Pour Lamartine
Publié le 17/02/2012
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En 1867, le gouvernement proposa au Corps législatif de voter une dotation nationale à Lamartine vieilli et ruiné. Emile Ollivier, son admirateur fervent, rédigea, pour soutenir le projet de loi, un rapport qui émut profondément le poète. Vous composerez son discours devant l'Assemblée. Messieurs, Le projet de loi, que j’ai eu l’honneur de déposer sur le Bureau de la Chambre, et que je viens défendre à cette tribune, n’est point de ceux qui divisent. J ’ai, au contraire, la ferme conviction qu’il ralliera l’unanimité de vos suffrages.
«
Son activite politique, intense durant de longues annees, n'interrompit
jamais son travail litteraire.
Son oeuvre, l'une des plus brillantes de notre
litterature, est aussi, par son etendue, Tune des plus considerables.
A la poesie personnelle succede la poesie sociale, echo de nos luttes publiques,
puis une epopee grandiose de l'humanite, avec des retours vers la poesie
philosophique dont les Meditations offraient déjà de magnifiques speci-
mens.
Des vers it passe a la prose : le voici, sur le tard, historien, auteur de
memoires, romancier populaire, critique litteraire, journaliste...
Et a toutes
ces oeuvres meme les plus hatives, it imp time la marque du genie.
Si Corneille a ete loue pour avoir ajoute au t capital moral de la France »,
la meme louange est due a M.
de Lamartine.
II a magnifie toutes les hautes
vertus dont s'honore l'humanite, et jamais sa plume ne consentit a exprimer
un sentiment vil ou une pensee basse.
La jeunesse de notre pays retrou-
vera toujours en lui ses propres aspirations vers la Beaute, la Justice, la
Liberte, la Bonte, la Fraternite.
Souvenons-nous, Messieurs, de notre adoles-
cence inquiete, seduite par l'idealisme du poete.
Sans doute, ces songes su-
blimes, ces reveries enchanteresses se sont aheurtes aux realites brutales de la vie, aux ameres desillusions de la politique.
Mais tous, n'est-ce pas,
nous resterons eternellement reconnaissants a Paede divin grace a qui fut
si beau le printemps de notre vie.
A ces raisons d'ordre moral, s'en ajoutent, d'autres, moins subjectives, plus
tangibles, plus pressantes.
Si tous ne sont pas sensibles au charme de la
poesie, a l'agrement d'une prose harmonieuse, des qu'il s'agit de Pactivite d'un homme mise au service de ses concitoyens, chacun sent qu'il ne peut
rester indifferent.
Le devouement a la cause publique impose le respect, commande la gratitude.
Du jour ou i1 parut dans cette enceinte, l'ecrivain déjà illustre devient le
plus actif, le plus devoue des representants de la Nation.
Mettant au service du pays son grand cceur, sa vaste intelligence, son savoir encyclopedique - -
car it serait temps que cesse la legende d'un « Lamartine ignorant, qui ne
sait que son ame - it ne mesura ni son temps, ni ses forces, ni, helas!
son argent, dans l'exercice de son manclat.
Il apportait a toutes les questions
le meme interet passionne.
Les problemes arides de Peconomie politique,
si peu faits, semble-t-il pour un favori des Muses, exercaient sur lui une
sorte de fascination.
Lui qui affectait de sieger « au plafond 3>, se tenait au courant de tout, s'assimilait tout avec une facilite deconcertante.
Il fut, vous le savez, la voix la plus eloquente de cette Chambre, on, par
la largeur de ses vues, Pelevation de son caractere, son complet desinteres-
sement, it s'imposa aux plus prevenus.
II devint le champion chaleureux de toutes les grandes causes nationales et humanitaires.
Tous les orateurs s'ef-
facaient devant lui lorsque se presentait un debat portant sur ces questions
qui debordent les interets de quelques-uns.
Il &tali alors la voix meme du
Droit, de la Pitie, ou de l'Honneur.
Et dans toutes ses interventions it
apportait une telle sincerite, un tel desk de ne blesser aucune susceptibilite,
que s'il eut ici de nombreux adversaires, it n'eut pas un seul ennemi.
La politique ne fut jamais pour lui le moyen de s'enrichir.
Serviteur
loyal des interets publics, M.
de Lamartine ignora toujours l'art de les
accorder avec ses propres affaires.
Aussi la carriere politique, qu'il avait
embrassee de preference a celle des lettres - qui eut pu etre plus caline et plus lucrative - entraina-t-elle la ruine de ses finances domestiques.
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