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Sainte-Beuve et Taine juges de Diderot

Publié le 10/02/2012

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beuve

"Premier grand écrivain en date qui appartienne décidément à la moderne société démocratique, il nous montre le chemin, et l'exemple", a écrit Sainte-Beuve.

Et Taine : « Après une première génération d'esprits sains, voici la seconde, où l'équilibre moral n'est plus exact. Diderot, volcan en éruption qui, pendant quarante ans, dégorgea les idées de tout ordre, de toute espèce : métaux précieux, scories grossières, boues fétides ... descend au fond de la doctrine antireligieuse et antisociale ... mais il tombe et s'étale dans le bourbier du siècle, qui est la gravelure et dans la grande ornière du siècle, qui est la déclamation ... 

 

Que pensez-vous de ces deux jugements?

beuve

« Pour expliquer l'homme et l'univers, Diderot n'hésite pas, d'accord avec la c philosophie du siècle », à professer ~n ma~érialisme !'_adical.

Il P!!rle du sensualisme de Locke, comme d'un falt acqws, et cons1dère la matière comme capable de penser.

Dans le monde, il n'y a que matière, douée, éternellement, de sensibilité et de mouvement.

Point de création, mais dans la matière éternelle, une circulation de vie sans fin.

Qu'est-ce qu'un organisme? Un agrégat de molécules qui vivent, s'agitent, s'écoulent, se modifient, sont éliminées, passent en d'autres combinaisons.

Qu'est-ce que l'homme? une république (l'animalcules.

A ces idée' empruntées, Diderot donne une âme, il lès enveloppe de poésie, les éclaire par des images ingénieuses : essaim d'abeilles, clavecin, araignée ...

il n'est jamais à court.

Avec des variantes, un appareil scientifique plus imposant, les mêmes idées seront reprises au siecle suivant par tous les athées matérialistes.

Diderot a encore montré la voie aux tenants de la génération spontanée et de l'évolutionisme; Il n'invente pas davantage; il répète un Leibniz.­ un Maupertuis, mais il les interprète à sa façon, si bien qu'il passe pour l'inventeur de la doctrine.

Tout vient d'un germe primordial; d'un être à l'autre la gradation est insensible.

L'animal, d'abord être confus, a com­ biné, aux divers âges de son espèce, les organes les plus variés : nageoires.

ailes, pieds, carapaces, cornes, cuir.

Les espèces actuelles sont-elles au terme de leurs métamorphoses? Qui sait si ce bipède déformé ...

qu'on appelle encore un homme ...

n'est pas l'image d'une espèce qui passe? Lamarck et Darwin, contemporains de Sainte-Beuve, viendront et n'au­ ront rien à changer à cette formule « transformiste » : « Les organes pro­ duisent les besoins et réciproquement les besoins produisent les organes.

» Conséquence logique de ces doctrines, Diderot enseignera le fatalisme déterministe.

Le père de «Jacques le Fataliste » nie la liberté.

Dès lors que l'âme et notre vie spirituelle ne sont que fonctions de la matière, plus de vices et de vertus, vieux mots à remplacer par « bienveillance » et c malveillance », Et, il nous faut ici faire un rapprochement qui noùs coûte, mais qui s'impose.

Diderot ressemble fort, en l'occurrence, à cet écrivain du xrx• siècle qui a osé écrire : « La vertu et le vice ne sont que des produits, comme Je sucre et le vitriol.

» Cette formule « déterministe :.

est signée Hippolyte Taine.

Oh! pas celui des Origines! L'athée matérialiste et fataliste, l'adorateur de ses propres passions, s'il est conséquent avec lui-même, verse dans l'anarchie.

Diderot n'y a pas manqué.

Il a vo.ulu réaliser toute sa nature, tout son moi; il a été, avant le personnage de Barrès, l'Ennemi des Lois.

Et les anarchistes ne s'y sont pas trompés, au temps de leurs tristes exploits.

(Sainte-Beuve n'a pas suivi Diderot· JUsqu'à ce stade du chemin.) Empêchés un jour de manifester sur la tombe de Ravachol, ils se rendirent à la statue de Diderot.

Celui-ci n•a.:.

t-il pas écrit ces quatre vers : La nature n'a fait ni serviteur ni maître; Je ne veux ni donner ni recevoir de lois ...

Et ces mains ourdiraient les entrailles du prêtre, A défaut d'un cordon pour étrangler les rois.

Ainsi s'exprimait le protégé de Catherine de Russie.

Précurseur de l'anarchie, il est aussi un ancêtre de l'anticléricalisme.

Il professe envers toute religion une haine de bas étage; celle de Jésus-Christ lui semble « criminelle ».

Il dénonce le sang que c l'abominable croix » a fait commettre.

Il hait tout prêtre; les plus saints sont les plus redouta­ bles; l'hypocrisie est une vertu sacerdotale; il faut avilir le sacerdoce par la pauvreté.

Telles sont ses théories en la matière.

· En bon anticlérical, il condamne les congr.égations religieuses, et leurs persécuteurs peuvent revendiquer son haut patronage.

Les vœux et l'état monastiques sont par lui réprouvés, on le devine, « au nom de la liberté individuelle ».

L'argument a été repris lors des grandes discussions qui ont précédé en 1901 et en 1904, la mise hors la loi des religieux français.

La voie que Diderot a tracée? Mais c'est encore celle de l'union libre, tant prônée par la « moderne société démocratique ».

Diderot l'a montrée à la postérité et lui a donné l'exemple.

Oui, cette erreur morale ·et sociale.

destructive ·de la famille, ennemie de toute société possédant l'instinct de la conservation, l'amant de M11" Champion, épousée malgré la volonté paternelle, puis abandonnée, l'amant de Mm• de Puisieux, de M11" Volland l'a fait passer dans la pratique de sa vie de bohême.. »

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