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LE POSSIBLE

Publié le 22/02/2012

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La notion de possible se prend en trois acceptions principales : est possible, en premier lieu, ce qui n'est pas mais qui pourrait être. En ce sens, le possible s'oppose au réel, si l'on entend par "réel " cela même qui est donné dans une expérience et qui n'est pas seulement à l'état imaginaire, contrairement au fictif, au virtuel, au projet, voire à l'éventualité. L'impossible désigne alors soit ce qui, par nature, ne saurait être promu au rang de réalité, soit ce qui s'avère irréel momentanément ou provisoirement. Le possible signifie également ce dont l'existence n'implique pas contradiction et s'apparente ainsi à l'essence et à la définition, par distinction d'avec le contingent. Le possible, enfin, caractérise ce qui ne contredit pas les lois de la nature, différent en cela du miracle, par exemple. Ces significations nous orientent vers une triple problématique ontologique (le rapport entre le possible et le réel, l'essence et l'existence), épistémologique (la question de la représentation et de la connaissance) et pratique (la question morale du permis et celle, technique, du réalisable). En effet, l'idée de possible, qui s'offre dans un nombre considérable d'expressions témoignant de son extraordinaire polyvalence, recoupe à la fois ce qui est concevable ou représentable et, sur un plan pratique, ce qui est autorisé et susceptible de réalisation. On peut envisager le possible comme une réalité en puissance, le réel possédant alors une prééminence par rapport au possible qui désigne un non être. Dans une perspective inverse, le possible prévaut sur le réel qui n'en est qu'un réarrangement, de sorte que du réel sont exclus le hasard et la contingence. Mais le possible peut incarner la dimension du projet libre, de l'avenir, de l'action, plutôt qu'un déploiement de ce qui existe déjà. Le possible : un non être, une moindre réalité ou bien ce qui excède la réalité, la révèle, voire l'accomplit ? Le possible ne désigne-t-il pas une " création continue d'imprévisible nouveauté " (Bergson, La pensée et le mouvant) et, à ce titre, une dimension fondamentale de l'action et de la liberté ?

« comme la dimension du temps créateur, ouvert sur l'avenir.

Le présent n'est plus façonné par un passé donateurd'être et de signification, il possède une richesse et une spécificité irréductibles qui autorisent l'innovation et leprojet libre. Ainsi se déploie une première signification du possible, lourde de présupposés philosophiques: le possible commepotentialité d'être et comme déploiement d'une certaine temporalité où le rapport entre le passé, le présent etl'avenir est diversement apprécié: valorisation du passé dans le cas du déterminisme, le réel étant déjà contenudans le possible; valorisation de l'avenir dans le cas d'une philosophie de la liberté et du projet, le possible émanantau contraire du réel.

La notion de possible prend sens à l'intérieur d'une réflexion ontologique et épistémologique oùle problème de la connaissance et de la représentation est défini sur le plan de l'être et de l'objet.

Mais la notion depossible signifie aussi ce dont l'existence n'implique pas contradiction.

Dans cette deuxième acception, l'idée depossible est de l'ordre du jugement et il convient alors d'envisager les conditions de possibilité du possible lui-même. En premier lieu, comme le montre Leibniz, l'idée de possible recoupe celle d'essence et de définition.

Lacaractéristique de l'essence est précisément qu'elle exclut toute contradiction en son sein.

Une chose n'est, eneffet, possible que si elle s'avère non contradictoire.

Et qu'est une définition, sinon l'accord entre la chose et ce quila rend possible.

Ici le possible – l'essence – prévaut sur l'existence ou le réel.

L'impossible, au contraire, incarne cequi est proprement inconcevable, ce dont l'existence implique contradiction.

Le possible, c'est aussi ce qui nécessiteune preuve, comme on le voit avec l'argument ontologique relatif à l'existence de Dieu : cette dernière est contenueanalytiquement dans le concept de Dieu; l'existence, en sa qualité de perfection, est déduite de l'essence de Dieu,c'est-à-dire de sa possibilité.

Leibniz pense que le réel existant se déduit du possible.

Il existe certes une infinité demondes possibles, mais Dieu, dans sa perfection, n'a pu créer que le meilleur, le nôtre.

Ce monde réalise un maximumde diversité pour un minimum de désordre.

De sorte que la création des existants par Dieu relève d'un choixrationnel, guidé par le souci de l'harmonie.

Dieu existe donc nécessairement s'il est possible.

La notion de possibles'inscrit ici dans une problématique ontologique et morale qui renvoie à la question de la Théodicée, c'est-à-dire dela justification du mal. Or, Leibniz articule étroitement le plan ontologique et le plan épistémologique : le possible figure une modalité del'être et de la connaissance.

La notion de possible revêt une signification ontologique, en ce sens que le possible estun prédicat de l'être.

C'est également une proposition, un jugement qui possède une valeur objective.

Leibniz définitles conditions de possibilité du possible qui sont de deux ordres.

C'est d'abord la " compossibilité " logique qui définitle possible, c'est-à-dire la non-contradiction interne – la nécessité.

C'est ensuite la "compossibilité" réelle : estpossible une chose qui possède une réalité objective, qui s'intègre dans un monde possible, c'est-à-dire dontl'existence n'est pas empêchée ou exclue par une autre chose.

Ici l'essentiel concerne l'accord avec les conditionsmêmes de l'expérience.

Le critère de la possibilité est donc, pour une chose, l'absence d'obstacle interne et externe. Aussi la notion leibnizienne de " compossibilité " logique et réelle est-elle sous-tendue par un postulat rationaliste quiconçoit la réalité comme un système unifié et rationnel de part en part (principe de raison suffisante).

Le réel, eneffet, est déjà tout entier contenu dans l'essence puisqu'il n'est autre que le fruit d'un calcul divin qui, au sein d'unemultiplicité de choix possibles,a opté pour le meilleur d'entre eux.

L'essence, le possible préexistent au réel qui n'est autre qu'une essence en acte.Le possible est l'essence en puissance.

La réalité se réduit au concept et à la représentation, ce qui est une autremanière de réduire la contingence du réel et le hiatus entre le sujet et l'objet, au fondement de l'idée même dereprésentation. On le voit également chez Platon où le possible possède une supériorité sur le réel puisqu'il constitue la naturepermanente et universelle d'une chose.

L'existence appauvrit l'essence, le passage du possible à la réalité constitueune déchéance.

Le possible, c'est aussi la dimension des projets, des espoirs qui sont riches en comparaison de nosréalisations effectives.

Ne pouvoir être qu'une chose à la fois, voilà le drame de l'existence et on comprend dès lorsqu'on puisse la considérer comme une dégradation au regard du possible lui-même. Au contraire de Leibniz, Kant, en rupture avec toute l'ontologie classique, qualifiée de dogmatique, fait du possibleune modalité du jugement et non de l'être (Critique de la raison pure, Analytique transcendantale).

On sort ainsid'une problématique ontologique, la notion de possible étant désormais envisagée dans une optique essentiellementépistémologique, celle des conditions et des limites de la connaissance. Est possible, en effet, ce qui s'accorde avec les conditions mêmes de toute expérience : les formes a priori de lasensibilité (l'espace et le temps) et de l'entendement (les catégories).

Kant range la notion de possible dans lacatégorie de la modalité qui concerne non le contenu de la proposition en tant que tel mais son mode d'énonciation(la copule).

Trois modes de jugement peuvent ainsi être distingués : problématique (le possible, l'impossible),assertorique (le réel, l'irréel), apodictique (nécessaire, contingent).

Du coup, est impossible ce qui dépasse lesbornes de l'expérience phénoménale.

Kant distingue ce qui relève de la pensée et de la connaissance.

La chose ensoi est certes impossible puisqu'elle se situe au-delà de toute expérience possible, dans un au-delà concevable maisproprement inconnaissable (Analytique transcendantale).

Elle n'en est pas moins pensable (Dialectiquetranscendantale), dans la mesure où elle peut renvoyer à un besoin de la raison dans sa double dimension théoriqueet pratique. Kant souligne par là même l'irréductibilité de l'existence au possible, c'est-à-dire au concept, en distinguant le. »

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