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La querelle du merveilleux chrétien et païen dans le chant III de l'Art poétique

Publié le 27/05/2011

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La querelle du merveilleux chrétien et du merveilleux païen occupe dans le poème de Boileau 81 vers, tandis que tout l'exposé des règles de l'épopée n'en a que 63. C'est déjà indiquer son importance. Au moment de la Renaissance, l'épopée du moyen âge est oubliée, le merveilleux chrétien discrédité : les idées de Ronsard dans la Franciade. N'oublions pas cependant les protestations soit de fait, soit de doctrine, et signalons Du Bartas et Vauquelin de la Fresnaye qui se séparent de Ronsard sur ce point. L'emploi du merveilleux chrétien finit par redevenir une des règles du poème épique. Sans doute des protestations- vont encore se produire, mais un fait général c'est que les théoriciens sont convaincus qu'ils doivent démontrer la vérité de leurs théories en faisant des chefs-d'oeuvre; c'est notamment l'avis de Desmarets. Aussi les oeuvres se multiplient-elles : Moïse sauvé (1653), Clovis (1654), Marie (1654), les premiers chants de la Pucelle (1656), Saint-Louis (1658), Jonas (1663), Samson et Josué (1665), Les Sarrazins chassés (1668), La Madeleine au désert (1668), Marie-Madeleine (1669), Esther (1670).

« tirera pas des machines poétiques.

Mais alors, dira Boileau, la fiction disparaît dans le poème épique.

On répondra : ilreste à savoir si cette définition que le poème épique vit de fictions doit être acceptée. 2° — Merveilleux païen.

Au vers 217, Ce n'est pas que j'approuve en un sujet chrétienUn auteur follement idolâtre et païen... Boileau semble faire une restriction à sa théorie.

En réalité ces deux vers ne sont pas très explicites.

Un sujetchrétien qu'est-ce que cela signifie ? Dont les personnages sont chrétiens, modernes ? Au fond, il s'agit d'uneattaque contre le Tasse, contre la Jérusalem, contre l'emploi de divinités païennes dans un sujet chrétien etmoderne.

D'ailleurs, Boileau ne désapprouve, dans ces sujets religieux, que l'auteur follement idolâtre et païen.

Entout cas, pour les sujets non exclusivement religieux, son opinion est très nette : seul l'emploi du merveilleux païenest permis. 1° a) Le catholique le recommande.

Les catholiques, qui étaient pour le surnaturel chrétien, trouvaient impie lemerveilleux païen; mais, dit Boileau, leur zèle est déplacé; c'est une pieuse erreur qui porte à faux.a') Boileau, ici, n'a pas grand tort ; on ne peut pas dire qu'il, soit impie de représenter Jupiter quand on n'y croitpas. 2° a) Le poète le recommande ail nom de la tradition.

Ce sont des ornements reçus, implantés depuis Ronsard.b) Il y a eu au IVe siècle une sorte de foi dans les dieux antiques qui venait au moins de l'imagination.

Existait-elleau temps de Boileau ? Si oui, le premier argument de Boileau aurait été condamnable et il aurait fallu rejeter cemerveilleux.

Si non, est-ce que l'autorité de Ronsard suffit à consacrer l'emploi de ce merveilleux et à en faire unornement légitimement reçu ? 3° a) L'admirateur des Anciens le recommande.b) Seulement on croyait à ce merveilleux autour d'Homère et de Virgile.

Virgile y croyait par patriotisme, avec sonimagination et son cœur.

Quant aux poètes homériques, au moment où ils écrivent, tout le monde croit à la réalitédes dieux qu'ils célèbrent.

Vauquelin dit qu'Homère, au XIIIe siècle, chanterait sa religion, c'est-à-dire Jésus-Christ.On peut se demander, d'ailleurs, si les dieux du XVIIe, siècle sont les dieux de la fable, ou des dieux revus etcorrigés à tel point qu' « imiter Homère » ne consiste pas seulement à reproduire le merveilleux païen. 4° a) Le théoricien du poème épique le recommande, et il développe cette idée que ce merveilleux fournit denombreux et excellents ornements.

-b) Il est vrai que ce merveilleux d'Homère nous attache, mais c'est parce que nous nous faisons une âme antiquepour le Sentir et pour le goûter ; chez les modernes il faut que, comme nous, le poète se fasse antique.Et le théoricien du poème épique est an contradiction avec le théoricien du classicisme ; car si rien n'est beau quele vrai, le principe de l'art classique est violé.

Sans doute Boileau nous répondra qu'il n'y a pas de contradictionparce que ce sont tout simplement des façons plus poétiques d'exprimer les choses.

Mais Boileau s'abuse ; ce n'estpas là peindre la nature.

Nous qui avons lu Rousseau, Chateaubriand, Hugo, nous voyons bien au contraire que levrai moyen de la peindre c'est de la débarrasser des oripeaux mythologiques. 5° a) L'auteur de la définition du poème épique ne peut que recommander le merveilleux païen, car le poème épique,selon lui, vit de fictions, d'allégories et de métaphores.b) Il faut distinguer : s'il s'agit de chasser « la balance de la justice », « l'horloge du temps », etc..., ce n'est.

pas làproscrire la métaphore et l'allégorie; nous les voulons plus claires, plus nouvelles, et nous repoussons les vieuxclichés.

Nous acceptons et appelons le mythe, mais nous entendons par là des personnifications vivantes etprolongées de l'âme humaine (l'Expiation).

Boileau appelle de ce nom exactement le contraire.Non seulement la défroque du mythe gênait la poésie, mais encore elle gâtait la fable elle-même, elle nousempêchait d'en voir la portée artistique, et c'est en ruinant la fable comme ouvrage de convention qu'on l'a renduepossible comme matière de poésie.

Laissons de côté André Chénier qui est un demi-Grec.

Qu'est devenue la fable duXVIIe siècle ? Elle a mérité d'être dédaignée par les romantiques, et ce n'est qu'à partir du jour où elle a étéregardée pour elle-même, sentie dans sa réelle beauté que nous avons eu les poèmes de Leconte de Lisle et lessonnets de Heredia, et, sans aller aussi loin, Hugo n'a-t-il pas senti la beauté antique dans le Rouet d'Omphale(Contemplations)? Une pièce de ce genre aurait été impossible à l'époque de Boileau. 6° a) Boileau, en terminant, nous indique que la fable a du moins cet avantage de nous donner des noms heureuxnés pour les vers.b) A cela nous répondrons que les noms dont nous parle Boileau sont conventionnels, qu'ils ne s'écrivaient pas et nese prononçaient pas ainsi.. »

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