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Peut-on échapper à l'emprise de l'imagination ?

Publié le 25/03/2004

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 »     c)      L'imagination, « maîtresse d'erreur et de fausseté »    Il peut être légitime de parler d'une réelle « emprise » de l'imagination. Avec l'imagination, c'est peut-être dans la fausseté que nous sommes emprisonnés.   PASCAL, Pensées, Brunschvicg 82 / Lafuma 44 « C'est cette partie dominante dans l'homme, cette maîtresse d'erreur et de fausseté, et d'autant plus fourbe qu'elle ne l'est pas toujours, car elle serait règle infaillible de vérité, si elle l'était infaillible du mensonge. Mais, étant le plus souvent fausse, elle ne donne aucune marque de sa qualité marquant du même caractère le vrai et le faux. Je ne parle pas des fous, je parle des plus sages, et c'est parmi eux que l'imagination a le grand droit de persuader les hommes. La raison a beau crier, elle ne peut mettre le prix aux choses. Cette superbe puissance ennemie de la raison, qui se plaît à la contrôler et à la dominer, pour montrer combien elle peut en toutes choses, a établi dans l'homme une seconde nature. Elle a ses heureux, ses malheureux, ses sains, ses malades, ses riches, ses pauvres. Elle fait croire, douter, nier la raison. Elle suspend les sens, elle les fait sentir.

 

C’est a priori une qualité que d’avoir beaucoup d’imagination. Cela souligne la richesse de sa production, son originalité, la beauté de ses images. Pourtant, cela peut aussi occasionner un reproche : « tu as trop d’imagination «, dira-t-on à celui qui s’inquiète dans le noir.

Quoiqu’il en soit, dans un cas comme dans l’autre, l’imagination produit des images.

D’une manière plus précise, on peut même distinguer que son pouvoir consiste premièrement à reproduire des images, lorsqu’elle présente à l’esprit des images qui correspondent aux observations des sens. Elle est alors liée à la mémoire, permettant de ramener à l’esprit des impressions passées.

Deuxièmement l’imagination peut produire, voire créer des images, lorsque ce qu’elle représente n’a pas son modèle dans ce qui a été observé.

Concernant chacun des deux pouvoirs, l’imagination est susceptible d’avoir une véritable emprise sur un individu. L’exemple extrême et symbolique est bien évidemment le rêve, lors duquel nous sommes sans doute complètement livrés à l’emprise de l’imagination. C’est elle, et non notre conscience ni notre volonté qui choisit les images qu’elle présente à l’esprit.

Il semble pas en être ainsi en état de veille. Pourtant, ne fait-on pas quotidiennement l’expérience que notre imagination peut avoir la main-mise sur nous ? Qu’il s’agisse tout simplement de la forme que l’on ne peut éviter de reconnaître dans un nuage, du son que l’on a cru percevoir, du fantasme ou de l’angoisse surgissant soudain à l’esprit - alors qu’ « il n’y avait rien « ; force est de constater que l’imagination participe à notre quotidien. En comprenant qu’elle agit au niveau de nos perception, on peut supposer qu’elle se mêle également à nos connaissances. Dans quelle mesure ? Un calcul mental, par exemple, fait-il appel à l’imagination ?

Il ne faut pas non plus mettre au même niveau toutes les contributions de l’imagination. Il y a évidemment des différences de degré d’emprise entre un rêve la représentation dans l’esprit d’un triangle. Dans un cas comme dans l’autre il s’agit de la même faculté, sans doute pas de la même participation.

Ainsi l’imagination est-elle peut-être concernée par chacune des opérations de l’esprit. Elle peut raviver un souvenir, et sans doute par là même le fausser. Cela illustre bien le problème posé par une potentielle emprise de l’imagination : l’imagination est source d’erreur. Pour illustrer le problème de manière simple, le monde « imaginaire « s’oppose au monde « réel «. En mêlant l’imagination à notre perception du monde, c’est peut-être toute notre connaissance du monde qui est menacée, et pourquoi  pas toutes nos actions. Les objets de nos croyances, de nos désirs, ne sont-ils pas souvent plus imaginaires que réels ?

Est-on alors condamné à l’emprise de l’imagination ?

Cette question en suppose beaucoup d’autres. Elle nécessite que l’on éclaircisse le rôle de l’imagination, et son degré de participation voire d’emprise sur la conscience. Quelle est « l’emprise « de l’imagination ? A quels niveaux se situe-t-elle, et sous quelles formes ? C’est seulement ensuite qu’il convient de s’interroger sur la nécessité puis les moyens d’échapper à cette emprise - sur les « procédés échappatoires «, si l’on peut dire. Pourquoi faudrait-il se libérer de l’emprise de l’imagination ? Par quels moyens ?

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