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Le plan de la « Critique de la raison pure ».

Publié le 21/03/2011

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— Nous pouvons comprendre maintenant le plan et les divisions de la Critique. L'objet essentiel en est d'établir les conditions et la méthode d'une vraie et sérieuse métaphysique, qui ne peut être — puisque les objets métaphysiques ne sont pas donnés dans l'expérience, — que l'œuvre de la raison pure. Méthodologie delà raison pure constituera donc la conclusion et, eu égard à la première intention de l'auteur, la partie essentielle de la Critique. Mais cette méthodologie, à son tour, ne peut s'établir que sur les bases de la Critique proprement dite, dont l'objet est d'analyser l'œuvre de la connaissance et d'en discerner les éléments a priori pour en déterminer la valeur. Cette analyse préalable est la première et, quant à l'étendue, la plus importante partie de la Critique ; elle constitue le corps même de l'ouvrage et a reçu de Kant le titre de Théorie élémentaire. A son tour, cette théorie se subdivise naturellement en autant de parties qu'il y a dans la connaissance de fonctions et d'éléments a priori à définir et à critiquer. L'examen de la faculté de sentir et de ses formes nécessaires d'intuition reçoit le nom d'Esthétique transcendantale. Ce mot de transcendantal ne désigne pas pour Kant ce qui dépasse l'expérience : il lui sert à caractériser toutes les spéculations ou théories qui concernent les données a priori de la connaissance. 

« mathématiques, leur caractère de certitude.

Il faut donc procéder à la preuve d'une manière plus profonde et plusdirecte, en montrant, par exemple, que, bien loin que l'expérience puisse donner naissance aux principes rationnels,elle n'existerait pas elle-même sans ces principes.

(R.

P., I, 157.) C'est précisément l'erreur de Hume de supposer, à l'origine de toute idée, l'expérience toute faite, comme un donné,ayant sa réalité propre et une nature définie, de telle façon qu'on en pourrait tirer après coup ceci ou cela.

Au vrai,l'erreur est triple.

D'abord Hume suppose qu'avant tout acte de pensée proprement dite, des objets définispourraient être donnés dont les perceptions s'associeraient en liaisons nécessaires ; et c'est là sa première erreur.

Ilne voit pas d'autre part qu'il n'y a pas de raison pour que de telles liaisons nécessaires se forment, si les faits, à lesprendre en eux-mêmes, ne sont pas soumis à des lois : il faut donc commencer par supposer réelle et objectivecette liaison nécessaire dont on veut faire une illusion de l'imagination, et c'est là, assurément, une deuxième erreurou, plutôt, une contradiction.

Enfin, ce qu'expliquerait l'associationnisme de Hume, c'est la succession régulière etnécessaire dans l'esprit de certaines représentations s'appelant l'une l'autre ; mais se représenter nécessairementtel fait après tel autre et affirmer qu'objectivement ces deux faits sont liés sont deux choses très différentes, et dene l'avoir pas vu c'est la troisième et la plus grave erreur de Hume.

D'un mot, il a confondu la sensation et lapensée, et c'est en les distinguant que Kant a donné de l'apriorisme la démonstration la plus profonde dont il soitsusceptible.

C'est par une même opération qu'il établit le caractère apriorique des catégories et la possibilité de lesappliquer aux objets.

Cette démonstration est l'objet de cette difficile Déduction transcendantale que Kant a siprofondément remaniée, pour la forme, d'une édition à l'autre de la Critique.

La première rédaction nous sembleencore la plus nette. Il y a cette différence, dit Kant, entre sentir et penser, que sentir c'est simplement se trouver affecté d'unecertaine façon, tandis que penser c'est rapporter sa sensation à un objet.

Qui éclaircirait cette idée d'objet aurait,par là même, mis en évidence l'originalité de l'action de l'entendement.

L'idée d'un objet, à la prendre au moins dansle sens commun, c'est l'idée de quelque chose à quoi correspond notre connaissance et dont notre connaissanceest la représentation en nous.

Cet objet est donc conçu comme nous étant extérieur, étranger, et, en ce sens, iln'est rien pour nous, il est X.

Toutefois, si indéterminé qu'il soit eu lui-même, il est déterminé dans sa fonction.L'objet, c'est ce qui fait que nos sensations ne se produisent pas capricieusement, mais qu'elles sontnécessairement telles en telles conditions, et autres en d'autres.

Par suite encore, nos sensations, en tant qu'ellesse rapportent au même objet, sont liées d'une manière nécessaire ; elles forment un tout dont les partiess'appellent, dont l'une annonce l'autre.

De sorte que finalement, l'objet en soi nous étant inaccessible, l'objet pournous n'est rien de plus que cette liaison nécessaire de certaines de nos représentations, susceptibles d'être penséescomme un tout.

Ce qui définit un objet particulier, c'est la loi ou la règle de cette liaison.

Par exemple, nous avonsl'idée d'un triangle comme d'un objet, c'est-à-dire comme d'autre chose que d'une impression subjective etaccidentelle, quand nous avons conscience de la règle selon laquelle il peut être construit par l'assemblage de troislignes.

Par là nous avons la notion de quelque chose qui peut être fait ou pensé à volonté et indéfiniment, qui a saloi d'existence et sa nature propre, indépendamment du fait que nous nous le représentons à tel moment.

C'estpourquoi nous disons que cela est.

C'est la fonction de l'entendement que de déterminer ces liaisons nécessaires etfixes qui constituent les choses; comme c'est l'objet de son acte essentiel, le jugement, de les objectiver, de lesénoncer comme des lois ayant un autre sens et une autre valeur qu'une aveugle succession de sensations. Il suit de là naturellement que les objets ne nous sont pas donnés.

Ils sont construits par notre intelligence et poséspour ainsi dire devant nous et comme en opposition avec nous.

Ils sont construits par une suite de synthèses queKant se contente d'indiquer un peu sommairement.

Ces synthèses sont constituées selon des lois dont Kant établitl'origine interne non seulement en montrant, comme nous l'avons déjà rappelé, qu'elles président uniformément àtous les actes de l'entendement, mais encore en faisant voir que de telles lois a priori sont requises par lesconditions fondamentales de la connaissance et surtout par cette condition première qu'il nomme l'aperceptiontranscendantale : il nomme ainsi la conscience a priori de l'identité du moi. Toute connaissance en tant que liaison du divers implique la conscience de l'identité du moi.

Les objets ne sontobjets, ou synthèses, qu'autant que les éléments en sont rapportés à un sujet qui se connaît comme le même entant qu'il perçoit l'élément a et l'élément b.

Et, pareillement, il n'y a un monde ou un système d'objets qu'autant queces divers objets sont rapportés et opposés à un sujet qui se sente le même en tant qu'il perçoit l'objet a et qu'ilperçoit l'objet b.

Cette conscience de l'identité du moi ne peut pas être la conscience empirique, à savoir laconscience que j'ai de moi-même à chaque instant comme déterminé de telle ou telle façon.

Car, en ce sens, je neme sens pas comme identique, mais comme perpétuellement autre.

C'est précisément en tant que j'unis dans unemême conscience supérieure, non empiriquement déterminée, mes divers états de conscience déterminés que je puisme connaître comme un.

La conscience de l'identité que requiert la connaissance objective doit donc êtreindépendante du sentiment de mes états à chaque moment : elle ne doit pas résulter de ma situation et de l'état demes organes; elle doit précéder tout état déterminé : elle doit être a priori.

Or la conscience a priori de l'identitén'est possible qu'autant que l'esprit perçoit, en même temps qu'il agit pour former les synthèses qui constitueront lesobjets, l'unité de son action toujours conforme aux mêmes règles.

S'il n'y a pas de règles a priori inhérentes à l'espritet se retrouvant les mêmes en toutes ses opérations constructives, l'esprit ne peut se connaître comme un, et parlà, le principe suprême de toute synthèse cognitive disparaissant, toute connaissance disparaîtrait du même coup.

Ily a donc des règles ou formes a priori de l'action de l'entendement, et ce sont naturellement celles dont onconstate la présence en tous ses jugements.

(R.

P., II, 414-433.) Il resterait à voir maintenant comment ces catégories s'appliquent aux données de la sensation et par quels degrésnous allons de l'aperception transcendantale, qui nous constitue comme esprits, à la conception de tels objets. »

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