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« La rêverie est le dimanche de la pensée. La flânerie n'est pas seulement délicieuse, elle est utile. C'est un bain de santé qui rend la vigueur et la souplesse à tout l'être, à l'esprit comme au corps, c'est le signe et la fête de la liberté, c'est un banquet joyeux et salutaire, le banquet du papillon qui lutine et butine sur les côteaux et dans les prés. Or, l'âme est aussi papillon. » (Amiel, Fragments d'un journal intime.) En faisant appel à vos souvenirs littéraires et à votre e

Publié le 19/06/2009

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esprit
« La rêverie est le dimanche de la pensée. La flânerie n'est pas seulement délicieuse, elle est utile. C'est un bain de santé qui rend la vigueur et la souplesse à tout l'être, à l'esprit comme au corps, c'est le signe et la fête de la liberté, c'est un banquet joyeux et salutaire, le banquet du papillon qui lutine et butine sur les côteaux et dans les prés. Or, l'âme est aussi papillon. » (Amiel, Fragments d'un journal intime.) En faisant appel à vos souvenirs littéraires et à votre expérience personnelle, vous commenterez ce passage en vous demandant à quelles conditions la rêverie peut être féconde. INTRODUCTION. - La rêverie, comme l'imagination à laquelle elle se rattache, n'a pas bonne presse. Lorsque, surtout au retour des vacances, le professeur interpelle un élève : « Attention, l'élève du dernier banc, vous rêvez », il veut dire que c'est là du temps perdu. Et si son appréciation d'un premier travail écrit porte : « Rêveries, mais point dissertation », cela signifie qu'il juge décousues ou incohérentes les idées dont le jeune philosophe était peut-être fier. Néanmoins la rêverie ne manque pas d'apologistes; parmi eux, AMIEL, qui, en une comparaison heureuse, voit en elle « le dimanche de la pensée ». L'auteur du Journal intime, il est vrai, était un incorrigible rêveur; par suite, on ne saurait le considérer comme un juge impartial. C'est pourquoi, après avoir commenté les lignes dans lesquelles il fait l'éloge de la rêverie, nous tâcherons de déterminer à quelles conditions celle-ci, au lieu d'être nocive, peut devenir bienfaisante.
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« affaires.

Aussi leurs heures libres et leurs vacances sont, elles remplies de distractions organisées comme uneentreprise : ils ne se promènent pas, mais font des excursions ou même prospectent méthodiquement un massifmontagneux; ils ne courent pas à l'aventure des rencontres, mais suivent un programme établi d'avances deréceptions et de visites.

Qu'il y ait un trou dans ce programme et qu'ils en soient réduits à flâner durant quelquesheures, les voilà de mauvaise humeur pour le reste du jour.C'est cependant pour eux que la flânerie serait le plus utile.

Asservi par la tâche professionnelle, l'esprit sefonctionnalise, semblable à la machine qui s'acquitte avec une sûreté remarquable de la tâche pour laquelle elle aété construite, mais est incapable d'autre chose.

Les lectures elles-mêmes, aliment normal de la pensée,empêchent, quand elles occupent tout notre temps, de réfléchir et de juger personnellement : l'érudit n'ignore riendes opinions imprimées, et ce savoir l'encombre au point qu'il n'y a.

plus de place dans son horaire et dans.

sonesprit pour un jugement personnel.

C'est dans la détente de la flânerie que l'imagination arrache l'homme actif desornières de la vie quotidienne, quo la masse d'informations recueillie dans les livres se décante, que l'esprit, prenantdu recul, recouvre sa fonction essentielle, qui est, de juger.Les lignes suivantes expriment en images plus ou moins heureuses ce rôle bienfaisant de la flânerie.

C'est un bain,non pas seulement de plaisir, mais encore de santé.

On s'est dépouillé des habits, signes de la fonction et du modede penser social plus ou moins stéréotypé, et.

l'on s'est plongé dans un milieu mental plus naturel.

C'est un bain quirend la vigueur et la souplesse à tout l'être, à l'esprit comme au corps, car.

tous deux bénéficient de la détente desheures de flânerie; c'est le signe et la fête de la liberté ; le signe, car le vagabondage du flâneur lui fait prendreconscience de ne dépendre que de sa fantaisie, indépendance qui, pour le vulgaire sinon pour le philosophe,représente l'essentiel de la liberté; la fête, car pour les enfants — et nous sommes tous plus ou moins enfants — iln'y a pas de fête sans la mise en congé des conduites sages, raisonnables, dans lesquelles tout est prévu, suivantl'utilité et les convenances.

C'est un banquet, non pas un banquet cérémonieux avec l'étiquette protocolaire, lestoasts officiels et le menu qui vous laissent le corps alourdi et l'esprit hébété, mais un banquet joyeux et salutaire,et qui, à strictement parler, n'est pas un banquet véritable, puisque banquet dérive de « banc » et qu'au banquetde la flânerie on ne s'assied pas; on se contente de se poser : c'est le banquet du papillon qui, au lieu de s'attablercomme pour une besogne d'une certaine durée, lutine, portant à droite et à gauche son regard indiscret et, enmême temps, butine sur les coteaux et dans les prés, prenant, pour en faire sa nourriture, le meilleur des fleurs surlesquelles un instant il se pose.

Or l'âme est aussi un papillon.

Ne comprenons-nous pas que l'âme estessentiellement papillon, que sa vie consiste à.

papillonner sans se fixer à une tâche.

La place de l'adverbe « aussi», nous invite à n'accorder à ce papillonnage que la seconde place; mais il n'en reste pas moins que tropd'acharnement à une tâche fixe risque de manquer, le but : il est des heures auxquelles il faut savoir se mettre àl'école du papillon.

II - REFLEXIONS CRITIQUES Pour bien comprendre un, auteur, il faut autant que possible entrer dans ses vues.

Aussi, en commentant le texted'Amiel, avons-nous réduit les réserves au minimum et acceptés dans son ensemble sa justification de la rêverie etde la flânerie.

Il convient cependant de reprendre l'esprit critique, afin de préciser quelle leçon pratique nouspouvons retenir des expériences de ce grand rêveur que fut l'auteur du Journal intime. Les dangers de la rêverie. La lecture de ce journal lui-même nous met déjà en garde contre les inconvénients d'une nature rêveuse.

En effet,si AMIEL fait l'éloge de la rêverie, il reconnaît aussi gaiement ce dont elle le prive.Tout d'abord, à trop rêve;, on risque la perte du contentement et de la joie; la rêverie romantique- est inséparablede la tristesse.

Il y a en effet un tel contraste entre ce qu'on rêve et le réel que l'existence est endolorie par desheurts incessants : « Ce qui pourrait être me gâte ce qui est (...).

L'idéal m'empoisonne toute possession imparfaite», avoue AMIEL.Plus fréquent l'aveu de l'entrave à l'action que constitue la vie de rêve.

Tout s'y déroule suivant les désirs dont rienne vient restreindre les projets.

Dès qu'on veut agir, au.

contraire, on se heurte aux hommes et aux choses aveclesquels il faut composer et faire la part du feu; dans une grande mesure, agir c'est renoncer : « L'action nouslimite, la contemplation nous dilate ».

La peur d'avoir à renoncer à quelque chose provoque chez AMIEL unevéritable phobie de l'action : « J'ai la terreur de l'action et ne me sens à l'aise que dans la vie impersonnelle,désintéressée, objective de la pensée.

Pourquoi cela ? Par timidité.

D'où vient cette timidité ? du développementexcessif de la réflexion ».

Dans la « méditation rêveuse » de son Journal intime, il s'est quotidiennement replié surlui-même, mais « l'intériorisation trop continue nous ramène au néant » (...).

Par l'analyse, je me suis annulé ».

Sansdoute, « le rêve est gigantesque, mais l'action est naine ».Bien plus, quoique AMIEL soit un véritable penseur en même temps qu'un romantique sentimental, il doit reconnaîtreque l'abus de la rêverie a entraîné chez lui la perte de pensée véritable, c'est-à-dire logique et rationnelle, maîtressed'elle-même et s'organisant avec méthode.

Vers la fin de sa vie, il note avec tristesse l'impuissance de ce qu'ilappelle sa « rêverie tournoyante » Ton défaut à toi, c'est la rêverie tournoyante, qui ne cherche rien et ne mène à rien.

Tu te contentes de prendrenote de ce qui s'agite en toi, tu te recueilles sans autre but que le recueillement, oubliant le passé et l'avenir,esquivant l'action, redoutant tout ce qui engage, engrène, entrave; c'est-à-dire que tu fais de la méditation unopium, une manière d'étourdissement, une échappatoire à l'obligation, un stratagème inconscient pour éluder lescensures de la conscience (...).. »

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