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Quelle différence y a-t-il entre le plaisir et l'intérêt ?

Publié le 02/06/2011

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Exorde. — Nous n'agissons jamais sans motifs, et, en dépit de certaine doctrine appelée la liberté d'indifférence, toutes nos résolutions s'expliquent par l'influence d'un motif ou mobile qui nous a poussés dans tel ou tel sens; et cette influence est même si puissante que le déterminisme en a conclu que la liberté n'était qu'une pure chimère. Or, tous les motifs qui agissent sur notre volonté et la déterminent peuvent se ramener à deux principaux, l'utile et l'honnête, l'intérêt et le devoir. Le mot intérêt représente et résume tous les motifs égoïstes, toutes les influences qui nous poussent à nous prendre nous-même pour but de nos actions; on peut y distinguer l'intérêt proprement dit et le plaisir. Relevant l'un et l'autre de la sensibilité, ils en ont les caractères, et par conséquent il n'y a pas entre eux de différence essentielle.

« l'intérêt suppose le calcul, la réflexion, l'intelligence, à la fois pour discerner le but à atteindre et combiner lesmoyens qui peuvent y conduire.

Quelle sagesse, quelles réflexions suppose, par exemple, le choix d'une carrière, sil'on ne veut pas se confier au hasard aveugle, se jeter tête baissée dans les aventures? Comparer entre elles lesprofessions nombreuses et variées qui s'offrent à un jeune homme dans nos sociétés si compliquées, en peser lesavantages et les inconvénients, examiner dans quelle mesure chacune d'elles peut convenir à nos aptitudes et à nosgoûts, être à la portée de notre ambition et de nos moyens, tout cela suppose tellement la solidité d'un esprit netet judicieux que les parents éclairés et prévoyants se gardent bien de laisser un choix si important à l'inexpériencede leurs enfants; et la carrière choisie, que d'efforts d'intelligence pour se faire une place dans le monde et pour laconserver? Dans cette lutte pour l'existence, le succès n'est-il pas à celui qui a reçu de la nature les dons del'esprit, à celui surtout qui cultive et développe ces qualités naturelles? Un homme obtus et borné n'arrive jamais àrien, même quand il est servi par les circonstances et dispose de tous les moyens qui, d'ordinaire, conduisent ausuccès, tandis qu'un homme intelligent et actif, même pauvre et obscur, est toujours assuré d'arriver à une situationhonorable. conclusion.

— On voit donc que, dans cette mobilité qui lui est commune avec le plaisir, l'intérêt présente une fixitérelative; supérieur pour cette raison aux entraînements capricieux du motif purement sensible, le motif intéressé l'estencore par ce fait qu'il peut rendre et rend de réels services à la société comme aux individus : enfin le plaisiraveugle peut s'allier à la médiocrité intellectuelle, tandis que l'intérêt suppose le calcul et la réflexion, uneintelligence plus ou moins développée.

Mais le plaisir et l'intérêt, quoique distincts, ne sont pas séparés par desdifférences essentiel) s, comme nous l'avons déjà dit, et l'histoire de la philosophie présente un fait qui montre bienque le plaisir n'est qu'une forme de l'intérêt et en réalité se confond avec lui.

L'école cyrénaïque avait proposé pourbut à la vie humaine le plaisir sensuel, la jouissance immédiate, la volupté dans le mouvement; les conséquencesgrossières et funestes, de Ce système firent reculer Épicure, et, tout en disant que la sagesse consiste àrechercher le plaisir et à éviter la douleur, il voulut qu'on évitât les voluptés sensuelles, qu'on leur préférât lesjouissances plus délicates et plus durables de l'esprit et du coeur; suivant lui, il y avait des plaisirs à éviter, desdouleurs même à subir en vue du plus grand bonheur possible.

Cette doctrine était donc une recherche calculée dubonheur, ce qui suppose la raison, la réflexion, tandis que le plaisir proprement dit est aveugle, sans règle et sansfrein; c'est ainsi que l'épicurisme se rapproche de la morale de l'intérêt et n'est en somme qu'une doctrine d'intérêtbien entendu.

Toutefois si l'intérêt est supérieur au plaisir, il n'a pas une valeur morale qui permette d'en faire notrerègle de conduite, et il n'est légitime que quand il est subordonné au devoir, à l'honnêteté, qui seule peut servir derègle universelle et obligatoire à l'activité humaine.. »

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