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Peut-on dire que le passé n’est jamais mort ?

Publié le 21/09/2011

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Pour illustrer notre réflexion, on prendra le modèle de la conversion religieuse. En effet, la conversion montre que le passé ne détermine pas le présent et encore moins l’avenir : c’est au contraire ce que le sujet entend devenir qui donne au passé sa coloration particulière.  La conversion n’est possible qu’à la condition d’une modification radicale des choix du sujet c’est-à-dire – comme le rappelle Kant lorsqu’il admire la version chrétienne de la conversion – de l’existence de sa liberté. Renoncer au mal passé et choisir le bien pour l’avenir n’est en rien oublier le passé : c’est au contraire en tenir compte et le juger pour ne pas le répéter.   

« l'humanité.En ce qui concerne la mémoire individuelle des hommes, on distingue, en citant les termes de Bergson, la mémoire-habitude et la mémoire-souvenir.

La première est la conservation dans le cerveau d'impressions passées qui influentsur le comportement de l'homme sous la forme d'automatismes.

La seconde est la seule capable de restituer lesétats de notre passé sous forme de souvenirs précis et situés.En second, ce sont les conséquences de nos actions passées qui font que ce temps révolu continu d'exister dans leprésent.

Comme on peut le constater tous les jours, les événements que nous vivons au présent ne sont que lerésultat de nos agissements passés : une annonce de fiançailles suivra selon une logique heureuse, des préparatifsqui eux-mêmes annonceront un mariage futur.

Nos faits et gestes passés influent sur la situation présente, en bienou en mal.Le passé ne serait donc jamais complètement révolu : les empreintes laissées dans la mémoire des hommesempêcheraient l'oubli intégral du passé.

De plus, l'influence de nos décisions et de nos actions auraient un impactsur le présent que nous vivons à l'instant même.

Le passé impose donc bien sa marque dans notre présent.Cependant, le passé n'est pas toujours conservé : quotidiennement, le sujet ne mémorise que certains événementsdont l'importance justifie le maintien, vécu de manière particulièrement intense (un accident, un événementheureux) ayant des conséquences durables sur l'individu.

Le reste, qui occupe pourtant la majeure partie del'existence, disparaît naturellement.

Cette « écume des jours » ne se fixe pas et c'est tant mieux car si notremémoire devait être encombrée d'une infinité de tels détails, nous aurions sans doute du mal à trier parmi tous cessouvenirs pour faire resurgir ceux qui peuvent, en fonction des circonstances, nous être utiles.Comme le fait observer Nietzsche, un homme qui garderait en mémoire les moindres détails de sa vie « finirait par seperdre dans le torrent du devenir ».

L'oubli n'est donc pas simplement un manque, mais une faculté positive quipermet à l'homme de ne conserver du passé que ce qui peut lui être réellement utile.A l'inverse, certains souvenirs peuvent être présents, au jour le jour, et être très encombrants.En premier, un souvenir malheureux, qu'on peut aussi nommer sous le nom de « mauvaise conscience » dans notreréflexion.

Le souvenir du passé survient par la honte, les remords, des souvenirs gênants de comportementsrépréhensibles dont il semble difficile de se défaire.

Le présent est alors perturbé : le sujet craint des reproches, desaccusations, il est troublé dans ses pensées quotidiennes, ces pensées même qui l'empêchent de dormir le soirvenu.En second, on verra qu'un souvenir heureux peut tout aussi bien assombrir le présent.

En effet, si ce passé heureuxparaît impossible à revivre ou difficile à surpasser, il risque de faire du présent, même de l'avenir, quelque chosed'insipide et sans réelle valeur.Ces souvenirs, heureux ou malheureux, sont dans les deux cas négatifs car ils semblent freiner l'initiative et peuventéventuellement gêner la production de l'avenir. Etant donné la précédente idée d'un passé négatif et afin de développer un peu plus la réflexion dans ce sens, onpourrait se demander quels seraient les inconvénients d'oublier ce passé (dans la perspective qu'on puisse le faireévidemment, en exceptant la maladie d'Elsheimer et l'amnésie).Tout d'abord, l'oubli du passé condamne à devenir ce que Jean Anouilh nomme un « voyageur sans bagage », c'est-à-dire un sujet sans expérience, incapable de maîtriser son présent.

Ne pas oublier le passé, permet de l'analyser,c'est-à-dire d'en corriger les aspects négatifs et d'échapper à sa répétition.La perception du passé (ainsi que du présent et de l'avenir par la même occasion) appartient à l'humanité.

L'oubli, àl'inverse, nous rapprocherait de l'animalité.

Ainsi, notre humanité est relative à notre conscience et à notre propresaisie du temps qui passe.Grâce à ces deux premiers arguments on peut donc déjà conclure qu'il serait difficile de concevoir un individu sanspassé car il serait dépourvu de toute humanité : incapable de communiquer, d'avoir un langage, il serait privéd'éducation et d'expérience.

Qui plus est, la notion d'un passé mort rendrait possible l'idée d'une nouvelle vie, d'unenouvelle identité, c'est-à-dire l'idée d'une nouvelle naissance, d'une remise à neuf, d'une remise à zéro qui nedevrait rien au passé.

Ainsi, le présent serait complètement affranchi d'un quelconque passé, celui-ci devenantfinalement un néant.

Or, le présent ne peut naître du néant : il nécessite une origine.Ensuite, rendre le passé mort, en empruntant la conception qu'avait Freud, peut engranger une névrose chez lesujet.

En effet, certains oublis sont pathogènes et se manifestent par un déséquilibre ou une maladie chez l'individunévrosé.

Un passé oublié, outre qu'il prive le présent, et donc l'avenir, de repères et d'expériences, ne disparaît pasintégralement : il peut rester actif, c'est-à-dire, pathogène.

Au lieu d'ouvrir sur l'avenir, son absence bloque le sujetdans la répétition et dans un présent lui-même déséquilibré.Afin de résumé notre précédente réflexion, on peut donc dire qu'il y aurait de nombreux inconvénients à oubliernotre passé : cela rendrait l'individu incapable de communiquer, de dialoguer, d'être civilisé, il serait rabaisser aurang d'animal et tout cela à cause du fait qu'il ne serait pas conscient du temps qui s'écoulerait ainsi que du manqued'expérience et de repères qu'il aurait perdu en oubliant, au fur et à mesure, tout ce qu'il aurait vécu.

Un passérefoulé aurait aussi comme conséquence une névrose qui se manifesterait de façon pathogène et donc néfaste pourle présent et l'avenir du sujet.Par conséquent, nous venons de démontrer que le passé n'est jamais réellement mort.

Comme vu précédemment,par la mémoire collective – l'histoire – ou individuelle – les souvenirs, les habitudes -, le passé est sans cesseressasser.

Que ce soit par l'étude de nos sociétés passées ou par nostalgie, les temps révolus sont sans arrêt renduà l'instant présent.

Cependant, n'existerait-il pas d'autres arguments ?Comme on peut le démontrer, l'esprit d'un individu est caractérisé par la mémoire.

En effet, notre caractère,toujours présent à toutes nos décisions, à toutes nos actions, est la synthèse actuelle de tous nos états passés.Nous agissons en connaissance de cause de notre expérience et de nos impressions passées.

Un individu préfèreraun aliment plutôt qu'un autre car il aura le souvenir d'un goût agréable, par exemple.

Ainsi, nos décisions présentes. »

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