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Y a-t-il une ou plusieurs interprétations ?

Publié le 02/02/2004

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Or, chaque processus vital obtient cette intensification de puissance en imposant sa forme à ses rivaux, c'est-à-dire en leur donnant un certain sens. Autrement dit, les processus vitaux s'interprètent mutuellement ; la volonté de puissance est un processus d'interprétation réciproque. Nietzsche pose ainsi le « caractère interprétatif de tout ce qui arrive. Il n'y a pas d'événement en soi. Ce qui arrive est un ensemble de phénomènes, choisis et rassemblés par un être interprétant ». Il n'y a pas de réalité en soi, mais uniquement des perspectives en devenir et des interprétations provisoirement dominantes. Toute connaissance est une interprétation subjective et partiale. Débat et enjeu DOGMATISME : Doctrine selon laquelle certaines vérités sont établies d'une façon définitive, sans possibilité de doute. Perspectivisme contre dogmatisme La thèse de Nietzsche permet de combattre le dogmatisme, pensée prétendant se dégager de toute perspective ou être la seule perspective possible sur le réel, s'identifiant ainsi, finalement, au point de vue de Dieu lui-même ! Toute pensée exprime une certaine perspective et ne peut dès lors connaître la réalité en soi, mais seulement telle qu'elle lui apparaît. Ou plutôt, toute pensée est une interprétation de la réalité produite par un corps, qui est une certaine hiérarchie de forces vitales, une certaine configuration de la volonté de puissance .

     Interpréter, qui nous vient du grec « herméneuein «, renvoyait dans l’Antiquité grecque aux prêtres chargés d’interpréter les oracles de la Pythie à Delphes. Aujourd’hui, le problème de l’interprétation est d’une ampleur considérable, dans la mesure où cette activité se prête à la détermination d’un bon nombre de sciences. Dès lors l’interprétation, qui consiste à dévoiler le sens des choses (humaines, naturelles ou divines), relèverait d’une science globale ayant pour finalité absolue la vérité. Il n’en reste pas moins qu’on peut interpréter toutes sortes d’objets et chacun sait qu’une même sonate de Beethoven peut donner lieu à plusieurs interprétations, très différentes. La question de l’interprétation reste largement ouverte et semble nous renvoyer à une pluralité fondamentale : n’y aurait-il pas là l’indice que l’interprétation se tisse au travers d’une vie de la nature et de l’esprit dont le sens ne peut qu’être que multiforme et multicolore ?  

« a.

Dans toutes les religions il est admis que le premier degré de lecture des textes est insuffisant et qu'il faut aller au-delà pour déchiffrer son sens secret. Au regard des divers étages de sens que pouvait révéler des textes sacrés, et notamment la Bible, il a été considéré de bon aloi de parler d'une science de l'interprétation.

Cettescience entendait traiter comme pourvus de sens des objets auxquels cette qualité n'est pas ordinairementreconnue, et proposer des normes d'interprétation cohérentes et pertinentes pour l'ensemble des objets du domaineconcerné.

L'exégèse par exemple, science de l'interprétation des textes sacrés, semble remplir ces deux conditions :les récits bibliques ont une cohérence interne (linguistique, historique, etc.) qui autorise à leur supposer du sensmême en dehors de toute référence au problème de l'existence de Dieu ; cependant ce sens n'est pasimmédiatement lisible : « Dieu est un feu » n'a guère de sens dans la langue ordinaire ; mais l'exégèse a permis demettre en évidence les règles qui commandent le travestissement du sens caché.

Spinoza nous renseigne sur ces divers sens retenu devant une unique parole : « Dieu est un feu admet unsens autre que le littéral, c'est-à-dire si le mot feu signifie autre chose que lefeu naturel.

Comme le mot feu se prend aussi pour colère et jalousie, il estfacile de concilier entre elles les phrases de Moïse, et nous arriveronslégitimement à cette conclusion que ces propositions Dieu est un feu, Dieuest jaloux, ne sont qu'une seule et même énonciation » ( Traité théologico- politique ).

C'est tout le problème de la polysémie qui apparaît ici.

Une simple phrase, un contexte, sont capables de transformer le sens d'un mot.

Lamétaphore est l'exemple du mot capable de conquérir un sens nouveau touten conservant l'ancien.

Et il est évident que les mots des textes sacrés(textes qui prétendent au sens absolu, à la vérité, à Dieu) sont toujours àinterpréter et réinterpréter. b.

Mais pourquoi interpréter ces textes que beaucoup estime relever de la folie, de l'absence de sens ? Pourquoi, de façon comparable, Freud prétend-il interpréter ces rêves que la plupart de leurs auteurs sont les premiers à jugersans intérêt, tant ils semblent ne rien vouloir dire ? Ainsi un rêve estinterprété dès lors qu'une explication en est proposée qui semble rendreraison de son existence, de sa fonction, etc.

Il y a donc deux manières deconsidérer le contenu d'un rêve ; d'abord tel qu'il se présente pour celui quirêve (c'est le contenu manifeste), et ensuite la manière d'interpréter lessignes manifestes en autant d'occasions de sens cachés (c'est le contenu latent).

Avec Freud, et notamment dansL'Interprétation des rêves , l'interprétation vient au secours de l'irrationnel, de ce qui semble absolument dépourvu de sens pour la conscience.

II.

L'irréductible subjectivité a.

Le sens est toujours à donner, à chercher, il est toujours le terme d'une interprétation.

Et la multiplicité des médiations (paroles, écriture, actes) qui s'interposent entre le fait ou l'intention de signifier, et le désir decomprendre, ruine d'avance toute aspiration à la lisibilité immédiate d'un sens unique et comme originairementdonné.

Le sens est toujours déjà là où quelqu'un l'a mis.

Ainsi c'est nous, les hommes, qui donnons un sens àl'univers.

Claude Lévi-Strauss affirmera que signifiant et signifié se sont constitués simultanément ( Sociologie et anthropologie , Introduction).

Mais le sens est à la fois toujours absent, autrement il n'y aurait pas de quête de sens.

Le lecteur d'un texte écrit, par exemple, est certes le destinataire d'une intention de signifier : mais l'auteurlui-même est désormais absent de son texte ; la subjectivité à l'œuvre dans l'acte de lire devient à son tourconstitutive du sens de ce texte pourtant déjà écrit.

L'interprétation, loin de n'être réductible qu'à l'acte d'expliquerou à celui de comprendre, est bien plutôt le produit de ces deux actes.

Et c'est tout le rôle de l'herméneute qued'interpréter, de mettre en lumière la structure de tel ou tel texte.

Car l'herméneutique est l'art d'interpréter touttexte dont la compréhension suppose un travail d'explication préalable. b.

Paul Ricœur , figure éminente de l'herméneutique, appelle à une reconstruction d'un sens qui ne se laisse pas si aisément donné, tel par exemple le sens écrit : « L'intention de l'auteur n'est plus immédiatement donné commeveut l'être celle du locuteur dans une parole sincère et directe.

Elle doit être reconstruite en même temps que lasignification du texte lui-même, comme le nom propre donné au style singulier de l'œuvre » ( Du texte à l'action , Essai d'herméneutique).

Dès lors on comprend qu'on ne peut plus se permettre de « tout comprendre » à la simplelecture d'un texte dont l'auteur est absent.

L'intention de l'auteur devient ainsi une question d'herméneutique, unequête encore subjective puisqu'elle appartient au lecteur.

Mais ce dernier lui-même, chargé d'intention (Ricœur abeaucoup étudié Husserl, il l'a même traduit ; d'où l'appui théorique basée sur l'intentionnalité, sur la signification,etc.) et par conséquent (et inconsciemment) donneur de sens, se comprend « devant le texte » toujours autrementque l'auteur s'est compris lui-même, ou qu'un autre lecteur.

Cette radicalité de l'individu, toujours donneur de sens,invite à penser le sens du monde comme une infinité de points de vue ou de perspectives, comme un essaipermanent d'interprétation pour des consciences présentes.. »

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