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Les raisons de la guerre froide

Publié le 05/09/2012

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Actuellement, le danger principal pour la classe ouvrière consiste en la sous-estimation de ses propres forces et en la surestimation des forces de l'adversaire. De même que, dans le passé, la politique munichoise a encouragé l'agression hitlérienne, de même aujourd'hui, les concessions à la nouvelle orientation des Etats-Unis d'Amérique et du camp impérialiste peuvent inciter ses inspirateurs à devenir plus insolents et plus agressifs. C'est pourquoi les partis communistes doivent se mettre à la tête de la résistance dans tous les domaines - gouvernemental, économique et idéologique - aux plans impérialistes d'expansion et d'agression. Ils doivent serrer leurs rangs, unir leurs efforts sur la base d'une plate-forme anti-impérialiste et démocratique commune, et rallier autour d'eux toutes les forces démocratiques et patriotiques du peuple. Une tâche particulière incombe aux partis communistes frères de France, d'Italie, d'Angleterre et des autres pays. Ils doivent prendre en main le drapeau de la défense de l'indépendance nationale et de la souveraineté de leurs propres pays. Si les partis communistes frères restent fermes sur leurs positions, s'ils ne se laissent pas influencer par l'intimidation et le chantage, s'ils se comportent résolument en sentinelles de la paix durable et de la démocratie populaire, de la souveraineté nationale, de la liberté et de l'indépendance de leur pays, s'ils savent, dans leur lutte contre les tentatives d'asservissement économique et politique de leur pays, se mettre à la tête de toutes les forces disposées à défendre la cause de l'honneur et de l'indépendance nationale, aucun des plans d'asservissement de l'Europe ne pourra être réalisé.

« En outre, il a été fortement insisté sur la thèse communiste selon laquelle un antagonisme fondamental existe entre le monde capitaliste et le monde socialiste.

Biendes signes indiquent que cette assertion n'est pas fondée en réalité.

Les faits ont été confondus à cause de l'existence, à l'étranger, de grandes puissances militaires,notamment le régime nazi en Allemagne et le gouvernement japonais des dernières années 1930 qui avaient, en effet, des intentions agressives contre l'Unionsoviétique.

Mais les preuves ne manquent pas que l'importance donnée à Moscou à la menace à laquelle les Soviets devaient faire face de la part du monde extérieurne se fonde pas sur les réalités de l'antagonisme étranger, mais sur la nécessité d'expliquer le maintien du régime dictatorial en Russie. Cette poursuite d'une autorité illimitée à l'intérieur, accompagnée de la culture du demi-mythe d'une implacable hostilité étrangère, a fortement influé sur la forme del'appareil gouvernemental soviétique tel que nous le connaissons aujourd'hui.

On a laissé dépérir les organes administratifs qui ne servaient pas ce but, et ceux qui leservaient se sont démesurément enflés.

La sécurité du pouvoir soviétique en est venue à reposer sur la discipline de fer du Parti, sur la sévérité et l'ubiquité de lapolice secrète, et sur l'in- transigeant monopolisme de l'Etat.

Les " organes de suppression ", auxquels les dirigeants soviétiques avaient demandé de les protégercontre les forces rivales, devinrent, dans une large mesure, les maîtres de ceux qu'ils devaient servir.

Aujourd'hui la majeure partie de la structure de la puissancesoviétique est consacrée à perfectionner la dictature et à perpétuer l'idée d'une Russie en état de siège, et dont l'ennemi menace les murs.

Et les millions d'êtreshumains qui forment cette partie de la structure gouvernementale sont obligés de défendre à tout prix cette conception de la position de la Russie, car, sans elle, ilsseraient superflus. Voyons à présent comment cet arrière-plan historique se traduit dans le caractère politique du régime soviétique tel qu'il est aujourd'hui. Rien n'a été officiellement rejeté de l'idéologie originelle : croyance à la nature fondamentalement mauvaise du capitalisme, à l'inévitabilité de sa destruction, àl'obligation, pour le prolétariat, de concourir à cette destruction et de prendre lui-même le pouvoir.

Mais on en est arrivé à insister principalement sur les idées le plusspécifiquement rattachées au régime soviétique : à sa position de seul régime véritablement socialiste dans un monde obscur et égaré, et à ses relations avec cemonde. La première de ces idées est celle de l'antagonisme inné entre le capitalisme et le socialisme.

Elle a de graves conséquences pour la conduite de la Russie en tant quemembre d'une société internationale.

Elle fait que Moscou ne peut jamais supposer avec sincérité une communauté de buts entre l'Union soviétique et les puissancesconsidérées comme capitalistes.

Moscou doit invariablement supposer que les buts du monde capitaliste sont opposés à ceux du régime soviétique et aux intérêts despeuples qu'il contrôle.

Si le gouvernement soviétique signe occasionnellement des documents qui pourraient indiquer le contraire, il faut y voir une man uvre tactiquepermise quand on traite avec l'ennemi (qui est sans honneur) et qui doit être admise comme étant de bonne guerre.

De cet antagonisme présupposé découlent nombredes phénomènes qui nous troublent dans la conduite de la politique étrangère du Kremlin : manque de franchise, suspicion, inimitié fondamentale des buts.

Cescaractères lui sont définitivement acquis; ils peuvent cependant varier d'intensité selon ce que les Russes désirent obtenir; l'un ou l'autre peut momentanéments'effacer; en ce cas, il y aura toujours des Américains qui annonceront en bondissant de joie : " Les Russes ont changé! " et il y en aura même qui s'attribueront lemérite de ces " changements ".

Mais nous ne devrions pas nous laisser leurrer par des manoeuvres tactiques.

Ces caractéristiques de la politique soviétique, de mêmeque le postulat d'où elles dérivent, sont fondamentales de la nature interne du régime soviétique, et elles persisteront, visibles ou cachées, jusqu'à ce que la natureinterne du régime soviétique soit changée. Ceci implique que les tractations avec les Russes continueront longtemps encore à être difficiles.

Non qu'il faille les croire inébranlablement décidés à renverser notrerégime à une date déterminée.

La théorie de l'inévitabilité de la chute du capitalisme n'indique pas que celle-ci soit pressée.

Les forces du progrès peuvent prendreleur temps pour préparer le coup de grâce.

En attendant, ce qui importe est que la " Patrie du socialisme " - cette oasis déjà gagnée au socialisme dans la personne del'Union soviétique - soit aimée et défendue par tous les bons communistes en Russie et à l'étranger, que ses chances soient favorisées, ses ennemis harcelés etconfondus.

Provoquer à l'étranger une révolution " aventureuse " et prématurée susceptible de gêner d'une manière quelconque le régime soviétique serait un acteinexcusable, voire contre-révolutionnaire.

La fin du socialisme est le soutien et l'établissement du régime soviétique tels qu'on les détermine à Moscou. Ceci nous amène à la seconde des idées importantes pour la compréhension de la perspective soviétique contemporaine : c'est l'infaillibilité du Kremlin.

Laconception soviétique du pouvoir, qui n'autorise aucun foyer d'organisation en dehors du Parti, exige que la direction du Parti demeure en théorie l'unique dépositairede la vérité.

Car si l'on devait pouvoir, trouver la vérité ailleurs, son expression en une activité organisée serait justifiées Et c'est là précisément ce que le Kremlin nepeut et ne veut pas permettre. La direction du Parti communiste a donc toujours raison, et elle a toujours eu raison depuis qu'en 1929 Staline a donné une forme précise à son pouvoir personnel enannonçant que les décisions du Politburo étaient prises à l'unanimité. La discipline de fer du Parti repose sur ce principe d'infaillibilité; en fait, ils se soutiennent mutuellement : une discipline parfaite exige la reconnaissance del'infaillibilité, et l'infaillibilité exige l'observance de la discipline.

Et les deux ensemble déterminent dans une large mesure le comportement de tout l'appareilgouvernemental soviétique.

Mais, pour en comprendre les effets, il est indispensable de tenir compte d'un troisième facteur : le fait que les dirigeants sont libres desoutenir n'importe quelle thèse que, pour des raisons tactiques, ils trouvent utile à leurs fins à un moment donné, et qu'ils peuvent exiger l'acceptation aveugle et fidèlede cette thèse de la part des membres du mouvement dans sa totalité.

Il en résulte que la vérité n'est pas une constante mais qu'elle est, en fait, créée virtuellement parles dirigeants soviétiques eux-mêmes.

Elle peut varier d'une semaine à l'autre, d'un mois à l'autre.

Elle n'a rien d'absolu et d'immuable, rien qui découle d'une réalitéobjective.

Elle est seulement la manifestation la plus récente de la sagacité de ceux en qui est censée résider la sagesse absolue parce qu'ils représentent la logique del'histoire.

Ces facteurs accumulés ont pour effet de donner à l'orientation de tout l'appareil subordonné du gouvernement soviétique une obstination et unepersévérance inébranlables.

Cette orientation peut être changée à volonté par le Kremlin mais par lui seul.

Une fois que le Parti a décidé d'une ligne de conduite àl'endroit d'une question de politique courante, toute la machine gouvernementale, y compris le mécanisme de la diplomatie, avance inexorablement dans la voieprescrite, comme une automobile-joujou remontée et lancée dans une certaine direction, ne s'arrêtant que si elle rencontre quelque force irréfragable.

Les individusqui composent cette machine sont réfractaires à tout raisonnement provenant d'une source extérieure.

On leur a enseigné à se méfier de la force de persuasionspécieuse du monde extérieur.

Comme le chien blanc devant le phonographe, ils n'entendent que " la voix du maître ".

Ainsi, le représentant étranger ne peut espérerque ses paroles produisent sur eux la moindre impression; tout ce qu'il peut espérer est qu'ils les transmettent aux dirigeants, seuls capables de modifier la ligne duParti.

Mais il n'y a guère de chances que ceux-ci se laissent influencer par la logique normale des paroles du représentant bourgeois.

Comme on ne peut invoquer debuts communs, on ne peut faire appel à des processus mentaux communs.

Pour cette raison, les faits parlent plus fort que les mots aux oreilles du Kremlin; et les motsont d'autant plus de poids qu'ils reflètent des faits d'une authenticité incontestable et sont confirmés par eux. Mais nous avons vu que son idéologie n'oblige nullement le Kremlin à se hâter.

Semblable à l'Église, il s'occupe d'idées d'une justesse à longue échéance et il peut sepermettre d'être patient.

Les préceptes de Lénine lui-même doivent être utilisés avec beaucoup de prudence et de souplesse dans la poursuite des objectifscommunistes, et les leçons de l'histoire russe fortifient ces préceptes : ces siècles d'obscures batailles entre des armées nomades dans les vastes étendues d'une plainedénuée de forts.

La circonspection, la souplesse et la tromperie sont, dans une telle guerre, les qualités les plus précieuses, et elles sont tout naturellement appréciéespar l'esprit russe ou oriental.

Le Kremlin n'hésite donc pas à reculer devant une force supérieure ; aucun horaire ne le hâtant, la nécessité de la retraite ne l'affole pas.Son action politique est un flot fluide constamment en mouvement vers un but déterminé, avançant partout où il peut passer.

Il se préoccupe surtout de remplir tousles coins et recoins disponibles de la puissance mondiale ; mais s'il trouve des barrières infranchissables sur son chemin, il les accepte et s'en accommode avecphilosophie.

L'important est qu'il y ait une pression continue, une pression constamment accrue en, direction du but désiré.

Rien, dans la psychologie soviétique,n'indique que ce but doive être atteint à un moment déterminé. Ces considérations rendent les rapports avec la diplomatie soviétique à la fois plus faciles et plus difficiles qu'avec des dictateurs individuels comme Napoléon etHitler.

D'une part, la diplomatie soviétique est plus sensible à la force opposée, plus prête à céder sur des secteurs isolés du front diplomatique, lorsqu'elle sent cetteforce trop puissante, et elle est, par là, plus rationnelle dans la logique et la rhétorique de la puissance.

D'autre part, elle ne se laisse pas aisément vaincre ou. »

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