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LA PREMIERE GUERRE MONDIALE

Publié le 13/03/2011

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i la Première Guerre mondiale est déclenchée par l'assassinat, à Sarajevo, de l'archiduc François-Ferdinand, héritier du trône d’Autriche, cet événement ne fait que cristalliser des tensions issues de contentieux antérieurs. C'est le détonateur d'une guerre préparée de longue date, aux origines plus profondes. On compte parmi les raisons structurelles un nationalisme fort, la montée des impérialismes, et les volontés expansionnistes ou qui y sont associées, comme l'irrédentisme italien, des conflits précédents non résolus (perte de l'Alsace-Lorraine par la France, guerres balkaniques), auxquelles s'ajoutent des rivalités économiques, un système d'alliances militaires complexe développé entre les différents pays européens au cours du XIXe siècle après la défaite napoléonienne de 1815 et le Congrès de Vienne qui s'en est suivi, des malentendus diplomatiques (l'Allemagne croyait notamment que le Royaume-Uni resterait neutre[5],[6])... Le climat de tension régnant avait poussé les grandes puissances européennes à une course aux armements, et chaque état-major s'était activement préparé au conflit. L'attentat de Sarajevo va déclencher ce que l’historien Jean-Baptiste Duroselle appelle un « mécanisme »[7], qui va entraîner presque malgré eux les protagonistes vers une guerre totale. Pour d'autres historiens, la guerre était souhaitée par les dirigeants allemands, voir Fritz Fischer[8].

 

 

 

Carte des régimes politiques à la veille de la Première Guerre mondiale.

Antagonismes entre puissances européennes

La question coloniale et économique

 

 

Représentation de la conférence de Berlin (en 1884) où sont réunis les représentants des puissances européennes.

Articles détaillés : Politique étrangère de l'Allemagne et Weltpolitik.

L'impérialisme des nations européennes est rendu visible à travers la question coloniale. Depuis la conférence de Berlin de 1885, qui avait permis le partage de l'Afrique entre les grandes puissances européennes, les différends coloniaux ne vont cesser de s'accroître, entretenant par là même les tensions entre les métropoles. Tensions d'abord entre Français et Anglais en Égypte et, surtout, au Soudan avec la Crise de Fachoda en 1898 puis tensions entre la France et l'Italie sur la Tunisie en 1881, qui vont entraîner l'adhésion de l'Italie à la Triplice. Les tensions entre la France et l'Allemagne apparaissent dès 1905 au Maroc. Depuis 1871, l'Allemagne unifiée a rattrapé, en quelques décennies, son retard économique sur le reste de l'Europe occidentale en se dotant par exemple d’une industrie très concentrée[9]. L'Allemagne regarde donc outre-mer et vers l’Afrique où elle espère trouver des matières premières à bon marché ou même fonder des comptoirs pour écouler ses produits manufacturés[10]. Cependant, la France et l'Angleterre se sont depuis longtemps partagées l'Afrique et l'Asie. L'Allemagne, sauf en de rares endroits comme au Cameroun, Namibie, Tanzanie, Togo ne peut obtenir de zones d’influence dans les colonies. Aussi ressent-elle comme une injustice que son industrie de plus en plus compétitive se heurte à la crainte ou à l’égoïsme des autres puissances européennes[11]. Ne disposant pas de colonies de peuplement, Guillaume II souhaite prendre pied au Maroc au nom de la Weltpolitik. Les deux crises, en 1905 avec le Coup de Tanger et en 1911 avec le Coup d'Agadir, qui l’opposent à la France conduisent à une multiplication des incidents diplomatiques. Pour l'historien allemand Fritz Fischer, cette situation est l’une des principales causes du déclenchement du conflit. Dès 1905, le conflit semble inévitable entre la France et l'Allemagne

 

Les inquiétudes sont aussi d'ordre économique. Même si chaque pays développe son économie, la rivalité économique entre l'Allemagne et la France s'accroît à partir de 1912[12]. La grande puissance industrielle allemande inquiète les États européens, car les produits allemands inondent les marchés français et britanniques[13]. Cette rivalité économique « (a) contribué à alourdir le climat général entre les deux États et, par là même, à faciliter la rupture[14] ». Quant aux Allemands, ils s’inquiètent de la croissance économique et démographique de la puissance russe qui les amène à penser qu’ils seraient incapables de lui résister dans quelques années ; de telle sorte qu’ils ont peut-être intérêt à provoquer un conflit avant qu’il ne soit trop tard[15].

 

L’antagonisme franco-allemand puise également sa force dans l’idée de revanche et le retour à la mère patrie des provinces perdues d'Alsace-Lorraine[16] où la résistance à l'Allemagne est forte[17]. L'antagonisme se nourrit aussi de la crainte qu’éprouvent les Français devant la poussée démographique de l’Allemagne alors que la France connait un déclin démographique durable[18]. Enfin, l’empereur Guillaume II est très influencé par le milieu des officiers prussiens[19], garant de la solidité de l’empire, tout auréolé de ses succès du milieu du XIXe siècle et qui a forgé l’unité allemande face à l’Autriche et à la France. Pour l’empereur, la guerre, un conflit localisé dans les Balkans notamment, peut être une solution pour résoudre les problèmes territoriaux de l'Allemagne et de l'Autriche.

 

Les ambitions territoriales en Europe

 

 

Carte des Balkans en 1913

Articles détaillés : Guerres des Balkans et Crise bosnienne.

Dans l’empire austro-hongrois, où pas moins de quarante peuples cohabitent, les velléités séparatistes sont nombreuses, liées à l'éveil des minorités nationales (Bohême, Croatie, Slavonie, Galicie, etc.) qui se manifestent depuis 1848. L’Empire ottoman, déjà très affaibli, est ébranlé par la révolution des Jeunes-Turcs en 1908. L’Autriche-Hongrie en profite pour mettre la main sur la Bosnie-Herzégovine voisine. L’Autriche-Hongrie désire continuer son expansion dans la vallée du Danube, jusqu’à la mer Noire, ou, du moins, maintenir le statu quo hérité du traité de San Stefano et du traité de Berlin. En Serbie, le nouveau roi, Pierre Ier envisage la formation d'une grande Yougoslavie, regroupant les nations qui appartiennent à l'empire austro-hongrois. Dans les Balkans, la Russie trouve un allié de poids en la Serbie, qui a l’ambition d’unifier les Slaves du sud. Le nationalisme serbe se teinte donc d’une volonté impérialiste, le panserbisme et rejoint le panslavisme russe, récoltant l’appui du tsar à ces mêmes Slaves du sud. Les Balkans, soustraits de l’Empire ottoman, sont en effet l’objet de rivalités entre les grandes puissances européennes[20]. En 1878, suite à une révolte des Bulgares et à une intervention des Russes puis des Autrichiens, la partie nord de Balkans est détachée de l’Empire ottoman. La rivalité entre Russes et Autrichiens dans les Balkans s’accentue[21]. En 1912 et 1913, deux guerres affectent la région : la première est tournée contre la Turquie qui perd tous ses territoires en Europe à l’exception de la Thrace orientale ; la seconde est un conflit entre la Bulgarie et les autres pays balkaniques. Elle se traduit par un importante extension du territoire et du nationalisme de la Serbie, un mécontentement de la Bulgarie, dépossédée d'une partie de son territoire et par la création, sous la pression autrichienne, d’une Albanie indépendante qui empêche la Serbie d’avoir une façade maritime.

 

Depuis longtemps, la Russie nourrit des ambitions face à l’Empire ottoman : posséder un accès à une mer chaude (mer Méditerranée). Cette politique passe par le contrôle des détroits. Dans cet Empire russe, les Polonais sont privés d’État souverain et se trouvent partagés entre les empires russe, allemand et austro-hongrois. En Allemagne et en Angleterre, dès le début du XXe siècle, l'essor industriel et la remilitarisation se sont accentués et l'Allemagne a des intérêts dans l’Empire ottoman[22].

 

L’Italie, unifiée depuis 1860, a donné à la France, à la suite de la victoire de la France sur l’Autriche, la Savoie et le comté de Nice. Malgré un fort courant pacifiste, l’Italie veut prendre au voisin autrichien, avec lequel elle a un vieux contentieux, des territoires qu’elle considère comme italiens, les Terres irrédentes, car majoritairement italophones[23]. Elle désire s’étendre en Dalmatie, liée historiquement à l'Italie et où l’on parle aussi italien, et contrôler la mer Adriatique, à l’instar de ce qu'a fait la République de Venise, et ce d’autant plus que ses tentatives de conquête d’un empire colonial africain ont échoué après la débâcle d’Adoua en Abyssinie en 1896. Seule une partie du Tigré a été rattachée à l’Érythrée déjà italienne, ainsi que la Somalie. La Libye est devenue colonie italienne en 1911 à la suite de la guerre italo-turque.

 

Les systèmes d’alliances

 

 

Les systèmes d’alliances

Articles détaillés : Triple-Entente, Alliés de la Première Guerre mondiale et Triplice.

De vastes systèmes d’alliances se sont créés à la fin du XIXe et au début du XXe siècle. Deux grands systèmes d'alliances se dessinent. La Triplice, plus ancienne, est l’œuvre du chancelier prussien Otto von Bismarck[24]. Conscient de l’hostilité française depuis l’annexion de l’Alsace-Lorraine, Bismarck cherche, sur le plan diplomatique, à isoler la France de la IIIe République pour l’empêcher de nouer une alliance contre le Reich. En 1879, sous son impulsion, un premier rapprochement a lieu entre l’Allemagne et l’Autriche-Hongrie. En 1881, l’Italie demande son intégration dans l’association germano-autrichienne par opposition à la France qui a pris pied en Tunisie, territoire que l’Italie revendiquait. Le 20 mai, un accord tripartite voit donc le jour : la Triplice ou Triple-Alliance. Toutefois, l’Italie revendique également le Trentin et l’Istrie, les « terres irrédentes » sous domination autrichienne. Le traité est renouvelé à plusieurs reprises, même si l’attitude de l’Italie devient de plus en plus froide, en particulier avec la signature d’un accord secret de neutralité avec la France en 1902[24]. La démarche diplomatique française vis-à-vis du royaume transalpin a l’avantage d’éviter à la France de devoir combattre sur deux fronts. Par ailleurs, en 1908, il y eut un tremblement de terre à Messine : l'État-major de l'Autriche-Hongrie proposa alors une guerre préventive contre l'Italie ; l'Empereur refusa, mais cela montre bien la fragilité de l'alliance entre les deux États.

 

En 1914, l’Allemagne peut aussi compter sur la sympathie de l'Empire ottoman[24], qui a été privé par Winston Churchill de deux cuirassés construits par la Grande-Bretagne. La menace russe pour prendre le contrôle des détroits se précise. En effet, l’Angleterre qui, jadis, protégeait l’Empire ottoman, est maintenant alliée à la Russie. Pour la Turquie, seul un rapprochement avec l’Allemagne de Guillaume II peut la sortir de son isolement. Elle a ainsi pu trouver des sympathies auprès des peuples colonisés dans tout le bassin de la Méditerranée, du Caucase à Marrakech.

 

La France finit cependant par sortir de son isolement. Le 27 août 1891, une convention militaire secrète est signée entre la France et la Russie après le lancement du premier emprunt russe sur la place de Paris[25]. Ce choix diplomatique est dicté par les impératifs de la politique internationale. Cet accord est officialisé le 27 décembre 1893. L’alliance franco-russe est renforcée en 1912 et prévoit une alliance défensive entre les deux pays. La France bénéficie ainsi d’un allié de poids, notamment sur le plan démographique et stratégique, avec la possibilité d’un deuxième front à l’est de l’Allemagne, ou d’un front en Inde en cas de guerre avec l’Angleterre, tandis que l’empire tsariste peut moderniser l’économie et l’armée du pays grâce aux capitaux français. Après la crise de Fachoda en 1898 entre Français et Anglais, les deux États ont réglé leurs différends coloniaux. En 1904, inquiet des progrès économiques et commerciaux de l’Empire allemand et de la puissance acquise sur mer par la flotte allemande, le Royaume-Uni accepte enfin de sortir de son isolement. Théophile Delcassé, alors ministre des Affaires étrangères français, réussit le rapprochement franco-anglais avec la signature de l’Entente cordiale en 1904[26]. Celle-ci n’est pas un traité d’alliance liant les deux pays, mais leur destin est de plus en plus imbriqué. Enfin, en 1907, à l’instigation de la France, le Royaume-Uni et la Russie règlent leurs contentieux en Asie en délimitant leurs zones d’influences respectives en Perse, en Afghanistan et en Chine. Ainsi naît la Triple-Entente.

 

Stratégies et course aux armements

 

 

Plans de bataille des états-majors allemand (plan Schlieffen) et français (plan XVII).

Article détaillé : Culte de l'offensive.

Sur le plan stratégique, le haut état-major allemand élabore un nouveau plan militaire entre 1898 et 1905. Contrainte de combattre sur deux fronts en cas de guerre, l’Allemagne choisit en conséquence de faire porter tous ses efforts sur une rapide victoire à l’ouest. La crainte d'un encerclement est le cauchemar de l'Allemagne[27]. Le plan Schlieffen prévoit donc de mener une blitzkrieg sur le front de l’Ouest, en France et en Belgique, alors qu’une petite partie des troupes allemandes et la totalité des troupes austro-hongroises garderaient le front de l’Est, qui ne serait pas directement menacé par la Russie à cause de la lenteur de la mobilisation. Avec ce plan, l’Allemagne pense défaire la France en six semaines[28]. Pour qu'il puisse réussir, c'est-à-dire pour que l'armée allemande puisse prendre à revers l'armée française, les Allemands font le pari de violer délibérément la neutralité de la Belgique garantie par des traités internationaux que l'Allemagne avait pourtant signés. Une fois la victoire acquise à l'ouest, les armées allemandes comptent se retourner contre la Russie et l'anéantir. Les Allemands craignent plus la France que la Russie. Ce plan élaboré oblige cependant l’Allemagne de Guillaume II à prendre l’initiative des opérations militaires.

 

De son côté, la France met sur pied à partir de 1913 le plan XVII[29] qui, respectant la neutralité belge, prévoit d’attaquer l’Allemagne par la Lorraine sur un terrain moins favorable que les plaines de Flandre. Enfin, les Britanniques sous l'impulsion de Henry Hughes Wilson, directeur des opérations militaires au Ministère de la Guerre, adoptèrent un plan de débarquement du Corps expéditionnaire britannique en France en cas d'attaque allemande. L'état-major de la Royal Navy s'opposait à cette idée, car cela serait trop long à mettre en œuvre ; les Allemands seraient à mi-chemin de Paris le temps d'agir. En plus, les quatre à six divisions que les Britanniques seraient susceptibles de mettre sur pied auraient peu de poids dans une guerre où chaque camp alignait entre 70 et 80 divisions. Ils préféraient garder l'armée au pays, pour être débarquée à Anvers ou sur la côte allemande, lorsque cela serait opportun.

 

Dans les deux camps, la course aux armements s’accélère et il y a surenchère dans la préparation de la guerre. Les dépenses consacrées aux armées s’envolent. Les fortifications frontalières (du moins à la fin du XIXe siècle), l’artillerie (le fameux canon de 75 de l’armée française) et les flottes de guerre (le Dreadnought britannique et les cuirassés allemands) absorbent une bonne partie des budgets des États. Le matériel est modernisé et la durée du service militaire allongée dans plusieurs pays : en France, la durée du service militaire passe à 3 ans en août 1913[30] pour pallier (dans une certaine mesure) l’infériorité numérique de la France face à l’Allemagne. En effet, si, en 1870, les deux pays avaient une population quasi-identique, en 1914 l’Allemagne comprenait une population de 67 millions[31], tandis que la France, ayant à peine comblé la perte de l’Alsace-Lorraine, était peuplée d'environ 40 millions d’habitants[32].

 

L'attentat de Sarajevo

 

 

Procès de Gavrilo Princip suite à l'assassinat de l’archiduc François-Ferdinand d'Autriche le 28 juin 1914.

Article détaillé : Attentat de Sarajevo.

Le détonateur du processus diplomatique aboutissant à la guerre est le double assassinat de l’archiduc François-Ferdinand, héritier du trône d’Autriche-Hongrie, et de son épouse morganatique Sophie Chotek, duchesse de Hohenberg, à Sarajevo le 28 juin 1914 par un étudiant nationaliste serbe de Bosnie, Gavrilo Princip[33]. Les autorités autrichiennes soupçonnent immédiatement la Serbie voisine d’être à l’origine du crime. L'Autriche-Hongrie interpelle l'Allemagne sur cela, mais pas l'Italie. Le 5 juillet, l’Allemagne assure l’Autriche-Hongrie de son soutien et lui conseille la fermeté. Les Autrichiens pensent battre facilement la Serbie et lui donner ainsi une bonne leçon qui calmera ses ardeurs expansionnistes. Il semble au haut commandement allemand que jamais les chances d’un succès contre la Serbie, la Russie et la France ne seraient aussi favorables. C’est la politique dite « du risque calculé » définie par le chancelier Bethmann-Hollweg. L’Autriche, quant à elle, compte profiter de l’occasion pour éliminer la Serbie en tant que puissance dans les Balkans[34].

 

L'entrée en guerre

En Allemagne, Guillaume II assure l'Autriche de son appui inconditionnel. C'est alors que survient l'attentat de Sarajevo, prétexte pour l'Autriche d'en finir avec le foyer pro-slave que constitue la Serbie.

 

Crise de juillet

 

 

La déclaration de guerre de l'Empire Allemand, signée par le Kaiser Guillaume II

Articles détaillés : Crise de juillet et Tentatives de paix pendant la Première Guerre mondiale.

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