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Pourquoi désirer l'impossible ?

Publié le 16/11/2009

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L'impossible peut par exemple être défini, dans une acception large il est vrai mais courante du terme, comme ce qui est très peu probable. On dira par exemple qu'il est impossible de gagner au loto. En ce cas, il ne s'agit pas d'un pur impossible. Si je désire gagner au loto, c'est bien parce que j'ai une chance, même infime, de gagner. La formule « désirer l'impossible «, en ce cas, résonne comme un simple abus de langage, qu'il ne faut peut-être pas prendre à la lettre. De même si contradiction il y a, peut-être est-ce entre deux perceptions du réel. Le sujet proposé, de ce point de vue, n'est peut-être pas énonçable à la première personne. Je peux croire quelque chose possible, et mon entourage le reconnaître comme impossible. Mais puis-je m'avouer quelque chose impossible et la désirer quand même ? Je ne puis dire, en ce sens, que « je désire l'impossible «, mais mon entourage peut par contre reconnaître, parlant de moi, qu'il « demande la lune «. C'est que nous sommes souvent bien ignorants des paramètres qui entrent en ligne de cause, ou que nous ne sommes pas toujours très perspicaces quant à nos possibilités… La jeunesse, qualifiée souvent d'idéaliste, désirera peut-être faire la révolution, ou changer le monde, mais c'est parce que sa vision du réel est simplifiée, et qu'elle ne prend pas toutes les données en compte qu'elle prendra peut être les armes pour instaurer « la paix et l'amour «. Le vent de l'histoire a balayé plus d'une fois notre désir d'un monde meilleur, et nous a montré que la réalité était plus complexe qu'il n'y paraissait. Si donc nous désirons l'impossible, c'est tout simplement parce que nous ne le reconnaissons pas comme tel, et que nous sommes avons souvent une vision simplifiée du réel. En ce sens, le sujet « Pourquoi désirer l'impossible ? « constitue une invitation à la circonspection, à la prudence, et à l'attention. Il s'agit de « comprendre «, selon le mot de Spinoza, les chaînes causales dans lesquelles nous sommes pris, et ne pas poursuivre aveuglément des fins irréalisables. Régler, donc, son désir et ne pas le laisser courir sans fin vers des mirages à jamais fuyants.

« souvent bien ignorants des paramètres qui entrent en ligne de cause, ou que nous ne sommes pas toujours trèsperspicaces quant à nos possibilités… La jeunesse, qualifiée souvent d'idéaliste, désirera peut-être faire larévolution, ou changer le monde, mais c'est parce que sa vision du réel est simplifiée, et qu'elle ne prend pas toutesles données en compte qu'elle prendra peut être les armes pour instaurer « la paix et l'amour ».

Le vent de l'histoirea balayé plus d'une fois notre désir d'un monde meilleur, et nous a montré que la réalité était plus complexe qu'il n'yparaissait.

Si donc nous désirons l'impossible, c'est tout simplement parce que nous ne le reconnaissons pas commetel, et que nous sommes avons souvent une vision simplifiée du réel.

En ce sens, le sujet « Pourquoi désirerl'impossible ? » constitue une invitation à la circonspection, à la prudence, et à l'attention.

Il s'agit de « comprendre», selon le mot de Spinoza, les chaînes causales dans lesquelles nous sommes pris, et ne pas poursuivreaveuglément des fins irréalisables.

Régler, donc, son désir et ne pas le laisser courir sans fin vers des mirages àjamais fuyants.

Car si nous désirons l'impossible ce peut être enfin parce que notre désir lui-même ne s'est pasaffirmé comme tel, et n'est encore qu'une vague velléité.

La contradiction que suppose le sujet peut en effet êtrerésolue d'une troisième façon si nous comprenons le mot « désir » dans un sens affaibli, où le désir n'est qu'uneaspiration, ou un élan tout juste conscient de lui-même, une rêverie.

Il est de ces désirs d'impossible qui ne sontque des brefs éclairs d'une volonté teintée d'imaginaire.

C'est par exemple, en attendant patiemment le métro auxheures de pointe, après avoir passé une rude journée enfermé au bureau, le désir immédiat et irrépressible de courirseul dans les steppes mongoliennes battues par les grands vents… Je ne le désire pas « réellement », au sensoù c'est un désir spontané, qui disparaît à peine éclos, et qui se construit comme une réaction par rapport à unesituation peu acceptable, plutôt que comme un véritable projet.

Désirer l'impossible cesse donc d'être unecontradiction, si l'on traite le désir non comme une ferme volonté de voir se réaliser un événement, mais comme uneaspiration fantasque, et sans suite, née spontanément de notre imaginaire.

Car enfin le sujet ne nous demande paspourquoi nous voulons l'impossible, mais pourquoi nous le désirons.

Si la volonté suppose le calcul rationnel etl'activité consciente, le désir, quant à lui, est bien plus mystérieux.

Il ½uvre bien souvent dans l'ombre, et portenotre existence, plus qu'il ne lui donne des limites et des objectifs, comme le fait en revanche notre volonté.

Cen'est pas d'ailleurs que le désir ait un rôle amoindri dans notre action.

Pour Freud, notre inconscient est tout entierrégi par nos désirs.

Ils sont autant de pulsions, qui ignorent la contradiction, l'espace et le temps.

Bon nombre denos actions, de nos paroles, de nos rêves, sont l'expression (indirecte, car ils ont d'abord été filtré par l'instancepsychique que Freud appelle le sur moi et qui joue un rôle de censure) de cet inconscient.

Nous n'avons pas accès àces désirs, par définition inaccessibles à notre conscience, mais ces désirs guident nos existences.

Or comme nousl'avons dit, ils ignorent la contradiction.

Je puis avoir, en tant que petite fille, le désir inconscient d'être un petitgarçon.

Cela est impossible, bien entendu.

Mais mon désir, parce qu'il n'est en aucun cas soumis aux lois de la non-contradiction, me portera peut-être à me comporter de manière très virile.

Dans une acception plus essentialiste dudésir, telle que la propose Freud, pour qui le désir constitue l'essence de notre moi profond, il n'y a pasd'incompatibilité entre le désir, et l'impossible.

C'est même comme le dit Freud ce qui peut paraître tragique dansnotre existence.

Nos désirs inconscients nous poussent vers la réalisation de certaines aspirations que notreconscience reconnaît allant contre les lois de la logique, et que notre sur-moi peut reconnaître comme allant contrecelles de la morale.

Nous désirons alors doublement l'impossible.

Mais que dirons-nous de ce désir qui s'ignore.

Il n'ade désir que la charge énergétique et dynamique.

S'agit-il encore d'un désir, puisqu'il perd sa consistance de projet,au profit de l'évanescence d'une pulsion aveugle et inconséquente.

Ce que nous pouvons retenir, en l'occurrence,c'est que notre comportement est fondamentalement irrationnel.

Bien sûr, l'homme est un être doté de raison, et ilen fait régulièrement usage.

Mais dirons-nous que la plupart de nos actes, au quotidien, sont accomplis sous lecontrôle de notre raison ? Combien, de gestes accomplis machinalement, de phrases dites par habitude, et d'actionsdont nous n'avons pas mesuré la portée ou dont nous n'avons pas médité les finalités… Désirer l'impossible neparaît donc guère moins irrationnel, que de se lever chaque matin en ayant oublié ce qui pour nous donne un sens àl'existence.

Mais en tant que tel, il nous condamne, semble-t-il, à un malheur certain.>IILa question « Pourquoi désirer l'impossible ? » sonne comme une invitation à remettre en cause ce désirapparemment non rationnel.

Le « pourquoi » résonne ici comme un « à quoi bon… ? », et nous proposed'examiner l'absurdité d'un tel désir, ainsi que ses conséquences malheureuses.

Notre désir d'impossible est guidé parla croyance rousseauiste que le plaisir ne se trouve pas tant dans la réalisation de nos désirs que dans la tension quinous y porte.

Le bonheur, selon Rousseau, comme il le montre dans La Nouvelle Héloïse, réside davantage dansl'imagination de l'être aimé, et l'attente de cet être, que dans les retrouvailles avec cet être.

Autrement dit, pourRousseau, le plaisir est dans l'imagination, dans la construction imaginaire que j'élabore pour pallier le manque qu'estle désir.

Comme le montre Sartre dans l'Etre et le Néant, le désir est manque en effet, manque d'être.

Il est pro-jectif, ek-statique, comme la conscience.

Tout désir est désir de quelque chose, pour paraphraser la célèbre formuled'Husserl dans les Méditations cartésiennes.

Or si le désir est manque d'être, l'erreur de Rousseau est de croire queje trouverai un quelconque plaisir dans une réalisation virtuelle de ce désir.

Notre désir s'enracine dans notre chair, ilcoule dans nos veines, nous procure l'énergie nécessaire pour mener à bien nos entreprises.

Il ne saurait être «rassasié » des productions de notre fantaisie, toutes plus inconsistantes et évanescentes les unes que les autres.De sorte que désirer l'impossible, c'est se contraindre à une satisfaction virtuelle, ou phantasmatique.

Mais cettesatisfaction, de nature psychique, ne peut suffire à combler l'élan, physique aussi, qui nous pousse.

A quoi bonpoursuivre l'impossible, si le bonheur ne se trouve pas dans notre imagination, qui ne satisfait pas ce désir ?Si nousdésirons l'impossible, c'est souvent parce qu'il est impossible.

L'impossible est souvent perçu comme un interdit.

Ondira par exemple que si ma femme et moi n'avons pas eu une fille, mais un garçon, c'est que Dieu, ou le Sort, qui ena voulu ainsi.

Nous percevons souvent le cours des événements comme le fruit d'une intelligence supérieure, quecelle-ci ait un projet vers lequel notre histoire tende ou qu'au contraire cette volonté soit capricieuse et agissespontanément.

Or si nous désirons l'impossible, c'est parce que nous y percevons la forme d'un interdit formulé parcette intelligence supérieure.

Il en va même parfois de notre honneur.

Nous désirons l'impossible comme l'enfantdésire ce qu'il sait lui être interdit.

C'est ainsi que l'on pourrait lire le mythe du péché originel, au cours duquel Adamet Eve croquent dans le fruit défendu.

Cueillir les fruits de l'arbre de la connaissance, c'est aspirer à acquérir la. »

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