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preromantisme

Publié le 26/12/2012

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Université Palacký à Olomouc Faculté de Lettres Département des Études romanes Le thème de la nature dans la sensibilité préromantique : Paul et Virginie, Atala, René Theme of Nature in the period of Pre-Romanticism : Paul and Virginie, Atala, René Bc. Veronika Toralová Directeur de recherche : doc. PhDr. Marie Vo?dová, PhD. Olomouc 2010 Je, soussignée, Veronika Toralová, atteste avoir réalisé ce travail par moi-même et avoir noté toutes les références utilisées dans ce mémoire. Veronika Toralová A Olomouc, le 10 mai 2010 2 Je voudrais remercier doc. PhDr. Marie Vo?dová, PhD. qui a dirigé mon travail, Bernadette et Gérard Audelain ainsi que Markéta et Olivier Debroise qui l'ont corrigé. 3 Sommaire Introduction ....................................................................................... 8 I Nature inanimée ............................................................................ 18 I.1 Eau ............................................................................................ 18 I.2 Rochers et terre ......................................................................... 22 I.3 Vent .......................................................................................... 25 I.4 Orage et tempête ....................................................................... 26 I.5 Feu ............................................................................................ 29 I.6 Astres, jour, nuit ........................................................................ 32 I.6.1 Soleil ................................................................................. 32 I.6.2 Lune .................................................................................. 34 I.6.3 Nuit ................................................................................... 35 II Nature animée ............................................................................. 37 II.1 Forêts et arbres ....................................................................... 37 II.2 Plantes et fleures ..................................................................... 40 II.3 Animaux ................................................................................. 43 III Nature humaine ......................................................................... 51 III.1 Nature des personnages ......................................................... 51 III.2 Habitudes et traditions ........................................................... 53 III.3 Religion ................................................................................. 55 III.4 Temps, espace et nature (mesure de temps, d'espace) ......... 59 Conclusion ........................................................................................ 62 Bibliographie ................................................................................... 69 Annexes ............................................................................................ 71 I Liste des oeuvres de Bernardin de Saint-Pierre et de Chateaubriand ....................................................................... 71 II Portraits de Bernardin de Saint-Pierre et de Chateaubriand ...................................................................... 72 III Exemples de diverses éditions .................................................. 73 4 « Mais de tout ce que renfermait cette enceinte rien n'était plus agréable que ce qu'on appelait le Repos de Virginie. Au pied du rocher la Découverte de l'amitié est un enfoncement d'où sort une fontaine, qui forme dès sa source une petite flaque d'eau, au milieu d'un pré d'une herbe fine. « « Aux environs, l'herbe de baume, dont les feuilles sont en coeur, et les basilics à odeur de girofle, exhalaient les plus doux parfums. Du haut de l'escarpement de la montagne pendaient des lianes semblables à des draperies flottantes, qui formaient sur les flancs des rochers de grandes courtines de verdure. Les oiseaux de mer, attirés par ces retraites paisibles, y venaient passer la nuit. « Jacques-Henri Bernardin de Saint-Pierre (Paul et Virginie, p. 196-197, 197-199) 5 « Les deux rives du Meschacebé présentent le tableau le plus extraordinaire. Sur le bord occidental, des savanes se déroulent à perte de vue ; leurs flots de verdure, en s'éloignant, semblent monter dans l'azur du ciel où ils s'évanouissent. On voit dans ces prairies sans bornes erre à l'aventure des troupeaux de trois ou quatre mille buffles sauvages. Quelquefois un bison chargé d'années, fendant les flots à la nage, se vient coucher parmi de hautes herbes, dans une île du Meschacebé. A son front orné de deux croissants, à sa barbe antique et limoneuse, vous le prendriez pour le dieu de fleuve, qui jette un oeil satisfait su la grandeur de ses ondes, et la sauvage abondance de ses rives. « François-René de Chateaubriand (Atala, p. 98) 6 « Les dimanches et les jours de fête, j'ai souvent entendu, dans le grand bois, à travers les arbres, les sons de la cloche lointaine qui appelait au temple l'homme des champs. Appuyé contre le tronc d'un ormeau, j'écoutais en silence le pieux murmure. Chaque frémissement de l'airain portait à mon âme naïve l'innocence des moeurs champêtres, le calme de la solitude, le charme de la religion, et la délectable mélancolie des souvenirs de ma première enfance. [ ... ] Tout se trouve dans les rêveries enchantées où nous plonge le bruit de la cloche natale : religion, famille, patrie, et le berceau et la tombe, et le passé et l'avenir. « François-René de Chateaubriand (René, p. 316) 7 Introduction La littérature préromantique a apporté une nouvelle approche à la création littéraire. Les écrivains de ce courant littéraire ont aimé le thème de la nature. Notre mémoire étudiera ce thème-là et le présentera de manière détaillée. Pour notre analyse, nous avons choisi trois livres de deux auteurs : Paul et Virginie de Jacques-Henri Bernardin de Saint-Pierre, Atala et René de François-René de Chateaubriand. Ces livres représentent bien le préromantisme y compris le thème de la nature et ont beaucoup en commun. Il faut dire qu'il existe plusieurs approches littéraires au thème de la nature et à sa complexité. La nature elle-même nous propose beaucoup de possibilités, de divers points de vue, mais avant de commencer, il faut répondre à la question essentielle : Comment partager la nature pour une analyse approfondie ? Le personnage très important du XXe siècle qui a consacré sa vie à la théorie littéraire, le critique Gaston Bachelard, a formulé sa propre théorie des éléments naturels. Il divise la nature en quatre éléments de base : l'eau, le feu, la terre et l'air.1 Dans ses livres, il s'approche de la psychanalyse et la lie à la poétique. Il en cherche les motifs cachés et souvent insolites et les relie à l'âme humaine. Nous connaissons bien ses idées qui nous ont servi d'exemple. Mais comme division essentielle, nous utiliserons celle qui nous est familière et qui est semblable à celle des sciences naturelles : la nature inanimée, c'est-à-dire cette partie de la nature qui ne grandit pas et qui ne peut pas respirer. Malgré cela, elle nous paraîtra souvent assez vivante et spontanée. Selon notre approche, ce sera l'eau, les rochers et la terre, le vent, l'orage, le feu et les astres. La deuxième grande partie de la nature est faite par les éléments animés qui peuvent - au point de vue biologique - respirer et grandir. Dans cette catégorie, on trouvera les forêts et les arbres, les plantes et fleurs et les animaux. Il ne faut pas oublier les hommes qui font aussi partie 1 Ses livres qui traitent de ces éléments : L'Eau et les rêves, La Psychanalyse du feu, La terre et les rêveries du repos, La terre et les rêveries de la volonté, L'Aire et les songes 8 de cette catégorie, mais dans notre mémoire, ils auront une place à part. Cette classification correspondra aux chapitres. La première partie sera appelée Nature inanimée et elle sera divisée en six chapitres consacrés chacun à un élément précis. La deuxième partie s'intitulera Nature animée. Elle comportera trois grands chapitres. La dernière grande partie sera appelée Nature humaine et ses chapitres seront Nature des personnages, Habitudes et traditions, Religion et Temps, espace et nature (mesure du temps, de l'espace). Le but de ce travail sera d'analyser les motifs de la nature dans les trois livres mentionnés et de les comparer. Nous allons répondre aux questions suivantes : Quelle est l'importance de la nature dans chaque livre ? Combien de motifs de la nature peut-on trouver dans les livres ? Quel livre en contient le plus ? Peut-on trouver des motifs communs dans les livres ? Ces motifs correspondent-ils aux sentiments des héros ? Si oui, lesquels ? Quelle est la nature des hommes ? Quelle est l'importance des traditions et de la religion ? Comment cela se relie-t'il à la nature ? Comment les personnages s'orientent-ils dans le temps et dans l'espace ? Il faut dire que les deux premières parties se distingueront de la troisième qui analysera les personnages en liaison avec la nature entière. Chaque chapitre des parties Nature inanimée et Nature animée présentera un élément, un motif de la nature et son traitement dans chaque ouvrage. Nous signalerons le changement de motif par des caractères gras et nous parlerons de ses fonctions dans l'intrigue. Souvent, on divisera le motif en deux aspects essentiels - positif et négatif. On comparera le motif dans les livres, on essaiera de trouver les points communs et différents ainsi que la liaison avec les personnages. Vers la fin du chapitre, nous nous pencherons, si possible, sur les symboles et métaphores liés au motif. Il faut préciser que chaque élément de la nature prendra une place différente. Le chapitre Rochers pourrait nous sembler un peu excessif, parce qu'il comportera aussi la terre et le terrain ; au contraire, on séparera les chapitres Vent et Orage et tempête. 9 La troisième partie Nature humaine décrira en bref les traits de caractère des personnages. Cette partie inséparable du reste de la nature n'analysera pas seulement les personnages principaux, mais aussi la culture des personnages des livres en général. Elle dévoilera de nombreuses habitudes, traditions et cérémonies, elle décrira leurs liens avec le thème de la nature. Le chapitre Religion ne parlera pas seulement de la religion des personnages, mais il cherchera aussi son rapport avec la nature. Le dernier chapitre traitera de la mesure du temps et de l'espace à l'époque, nous en donnerons quelques exemples concrets. Ce dernier chapitre terminera notre analyse. Pour que les idées présentées soient plus claires, nous utiliserons des citations tirées des ouvrages ou bien leurs paraphrases. La conclusion résumera tout le mémoire pas à pas et elle répondra aux questions annoncées. La fin du mémoire sera faite d'annexes - la liste des oeuvres de Bernardin de Saint-Pierre et de Chateaubriand, leurs portraits et des illustrations de diverses éditions des livres analysés. Avant de commencer notre analyse, présentons le préromantisme en tant que courant littéraire, son approche vers la nature et ses représentants les plus connus. Le préromantisme français - précurseur du romantisme - a commencé à se répandre dans la moitié du XVIIIe siècle ; il est difficile de trouver la date précise de la naissance du préromantisme. Nous savons bien que l'appellation préromantisme n'existait pas à l'époque. Elle est née pendant la première moitié du XXe siècle et a été imposée par le savant littéraire français Paul van Tieghem. Ce courant littéraire souvent négligé symbolise le passage du classicisme en romantisme. Nous pouvons dire autrement que le préromantisme est la lente maturation du romantisme qui a dégagé de l'âme classique l'âme romantique. Un autre savant littéraire, Philippe van Tieghem, relie le préromantisme et le romantisme au classicisme 2 : selon lui, ce 2 Dans son livre Petite histoire des grandes doctruines littéraires en France. PUF, Paris 1946. 10 nouveau courant est l'élargissement du classicisme parce que les romantiques ainsi que les préromantiques ne voulaient pas créer une nouvelle doctrine littéraires, mais compléter celle du classicisme. Mais les thèses différaient : les préromantiques et les romantiques proclamaient l'individualité de l'oeuvre et des personnages, l'indépendance de l'art et la liberté. Ils cherchaient l'inspiration dans les littératures étrangères, ils voulaient les accueillir. Le héros classique sert à la société et à ses idéaux, le héros préromantique ainsi que romantique agit pour lui-même. Sa sensibilité forme l'âme romantique, sensible et mouvementée. Cela se relie à la rêverie et au mal du siècle, nouvelle attitude devant la vie liée à une grande vague de passions. Nous pouvons nous demander d'où vient cette évolution de la sensibilité ? La société elle-même l'a causée : la civilisation, l'ordre économique et politique du pays. Cette situation se retrouvait dans la littérature ; les auteurs ont cherché comment exprimer cette âme nouvelle. Ils ont écrit souvent des oeuvres autobiographiques pleines de mélancolie et d'émotions. La littérature préromantique se distingue par trois grands piliers d'appui3 : sentiment de la nature, sentiment religieux et amour. Pour que nous comprenions ces idées, il nous faut des exemples concrets d'ouvrages préromantiques. Présentons maintenant les écrivains préromantiques les plus connus : Le premier représentant le plus connu et le plus important est sans doute Jean-Jacques Rousseau. Selon lui, le caractère humain est bon s'il n'est pas détérioré par la civilisation ; donc il faut revenir à la nature, mais jamais à l'état sauvage. Son oeuvre pleine de ses pensées, le roman épistolaire Julie ou la Nouvelle Héloïse, a servi d'exemple à plusieurs écrivains français et étrangers. Ce roman a résumé le préromantisme français, il a inspiré le préromantisme ainsi que le romantisme et il a proclamé l'âme moderne. Rousseau y a accompli les exigences de l'oeuvre : elle devait être morale et vraisemblable, le 3 Lagarde, A. ; Michard, L. : XVIIIe siècle. Bordas, Paris 2004, p. 263. 11 monde devait être proche du nôtre et l'écrivain devait décrire des états de l'âme. Il est désigné barde et apôtre de la littérature préromantique. Son disciple et prédecesseur de Chateaubriand Jacques-Henri Bernardin de Saint-Pierre est né au Havre en 1737. Sa jeunesse fut pauvre et aventureuse : déjà à 12 ans, il a voyagé en Martinique. Plus tard, il s'est rendu en Hollande, en Allemagne, en Russie (au service de ce pays), en Pologne. Il a séjourné à l'île de France (1768-1770) - actuellement l'île Maurice. Ce dernier voyage surtout lui a laissé des souvenirs inoubliables. Il a fréquenté aussi le salon philosophique de Mlle de Lespinasse et celui de Mme Necker. Il est devenu ingénieur. Il s'est lié d'amitié avec Jean-Jacques Rousseau et il a partagé avec lui non seulement l'amour de la nature, mais aussi l'horreur de la civilisation. Il fut intendant du Jardin des Plantes et du cabinet d'histoire naturelle à Besançon. En 1794, il fut nommé professeur de morale à l'École Normale Supérieure. Un an plus tard, il a rejoint le rang des membres de l'Institut de France et en 1803, il a été élu membre de l'Académie française. Bernardin de Saint-Pierre est mort en 1814. Pendant sa vie, il a publié un grand ouvrage consacré à la nature - Études de la nature dont une partie est devenue très connue - le court roman Paul et Virginie. François-René de Chateaubriand, annoncé par Roussseau et Bernardin de Saint-Pierre, est parfois considéré comme un représentant du romantisme, mais nous le qualifions comme un auteur préromantique. Ses ouvrages Atala et René sont parus tout au début du XIXe siècle. Il est né en 1768 à Saint-Malo.4 Élevé dans la foi chrétienne, il a fait ses études à Dol, Rennes et Dinan. Il aimait lire des ouvrages des Lumières. Il a obtenu le brevet de sous-lieutenant et a voyagé en Amérique pendant 5 mois en 1791. Plus tard, il s'est établi à Londres où il vivait dans la pauvreté. Très marqué par la mort de sa mère puis de sa soeur Julie, il s'est tourné de nouveau vers le christianisme. Il a entrepris un voyage en Auvergne, en Suisse et en Bretagne et un grand 4 Le livre qui traite de son paysage : Richard, J.-P. : Paysage de Chateaubriand. Le Seuil, Paris 1967. 12 voyage en Orient : il a visité la Grèce, les Lieux Saints, l'Égypte, la Tunisie et il est revenu en traversant l'Espagne. Pendant sa vie, il a occupé plusieurs hautes charges : il a été élu à l'Académie française en 1811 et pair de France, il a exercé la fonction de ministre de l'Intérieur et plus tard, des Affaires Étrangères. Le roi l'a aussi nommé diplomate à Berlin, à Londres et à Rome. Sa carrière politique a fini par une mission à Prague. Chateaubriand a consacré sa vieillesse à la littérature et il a donné la lecture de son oeuvre dans le salon de Mme Récamier. Il est mort en 1848. Retournons maintenant aux thèmes préromantiques : La religion chrétienne est proche des héros préromantiques. Elle est inséparable de la nature. La solitude, le paix et le mystère de la nature aident l'âme préromantique à se rapprocher de Dieu. Le héros cherche Dieu dans la nature puisqu'elle présente sa majesté et sa création. La plus grande inspiration de la religion se retrouve dans le livre Atala. Cette oeuvre prend sa source dans la Bible. La religion se rattache à la morale et aux vertus ; des héroïnes préromantiques préfèrent la mort au risque de succomber à la tentation ou de trahir leur promesse. Les héros doivent combattre la passion au nom de la vertu - cette vertu permet de résister. En parlant des passions, on touche au thème de l'amour qui reste éternel dans ces livres. Tous les héros éprouvent l'amour passion (amour comme la vague des passions) qui ne se réalise jamais totalement. Le livre Julie ou la Nouvelle Héloïse a présenté pour la première fois le nouvel aperçu de ce sentiment beau et majestueux, mais aussi douloureux ; il montre ses nombreux côtés : la fatalité de la passion, les tourments de la séparation, le temps qui passe, la recherche de l'oubli dans les voyages, la prédestination des amants et les émotions omniprésentes.5 Dans ce livre ainsi que dans les autres livres, l'amour n'abaisse pas les coeurs enflammés ; l'amour, la passion se lient à la vertu. On peut comprendre ces livres comme un hymne à l'amour. 5 Cf. Lagarde, A. ; Michard, L. : XVIIIe siècle, op. cit., p. 263. 13 Les écrivains préromantiques proposent aux lecteurs l'image naturelle et réelle des âmes simples. Rousseau a cherché le premier comment exprimer la sensibilité de cette nouvelle âme. Il l'a trouvée dans la nature et sa beauté. Lui ainsi que les auteurs suivants préfèrent le milieu de la campagne, la nature sauvage et souvent exotique. Le paysage véritable s'oppose à la vie urbaine qui est toujours pleine de mensonges et de vaines ambitions. Le préromantisme est amoureux de la nature, il la découvre non seulement avec les yeux, mais aussi avec le coeur. Les héros aiment percevoir et contempler la nature qui est un idéal inaccessible. Les histoires des héros se déroulent dans un milieu concret pour que la nature puisse créer le décor réel et effectif. Mais comment peut-on trouver la partie de la nature qui nous conviendra le mieux ? Rousseau nous montre dans ses Confessions qu'on ne doit pas aller trop loin pour l'inspiration : « Pour placer mes personnages dans un séjour qui leur convînt, je passai successivement en revue les plus beaux lieux que j'eusse vus dans mes voyages. Mais je ne trouvai point de bocage assez frais, point de paysage assez touchant à mon gré... Il me fallait cependant un lac, et je finis par choisir celui autour duquel mon coeur n'a jamais cessé d'errer. « 6 Ce grand personnage de la littérature française savait être sensible à la grandeur de la nature et à son mystère. Il a découvert la nature dans ses rapports avec l'homme et son âme. La nature enfin « offre à l'homme des spectacles pour le charmer, pour apaiser son coeur ; elle éveille en nous des sentiments en accord avec ses spectacles. « 7 La nature crée donc le cadre des émotions humaines, elle les suggère et les souligne. Par exemple la mélancolie du héros comme un état de l'âme très fréquent se reflète dans la nature par les motifs suivants : l'automne, la nuit et la lune, les ruines et les tombeaux... Le héros se réjouit de la beauté naturelle, il y trouve son bonheur (mais pas pour toujours), par exemple Saint-Preux ne se sent meilleur que dans ses montagnes préférées - celles du Valais. L'harmonie absolue du paysage s'unit d'une manière extraordinaire aux sentiments humains. 6 7 Ibid., p. 281. (Confessions IX) Ibid., p. 263. 14 Disciple de Rousseau, écrivain dont la production reste à découvrir, Bernardin de Saint-Pierre, est un des créateurs de l'exotisme dans la nature. C'est pour cela qu'il est désigné prédecesseur de Chateaubriand. Sa vie comme celle de ce dernier a été marquée par un grand goût des voyages. Il a fait connaissance de nombreux pays et paysages. L'île de France, région tout à fait exotique, l'avait inspiré le plus. Grâce à cette expérience, le paysage de ses romans idylliques est plein de coloris. Ses Études de la Nature contiennent ses thèses ainsi que le roman Paul et Virginie qui devait être l'application des Études aux histoires et bonheur de deux familles. Ce qui est intéressant c'est que les enfants de Bernardin de Saint-Pierre s'appellaient aussi Paul et Virginie. Le nom de Virginie se rapporte au terme de vierge.8 Il a cherché - à l'exemple de Rousseau - l'harmonie et l'ordre dans la nature et il les a associés aux sentiments humains. La nature peut être comparée à une tendre amie qui se conforme à la situation du personnage. La nature, à la base, correspond à l'homme car Dieu (ou la Providence) l'a créée et organisée pour lui et pour son bonheur. La nature a aussi ses lois morales ; nous ne pouvons pas les connaître par notre raison, mais par le sentiment, grâce à l'existence de Dieu et grâce à notre âme immortelle. Cet écrivain laisse parler son âme mélancolique et sa riche imagination : s'il pleut, il voit une belle femme pleurer.9 Cette imagination peut nous rappeller René, héros du livre René de Chateaubriand. Dans ses Harmonies de la Nature, élargissement des Études, il montre qu'aucun élément du monde n'existe par hasard dans le système, tout est dans une harmonie absolue : 8 9 Voir le chapitre Nature des personnages Ibid., p. 345. (Les Études de la Nature XII) 15 Harmonie céleste ou soli-lunaire Six harmonies physiques Élémentaires Organisées 1 aérienne 1 végétale 2 aquatique 2 animale 3 terrestre 3 humaine Six harmonies morales Élémentaires Organisées 1 fraternelle 1 spécifiante 2 conjugale 2 générique 3 maternelle 3 sphérique10 Malgré tout cela, Bernardin de Saint-Pierre n'avait pas seulement l'esprit chimérique, mais était aussi (comme Rousseau) nerveux et sa sensibilité était assez maladive. François-René de Chateaubriand, l'auteur le plus jeune, a adhéré à la pensée de ses deux précurseurs. Sa vie fut liée inséparablement à la nature et aux passions. Nous découvrons les signes de son intérêt pour la nature dans son enfance. Le caractère de ses parents l'a influencé : son père était sombre, sa mère pieusement mélancolique. Né au bord de l'océan, il passait des heures à le comtempler en écoutant le refrain des vagues. La famille s'est installée au château de Combourg qui renforce encore plus l'imagination et la rêverie de Chateaubriand. Il rêve de paysages éloignés (surtout l'Orient) ; il a cherché et ressenti la solitude, l'exaltation et la tristesse qui menaient à 10 Beaumarchais, J.-P. de ; Couty, D. ; Rey, A : Dictionnaire des écrivains de langue française. A-L. Larousse, Paris 2001, p. 202. 16 une sensibilité ardente, pleine de passions. Cette sensibilité se reflète surtout dans René, mais aussi dans Atala. Il a admiré la nature tendre et se promenait souvent avec sa soeur Lucile. Son voyage en Amérique lui a montré la face exotique de la nature, la nature vierge étant encore plus belle. Les Indiens - les tribus sauvages - et cette nature extraordinaire lui ont apporté le premier succès littéraire en France.11 On peut dire que toute son âme se reflète dans son oeuvre. Ses personnages vivent dans l'harmonie avec la nature qui - ainsi que chez Rousseau et Bernardin de Saint-Pierre - est capable de s'accomoder absolument des sentiments souvent orageux des hommes. La tombe de Chateaubriand exprime bien son attitude de la vie et de la nature : elle est située à la pointe du Grand-Bé près de SaintMalo, face à la mer. Bien que les auteurs préromantiques soient plus nombreux, ces trois écrivains représentent très bien les idées de ce courant littéraire. 11 L'ouvrage qui traite des premiers livres de Chateaubriand : G. Mouron : Études sur les premières oeuvres de Chateaubriand. Nizet, Paris 1962. 17 I. Nature inanimée I.1 Eau L'eau joue un rôle très important dans tous les livres sous la forme de la rivière et de la pluie. La mer (l'océan) figure dans Paul et Virginie12 et René. L'eau symbolise la vie ainsi que la destruction et en plus, dans Paul et Virginie, la mort. Dans ce livre, l'eau est l'élément le plus important. Elle nous montre ses deux aspects : celui qui aide, qui sert au repos, et celui qui est capable de tout détruire. Cette opposition se trouve dans tous les livres, mais elle est remarquable dans Paul et Virginie. Le pôle positif de l'eau est présenté par les motifs suivants : Elle sert aux hommes pour qu'ils puissent vivre et en profiter - la mer donne ses fruits divers13 ; et le petit lac près des maisons de Paul et Virginie permet d'y laver le linge des familles. Nous apercevons ce petit lac qui se trouve au milieu du jardin dans un endroit appelé le Repos de Virginie. Il prend sa source au pied du rocher appelé la Découverte de l'Amitié. Ce lieu magique entouré d'un pré et les petits lacs aux environs reflètent la nature alentour comme des miroirs : « Les eaux qui descendent du sommet de ces roches formaient au fond du vallon, ici des fontaines, là de larges miroirs qui répétaient au milieu de la verdure les arbres en fleurs, les rochers, et l'azur des cieux. « 14 Nous voyons que ce plan d'eau est calme et invite au repos, on peut le comparer à l'oasis au milieu du désert. Ainsi le narrateur habite près d'un fleuve calme qui symbolise la vivacité et la tranquillité. Ce fleuve, les chutes d'eau proches et le petit lac sont les lieux préférés de Paul et Virginie. Ils s'y rendent souvent et se reposent auprès d'eux. Dans Atala, l'eau est représentée surtout par de grands fleuves (Mississipi, Tennessee et ses affluents) qui fascinent le narrateur au début, quand il décrit la beauté de la nature sauvage. Il est étourdi par 12 L'étude qui traite de cette oeuvre : Fabre, J. : Paul et Virginie, pastorale. Dans : Lumières et romantisme. Klincksieck, Paris 1963. 13 Voir le chapitre Animaux 14 Bernardin de Saint-Pierre, J.-H. : Paul et Virginie. Librairie Générale Française. Paris 1984, p. 193. 18 leur beauté et leur grandeur, mais il sait aussi ce qu'ils peuvent causer - les innondations détruisantes. Le motif allégorique des innondations figure da...

« 2                                        Je, soussignée, Veronika Toralová, atteste avoir ré alisé ce travail  par  moi-même  et  avoir  noté  toutes  les  références  ut ilisées  dans  ce  mémoire.        Veronika Toralová  A Olomouc, le 10 mai 2010       . »

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