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Le Petit Chose

Publié le 05/04/2013

Extrait du document

Dans Le Petit Chose (1868), Alphonse Daudet se raconte sous les traits de Daniel Eyssette, tandis que son frère Ernest est la « mère Jacques «. Dès leur enfance, les deux garçons furent très liés. « Ma vie de ce temps-là, ouverte à tout vent, n'ayant que des élans courts, des velléités au lieu de volonté, ne suivant jamais que son caprice et l'aveugle frénésie d'une jeunesse qui menaçait de ne point finir ... « Alphonse Daudet.

« « Nous pl eurâ mes long uemen t, é pe rdu s, dan s les bras l' un de l'autr e.» EXTRAITS Fils de riche s et « gone » Ce qui me frappa d'abord, à mon arrivée au collège, c'est que j'étais le seul avec une blouse.

A Lyon, les fils de riches ne portent pas de blouses ; il n'y a que les enfants de la rue, les gones comme on dit.

Moi, j'en avais une, une petite blouse à car­ reaux qui datait de la fa brique ; j'avais une blouse, j'avais /'air d'un go ne ...

Quand j'entrai dans la classe, les élèves ricanèrent .

On disait : « Tiens ! il a une blouse ! » Le professeur fit la grimace et tout de suite me prit en aversion.

Depuis lors, quand il me parla, ce fut tou­ jours du bout des lèvres, d'un air méprisant.

Jamais il ne m'appela par mon nom; il di­ sait toujours : «Eh! vous, là-bas, le petit Chose ! » Je lui avais dit pourtant plus de vingt fois que je m'appelais Daniel Eyssette ...

A /afin, mes camarades me sur­ nommèrent « le petit Chose », et le surnom me resta ...

Ce n'était pas seulement ma blouse qui me distinguait des autres enfants.

Les autres avaient de beaux cartables en cuir jaune, des encriers de buis qui sentaient bon, des cahiers cartonnés, des livres neufs avec beaucoup de notes dans le bas; moi, mes livres étaient de vieux bouquins achetés sur les quais, moisis, fanés , sentant le rance ; les couvertures étaient toujours en lam­ beaux, quelquefois il manquait des pages.

Du haut de la chaire Je trouvai là une cinquantaine de méchants drôles, montagnards joufflus de douze à quatorze ans,fils de métayers enrichis, que leurs parents envoyaient au collège pour en faire de petits-bourgeois, à raison de cent vingt francs par trimestre.

Grossiers, insolents, orgueilleux , parlant entre eux un rude patois cévenol auquel je n'entendais rien, ils avaient presque tous cette laideur spéciale à/' enfance qui mue , de grosses mains rouges avec des engelures, des voix de jeunes coqs enrhumés, le regard abruti, et par là-dessus l'odeur du collège ...

Ils me haïrent tout de suite, sans me connaître.

J'étais pour eux /'ennemi, le Pion; et du jour où je m'assis dans ma chaire , ce fut la guerre entre nous, une guerre acharnée, sans trêve, de tous les instants.

Poésie Du matin au soir, la fenêtre restait ouverte avec ma table devant, et sur cet établi, du matin au soir j'enfilais des rimes.

De temps en temps un pierrot venait boire à ma gout­ tière ; il me regardait un mo­ ment d'un air effronté, puis il allait dire aux autres ce que je fais ais et j'entendais le bruit sec de leurs petites pattes sur les ardoises ...

J'avais aussi les cloches de Saint-Germain qui me rendaient visite plusieurs fois dans le jour.J'aimais bien quand elles venaient me voir .

Elles entraient bruyamment par la fenêtre et remplissaient la chambre de musique.

Tantôt des carillons joyeux et fous précipitant leurs double croches; tantôt des glas noirs, lugubres, dont les notes tom­ baient une à une comme des larmes.

« La terri ble vision de mon rêve passa encore une foi s deva nt mes yeux.» NOTES DE L'ÉDITEUR «Ce soir, en dînant chez Flaubert, Alphonse Daudet nous racontait son enfance, une enfance hâtive et trouble.

Elle s'est passée au milieu d'une maison sans argent, sous un père changeant tous les jours d'industrie et de commerce, dans le brouillard éternel de cette ville de Lyon, déjà abominée par cette jeune nature amoureuse du soleil.

Alors des lectures immenses, des lectures de poètes, de livres d'imagination qui lui exaltaient la cervelle, des lectures fouettées de l'ivresse produite par des liqueurs chipées à la maison, des lectures promenées, des journées entières, sur des bateaux qu'il décrochait du quai.» Journal des Goncourt, dimanche 8 février 1874.

« Quand, interrogeant ma mémoire, je cherche à me souvenir de mon frère enfant, je vois un beau petit garçon de trois à quatre ans, ayant de larges yeux bruns, des cheveux châtains, un teint mat et des traits d'une exquise délicatesse.

Je me rappelle en même temps des colères terribles, des révoltes quasi tragiques contre les corrections qu'elles lu i attiraient.» Ernest Daudet.

1 Sipa -lcono 2.

3.

4 dess ins de Philippoteaux, Hetzel et Cie, Paris, 1892 /clichés Bibli othèque de !'Heure joyeuse « ...

en dépit de l'intelligence et de l'esprit qu'il jette dans la conversation, je lui crois un tempérament d'improvisateur, peu propre à fouiller, à approfondir, à creuser les choses, qui le condamne à tout jamais à faire joliment de la littérature un peu facile.

» Op.

cit., vendredi 5 juin 1874.

DAUDET03. »

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