

Il est en face dequelque chose qui n'est pas encore et que seul il peut réaliser, puis faire entrer dans sa lumière. Et je recommence à me demander quel pouvait être cet état inconnu, qui n'apportait aucune preuve logique maisl'évidence de sa félicité, de sa réalité devant laquelle les autres s'évanouissaient. .

.

.

Certes, ce qui palpite ainsi au fond de moi, ce doit être l'image, le souvenir visuel, qui, lié à cette saveur, tentede la suivre jusqu'à moi.

Mais il se débat trop loin, trop confusément ; à peine si je perçois le reflet neutre où seconfond l'insaisissable tourbillon des couleurs remuées ; mais je ne puis distinguer la forme, lui demander, comme auseul interprète possible, de me traduire le témoignage de sa contemporaine, de son inséparable compagne, lasaveur, lui demander de m'apprendre de quelle circonstance particulière, de quelle époque du passé il s'agit. Arrivera-t-il jusqu'à la surface de ma claire conscience, ce souvenir, l'instant ancien que l'attraction d'un instantidentique est venue de si loin solliciter, émouvoir, soulever tout au fond de moi ? Je ne sais. ...

Et tout d'un coup le souvenir m'est apparu.

Ce goût, c'était celui d'un petit morceau de madeleine que ledimanche matin à Combray (parce que, ce jour-là, je ne sortais pas avant l'heure de la messe), quand j'allais lui direbonjour dans sa chambre, ma tante Léonie m'offrait après l'avoir trempé dans son infusion de thé ou de tilleul.

Lavue de la petite madeleine ne m'avait rien rappelé avant que je n'y eusse goûté ; peut-être parce que, en ayantsouvent aperçu depuis, sans en manger, sur les tablettes des pâtissiers, leur image avait quitté ces jours deCombray pour se lier à d'autres plus récents ; peut-être parce que de ces souvenirs abandonnés si longtemps horsde la mémoire, rien ne survivait, tout s'était désagrégé. .

.

.

Mais, quand d'un passé ancien rien ne subsiste, après la mort des êtres, après la destruction des choses,seules, plus frêles mais plus vivaces, plus immatérielles, plus persistantes, plus fidèles, l'odeur et la saveur restent. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles