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En quoi Cinna ressemble-t-il à Hernani ? Par quoi en diffère-t-il ?

Publié le 12/02/2012

Extrait du document

Cette comparaison offre un triple intérêt. Elle nous permet de mieux comprendre deux genres, deux génies, deux époques. Nous y découvrirons tout ce qui sépare le drame romantique de la tra~édie classique; nous y constaterons que le génie dramatique et le génie lyrique diffèrent profondément et s'excluent parfois; nous y relèverons les transformations opérées dans l'esprit et le goût français entre 1640 et 1830....

« Auguste, l'empereur magnanime, maitre de lui comme de l'univers.

Don Carlos, prince aux mceurs plus que legeres, depourvu de scrupules, capable de sacrifier a sa passion ses plus fideles serviteurs, salissant son royal man- teau dans les bouges de sa capitale, et pret a le tremper dans le sang inno- cent, devenu empereur se transforme subitement et atteint sans peine au sublime.

Telles sont les concordances que l'on peut relever entre la tragedie de Corneille et le drame de Victor Hugo.

Mais ne nous laissqns pas impres- sionner par ces premieres constatations.

Nous aurons vite fait de remarquer combien plus nombreuses sont les divergences.

El les portent sur les memes points, et aussi sur le style. 1r Corneille en bon classique, emprunte son sujet a l'antiquite.

Sans doute le Cid lui venait d'Espagne, le Menteur s'inspirera d'Alarcon et don Sanche sera de source castillane; mais son culte de Rome le ramene constamment vers l'histoire du peuple-roi, si riche en faits extraordinaires, en figures au relief puissant.

Il prend des libertes avec cette histoire; it respecte le fond des evenerfients et des caracteres.

On peut dire que son Cinna est un « tableau d'histoire un « moment 3. de l'Empire.

Il n'a point denature Seneque, traduit par Montaigne, qui lui a fourni le recit du complot.

Hugo n'emprunte a l'Antiquite que certains sujets epiques.

La realite se &forme en passant par le prisme de son imagination.

Ses drames sont modernes, et aussi peu historiques que possible.

Francais, italiens, espa- gnols, ils sont, avant tout, des creations fantaisistes de l'auteur.

Ce qu'il appelle couleur locale ) n'est guere qu'un attrape-nigauds.

Hernani ne repose sur aucun fond historique.

L'inventeur a bien tente de se justifier en citant un nomme Alaya; mais on lui prouva aisement que le passage depeignant la revolution operee en Don Carlos voluptueux et cruel, lors de son accession a l'empire, etait certainement apocryphe.

Ce sens de l'histoire que posse- daient un Corneille, un Racine, manque it Victor Hugo; it fausse la verite, dans ce drame; et les Espagnols eurent raison de s'indigner, en 1830, du sans- gene odieux avec lequel ii parle d'un de leurs plus grands hommes.

L'Auguste de Cinna est infiniment plus ressemblant que le Don Carlos d'Hernani.

L'action se developpe dans les deux oeuvres de facon toute differente. Celle de Corneille, resserree, condensee par la regle des trois unites, est recluite a une crise, et debute tout pros de son denouement.

L'unite de lieu simplifie le decor; nous ne sortons pas du palais d'Auguste, tout au plus pas- sons-nous de l'appartement d'Emilie a celui de l'empereur.

Rien pour la vue; la tragedie se joue an fond des Ames; les costumes sont ceux du xvii' siècle. Les evenements tiennent, sans compression factice, dans les 24 heures; certains critiques ont meme soutenu, qu'ils pourraient se derouler dans le temps meme on l'on joue la piece.

L'action est une, progressive, logique : tout s'y explique et s'y enchaine.

Nous savons pourquoi, par exemple, et com- ment le complot est decouvert.

Les agissements de Maxime et d'Euphorbe nous sont clairement exposés.

II n'est absolument question, nous l'avons dit, que d'une conspiration ourdie, decouverte, pardonnee : trois phases d'un seul et meme fait.

Tout se ramene a savoir si Auguste vivra et, vivant, s'il sevira ou s'il absoudra. L'action, dans Hernani, n'est point ensertee dans un temps et un espace limites.

Elle n'est plus une .crise, mais une histoire.

C'est que l'on vent alors de l'action a tout prix.

Voltaire, Diderot sont passes par la; on a etudie Shakespeare et le theatre allemand; on ne se contente plus d' « une-conver- sation sous un lustre 3.

Aussi la scene se deplace-t-elle a chaque lever de rideau : de Saragosse au chateau de Silva, de celui-ci it la crypte d'Aix-la- Chapelle, pour s'achever au clair de lune dans les jardins du palais de Jean d'Aragon.

Des decors appropries, de riches costumes, aussi exacts que pos- sibles, charment la 'Vile- en meme temps qu'il dispersent l'attention.

Des mois s'ecoulent entre le 1" et le 5' acte.

L'action debute an commencement de fevrier 1519; l'election de l'empereur a lieu le 28 juin -a Francfort, et non a Aix - et c'est en aofit qu'il faut placer la tuerie °finale.

Enfin cette action est triple : ascension morale de don Carlos, vengeance de Ruy Gomez, infortune des deux amants.

Cette derniere assure neanmoins I unite d'interet ), la seule necessaire, d'apres la « Preface de Cromwell Hernani epousera-t-il Dofia Sol? telle est la question posee des l'exposition, et it laquelle repond le denouement. Auguste, l'empereur magnanime, maître de_ lui comme de l'univers.

Don Carlos, prince aux mœurs plus que légères, dépourvu de scrupuJes, capabJe de sacrifier à sa passion ses plus fidèles serviteurs, salissant son royal man­ teau dans les bouges de sa capitale, et prêf à le tremper dans le sang inno­ cent, devenu empereur se transforme subitement et atteint sans peine au sublime.

_ Telles sont les concordances que l'on' peut relever entre la tragédie de Corneille et le drame de Victor Hugo.

Mais ne nous laiss~ns pas impres­ sionner par ces premières constatations.

Nous aurons vite fait de remarquer combien plus nombreuses sont les divergences.

Elles portent sur les mêmes points, et aussi sur le style.

_ ' * •• Corneille en bon classique, emprunte son sujet à l'antiquité.· Sans doute · le Cid lui venait d'Espagne, le Menteur s'inspirera d'Alarcon et do11: Sanche sera de source castillane; mais son culte de Rome le ramène constamment vers l'histoire du· peùple-roi, si riche en faits extraordinaires, en figures au relief \)Uissant.

Il prend des libertés avec cette histoire; il respecte le fond des evénements et des caractères.

On r.eut dire que son Cinna est un « tableau d'histoire >, un « moment > de 1 Empire.

rr n'a point dénaturé Sénèque, traduit par Montai~ne, qui lui a fournne récit du complot.

Hugo n'emprunte à l'Antiquité que certains sujets épiques., La réalité se déforme en passant par le prisme de son imagination..

Ses drames sont modernes, et aussi peu historiques que possible.

·Français, italiens, esJ>a­ gnols, ils sont, avant tout, des créations fantaisistes de l'auteur.

Ce qu'il appelle «couleur locale» n'est guère qu'un attrape-nigauds •.

Hernani ne rel?ose sur aucun fond historique.

L'inventeur a bien tenté de se justifier en citant un nommé Alaya; mais on lui prouva aisément que le passage dépeignant la révolution o:pérée en Don Carlos voluptueux et cruel, lors de son accession à l'empire, etait certainemènt apocryphe.

Ce sens de l'histoire que possé­ daient un Corneille, un Racine, manque à Victor Hugo; il-fausse la vérité, dans ce drame; et les Eseagnols eurent raison de s'indigner, en 1830, du sans­ gêne odieux avec lequel Il parle d'un de leurs plus grands hommes.

L'Auguste de Cinna est infiniment plus ressemblant que le Don Carlos d'Hernani.

L'action se développe dans les deux œuvres de fa~on toute différente.

Celle de Corneille, resserrée, condensée par la regle des trois unités, est réduite à une crise, et débute tout près de son dénouement.

L'unité de lieu simplifie le décor; nous ne sortons pas du palais d'Auguste, tout au plus pas­ sons-nous de l'appartement d'Emilie à celui de l'empereur.

Rien pour la vue; la tragédie se joue au fond des âmes; les costumes sost ceux du XVII" siècle.

Les événements tiennent, sans compression factice, dans les 24 heures; ceiiains critiques ont même soutenu.

qu'ils pourraient se dérouler dans le temps même où l'on joue la pièce.

L'action est une, progressive, logique : tout s'y explique et s'y enchaîne.

Nous savons pourquoi, par exemple, et com­ ment le comi?lot est découvert.

Les agissements de Maxime et d'Euphorbe nous sont clairement exposés.

Il n'est absolument question, nous l'avons dit, que d'une conspiration om·die, découverte, pardonnée : trois phases d'un seul et même fait.

Tout se ramène à savoir si Auguste vivra et, vivant, s'il sévira ou s'il absoudra.

L'action, dans Hernani, n'est point enserrée dans un temps et un espace limités.

Elle .n'est plus une ·crise, mais une histoire.

C'est que l'on veut alors de l'action à tout prix.

Voltaire, Diderot sont passés par là; on a étudié Shakespeare et le théâtre allemand; on ne se contente plus d' « une"conver­ sation sous un lustre ».

Aussi la scène se déplace-t-elle à chaque lever de rideau : de Saragosse au château de Silva, de celui-ci à la crypte d'Aix-la­ Chapelle, pour s'achever au clair de lune dans les jardins du palais de Jean d'Aragon.

Des décors appropriés, de riches costumes, aussi exacts que pos­ sibles, charment la vue...

en même temps qu'il dispersent l'attention.

Des mois s'écoulent entre le t•• et le 5" acte.

L'action débute au commencement de février 1519; l'élection de l'empereur a lieu le 28 juin -à Francfort, et non· à Aix - et c'est en août qu'Il faut placer la tuerie 'finale.

Enfin cette ~ction est triple :.

ascension morale de don Carlos, vengeance de Ru~ Gomez, mfortune des deux amants.

Cette dernière assure néanmoins 1 « unité d'intérêt», la seule nécessaire, d'après la «Préface de Cromwell».

Hernani épousera-t-il Doiia Sol? telle est la question posée dès l'exposition, et à laquelle répond le dénouement.. »

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