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roman - littérature.

Publié le 28/04/2013

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roman - littérature. 1 PRÉSENTATION roman, genre littéraire narratif qui se distingue du mythe par son attribution à un auteur, du récit historique par son caractère fictif, de l'épopée par son usage de la prose, du conte et de la nouvelle par sa longueur, du simple « récit « par la plus grande complexité de sa narration. Sous le nom de roman se regroupent des oeuvres très diverses, comme en attestent les innombrables sous-catégories proposées selon les thèmes, les formes, les visées ou les écoles : roman d'analyse, de moeurs, d'amour, de cape et d'épée, ou encore roman rural, social, policier, médical, etc. 2 LES ORIGINES DU ROMAN 2.1 La justification du roman Les réflexions sur le roman, et cela doit retenir l'attention, s'appuient souvent sur une recherche de son origine. Dans un des premiers textes français sur le roman, intitulé justement Traité de l'origine des romans (1670), P.-D. Huet fait de la fiction le propre de l'Homme et une conséquence de l'inquiétude qui le pousse à connaître : l'Homme apaise sa faim de savoir dans la fiction, la fable, soit par défaut (mythologie des peuples ignorants), soit par paresse (connaître par raison est plus difficile), soit par luxe (comblées d'érudition, les nations « civilisées « retrouvent le goût de la fiction). Mais la fiction peut heureusement ne pas être vaine si un « sens caché « en fait une « figure de vérité «, comme l'expliquait saint Augustin. Fénelon illustre ce projet avec le roman pédagogique les Aventures de Télémaque (1699), écrit pour son élève le duc de Bourgogne ; inspirée par le « roman « antique pour la forme, cette oeuvre l'est par l'Odyssée pour le sujet. C'est la réflexion augustinienne que Voltaire reprendra, pour la subvertir, dans l'Ingénu (1767), où il opposera la « fable des imposteurs « (mythologie, textes religieux, origines mythiques par lesquelles un peuple se légitime), la « fable des enfants « (le conte pour le plaisir) et la « fable des philosophes «, « emblème de la vérité «. À travers l'ambivalence classique du « plaire « et de l'« instruire « se pose un des problèmes du roman, qui se trouve partagé entre la littérature de l'évasion, où il trouve son attrait, et celle de l'édification (morale, psychologique, politique), où il met son personnage (ainsi que le lecteur) à l'école du monde et où il cherche sa justification. Au XXe siècle, c'est la psychanalyse qui propose de nous livrer le secret de l'origine de la fiction romanesque (Otto Rank, puis Marthe Robert) : l'origine du roman, selon cette théorie, serait à chercher dans le « roman des origines «, cette histoire personnelle que l'enfant, face au complexe d'OEdipe, se construit pour refuser sa filiation au père. Dans cette perspective, les romans de la lutte avec le monde (Balzac) correspondraient à la fiction du bâtard-peut-être-fils-de-roi, et les romans de la fuite ou de la bouderie du monde (Don Quichotte, Robinson Crusoé), à celle de l'enfant trouvé. Mais le roman en lui-même est un genre en quête de légitimité : il est le bâtard né de l'union des genres « élevés « ou « nobles « (l'épopée, la tragédie, selon l'antique hiérarchie des genres) avec la comédie. À cette dernière, il emprunte en effet ses personnages « bas « : le bourgeois dans la société de l'aristocratie nobiliaire, les prolétaires dans la société bourgeoise, les marginaux dans la société de tout temps, les animaux parmi les hommes (âne latin ou singe chinois), les exclus errants dans l'Espagne de la Renaissance ou ceux de l'Amérique pendant la Grande Dépression. 2.2 Aux origines du roman, le conte C'est encore en termes d'origine que peut se poser le rapport du roman avec les histoires courtes, en particulier celles de la littérature orale. Beaucoup d'oeuvres anciennes qu'on appelle aujourd'hui « roman « sont en effet des agglutinations de « bonnes histoires « courtes. Le « roman « antique grec (Héliodore, Éthiopiques ; Achille Tatius, Aventures de Leucipée et de Clitophon ; Chariton d'Aphrodise, Aventures de Chaeréas et de Callirhoé ; Xénophon d'Éphèse, Éphésiaques ; Longus, Daphnis et Chloé) et latin (Pétrone, Satiricon ; Apulée, l'Âne d'or) offre déjà quelques schémas (roman d'amour, roman picaresque avant la lettre, roman philosophique) et quelques caractéristiques du roman moderne (parodie, emboîtement des récits). Le récit antique apparaît souvent comme un entrecroisement de plusieurs histoires, qu'il reprenne une légende populaire (loup-garou de Pétrone) ou qu'il soit la parodie des grands textes (Phèdre revue par Apulée). Le critique russe Bakhtine (1895-1975) utilise d'ailleurs ces textes de façon privilégiée pour montrer les jeux de références qui selon lui caractériseraient le genre romanesque. Les contes arabes des Mille et Une Nuits, révélés par Galland (1646-1715), sont également constitués de contes de dates et d'origines diverses (fonds indo-persan hellénisé, contes de Bagdad, fonds égyptien) ; organisés en un ensemble cohérent grâce à la technique du récit emboîté, ces contes sont unifiés par un récit-cadre (l'histoire de Chariyar et Schéhérazade) : Proust, qui construit sa Recherche du temps perdu comme une couturière monte une robe, en fera un de ses modèles. L'évolution du roman médiéval va dans le même sens : aux romans en vers du XIIe siècle succèdent les romans-fleuves en prose du XIIIe siècle, où s'entrelacent les histoires (Lancelot, Tristan). Voir courtois, courtoisie. Quant à la nouvelle, telle que la fixe Boccace dans son Décaméron (imité notamment par Marguerite de Navarre et Cervantès), elle s'écrit d'abord comme un roman à tiroirs (qui met en scène, dans un récit emboîtant, des personnages réunis pour échanger leurs histoires) avant de se constituer en courtes histoires autonomes. Le roman, par sa longueur, se détache de l'histoire orale ; il est donc lié à l'écrit comme il le sera plus tard à l'imprimerie. Il permet au personnage témoin ou auditeur des différentes histoires de devenir le centre même de la fiction : le roman est ainsi mis sous le signe du devenir et de l'individu. 2.3 Aux origines du roman, le mythe et l'épopée C'est pourtant du côté du mythe et de l'épopée qu'on cherche le plus souvent les origines du roman. Le roman apparaît alors comme une forme seconde, et donc dégradée, de ces grands genres. Les anthropologues montrent, par exemple, que dans la retranscription en prose d'une épopée « la narration devient une fin en soi « (Dumézil) ; ils semblent déplorer que le foisonnement narratif brouille le sens du mythe, rompe sa structure et le fasse verser dans le romanesque (Lévi-Strauss). Dès son apparition moderne, le roman est vu comme une forme mineure de l'épopée. Au XIXe siècle, Hegel lui donne une place dans son Esthétique et livre à propos du roman du XVIIIe siècle une définition restée célèbre : « moderne épopée bourgeoise qui exprime le conflit de la poésie du coeur et de la prose des rapports sociaux «. À sa suite, le critique marxiste Lukács définit le roman comme « l'épopée d'un monde sans dieu «, monde « dégradé « dans lequel le héros devenu « problématique « mène sa quête : trois types de romans se distinguent alors, celui de l'idéalisme abstrait (Don Quichotte), le roman d'apprentissage (ou Bildungsroman, illustré par Goethe et son Wilhelm Meister) et le roman des « illusions perdues « (romans français du XIXe siècle). Ce héros « problématique « serait né du passage d'une « pensée du symbole « à une « pensée du signe « (Julia Kristeva analysant le Petit Jehan de Saintré, d'Antoine de La Sale, roman du XVe siècle) : dans cette perspective, le symbole correspond à un monde garanti par Dieu, alors que le signe permet au contraire l'ambiguïté et le jeu du sens. La sagesse du roman serait ainsi une « sagesse de l'incertitude «, liée à l'ironie et à l'indécidable, comme le dit Milan Kundera : le roman se confond avec la culture de la vieille Europe depuis la Renaissance, depuis les errances et les errements de Don Quichotte ou de Panurge, et il serait non pas une « confession de l'auteur mais une exploration de ce qu'est la vie humaine dans le piège qu'est devenu le monde « (l'Insoutenable Légèreté de l'être). 3 NAISSANCE ET ESSOR DU ROMAN MODERNE La veine « comique « au sens d'anti-héroïque n'est pas absente des genres narratifs médiévaux (fabliau) ni du roman lui-même (Roman de Renart). Mais le roman médiéval était un roman romanesque, si le romanesque se définit comme « la forme littéraire la plus proche de l'accomplissement du rêve « (Frye). C'est du roman de chevalerie qu'est issu le roman espagnol Amadis de Gaule, célèbre dans toute l'Europe jusqu'à devenir proverbial de 1550 à 1615 environ, et bien plus longtemps encore dans la littérature de colportage. (Voir Espagnole, littérature). C'est dans la lignée de ce texte que se situent les romans romanesques du XVIIe siècle, avec leurs variantes héroïque ou pastorale illustrées par Honoré d'Urfé, Gomberville ou encore Mlle de Scudéry (voir Pastoral, genre). Un auteur français écrivit d'ailleurs une version renouvelée de l'Amadis en 1629. Et c'est contre ce courant que se définissent plusieurs voies, qui souvent se recoupent dans une même oeuvre. La première voie est celle de la « déraison « : le personnage se prend pour un chevalier (Cervantès, Don Quichotte) ou pour un berger (Sorel, le Berger extravagant). C'est d'ailleurs la voie parodique qui dévoile le roman comme fiction et qui pose des questions philosophiques sur le sens de la destinée. Cette voie ouverte sera prolongée au XVIIIe siècle par l'humour de Sterne (Vie et Opinions de Tristram Shandy) ou de Diderot (Jacques le Fataliste et son maître). La deuxième voie est celle du burlesque : le héros devient un bourgeois ou un homme du peuple (histoires « comiques « ou « bourgeoises « de Furetière ou de Scarron au XVIIe siècle). Ce peut être même un « gueux «, un vagabond : c'est la formule du roman picaresque, inventé en Espagne dès le XVIe siècle (Lazarillo de Tormes, 1554 ; Alemán, Quevedo), mais diffusé dans toute l'Europe (Grimmelshausen, les Aventures de Simplicius Simplicissimus, 1669). Les grands romans réalistes et moraux anglais du XVIIIe siècle (Defoe, Richardson, Fielding, Smollett) suivent cette voie et fixent de nouveaux modèles : Diderot loue la sentimentalité des oeuvres de ces auteurs mais déplore d'être obligé d'utiliser pour eux le nom de roman. Les romanciers cherchent aussi à créer l'illusion d'une absence de « différences essentielles entre le roman et le récit naturel des choses que nous avons vues et entendues «, absence qui, bien plus tard, irritera tant Valéry. Cette volonté de conférer une « vérité « au roman explique la vogue du roman épistolaire, qui est illustré brillamment par Guilleragues, Montesquieu ou Richardson, et plus tard par Rousseau, Laclos, Restif de la Bretonne, et qui annihile la différence entre la création romanesque et la réalité. Ce goût de la vérité explique également le succès de la nouvelle, et particulièrement de la nouvelle historique (illustrée par des auteurs comme Saint-Réal ou Mme de La Fayette), et du récit à la première personne imitant l'autobiographie (ce qu'on appelle les « Vies «, les Mémoires fictifs), comme le faisait déjà l'auteur anonyme de la Vie de Lazarillo de Tormes mais aussi Prévost, Fielding ou Marivaux. Toutes ces voies, tracées contre l'esthétique d'Amadis de Gaule, lui empruntent pourtant certains traits, comme la longueur (Tom Jones, histoire d'un enfant trouvé, de Fielding comprend par exemple dix-huit livres), le goût de l'aventure ou celui de l'amour, caractères qui faisaient précisément le charme d'Amadis. D'autre part, on notera des évolutions surprenantes : le conflit de la vertu et du vice qui alimente les romans dits « sentimentaux « débouche sur les romans du mal (Restif de la Bretonne, Laclos, Sade), qui s'ouvrent au diabolique, donnant naissance aux romans gothiques anglais (ou « romans noirs «) avec des auteurs comme Horace Walpole, Ann Radcliffe, Matthew Gregory Lewis ou Mary Shelley. Le genre du roman gothique trouve naturellement son prolongement en Amérique en même temps que s'invente le genre du roman fantastique (Cazotte). 4 LE GRAND ROMAN DU XIXE SIÈCLE Ce sont les romans de l'Écossais Walter Scott qui créent le roman historique moderne, un genre qui connaît bientôt la gloire partout, et en Angleterre particulièrement avec des auteurs comme Dickens, Thackeray, Trollope ou Eliot, mais aussi en France avec Hugo et Dumas, ainsi qu'en Italie avec Manzoni (les Fiancés) et en Allemagne avec Freytag, aussi bien qu'en Amérique avec Fenimore Cooper. Le roman historique produira des chefs-d'oeuvre jusque tard dans le siècle (Tolstoï). Scott donne surtout l'idée du roman comme reconstitution totale d'une société : c'est lui qu'invoque Balzac quand il écrit son avant-propos à la Comédie humaine (1842), où il explicite son grand projet du réalisme (« La société française allait être l'historien, je ne devais en être que le secrétaire «). Le roman triomphe commercialement au XIXe siècle (le roman-feuilleton est illustré par Dumas, Sue, Ponson du Terrail) en même temps qu'il cherche sa légitimation : la fiction veut rivaliser avec l'Histoire et la philosophie, et prend pour référence les sciences de la nature. Zola et les autres naturalistes prolongeront cette entreprise. Le roman d'apprentissage et d'amour du XVIIIe siècle, dont les Allemands avaient offert de fascinants modèles à la fin du siècle (succès immense de Werther, de Goethe), tourne alors au roman social (Stendhal, Balzac, Flaubert en France, Dickens et Emily Brontë en Angleterre, Gogol et Tourgueniev en Russie). Le roman du temps propose des figures autobiographiques (Chateaubriand, Constant) et retrouve le sens tragique (Zola, Hardy, Dostoïevski). La littérature des États-Unis invente sa propre mythologie en utilisant la veine réaliste (Twain), donnant naissance à des oeuvres au symbolisme puissant (Melville, Hawthorne). 5 LES ROMANS AU XXE SIÈCLE À partir de la fin du XIXe siècle, le roman, genre autrefois mineur, s'impose. En outre, il s'est mondialisé sous sa forme européenne, et son histoire se fait désormais à travers les apports nationaux les plus divers : roman japonais (Mishima, Kawabata), chinois (Ba Jin, Maon Dun), arabe (Mahfouz), anglo-américain (Dos Passos, Steinbeck, Fitzgerald, Hemingway, Faulkner, Capote, Bellow, Mailer) ou latino-américain (García Márquez, Fuentes, Vargas Llosa), etc. La production populaire s'est également multipliée, en reprenant des formules anciennes ou en créant de nouveaux genres (science-fiction, roman policier, roman d'espionnage). Dans le même temps, le genre a fait une sorte de retour sur lui-même : les écrivains composent leur « art du roman «, que ce soit sous la forme d'essais ou au sein même de leurs romans (James, Joyce, Proust, Virginia Woolf, Gertrude Stein, Nabokov et tous les auteurs français du Nouveau Roman). Au début du siècle, la technique du « point de vue « élaborée au siècle précédent par des auteurs comme Stendhal, Flaubert ou Maupassant prend une importance particulière (Henry James). C'est ainsi que dans les romans modernes, la conscience du monde prime souvent, au détriment de sa représentation (notamment grâce à la technique du monologue intérieur), et les romans explorent une temporalité qui n'est plus celle du monde social (Virginia Woolf, Foster, Döblin, Dos Passos, Faulkner). Le roman peut en outre utiliser le langage parlé (Céline), des dialectes divers (Gadda) ou encore reprendre tous les grands textes de la culture (Joyce). Les auteurs hésitent entre la remise en question (voire le refus) du roman et de son culte, entre la recherche de formules radicalement nouvelles (Nouveau Roman) et la reprise parfois ironique de l'héritage historique du genre. Quelle que soit la voie choisie, le roman fournit souvent une méditation sur le destin de l'Occident ou sur la condition humaine (Thomas Mann, Musil, Kafka, Hesse, Céline, Gombrowicz, Malraux, Kundera) : il s'est imposé comme mode de représentation réaliste ou symbolique du réel. Microsoft ® Encarta ® 2009. © 1993-2008 Microsoft Corporation. Tous droits réservés.

« la retranscription en prose d’une épopée « la narration devient une fin en soi » (Dumézil) ; ils semblent déplorer que le foisonnement narratif brouille le sens du mythe, rompe sa structure et le fasse verser dans le romanesque (Lévi-Strauss). Dès son apparition moderne, le roman est vu comme une forme mineure de l’épopée.

Au XIX e siècle, Hegel lui donne une place dans son Esthétique et livre à propos du roman du XVIII e siècle une définition restée célèbre : « moderne épopée bourgeoise qui exprime le conflit de la poésie du cœur et de la prose des rapports sociaux ».

À sa suite, le critique marxiste Lukács définit le roman comme « l’épopée d’un monde sans dieu », monde « dégradé » dans lequel le héros devenu « problématique » mène sa quête : trois types de romans se distinguent alors, celui de l’idéalisme abstrait (Don Quichotte), le roman d’apprentissage (ou Bildungsroman, illustré par Goethe et son Wilhelm Meister ) et le roman des « illusions perdues » (romans français du XIX e siècle). Ce héros « problématique » serait né du passage d’une « pensée du symbole » à une « pensée du signe » (Julia Kristeva analysant le Petit Jehan de Saintré, d’Antoine de La Sale, roman du XVe siècle) : dans cette perspective, le symbole correspond à un monde garanti par Dieu, alors que le signe permet au contraire l’ambiguïté et le jeu du sens.

La sagesse du roman serait ainsi une « sagesse de l’incertitude », liée à l’ironie et à l’indécidable, comme le dit Milan Kundera : le roman se confond avec la culture de la vieille Europe depuis la Renaissance, depuis les errances et les errements de Don Quichotte ou de Panurge, et il serait non pas une « confession de l’auteur mais une exploration de ce qu’est la vie humaine dans le piège qu’est devenu le monde » (l’Insoutenable Légèreté de l’être). 3 NAISSANCE ET ESSOR DU ROMAN MODERNE La veine « comique » au sens d’anti-héroïque n’est pas absente des genres narratifs médiévaux (fabliau) ni du roman lui-même (Roman de Renart). Mais le roman médiéval était un roman romanesque, si le romanesque se définit comme « la forme littéraire la plus proche de l’accomplissement du rêve » (Frye).

C’est du roman de chevalerie qu’est issu le roman espagnol Amadis de Gaule, célèbre dans toute l’Europe jusqu’à devenir proverbial de 1550 à 1615 environ, et bien plus longtemps encore dans la littérature de colportage.

( Voir Espagnole, littérature). C’est dans la lignée de ce texte que se situent les romans romanesques du XVII e siècle, avec leurs variantes héroïque ou pastorale illustrées par Honoré d’Urfé, Gomberville ou encore Mlle de Scudéry ( voir Pastoral, genre).

Un auteur français écrivit d’ailleurs une version renouvelée de l’ Amadis en 1629.

Et c’est contre ce courant que se définissent plusieurs voies, qui souvent se recoupent dans une même œuvre. La première voie est celle de la « déraison » : le personnage se prend pour un chevalier (Cervantès, Don Quichotte) ou pour un berger (Sorel, le Berger extravagant). C’est d’ailleurs la voie parodique qui dévoile le roman comme fiction et qui pose des questions philosophiques sur le sens de la destinée.

Cette voie ouverte sera prolongée au XVIII e siècle par l’humour de Sterne (Vie et Opinions de Tristram Shandy) ou de Diderot (Jacques le Fataliste et son maître). La deuxième voie est celle du burlesque : le héros devient un bourgeois ou un homme du peuple (histoires « comiques » ou « bourgeoises » de Furetière ou de Scarron au XVII e siècle).

Ce peut être même un « gueux », un vagabond : c’est la formule du roman picaresque, inventé en Espagne dès le XVI e siècle (Lazarillo de Tormes, 1554 ; Alemán, Quevedo), mais diffusé dans toute l’Europe (Grimmelshausen, les Aventures de Simplicius Simplicissimus, 1669).

Les grands romans réalistes et moraux anglais du XVIII e siècle (Defoe, Richardson, Fielding, Smollett) suivent cette voie et fixent de nouveaux modèles : Diderot loue la sentimentalité des œuvres de ces auteurs mais déplore d’être obligé d’utiliser pour eux le nom de roman. Les romanciers cherchent aussi à créer l’illusion d’une absence de « différences essentielles entre le roman et le récit naturel des choses que nous avons vues et entendues », absence qui, bien plus tard, irritera tant Valéry.

Cette volonté de conférer une « vérité » au roman explique la vogue du roman épistolaire, qui est illustré brillamment par Guilleragues, Montesquieu ou Richardson, et plus tard par Rousseau, Laclos, Restif de la Bretonne, et qui annihile la différence entre la création romanesque et la réalité.

Ce goût de la vérité explique également le succès de la nouvelle, et particulièrement de la nouvelle historique (illustrée par des auteurs comme Saint-Réal ou Mme de La Fayette), et du récit à la première personne imitant l’autobiographie (ce qu’on appelle les « Vies », les Mémoires fictifs), comme le faisait déjà l’auteur anonyme de la Vie de Lazarillo de Tormes mais aussi Prévost, Fielding ou Marivaux. Toutes ces voies, tracées contre l’esthétique d’ Amadis de Gaule, lui empruntent pourtant certains traits, comme la longueur ( Tom Jones, histoire d’un enfant trouvé, de Fielding comprend par exemple dix-huit livres), le goût de l’aventure ou celui de l’amour, caractères qui faisaient précisément le charme d’ Amadis. D’autre part, on notera des évolutions surprenantes : le conflit de la vertu et du vice qui alimente les romans dits « sentimentaux » débouche sur les romans du mal (Restif de la Bretonne, Laclos, Sade), qui s’ouvrent au diabolique, donnant naissance aux romans gothiques anglais (ou « romans noirs ») avec des auteurs comme Horace Walpole, Ann Radcliffe, Matthew Gregory Lewis ou Mary Shelley.

Le genre du roman gothique trouve naturellement son prolongement en Amérique en même temps que s’invente le genre du roman fantastique (Cazotte). 4 LE GRAND ROMAN DU XIX E SIÈCLE Ce sont les romans de l’Écossais Walter Scott qui créent le roman historique moderne, un genre qui connaît bientôt la gloire partout, et en Angleterre particulièrement avec des auteurs comme Dickens, Thackeray, Trollope ou Eliot, mais aussi en France avec Hugo et Dumas, ainsi qu’en Italie avec Manzoni (les Fiancés) et en Allemagne avec Freytag, aussi bien qu’en Amérique avec Fenimore Cooper.

Le roman historique produira des chefs-d’œuvre jusque tard dans le siècle (Tolstoï). Scott donne surtout l’idée du roman comme reconstitution totale d’une société : c’est lui qu’invoque Balzac quand il écrit son avant-propos à la Comédie humaine (1842), où il explicite son grand projet du réalisme (« La société française allait être l’historien, je ne devais en être que le secrétaire »).

Le roman triomphe commercialement au XIX e siècle (le roman-feuilleton est illustré par Dumas, Sue, Ponson du Terrail) en même temps qu’il cherche sa légitimation : la fiction veut rivaliser avec l’Histoire et la philosophie, et prend pour référence les sciences de la nature.

Zola et les autres naturalistes prolongeront cette entreprise. Le roman d’apprentissage et d’amour du XVIII e siècle, dont les Allemands avaient offert de fascinants modèles à la fin du siècle (succès immense de Werther, de Goethe), tourne alors au roman social (Stendhal, Balzac, Flaubert en France, Dickens et Emily Brontë en Angleterre, Gogol et Tourgueniev en Russie).

Le roman du temps propose des figures autobiographiques (Chateaubriand, Constant) et retrouve le sens tragique (Zola, Hardy, Dostoïevski).

La littérature des États-Unis invente sa propre mythologie en utilisant la veine réaliste (Twain), donnant naissance à des œuvres au symbolisme puissant (Melville, Hawthorne). 5 LES ROMANS AU XX E SIÈCLE À partir de la fin du XIX e siècle, le roman, genre autrefois mineur, s’impose.

En outre, il s’est mondialisé sous sa forme européenne, et son histoire se fait désormais à travers les apports nationaux les plus divers : roman japonais (Mishima,. »

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