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Rapports du langage et de la pensée

Publié le 22/02/2012

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Ce sujet est assez fréquemment posé au baccalauréat. En un sens c'est une question de cours (au moins dans la classe de Philosophie, dont le programme comporte expressément : rapports du langage et de la pensée), mais les candidats doivent savoir que la reproduction pure et simple d'un cours ou d'un chapitre de manuel ne saurait tenir lieu de dissertation. Sans doute auront-ils à utiliser les éléments fournis par le cours ou par le livre, mais ils doivent le faire d'une façon originale. Faire une dissertation, ce n'est pas exposer tout ce que l'on sait d'une question; c'est définir un problème précis et s'efforcer de le résoudre. Le problème ici pourrait se formuler ainsi : dans quelle mesure la pensée est-elle tributaire du langage? L'étude de cette question comporte deux aspects : En fait, comment sont liés le langage et la pensée? En droit, ce lien est-il nécessaire? Il va de soi que l'étude de la question de fait doit précéder l'étude de la question de droit.
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« Ce lien du langage et de la pensée était précisément l'argument qu'invoquait Descartes pour nier l'existence d'uneintelligence animale : « Les bêtes ne pensent pas, disait-il, parce qu'elles ne parlent pas.

» Qu'est-ce que penser,en effet? On a dit que « penser, c'est se retenir d'agir ».

Ce qui signifie qu'un être qui pense réfléchit avant d'agir.Réfléchir, c'est se représenter mentalement la situation, le problème et l'action.

L'animal est incapable de sedétacher ainsi de l'action; mis en présence d'une boîte à l'intérieur de laquelle se trouve un appât, Pépée, le singede Boutan, s'en empare aussitôt et la manipule de toutes manières jusqu'à ce qu'elle s'ouvre; le comportement d'unenfant qui ne parle pas encore est identique à celui du singe.

Mais à partir de trois ans, René, le fils de Boutan,examine longuement la boîte avant de la saisir et, d'essayer de l'ouvrir; il se retient d'agir; on peut dire qu'il pense.Et ce sont les mots précisément qui rendent possible cette pensée, cette sorte de détachement à l'égard de lasituation, cette représentation mentale.

Les mots sont, en effet, les véhicules des concepts, symboles abstraits etgénéraux qui résument toutes nos expériences, représentent toutes nos connaissances relatives à une classe dechoses ou d'êtres.

Le mot « homme » par exemple, évoque à la fois les propriétés caractéristiques de l'homme,celles qui le distinguent des autres êtres (c'est ce qu'on appelle la « compréhension » du concept) et l'ensemble deshommes différents que nous avons connus ou que nous pouvons rencontrer (c'est F « extension » du concept).Penser, c'est ramener à l'unité d'un concept ou, comme on dit encore, subsumer sous un concept la diversité dessensations.

« Un objet, dit Kant, est ce dont le concept réunit les éléments divers d'une intuition donnée.

» Parexemple, quand je dis : « Je vois une orange », le mot orange exprime le concept par lequel je rassemble en un seulobjet une diversité d'impressions sensibles : forme, couleur, saveur, odeur, etc...

On appelle pensée conceptuellecette pensée dont le langage est l'instrument essentiel, et la question se pose de savoir si toute pensée estconceptuelle, ou s'il est possible de définir un autre mode de pensée, qui se passerait du langage. II.

— Rapports de droit A.

— La critique de la pensée conceptuelle C'est dans la philosophie de Bergson que l'on trouverait sans doute la critique la plus radicale du langage et l'effortle plus hardi pour définir une pensée non conceptuelle.

Le langage, selon Bergson, est nécessairement lié à laconnaissance intellectuelle.

Mais la fonction de l'intelligence n'est pas de connaître à proprement parler.L'intelligence est au service de l'action ; elle ne saisit des choses que l'aspect qu'il est utile d'en retenir pour vivre,c'est-à-dire pour agir; ce qu'il y a d'original et d'unique dans le réel lui échappe.

Et il est nécessaire qu'il en soit ainsi: l'intelligence ne pourrait remplir son rôle, qui est de permettre à l'homme de s'adapter au monde, si elle s'attachaità l'individualité des êtres et des choses; elle doit faire abstraction des différences individuelles pour ne retenir quedes caractères généraux, et c'est pourquoi son instrument est le concept qu'exprime le mot.

Le mot « ne note de lachose que sa fonction la plus commune et son aspect banal ».

Le langage répond donc bien aux exigences del'action, mais par cela même, loin de nous faire connaître la réalité, il nous la masque, en s'interposant comme unécran ou comme un voile entre elle et nous.

C'est ainsi que « nous nous mouvons parmi des généralités et dessymboles ».

Une connaissance qui voudrait atteindre la réalité ou, comme on dit, le fond des choses, devrait doncrenoncer à ces intermédiaires déformants que sont les mots.

Tel est précisément le rôle de l'intuition, « cetteespèce de sympathie par laquelle nous nous transportons à l'intérieur d'un objet pour coïncider avec ce qu'il ad'unique et par conséquent d'inexprimable ».

La véritable connaissance serait cette connaissance sans concept qui,au lieu de donner au sujet une vue extérieure, superficielle et artificielle, de l'objet, assurerait la pénétration del'objet par un sujet, et leur communion. B.

— La nécessité du langage Mais précisément parce que cette connaissance est une connaissance sans concept, elle est inexprimable.Indéfinissable, ineffable, indicible, sont des adjectifs que l'on retrouve fréquemment au terme des recherches deBergson.

Et il s'agit de savoir si l'on peut considérer la « sympathie » comme un mode de pensée.

Bergson nousavoue son antipathie pour r « Homo loquax, dont la pensée, quand il pense, n'est qu'une réflexion sur sa parole »;mais le bon sens, dont il a lui-même fait l'éloge, a toujours considéré que la vertu première d'un penseur est desavoir ce qu'il dit.

Or, si les mots sont inadéquats à la réalité que nous révèle l'intuition, nous ne pourrons jamaisavoir de cette réalité une connaissance objective; tout ce que nous pourrons en dire sera insuffisant et c'est àl'homme de l'intuition, s'il tente d'exprimer son intuition, qu'on pourra faire le reproche de ne savoir ce qu'il dit.

Lapensée intuitive serait ainsi condamnée à rester fermée sur elle-même et incommunicable.

On reconnaît une vraiepensée à ceci qu'elle supporte l'épreuve d'être repensée par les autres, et il faut donc d'abord qu'elle puisseaffronter cette épreuve.

« Vouloir penser sans les mots, disait Hegel, c'est une tentative insensée.

» Et il ajoutait :« On croit ordinairement, il est vrai, que ce qu'il y a de plus haut, c'est l'ineffable.

Mais c'est là une opinionsuperficielle et sans fondement, car en réalité, l'ineffable, c'est la pensée obscure, la pensée à l'état defermentation, et qui ne devient claire que lorsqu'elle trouve le mot.

Ainsi le mot donne à la pensée son existence laplus haute et la plus vraie.

» C'est grâce au langage, en effet, que la pensée peut ne pas s'éparpiller dans ladiversité infinie des sensations et se communiquer entre les hommes pour être mise à l'épreuve. C.

— Du bon usage des mots Bergson a eu raison cependant d'insister sur les pièges du langage.

Le mot est le véhicule du concept, mais c'est lesens qui constitue l'élément essentiel du concept.

Penser ne consiste pas seulement à proférer des paroles; il fautencore avoir conscience de ce qu'elles signifient, de leur sens, c'est-à-dire des réalités, des expériences qu'ellesévoquent ou résument.

Or il arrive souvent que l'on prenne le mot lui-même pour la réalité qu'il signifie et que l'onraisonne sur des mots sans se soucier des choses qu'ils représentent.

Ce que le sens commun appelle verbalisme,. »

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