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La pitié est-elle un mauvais sentiment ?

Publié le 08/10/2005

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La sensibilité est liée à la souffrance. La pitié ne suppose rien d'autre que la sensibilité physique et la sensation que j'identifie. C'est pourquoi la souffrance est un sentiment naturel. La pitié précède la réflexion. Dans l'état de nature, la pitié « tient lieu de lois, de moeurs, et de vertu avec cet avantage que nul n'est tenté de désobéir à sa douce voix «, écrit Rousseau. La pitié n'est pas un sentiment moral, contrairement à la thèse nietzschéenne, car toute morale suppose un jugement. La pitié ne réfléchit pas, elle s'éprouve et agit dans l'immédiateté.  

3 - La morale de la pitié  

La voix de la pitié ressemble à celle de la conscience morale. Dans l'état de nature et au-delà de l'état de nature, la pitié fonde un rapport de justice à autrui.  Rousseau énonce une maxime de la pitié : Fais ton bien avec le moindre mal d'autrui qu'il est possible.

La pitié est un sentiment d'affliction que l'on éprouve pour les maux et les souffrances d'autrui. Sentiment d’affliction d’autant plus lourd que nous héritons des valeurs chrétiennes. Le sentiment est de l’ordre du ressenti. Il n’est pas sur le même plan que la raison. Un sentiment s’éprouve tandis que la raison commande, légifère. Il est difficile de concevoir la pitié hors du cadre religieux. La pitié est un sentiment que l’on éprouve à l’égard d’autrui. En radicalisant, la pitié pourrait provoquer l’oubli de soi dans le rapport à autrui. Telle fut l’attitude de certains saints ou mystiques. Mais la pitié n’est-elle qu’un sentiment d’affliction ? Se caractérise-t-elle uniquement par la souffrance d’autrui et la douleur de ne pouvoir remédier à sa peine ?

Problème : La pitié est-elle un sentiment mauvais en tant qu’il se retourne contre nous dès lors que l’on agit telle que nous l’ordonne les sens et non la raison ? Ou, au contraire, est-il possible de déceler dans la pitié un principe actif ?

« seule chose qui lui permet de sentir sa condition d'homme.

L'homme est homme parce qu'il est doué d'une grandesensibilité à l'égard d'autrui.

Bien loin de nuire à l'homme, la pitié le sauve. Rousseau: Sentiment de pitié 1.

La pitiéLa réflexion sur la sociabilité de l'homme conduit Rousseau à insister sur le rôledes sentiments.

Ainsi, le sentiment naturel de la pitié pour nos semblables(Discours sur l'origine de l'inégalité), qui nous pousse à nous identifier à celuiqui souffre, est une manière de nous unir aux autres par affection plutôt quepar intérêt.

La pitié est à l'origine des vertus sociales. 2.

La sincérité du coeurLe sentiment n'est pas limité au caractère sociable de l'homme.

Il est aussibien ce qui nous révèle notre spiritualité, la foi naturelle en une intelligencedivine à laquelle invite l'ordre de l'univers, que ce qui nous permet de déciderdu bien ou du mal, du vrai et du faux.

Ainsi, les connaissances évidentessont, pour Rousseau, celles auxquelles, dans la sincérité de mon coeur, je nepeux refuser mon consentement (Profession de foi du vicaire savoyard). « Il est donc bien certain que la pitié est un sentiment naturel qui, modérantdans chaque individu l'activité de l'amour de soi-même, concourt à laconservation mutuelle de toute l'espèce.

C'est elle qui nous porte sansréflexion au secours de ceux que nous voyons souffrir : c'est elle qui, dansl'état de nature, tient lieu de lois, de mœurs et de vertu, avec cet avantageque nul n'est tenté de désobéir à sa douce voix : c'est elle qui détournera tout sauvage robuste d'enlever à unfaible enfant, ou à un vieillard infirme, sa subsistance acquise avec peine, si lui-même espère pouvoir trouver lasienne ailleurs ; c'est elle qui, au lieu de cette maxime sublime de justice raisonnée, Fais à autrui comme tu veuxqu'on te fasse, inspire à tous les hommes cette autre maxime de bonté naturelle bien moins parfaite, mais plus utilepeut-être que la précédente, Fais ton bien avec le moindre mal d'autrui qu'il est possible.

C'est en un mot dans cesentiment naturel, plutôt que dans des arguments subtils, qu'il faut chercher la cause de la répugnance que touthomme éprouve à mal faire, même indépendamment des maximes de l'éducation.

Quoiqu'il puisse appartenir àSocrate et aux esprits de sa trempe, d'acquérir de la vertu par raison, il y a longtemps que le genre humain ne seraitplus, si sa conservation n'eût dépendu que des raisonnements de ceux qui le composent.

» Rousseau. MODELE. Dans ce texte, Rousseau fait l'apologie de la pitié.1) La pitié est définie tout d'abord comme le sentiment naturel.2) Puis, la pitié est décrite en ses différentes fonctions.3) Rousseau indique la supériorité de la maxime qu'elle inspire.4) Il ait de cette maxime le fondement de la morale. 1) Dans la forme d'une argumentation qui s'achève (« donc ») Rousseau affirme que « la pitié est un sentimentnaturel ».

On sait que Rousseau opposera constamment ce qui est de l'ordre de la nature et ce qui est de l'ordre dela société (du social, ou du civil).Cette succession historique (supposée) a son équivalent à l'intérieur de l'homme.

Il y a en lui ce qui est de l'ordre dela nature (inné) et ce qui a sa source dans la société (l'acquis).

Rousseau estime que ce qui est de l'ordre dusentiment (la pitié) est déjà là, en l'homme, au niveau de l'homme naturel, et donc premier (et par là mêmeantérieur) à la raison qui, elle, est seconde (et par là même postérieure), de l'ordre de l'homme civilisé.Ainsi, Rousseau, au niveau de l'homme « naturel », distingue-t-il un sentiment égoïste (« l'amour de soi ») et unsentiment altruiste (« la pitié »).

Il les comprend comme antagonistes, et s'équilibrant l'un l'autre (« la pitié […]modérant dans chaque individu l'activité de l'amour de soi-même »).Sans que Rousseau soit très explicite sur ce point, on peut imaginer que l'amour de soi conduit l'homme au repli etl'éloigne de ses semblables (à moins que l'amour de soi ne le conduise à vouloir imposer sa volonté par la force).

Aucontraire, la pitié nous ouvre vers autrui et conduit à nous rapprocher des autres hommes, nos semblables, nosfrères.

Chacun, éprouvant de la pitié pour l'autre, est enclin à le protéger et à lui porter secours.

Ainsi, la pitiéconcourt-elle « à la conservation mutuelle de l'espèce ». 2) Aussi Rousseau se livre-t-il à une célébration de la pitié, en décrivant ses différentes fonctions.

Plus exactement,il croise les descriptions concrètes avec les fonctions abstraites.

Ainsi la pitié est reliée à la souffrance (« c'est ellequi nous porte [..] au secours de ceux que nous voyons souffrir ») ou bien elle est pensée comme frein à l'injustice(« c'est elle qui détournera tout sauvage robuste d'enlever à un faible enfant […] sa subsistance acquise avec peine»).Mais, à chaque fois, une fonction de la pitié est indiquée : à la suite de la souffrance, Rousseau montre que la pitiéjoue dans l'état de nature le même rôle que la loi joue dans l'état de société (« la pitié tient lieu de lois, de mœurs,et de vertu »).

De même, à la suite de l'injustice, Rousseau montre que la pitié débouche sur une maxime valabledans l'état de nature (« une maxime de bonté naturelle ») autrement plus efficace que la maxime qui a cours dansl'état de société.. »

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