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En politique, ne faut-il croire qu'aux rapports de force ?

Publié le 28/02/2004

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Les présupposés du sujet4. Approfondissez la question posée par l'emploi du verbe «croire»: s'agit-il d'une recommandation pratique, destinée à l'acteur politique au sens large ou d'une vue théorique sur la nature de la politique ?5. À quelle conception de la politique s'oppose fondamentalement l'idée que celle-ci ne consisterait qu'en rapports de force?6. Lorsqu'on conçoit la politique en termes de rapports de force, y inclut-on l'usage de la ruse et de tous moyens détournés de parvenir à ses fins? Imposer sa volonté en trompant (propagande, désinformation, déclarations et promesses mensongères) fait-il partie des moyens de la force ?7. Si la politique n'est finalement qu'une question de rapports de forces, quelle est sa fonction et quels peuvent être ses objectifs ?Éléments pour une problématique8.

« « Aussi est-il nécessaire au prince qui se veut conserver qu'il apprenneà pouvoir n'être pas bon.

» MACHIAVEL En 1513, Machiavel, diplomate originaire de Florence, achève larédaction du « Prince ».

Suite à un bouleversement politique àFlorence, il avait été contraint d'abandonner ses fonctions et de seretirer.

Il profita de cet exil pour rédiger une sorte de traité expliquant àun chef politique la façon de sauvegarder son pouvoir et mêmed'accéder à la gloire.L'idée d'un tel ouvrage, constitué par des conseils adressés à un prince,n'était pas neuve en elle-même.

Il existait déjà de nombreux « miroirsdes princes » et Machiavel s'insère donc dans une tradition.

Mais ilrompit avec l'usage et provoqua le scandale par la manière dont ilaborda le problème.

On vit en lui une nouvelle incarnation de Satan et,aujourd'hui encore, quelques commentateurs continuent de leconsidérer comme un « apôtre du mal ».Le discours humaniste du temps, que récuse Machiavel, s'inspirait desmoralistes latins et notamment de Cicéron.

Pour ce dernier et ceux quise rattachaient à sa pensée au XV ième, la gloire du chef reposait surune bonne gestion allant de pair avec une conduite vertueuse, cadconforme aux exigences de la morale.Machiavel s'inscrit en faux contre cette thèse.

Le souci premier duPrince doit être de conserver son pouvoir et même de l'accroître à l'occasion.

Si les hommes étaient bons, il pourrait le faire sans jamais s'écarter des grands principes morauxuniversellement admis.

Mais les hommes sont pour la plupart méchants quand on ne les force pas à être bons.En conséquence, le Prince sera vertueux, au sens courant du terme, si le contexte le permet, et il ne le serapas si la situation le lui impose.

En cas de nécessité, il pourra faire des entorses aux grands principes.

Il luisera loisible d'agir contre la parole donnée, contre la charité, contre l'humanité (le respect de l'homme) etmême contre la religion.

La fin justifie les moyens.Cette idée est exprimée en plusieurs endroits du « Prince » et de « Discours sur la première décade de Tite-Live », et, en particulier, dans le chapitre XV du « Prince » : «Car qui veut entièrement faire professiond'homme de bien, il ne peut éviter sa perte parmi tant d'autres qui ne sont pas bons.

Aussi est-il nécessaireau Prince qui se veut conserver qu'il apprenne à pouvoir n'être pas bon, et d'en user ou n'user pas selon lanécessité.

».Après avoir, dans les premières pages du « Prince », envisagé les différentes formes de gouvernement,Machiavel décide de centrer son propos sur la situation qui peut paraître la plus précaire, celle d'un princenouveau et qui a été mis en place par une armée étrangère.

Quels principes doit mettre en oeuvre ce princepour se conserver et pour conserver son pouvoir ? Le « Prince » tout entier se propose de répondre à cettequestion.Machiavel pense que l'on peut tirer des leçons de l'histoire.

En étudiant le comportement des grands hommes,en analysant les causes de leurs échecs ou de leurs succès, il est possible de dégager les principes surlesquels pourra se fonder une action politique.

Sa conclusion est claire : on ne fait pas de bonne politiqueavec de bons sentiments.Il n'est pas important pour le « Prince » d'être bon ou de ne pas l'être.

Celui-ci doit avoir la ruse du renard «pour connaître les filets » et la force du lion « pour faire peur aux loups ».

L'exemple à suivre est celui del'empereur Sévère qui « fut un très féroce lion et un très astucieux renard ».« Il faut donc savoir qu'il y a deux manières de combattre, l'une par des lois, l'autre par la force ; la premièreforme est propre aux hommes, la seconde propre aux bêtes ; comme la première bien souvent ne suffit pas, ilfaut recourir à la seconde.

Ce pourquoi est nécessaire au Prince de savoir bien pratiquer la bête et l'homme.

»La même idée que la fin justifie les moyens est exprimée dans les « Discours » : « Un esprit sage necondamnera jamais quelqu'un pour avoir usé d'un moyen hors des règles ordinaires pour régler une monarchieou pour fonder une république.

Ce qui est à désirer, c'est que si le fait l'accuse, le résultat l'excuse.

»Ce réalisme, bien loin de la morale humaniste ou de la morale chrétienne, apparaît, à première vue, tout à faitdénué de machiavélisme.

Dans son acception courante, ce terme évoque, en effet, des manoeuvrestortueuses, le recours au secret.

Rien de tout cela ici, mais seulement un exposé lucide dans lequel il n'estpas toujours facile de percevoir la marge d'ironie.

Ce « machiavélisme » apparaît cependant dans les conseilscomplémentaires.

Le prince doit « savoir entrer dans le mal s'il y a nécessité », mais il veillera cependant àsauver sa réputation.

Il fera prendre les mesures impopulaires par quelqu'un d'autre, se réservant celles quiont la faveur du peuple.

Il sera renard : « Mais il est besoin de savoir bien colorer cette nature, bien feindreet bien déguiser.

» Machiavel ajoute que les hommes sont si simples et tant soumis aux nécessités du présentque celui qui trompe trouvera toujours quelqu'un prêt à se laisser tromper.

Il importe donc avant tout depréserver ce que l'on n ‘appelait pas encore son « image de marque » : « il n'est donc pas nécessaire à unPrince d'avoir toutes les qualités dessus nommées, mais bien il faut qu'il paraisse les avoir.

»Un exemple parmi d'autres de ces pratiques, qui laissa Machiavel frappé de stupeur, mais sans doute aussiadmiratif : César Borgia, pour faire régner l'ordre en Romagne, donna toute puissance à l'un de ses hommes deconfiance connu pour être cruel & expéditif.

La paix établie, pour éviter que l'opprobre ne s'attache à sapropre personne, il fit exécuter l'officier, exposant son corps coupé en deux morceaux sur une place publique.Bel exemple de duplicité et de détermination.

Borgia possédait la « virtù ».Le Prince ne se souciera donc pas de ce qu'exige la morale, mais il veillera à manipuler l'opinion pour asseoir sa. »

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